L’intelligence est une arme, l’égoïsme est une cuirasse
Dont le cœur constitue le défaut.
La volonté est le désir d’en découdre.
Les hommes sont des gladiateurs, la société une arène,
Dieu est Néron.

La nuit s’achève : les jeux vont reprendre
Pour toute une journée.
Bientôt la trompette sacrée du coq retentira.
J’entends déjà le grand murmure de la vie qui s’élève :
Panem et circenses !
Allons ! Il faut entrer dans la mêlée confuse ;
Mais où sont les rétiaires ? Où sont les mirmillons ?
Tiens bon ma cuirasse ! Je ne suis ni armé, ni farouche,
Et tu tiens ma vie dans ta substance de métal.
Mon cœur ! n’écoute pas les cris de l’agonie qui t’entoure,
Ne sois pas la cause de ma perte.

Sans intelligence et sans ambition, j’erre, inutile,
Au sein de la bataille,
N’espérant de secours que de mon égoïsme.
Esquivant de mon mieux les coups qui pleuvent,
Je risque parfois un regard vers le ciel
Pour compter les degrés que parcourt le soleil.
Je tremble et j’attends la nuit.
La nuit ! sombre manteau recelleur de lumière !
C’est quand tombe la nuit que j’ôte ma cuirasse
Et que mon cœur respire dans les bras de ma mie,
Enfin retrouvée.

La nuit !... Prends garde sur ta gauche,
Gladiateur d’occasion ! si tes yeux innocents
Veulent revoir la lune…
Vois ! Le soleil décline ! Néron s’ennuie
Et son pouce lassé demeure renversé.
La bataille fait rage parmi les survivants :
On en donne un bon coup car le repos attend.
La pointe d’une épée a surpris ma défense.
Le soleil s’est couché mais mon corps s’est meurtri.
Une fois encore, ô gladiateur sans armes et pacifique,
Tu passeras ta nuit à laver une plaie.

L’intelligence est une arme, l’égoïsme est une cuirasse
Dont le cœur constitue le défaut.
La volonté est le désir d’en découdre.
Les hommes sont des gladiateurs, la société une arène,
Dieu est Néron.
Je ne suis pas grand homme, et je ne suis pas Dieu,
Mais je suis dans l’arène.
Et mes yeux y voient mal dans la mêlée confuse :
Mais où sont les rétiaires ? Où sont les mirmillons ?