Toi qui entres dans la vie, mon fils, voici mes derniers conseils : si tu prends le parti de répondre à la vie par la force et la vitalité, ne garde aucun scrupule et va toujours de l’avant ; tel un navire rapide et puissant, suis ton chemin sans te soucier de l’écume que ton étrave déplace ; bats-toi comme un lion dans la forêt sociale, sans pitié et sans cœur ; et si l’intérêt des décisions que tu prendras le commande, abats impitoyablement les obstacles que tu rencontreras, même si ces obstacles te sont chers, même si c’est ton père qui te barre le chemin. Oui, même moi, il te faudra m’abattre.
Si tu prends le parti de répondre à la vie par la douceur et la résignation, demeure jusqu’à ta mort doux et résigné. Ne te laisse jamais gagner par la colère et la haine, quand même cette colère et cette haine seraient-elles justifiées par les plus terribles injustices et les plus légitimes défenses. Pardonne toujours à tes ennemis et bénis-les de t’avoir offensé ; rends le mal par le bien et le bien par le mieux ; et tu devras agir de la sorte en présence des pires canailles que l’humanité est capable de porter dans ses flancs.
Mais ne sois jamais, mon fils, un homme médiocre et mitigé ; ne sois jamais bon ou mauvais selon les circonstances : ne sois pas un juste capable des pires excès ou un méchant qui se laisse parfois attendrir. Si tu devenais un tel homme, je préfèrerais que tu ne te présentas plus devant moi. Vois-tu, mon fils, je voudrais que tu sois…
Tu seras un gangster, mon fils… ou un saint.