Il fut, dans tous les temps et dans toutes les nations, des femmes remarquables par leur courage et leur détermination dans des circonstances exceptionnelles et mouvementées, notamment dans les guerres. Depuis la plus haute Antiquité, les contemporains de telles héroïnes ont été interloqués par la relation de hauts faits qu’ils n’auraient pu auparavant attribuer qu’à des hommes particulièrement virils. De là, sans doute, cette suspicion latente qui rôde autour des grandes guerrières qui ont marqué leur siècle de leurs exploits : s’agissait-il vraiment de femmes ou n’étaient-elles pas de ces êtres bizarres, mi-hommes, mi-femmes, que l’on traite pudiquement de viragos ? Et pourquoi, si ce n’est pour ne pas encourir l’opprobre, prenaient-elles soin généralement de s’habiller en hommes ?
En fait, la colère, la haine, le désir de vengeance, l’amour de sa cité ou de sa patrie, la volonté farouche de défendre contre vents et marées des idées profondément ancrées et menacées sont propres à insuffler à l’être apparemment le plus frêle l’énergie prétendument réservée aux monstres de guerre. C’est ce que montre ce petit dictionnaire qui a pour but de présenter sommairement des femmes de toutes conditions qui ont défrayé la chronique de leur siècle par des prouesses guerrières ou par des actions d’éclat dans un conflit d’ordre privé. On y trouvera, depuis la mythologie grecque jusqu’aux nobles figures féminines des deux guerres mondiales, depuis la républicaine Marie Adriam jusqu’à la reine de Palmyre Zénobie, une galerie de portraits dont certains, tel celui de notre Pucelle d’Orléans, nous sont familiers, tandis que d’autres ravivent le souvenir d’héroïnes obscures ou aujourd’hui oubliées.
Nous avons emprunté, pour la réalisation de ce dictionnaire, plusieurs extraits de remarquables ouvrages pourtant méconnus. Citons surtout les trois ouvrages suivants :
- Dictionnaire historique, critique et bibliographique, contenant la vie des hommes illustres, célèbres ou fameux de tous les pays et de tous les siècles (par une société de gens de lettres, Paris, Ménard et Desenne, 1821) ;
- Histoire militaire des femmes (Édouard de La Barre Duparcq, Paris 1873) ;
- Dictionnaire des femmes célèbres de tous les temps et de tous les pays (Lucienne Mazanod et Ghislaine Schoeller, Robert Laffont, 1992).
ADRIAM (Marie).- Lors du siège de Lyon par les Républicains, en 1793, Marie Adriam figura parmi les défenseurs de la ville. Habillée en homme, elle remplit durant deux mois l'office de canonnier. Arrêtée après la prise de la cité, elle fut guillotinée.
Philippe Le Bas, L’Univers. Histoire et description de tous les peuples. Dictionnaire encyclopédique de la France, Firmin Didot, 1840-1845, tome Ier : « Née à Lyon, se distingua pendant le siège de cette ville, en 1793. Âgée de seize ans, elle prit des habits d’homme et servit, pendant tout le temps que dura le siège, en qualité d’artilleur. Après la prise de la ville, Adriam fut arrêtée et condamnée à mort. Fidèle aux principes qui avaient soulevé Lyon contre le gouvernement de la Convention, Adriam répondit à ses juges, qui lui demandaient pourquoi elle avait combattu contre sa patrie, qu'elle avait pris les armes pour la servir, la défendre et la délivrer de ses oppresseurs ! ».
Elle fut guillotinée le 24 décembre 1793. Avant d’être mise sous le couperet, elle s’écria : « Vive le roi ! » (Il s’agissait, bien sûr, de Louis XVII, le dauphin enfermé au Temple, puisque le malheureux Louis XVI avait été exécuté le 21 janvier).
AËLLE.- Une des Amazones, réputée pour sa légèreté à la course, qui combattirent contre les Grecs de Thésée et d’Hercule (Voir Amazones).
AFTÉRIE.- Une des Amazones qui combattirent contre les Grecs de Thésée et d’Hercule (Voir Amazones).
AÏCHA ou A'ichaBint Abu Bakr.- Troisième femme et épouse préférée de Mahomet, fille d’Abou Bekr (ou Abu Bakr, dit al-Siddiq), successeur de Mahomet, élu calife en 632, née en 614 à La Mecque, morte en 678 à Médine (Arabie Saoudite). Elle était aussi intelligente que belle. Lors des querelles suscitées par la succession de Mahomet, elle combattit avec violence le parti d’Ali qui avait conseillé au Prophète de la répudier. Elle se trouva à la bataille dite du Chameau qui vit la victoire des troupes d’Ali ibn abi Talib sur celles de Talha et de Zobair, deux compagnons de Mahomet, en décembre 656, près de Bassora, en Irak. Les épisodes les plus sanglants de la bataille se déroulèrent autour du chameau qui portait Aïcha. Celle-ci fut faite prisonnière par Ali qui la traita avec respect et la fit reconduire à Médine. Les sunnites la surnomment « mère des croyants ».
Jean-Charles-Léonard Simonde de Sismondi, Histoire de la chute de l’empire romain et du déclin de la civilisation, de l’an 250 à l’an 1000, Paris, Treuttel et Würtz, 1835, Bruxelles, 1837 : [Ali] « avait mécontenté Telha et Zobéir, deux des plus vaillants chefs des Arabes, qui levèrent contre lui, à La Mecque, l’étendard de la rébellion, qui usurpèrent le gouvernement de Bassora et de l’Assyrie, et qui appelèrent Ayesha dans leur camp. Ali vint les chercher jusque sous les murs de Bassora : une terrible bataille, dans laquelle il avait contre lui le désavantage du nombre, fut livrée entre deux armées, dans l’une desquelles on voyait le gendre, dans l’autre la veuve de Mahomet. Celle-ci, après avoir parcouru les rangs, s’était arrêtée dans une chaise fermée que portait un chameau au milieu de la mêlée. Soixante-dix hommes furent successivement blessés ou tués en conduisant ce chameau, qui a donné son nom à la première bataille des musulmans dans leurs guerres civiles ; on la nomma la bataille du chameau. Ali fut enfin victorieux, et Avesha, sa prisonnière, fut reconduite avec honneur à la tombe du prophète ».
ALBAINES.- Hongroises qui se distinguèrent au milieu du XVIe siècle par leur résistance armée aux envahisseurs turcs.
Histoire militaire des femmes : «On vit d’abord les effets de leur courage au siège d’Albe(*) (Stuhlweiffembourg), capitale de ce royaume ; plusieurs se portèrent sur les remparts, afin de venger la mort de leurs maris, et frappèrent d’étonnement l’armée ottomane ; on rapporte que l’une d’elles, placée à l’endroit le plus périlleux, abattit avec une faulx la tête de deux Turcs qui se montrèrent successivement pour escalader la muraille. La ville de Valpon fut défendue, pendant cette même guerre, trois mois durant par une femme. La place d’Agrin montra encore la valeur des Hongroises ; elles secondèrent les combattants, en leur portant tous les projectiles possibles. Comme l’une d’elles, armée d’une grosse pierre, eut la tête emportée par un boulet, sa fille, ivre de fureur, ramassa la pierre, la lança contre les ennemis, puis se jeta au milieu d’eux, sacrifiant sa vie pour en blesser plusieurs ; à deux pas de cette scène, une autre femme refusait d’emporter le cadavre de son mari abattu par un coup de feu et restait à son poste sur le rempart, disant : “Défendons la patrie, avant de rendre les devoirs aux morts.” Au siège de Szigeth, une femme donna un exemple mémorable ; son mari, pour la soustraire aux outrages, voulait la tuer avant d’aller combattre, mais elle : “Attends, cher époux, qu’au moins la perte de ma vie soit nuisible à nos adversaires.” Elle dit, prend un habit d’homme, des armes, un cheval, court au champ de carnage, se mêle aux officiers, combat avec bravoure, jonche la terre de Turcs, anime son mari par sa présence et ses exploits, jusqu’au moment où elle tombe épuisée sur le corps de celui-ci déjà terrassé ».
(*) D’où leur désignation fréquente, pour ce fait particulier, sous le nom d’Albaines.
ALBRECHT (Berthe, dite Bertie).- Résistante française d'origine suisse, née Wild, à Marseille le 15 février 1893, morte à Paris le 31 mai 1943.
Dictionnaire des femmes célèbres :
« Issue d’une famille de protestants suisses, elle fit des études d’infirmière. Elle épousa un courtier néerlandais, Frédéric Albrecht, dont elle eut deux enfants, Freddy en 1920 et Mireille en 1924. À partir de 1927, à Londres où son mari faisait des affaires florissantes, elle se passionna pour les problèmes sociaux, fréquenta les milieux du Birth Control et de la Fédération ouvrière socialiste. Son mari perdit l’essentiel de sa fortune au moment de la crise de 1929, et elle s’installa alors à Paris. Pendant les années 30, elle fréquenta les milieux de gauche, en particulier le parti communiste dont elle fut un temps une sympathisante sans jamais y adhérer. Elle travailla à la Ligue des droits de l’homme et aux Amis de l’URSS. En 1933, elle fonda une revue éphémère, Le Problème sexuel, dans laquelle elle souhaitait soumettre les questions sexuelles à l’examen de la science et de la raison, préconisant le contrôle des naissances et l’avortement libre ».
« Cette grande bourgeoise fortunée -son mari avait entre-temps rétabli ses affaires- décida d’entrer à l’école des surintendantes de Paris afin de découvrir et de partager la condition ouvrière des femmes (1936-1938). Elle travailla ensuite en usine, ce qui provoqua sa séparation d’avec son mari. Au début de la guerre, elle fut nommée surintendante à la manufacture d’armes de Saint-Étienne. Ses fonctions la conduisirent à Clichy, puis à Vierzon où elle mit sur pied, à partir de juin 1940, un réseau d’aide aux prisonniers évadés afin de leur permettre de passer en zone libre. Au début de l’année 1941, elle alla à Vichy retrouver son ami de toujours, Henri Fresnay. Ensemble, à Lyon, ils organisèrent le mouvement de résistance Combat. Elle fut arrêtée en avril 1942 par la police française et, en signe de protestation, elle entama une grève de la faim de quatorze jours afin d’obtenir le droit d’être jugée. Incarcérée à Lyon, elle fut jugée en octobre avec une quarantaine de membres de Combat ce qui lui valut six mois d’internement dans le Tarn. Sachant qu’elle risquait la déportation, elle simula la folie et fut placée dans un hôpital dont elle s’évada. Elle reprit alors ses activités au sein de Combat. Elle fut arrêtée une seconde fois à Mâcon, le 28 mai 1943, dans des conditions restées obscures, soit par la Gestapo parisienne, soit par celle de Lyon, sur l’ordre de Klaus Barbie, qui aurait utilisé les services d’un agent double. Transférée sur-le-champ à la prison de Fresnes, elle y mourut de manière inexpliquée le 31 mai. Cette forte personnalité, qui se définissait comme « un modeste rouage d’une grande entreprise », fut faite compagnon de la Libération à titre posthume par le général de Gaulle. Son corps a été inhumé au Mont-Valérien ».
ALCIPE.- Une des Amazones qui combattirent contre les Grecs de Thésée et d’Hercule (Voir Amazones).
ALDRUDE (comtesse).- Jeune veuve du comte de Bertinoro qui, en 1172, vint au secours des habitants d'Ancône assiégés depuis sept mois par les Vénitiens et les troupes de l'empereur Frédéric Ier et qui fit lever le siège. Celui-ci avait commencé le 1er avril 1172 et dura jusqu'au 15 octobre, jour où la comtesse de Bertinoro remporta une victoire complète sur Christian, archevêque de Mayence, qui commandait l'armée impériale.
Histoire militaire des femmes : «Devenue, jeune encore, veuve du comte de Bertinoro, dans la Romagne, elle gouverna sagement ses États et, se portant elle-même à la tête de ses troupes, secourut Ancône assiégée par les Impériaux, que commandait l’archevêque de Mayence, et força ce dernier, archichancelier de l’empereur Frédéric, de lever le siège de ladite ville (1172). Elle adressa sous les murs de la place, aux soldats abrités par sa bannière, une allocution où elle chercha à enflammer leur courage, « en faveur des citoyens, et surtout des dames d'Ancône qui craignaient de tomber entre les mains des assiégeants, parce que ces derniers feraient de leurs corps un objet d'opprobre éternel ». Et elle ajouta dans cette harangue prononcée contre l’usage général des femmes, ou du moins Buon-Compagnon, l’historien de ce siège, lui fait ajouter en forme de péroraison :
« Soyez sous les armes à la pointe du jour, afin que le soleil éclaire, en se levant, la victoire que le Très-Haut promet à votre zèle pour le malheureux peuple d'Ancône. Que mes prières puissent donc quelque chose sur vous, et que la vue de ces belles personnes qui m'accompagnent anime votre courage ! Si les gens de guerre donnent volontiers des tournois où, déployant leur force et leur courage, ils exposent leur vie en l'honneur des belles, quelle doit être leur ardeur quand la beauté les appelle au salut de la patrie !”.
AMAGA ou Amage.- Reine des Sarmates, femme de Médosac qui laissa à son épouse le gouvernement de ses États. Amaga rétablit l'ordre dans les tribunaux et la discipline dans l'armée. Sa renommée s'étendit dans toute la Scythie et elle devint, par son courage et son équité, l'arbitre des peuples voisins.
Histoire militaire des femmes : « La femme d’un roi des Sarmates, Amage était son nom, se substitua dans le gouvernement à son mari très adonné au vin. Elle administra sans doute sagement, mais en tout cas protégea les habitants contre les invasions ennemies, plaçant elle-même des troupes sur les frontières. Elle étendit sa protection aux localités voisines. On raconte d'elle une prouesse. Les populations de la Chersonèse s'étant plaintes à elle d'un roi des Scythes, elle l'aurait invité à cesser ses vexations, puis, sur son refus, aurait pris 120 guerriers vigoureux et pleins de valeur, franchi avec eux 1200 stades(*) en vingt-quatre heures, atteint le palais du monarque récalcitrant et tué ce dernier sans miséricorde ; avant son retour elle aurait donné le trône au fils du défunt sous condition de laisser vivre en paix les Grecs de son voisinage(**) ».
(*) Nous supposons le stade olympique de 185 mètres.
(**) Polyen, VIII, 56.
AMAZONES.- Fabuleuse peuplade de femmes qui habitait les rives du Thermodon, en Cappadoce. Chasseresses et guerrières farouches vivant de pillage, elles se débarrassaient de leurs enfants mâles en les tuant, en les mutilant pour en faire des esclaves ou en les confiant au père. La légende veut qu'elles se brûlaient le sein droit afin d'utiliser plus commodément leur arc ou leur lance. Parmi les Amazones célèbres, il convient de citer :
- Penthésilée, qui alla au secours des Troyens et qui fut tuée par Achille, lequel assomma Thersite pour avoir proféré des insultes sur la dépouille de la belle Amazone ;
- Thomyris, qui fit périr Cyrus ;
- Thalestris, qui visita Alexandre ;
- Atalante, qui fut exposée à sa naissance sur le mont Parthenius, en Arcadie, et nourrie et élevée par un ours femelle ; elle avait dans l'exercice continuel de la chasse une si grande légèreté qu'il n'y avait point de bêtes sauvages qu'elle ne pût atteindre à la course, ni d'hommes capables de la suivre quand elle voulait s'échapper de leurs mains ;
- Camille, reine des Volsques, qui combattait le casque en tête et la moitié du sein découverte pour avoir le bras droit plus en liberté. Tantôt elle lançait une grêle de traits sur l'ennemi, tantôt, la hache à la main, elle frappait tout ce qui se trouvait devant elle sans se lasser. Si, quelquefois, il était nécessaire de battre en retraite, elle décochait ses flèches par derrière avec autant d'adresse que les Scythes et les Parthes. Ses compagnes qui étaient autour d'elle répondaient à sa bravoure et faisaient le même carnage, quoiqu'elles ne fussent armées que d'une petite hache garnie d'airain ;
- Lampeto et Marpéfia, deux co-reines qui se partageaient le pouvoir, la première veillant à la tranquillité interne de l'État et au respect de l'obédience par les peuples soumis, la seconde se trouvant à la tête d'une armée en quête d'autres annexions ;
- les co-reines Antiope et Orithrie et les Amazones Aëlle, Philippis, Prothoë, Eurybée, Célène, Phobée, Déjanire, Aftérie, Recmesse, Alcipe, Ménalippe et Hippolyte qui combattirent contre les Grecs d’Hercule dont le neuvième de ses douze travaux consistait à ôter à Antiope sa ceinture de chasteté ;
- la reine Myrine qui perdit la vie en combattant contre les Phrygiens.
Le Marañón (nom de l'Amazone au Pérou jusqu'à Iquitos) fut appelé fleuve des Amazones parce qu'on y rencontrait, sur ses rives, des femmes qui combattaient aussi vaillamment que des hommes.
Il existait au Dahomey (aujourd'hui le Bénin), avant la conquête française, un corps d'Amazones.
Au VIIIe siècle il y aurait eu en Bohême de véritables Amazones qui, commandées par Libussa et Ulasta, répandirent la terreur. Le légendaire roi Premysl aurait eu du mal à les exterminer.
Dans la sculpture ancienne, l'Amazone est le type féminin du guerrier portant un costume asiatique ou dorien. Elle est souvent représentée blessée. La lutte des Amazones avec Hercule, Thésée, a inspiré nombre d'œuvres d'art, notamment les frises du temple de Phigalée, du mausolée d'Halicarnasse. Rubens a peint le “Combat des Amazones” (1619) représentant la victoire de Thésée sur le pont du Thermodon.
Voir Atalante, Camille, Hippolyte, Penthésilée, Thalestris, Tomyris, Ulasta.
AMBREE (Mary).- On peut lire dans Le magasin pittoresque (publié sous la direction d’Édouard Charton, 18e année, Paris, 1850) :
« Mary Ambree ou Ambry est une héroïne anglaise qui s'immortalisa par son courage au siège de Gand, en 1584 ».
« On trouve une ballade populaire composée en son honneur dans Percy’s reliques of ancient english poetry ».
« Il en est également question dans la comédie de Scornful lady, acte V, par V. Baumont et Fletcher ».
« Ben Johnson, dans son masque des Îles Fortunées, mentionne cette ballade :
Mary Ambree,
Qui marcha si fièrement
Au siège de Gand,
Et qui brava la mort
(Comme dit la ballade).
« Ailleurs, il fait dire à un des personnages : « Ma fille sera vaillante, et se montrera dans l’occasion une « véritable Mary Ambry ».
ANDRÉ (Valérie).- Première femme militaire ayant atteint le grade d'officier général.
On a pu lire sur le site Internet du « Service historique de la Défense » :
« Reçue docteur en médecine en novembre 1948, Valérie André rejoint en décembre suivant, avec le grade assimilé de médecin capitaine, l'hôpital militaire de MyTho en Indochine, puis l'hôpital de Saïgon. En 1950, elle est la première femme à obtenir le brevet de pilote privé d'hélicoptère. Elle est alors nommée chef de section pilote d'hélicoptère sur la base aérienne de Gialam (Nord Vietnam) en octobre 1950. Elle compte à son actif 285 missions dont 165 évacuations sanitaires ».
« Au début de 1955, le capitaine André est affecté au Centre d'essais en vol de Brétigny-sur-Orge où elle apprend le pilotage sur avions tout en exerçant ses fonctions de médecin du personnel navigant. En 1959, Valérie André est affectée en Algérie en tant que médecin-chef et pilote à la 23e escadre d'hélicoptères. En 1960, elle devient médecin-chef de la base aérienne de La Reghaïa ».
« De retour d'Algérie, elle prend le poste de médecin-chef de la base aérienne de Villacoublay de 1962 à 1971. Le 21 avril 1976, elle devient la première femme médecin général dans l'histoire de la Défense avec le grade de général de brigade. En 1981, Valérie André est nommée médecin général inspecteur et promue grand officier de la Légion d'honneur avant de quitter l'armée ».
ANNE DE BRETAGNE.- Fille de François II, duc de Bretagne, et de Marguerite de Foix, née à Nantes le 25 janvier 1477, morte à Blois le 9 janvier 1514, duchesse de Bretagne et reine de France. Elle fut mariée par procuration en 1490 à l'empereur Maxilimien Ier dans l'espoir de protéger la Bretagne contre les visées de la France, mais, assiégée dans Rennes, elle fut contrainte d'épouser le roi Charles VIII en 1491. Veuve, elle se remaria avec le roi Louis XII en 1499.
On peut lire dans Le magasin pittoresque (publié sous la direction d’Édouard Charton, 4e année, Paris, 1836 :
« Anne, duchesse de Bretagne, et qui monta deux fois sur le trône de France, s’est acquis par ses hautes capacités une réputation et une gloire qui lui appartiennent en propre. La force d’âme avec laquelle elle supporta, à la mort de son père, les plus grands revers, son habileté dans la direction de son duché, sa sage et prudente régence pendant les guerres d’Italie, la protection qu’elle accorda aux arts, aux sciences et à toutes les entreprises utiles, l’ont placée au rang des femmes les plus illustres. Si quelquefois son esprit d’indépendance bretonne revêtit un caractère dominateur et orgueilleux, on doit pardonner cette faiblesse humaine à une intelligence qui, presque toujours, comprit si dignement la mission de la reine et celle de la femme ».
« Fille unique de François II, duc de Bretagne, Anne, toute jeune encore, succéda à son père dans un moment où les prétentions de la France sur le duché de Bretagne (prétentions qui s’appuyaient déjà sur plusieurs victoires) rendaient la conservation de cette province à peu près impossible. À la mort de François II, des dissensions, fondées sur des intérêts individuels, éclatèrent dans le conseil de la jeune duchesse, et lui rendirent l'administration souveraine encore plus difficile. Ceux mêmes à qui leur position faisait une inviolable obligation de la protéger se soulevèrent contre elle. Son tuteur, le maréchal de Rieux, mécontent de ce qu'elle refusait la main d'Alain d'Albret, protégé par lui, lui fit fermer les portes de Nantes, au moment où elle se réfugiait dans cette ville pour échapper à un parti de l'armée française qui avait voulu l'enlever à Redon. Avertie à temps de cette lâche trahison, et indignée d'une semblable déloyauté, Anne monte à cheval l'épée à la main, et, suivie de Dunois et de ses principaux officiers, elle se présente aux portes de la ville, ordonne qu'on les lui ouvre, et en impose tellement aux rebelles que les ponts-levis s'abaissent devant elle. Mais cette généreuse fermeté, qui suffisait à arrêter des révoltes intestines, était impuissante contre le roi de France et ses armées ; la duchesse comprit qu'il fallait chercher un protecteur qui pût la défendre, elle et son peuple. Dans un âge où les intérêts de cœur dominent tous les autres, elle n’écouta que la raison, et, sacrifiant son affection pour le duc d'Orléans (depuis Louis XII), elle se décida à accepter la main de Maximilien d'Autriche ».
« Mais ce dévouement à la cause publique n'eut point l'effet que la duchesse en espérait. Maximilien n'envoya pas les secours sur lesquels elle avait compté. L'armée française s'était déjà emparée des principales places de la Bretagne, et Anne se vit forcée, après quelques triomphes sans importance et de rudes défaites, à demander la paix. On la lui accorda, mais à des conditions qui rendaient la France maîtresse d'une grande partie du duché ».
« Charles VIII, pour consolider les droits que la guerre venait de lui donner sur cette belle province, demanda la main de la duchesse, qui l’accorda ».
« Devenue reine d’une des premières nations de l’Europe, Anne se montra en tout digne d’occuper le trône sur lequel elle était montée. Pendant les guerres d’Italie, Charles VIII, qui ne quittait point le commandement de ses armées, la nomma régente du royaume, et elle l’administra avec un talent et une prudence remarquables ».
« À la mort de Charles VIII, Anne se rendit à Nantes pour reprendre possession, aux termes de son contrat de mariage, du duché de Bretagne. Ce fut la première reine de France qui porta le deuil de son époux en noir ; jusque-là, elles l’avaient porté en blanc ; de là, sans doute, le surnom de Blanche donné à plusieurs veuves de nos rois ».
« Les mêmes causes politiques qui l’avaient décidée à accepter la main de Charles VIII se réunirent à ses sentiments personnels pour lui faire accepter celle du duc d'Orléans, devenu roi de France sous le nom de Louis XII. Mais en contractant cette nouvelle union, elle n'oublia point les intérêts de son peuple, et elle obtint, par un traité particulier, que la Bretagne serait gouvernée comme elle l'avait été sous les ducs, et que ses droits et privilèges lui seraient maintenus ».
« La reine contribua beaucoup aux progrès de la marine française. Douze vaisseaux de ligne furent construits et équipés par ses ordres lors de l'expédition des princes chrétiens contre l'empire turc. Du reste, elle ne fut pas seulement remarquable par ses talents politiques et par son énergie, ce fut encore une des femmes les plus lettrées de son époque. Élevée par Françoise de Dinan, Anne fut de bonne heure initiée à des connaissances étrangères à la plupart des femmes. Elle composa sur les principaux événements de sa vie et sur la bataille de Saint-Aubin, qui valut à l’armée française un si mémorable triomphe sur le duc François II, des mémoires fort curieux […] ».
ANTIOPE.- Voir Amazones.
AQUILÉENNES.- Histoire militaire des femmes : « L’an 239, l’empereur Maximin, déclaré déchu par le sénat, accourut de la Gaule où il combattait, et vint en Italie avec le projet de tout mettre à feu et à sang. La ville d’Aquilée lui ferma ses portes. Pendant le siège les Aquiléennes soutinrent les défenseurs par leur énergie, et, voyant les cordes manquer pour le service des catapultes et autres machines de guerre, elles n’hésitèrent pas à couper leurs chevelures, à les unir, à les tresser. En mémoire de ce trait, le sénat fit élever un temple à Vénus la Chauve ».
ARMOISES (Claude, dite Jeanne, des).- Dictionnaire des femmes célèbres : « Aventurière française (XVe siècle). Profitant de sa ressemblance avec Jeanne d'Arc, elle se fit passer pour son illustre devancière à partir de 1436, alors que celle-ci était morte en 1431. Elle aurait même réussi à tromper la famille de Jeanne d'Arc, ce qui paraît peu vraisemblable. En revanche, il est certain qu'elle parvint à convaincre la population de Metz qui se cotisa pour lui offrir un cheval et, arpentant la Lorraine et le duché de Luxembourg, elle obtint partout où elle passait le même succès. Après un séjour en Italie où elle aurait combattu dans les troupes au service du pape, on la retrouve à Orléans, en 1439, où elle fit une entrée triomphale, toujours en fausse Jeanne d'Arc. Charles VII lui-même accepta de la recevoir, mais la supercherie fut aussitôt découverte, et elle fut pardonnée. Après la mort de son premier mari, Robert des Armoises, elle épousa un Angevin, fut emprisonnée à Saumur, puis condamnée au bannissement. On perd sa trace après 1457 ».
ARSINOÉ III.- Princesse égyptienne de la dynastie des Ptolémées, fille du roi d'Égypte Ptolémée III Évergète et de Bérénice. Elle épousa son frère Ptolémée IV Philopator (« qui aime son père ») et eut pour fils Ptolémée V. Elle participa activement à la bataille de Raphia (aujourd'hui Rafa) qui vit la victoire des Égyptiens sur le roi de Syrie Antiochos III le Grand en 217 av. J.-C. À la mort de Ptolémée IV, vers 204 av. J.-C., elle fut assassinée par Sosibios, qui avait dirigé les troupes à Raphia, et Agathoclès.
ARTEIL (Alice).- Résistante française, née à Saint-Romain-d’Urfé, dans la Loire, en 1912, décédée à Saint-Just-en-Chevalet, dans la Loire, en 1995. Elle commença par diffuser des tracts et des journaux clandestins, puis prit la tête d’un petit groupe de maquisards qui fusionna avec les FTPF (Francs-tireurs partisans français). À la tête de son groupe, elle mena plusieurs opérations de sabotage (déraillements de trains, destruction de voies ferrées et de câbles téléphoniques). Après les débarquements alliés de Normandie et de Provence, elle participa à la libération des boucles du Doubs, de Valentigney et de Montbéliard. Elle avait été promue lieutenant, mais dut cependant cesser de participer aux combats, l’état-major ayant interdit aux femmes l’action armée. Chevalier de la Légion d’honneur, Alice Arteil fut aussi titulaire de la croix du combattant volontaire de la Résistance, de la croix de guerre avec palme et de la croix du combattant volontaire 39-45.
Femmes sous l’uniforme : sur ce site Internet, Éric Labayle donne les précisions suivantes sur Alice Arteil :
« Pendant l’hiver 1943-1944, poursuivie par la Gestapo qui a eu vent de ses agissements, elle mène une existence itinérante entre la Loire et l’Allier. En décembre, le « lieutenant Arteil » quitte les F.T.P. Le mois suivant, avec sept de ses anciens volontaires, elle rejoint le groupe « Roussel », dirigé par le chef de bataillon Colliou, commandant l’O.R.A. pour l’Allier. Avec ses hommes, elle constitue ainsi l’embryon de la future demi-brigade d’Auvergne ».
« À la tête de son groupe franc, elle mène de nombreuses opérations de sabotage, dont les plus remarquables sont le déraillement d’un train blindé à Paray-le-Monial, la destruction d’une voie ferrée entre Roanne et Lapalisse, la destruction de câbles téléphoniques et l’attaque d’une cinquantaine de soldats allemands près du village de Decize ».
« En juin 1944, son grade de lieutenant est officialisé par Londres. L’annonce des débarquements (Normandie en juin et Provence en août) marque le début de la lutte à visage découvert. Avec sa section, Alice Arteil participe à la libération des boucles du Doubs, puis à celles de Valentigney et de Montbéliard ».
« Elle se fait remarquer par ses qualités de chef et sa capacité d’adaptation aux contraintes de l’instant. Sa volonté, également, force l’admiration de ses camarades de combat ».
« L’automne 1944 est l’époque de « l’amalgame » entre l’armée régulière et les troupes formées par les maquis. Le lieutenant Arteil et ses hommes sont donc incorporés au 152e R.I., le régiment des « Diables Rouges », l’un des plus prestigieux de l’armée française. Elle y conserve son grade et son commandement, puis est affectée à l’état-major régimentaire. Avec le 15-2, elle termine la campagne d’Alsace, franchit le Rhin en avril 1945 et se trouve à Singen à la fin de la guerre. C’est là qu’elle est démobilisée ».
ARTÉMISE Ière.- Reine d’Halicarnasse, fille de Ligdamie, qui prit part à l’expédition de Xerxès Ier Khchayarcha contre les Grecs et combattit bravement à la bataille de Salamine, en 480 av. J.-C.
Histoire militaire des femmes : « Hérodote nous parle de la reine d’Halicarnasse ou de Carie Artémise(*). Cette princesse, qui possédait, outre la ville dont elle portait le titre, plusieurs îles voisines(**), possédait une rare prudence et avait déjà fait preuve de courage ; elle avait suivi volontairement Xercès dans son expédition contre la Grèce et prenait vis-à-vis de lui l’avis le plus franc et le plus net. Comme on délibérait si l’on attaquerait de nouveau la flotte des Grecs, et que la plupart des membres du conseil de guerre opinaient pour livrer une bataille navale, elle qui s’était distinguée dans les combats sur mer livrés pendant trois jours entre l’île d’Eubée et la terre ferme, après les deux tempêtes qui avaient assailli la flotte des Perses, prit ainsi la parole : « Rapportez à Xercès ce que je vais vous dire. Après ma conduite dans les derniers combats, on ne peut soupçonner ma lâcheté. Mon zèle m’oblige à lui donner un conseil salutaire. Ne hasardez point une bataille ; ses suites seraient inutiles ou funestes à votre gloire. Le but principal de votre expédition n’est-il pas rempli ? Vous êtes maîtres d’Athènes. Laissez votre flotte dans l’inaction ; celle des ennemis se dissipera, car elle manque de vivres. Pour hâter ce moment, envoyez vos vaisseaux vers l’isthme de Corinthe, ceux des Grecs les suivront. Je crains une bataille qui exposerait vos deux armées(***), car je connais la supériorité de la marine des Grecs. Vous êtes, seigneur, le meilleur des maîtres, mais vous avez de mauvais serviteurs ». Xercès loua fort la reine d’Halicarnasse, et, pour concilier son avis avec l’opinion de la majorité, ordonna à sa flotte de s’avancer vers l’île de Salamine et à son armée de marcher vers l’isthme de Corinthe. Cette marche donna raison à Artémise, car la plupart des généraux grecs demandèrent aussitôt qu’on marchât au secours du Péloponèse ; on connaît le stratagème de Thémistocle pour sauver Athènes malgré ses alliés ; il envoya le précepteur de ses enfants dire à l’ennemi que les Grecs sont frappés de terreur et veulent se retirer. Ce stratagème réussit, et Xercès ordonne les premières dispositions du combat. Nous n’avons pas à raconter la bataille de Salamine. Artémise y prit une part brillante, et d’autant plus glorieuse que les Athéniens venaient de mettre sa tête à prix(****) ».
(*) La même qui devint amoureuse de Dardanus d’Abydos, et, s’en voyant méprisée, lui creva les yeux pendant qu’il dormait, au dire de Ptolémée (Hephœst, apud Photium). L’habitude de la guerre avait inspiré une vengeance atroce à Artémise, si l’action citée par Ptolémée est véritable ; heureusement pour la mémoire d’une femme qui fit preuve d’une rare énergie, cet auteur a mêlé à ses récits plus d’une fable.
(**) Cos, Nysiros et Calydnes. Autour d’Halicarnasse, cette souveraine régnait sur une petite partie seulement de la Carie.
(***) Celles de terre et de mer.
(****) Pour 10.000 drachmes.
Victor Duruy, Histoire des Grecs depuis les temps les plus reculés jusqu’à la réduction de la Grèce en province romaine, tome II : « Depuis les guerres médiques jusqu’au traité d’Antalcidas » : « Une femme se signala : Artémise, reine de Carie. Comme sa galère était vivement pressée par un navire athénien(*), elle se détourna sur un vaisseau perse et le coula. L’Athénien, croyant qu’il poursuivait un ami, chercha un autre adversaire. Xerxès vit l’action d’Artémise ; il pensa que le vaisseau brisé par elle était grec, et s’écria qu’en ce jour les femmes se battaient comme des hommes, les hommes comme des femmes. Pour honorer son courage, dans la retraite il lui confia ses enfants, qu’elle ramena à Éphèse ».
(*) Ce navire était monté par Amynias qui, après l’action, eut le prix de la valeur parmi les Athéniens et dont, malgré le silence d’Hérodote, on a fait un second frère d’Eschyle.
ARUNDEL (Blanche).- Fille du comte de Worcester, et épouse de lord Arundel, célèbre par la vigoureuse défense qu'elle mena, dans le château de Wardour, contre une armée de rebelles conduite par sir Edward Hangerford. À la tête de seulement vingt-cinq hommes, elle soutint un siège pendant dix jours contre mille trois cents assiégeants et capitula avec les honneurs.
ATALANTE.- Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Fille de Schénée, roi de l'île de Scyros, d'une beauté rare, tirait supérieurement de l'arc, et surpassait tous les hommes à la course et dans les autres exercices du corps. Se voyant poursuivie par une foule d'amants, elle leur déclara, par ordre de son père, qu'elle ne donnerait sa main qu'à celui qui pourrait la vaincre. Plusieurs jeunes princes le tentèrent, et s'en retournèrent confus. Elle remporta, aux jeux institués en l'honneur de Pélias, le prix sur Pélée contre qui elle lutta. Hippomène, instruit par Vénus, s'étant présenté au combat de la course fut le seul qui observa la condition prescrite. La déesse lui conseilla de jeter, dans la carrière, trois pommes d'or que l'imprudente Atalante s'amusa à ramasser. Par cette ruse, l'heureux Hippomène gagna le prix, et força la princesse à reconnaître en lui son vainqueur et son époux. Peu de temps après, les deux époux, ayant oublié de reconnaître la protection de Vénus par des sacrifices, furent changés en lions ».
ATTENDULI (Marguerite).- Née à Cotignola, petite ville de la Romagne, vers 1370, d'une famille obscure. Son frère Sforce s'était élevé à la place de grand-connétable du royaume de Naples. Lorsqu'il fut arrêté par le comte Jacques de La Marche, époux de la reine de Naples, sa sœur rassembla ses amis, se mit à leur tête et marcha contre le comte ; après divers exploits, elle s'empara de Tricarico. Le comte de La Marche lui envoya alors une députation de plusieurs nobles qui lui annoncèrent que Sforce serait immolé si Tricarico ne lui était pas rendu. Marguerite fit répondre que son frère ne craignait pas la mort et qu'elle n'achèterait pas sa vie par une lâcheté ; elle précisa aussi que les députés qu'elle détenait répondraient du meurtre de son frère. Les parents des députés sollicitèrent alors et obtinrent la liberté de Sforce.
AUBRAC (Lucie).- Épouse de Raymond Samuel, dit Raymond Aubrac, résistant français. Née Bernard, en 1912, à Paris, morte en 2007 à Issy-les-Moulineaux, dans les Hauts-de-Seine. Elle prit part avec son mari à la Résistance, dans le mouvement Libération. Son mari ayant été arrêté par la Gestapo et emprisonné au fort de Montluc, elle monte une opération armée pour le libérer. Elle obtient d’abord une entrevue avec Klaus Barbie, le chef de la Gestapo de Lyon, à qui elle demande la permission de voir son soi-disant fiancé, dont elle attendrait un enfant, et de l’épouser en prison. Lors de sa visite, elle communique à son époux le plan de l’évasion. Le 21 octobre 1943, lors d’un transfert de prisonniers, Lucie et ses compagnons attaquent le fourgon allemand, tuent quatre hommes et libèrent Raymond Samuel et treize autres résistants. Lucie, son mari et leurs enfants parviennent ensuite à rejoindre Londres en février 1944. Grand officier de la Légion d’honneur, Lucie Aubrac a écrit notamment :
- Ils partiront dans l’ivresse (1984) ;
- Cette exigeante liberté (1997) ;
- La résistance expliquée à mes petits-enfants (2000).
AUDU (Louise-Reine).- Fruitière de Paris remarquable par sa beauté et plus encore par sa force et son audace. Dès les débuts de la Révolution, elle participa à tous les mouvements insurrectionnels. Les 5 et 6 octobre 1789, elle dirigeait les hommes et les femmes qui pénétrèrent dans les appartements du château de Versailles et qui égorgèrent plusieurs gardes du roi. Elle se signala aussi à la journée du 10 août.
Biographie moderne, ou galerie historique, civile, militaire, politique et judiciaire ; Contenant les portraits politiques des Français de l’un et l’autre sexe, morts ou vivants, qui se sont rendus plus ou moins célèbres, depuis le commencement de la révolution jusqu’à nos jours, par leurs talents, leurs emplois, leurs malheurs, leur courage, leurs vertus ou leurs crimes, Paris, Alexis Eymery et Delaunay, 1815, tome Ier : « L’une des héroïnes du 6 octobre 1789 ; elle fut impliquée dans les poursuites dirigées par le châtelet contre les fauteurs de cette journée, subit un interrogatoire assez long, et fut ensuite mise en liberté, ainsi que tous les prévenus. Elle se distingua encore personnellement à la journée du 10 août 1792, et fut ensuite couronnée par les vainqueurs ; plusieurs soldats suisses furent immolés de sa main, et tout porte à croire qu’elle eût été une digne rivale de Renée Langevin [Voir Bordereau (Renée)], si le sort l’eut conduite à la Vendée. Reine Audu était surnommée la Reine des halles ».
AUGUSTINA.- Histoire militaire des femmes : « Au siège de Saragosse, en février 1809, outre les femmes espagnoles qui s’aventuraient entre les murailles pour dépouiller nos morts, il y eut plusieurs femmes attachées au service des batteries. On cite particulièrement Augustina, mariée à un caporal d’artillerie, employée à la même batterie que son mari, et très habile à pointer ».
AUMONI.- Histoire militaire des femmes : « La princesse Aumoni honore le coin de la terre africaine que nous nommons aujourd’hui la province ou le département de Constantine. Âgée de soixante ans, à la date de 1723, elle commandait à une portion étendue de pays ; depuis son veuvage, elle s’était maintenue et avait fait respecter son pouvoir, livrant au besoin des combats et y paraissant au premier rang ; on la redoutait, elle avait dompté plusieurs fois l'orgueil du bey de Constantine ; celui-ci, vaincu, avait même épousé sa fille, pour acquérir enfin son alliance et vivre en paix avec une aussi terrible voisine ».
BALAND (Catherine).- Vivandière qui appartenait au 95e régiment de ligne sous le premier Empire et qui participa notamment à la bataille de Chiclana, en Espagne, le 5 mars 1811 (bataille indécise entre les Français du maréchal Victor et une armée anglo-hispanique commandée par le général La Peña et le général anglais Graham). Le peintre Lejeune la fit figurer, distribuant de l'alcool aux soldats, dans son tableau consacré à la bataille. Catherine Baland fut décorée de la Légion d'honneur en 1813.
BALMONT (comtesse de).- D’une illustre famille de Lorraine, elle réunissait à son charme les dons de l’esprit et la valeur guerrière. Durant l’absence de son mari, elle fut insultée par un militaire. Elle s’habilla alors en homme et le défia en duel en se faisant passer pour son frère. Elle désarma son adversaire et le pria de respecter à l’avenir un peu plus les femmes. La comtesse de Balmont publia en 1650 une tragédie : Les jumeaux martyrs.
BARBANÇON (Marie de).- Dictionnaire des femmes célèbres : « Héroïne française (XVIe siècle). Durant les guerres de Religion entre catholiques et huguenots, qui ensanglantèrent la France sous le règne des Valois, on cite l’histoire de Marie de Barbançon, veuve de Jean de Barret, un des chefs de la Réforme. Armée d’une pique, elle défendit elle-même son château de Bannegon, dans le Berry. Mêlée aux combattants, elle se comporta avec une vaillance extraordinaire : entourée d’une dizaine d’hommes, elle soutint le siège pendant plus de quinze jours et vit son château tomber peu à peu sous les coups des troupes royales. À court de vivres et de poudre, Marie de Barbançon dut capituler, mais obtint la vie sauve pour ses hommes. En 1569, Charles IX lui rendit son château sans exiger de rançon ».
Philippe Le Bas, L’univers. Histoire et description de tous les peuples. Dictionnaire encyclopédique de la France, Paris, Firmin Didot, 1840, tome II : «Après la mort de son mari, pendant les guerres de religion, sous le règne de Charles IX, cette dame étant assiégée dans son château de Benegon en Berri, par Montare, lieutenant du roi en Bourbonnais, donna des preuves d’un courage extraordinaire. Elle ne s’étonna pas à la vue des tours et des murs de son château renversés, et elle défendit elle-même la brèche la plus dangereuse, une demi-pique à la main. Tant de courage dans une femme fit honte à ses soldats, qui parlaient de se rendre ; ils la suivirent et repoussèrent tous les assauts. Marie de Barbançon parvint à faire durer ainsi le siège pendant quinze jours ; elle l’eût sans doute soutenu plus longtemps, si la faim ne l’eût forcée de capituler. Elle se rendit le 6 novembre 1569, après avoir obtenu de l’ennemi la promesse de la vie pour elle et pour tous ceux qui étaient dans le château, à la charge néanmoins de payer rançon. Charles IX, qui fut instruit de la bravoure de cette dame, fit défendre à Montare et aux autres capitaines de recevoir la rançon, et la fit reconduire avec honneur dans son château ».
BARREAU (Alexandrine).- L’intermédiaire des chercheurs et curieux (18e année, Paris, 1885) : « Il y a certainement eu des femmes, en très petit nombre, qui ont servi dans les armées de la République et de l’Empire. Le 13 août 1793, Alexandrine Barreau, grenadier au 2e bataillon du Tarn, combattait avec son mari Leyrac et son frère Barreau ; ils attaquaient la redoute d'Elloqui (espagnole), lorsqu’un boulet vint enlever son frère et une balle fracasser la jambe de son mari. Alexandrine pousse un cri de vengeance, s'élance, elle troisième, dans la redoute, tue plusieurs Espagnols, et, quand elle voit notre drapeau sur l'épaulement, elle revient panser les blessures de son mari ».
Philippe Le Bas, L’univers. Histoire et description de tous les peuples. Dictionnaire encyclopédique de la France, Paris, Firmin Didot, 1840, tome II : « Née à Castres, s’engagea avec son frère et son mari dans le deuxième bataillon du département du Tarn. Elle se trouvait, le 16 août 1794, à l’attaque de la redoute d’Elloqui par l’armée des Pyrénées orientales. Son frère reçoit un coup mortel, son mari est dangereusement blessé ; Alexandrine a soif de vengeance ; elle saute la troisième dans la redoute, tue plusieurs Espagnols, et ne revient panser les blessures de son mari qu’après que la victoire est déclarée pour les armes françaises ».
BELGIOJOSO (marquise Cristina Trivulzio, princesse de).- Dictionnaire des femmes célèbres : « Patriote et femme de lettres italienne (Milan 1808 – id., 1871). Elle épousa en 1824 le prince Emilio de Belgiojoso qui était à la tête d'une société secrète, la Federazione et, à son contact, elle devint l'une des plus ardentes propagandistes de la cause italienne et l'ennemie irréductible de l'Autriche. En 1831, elle dut s'exiler à Paris, où son étrange beauté, ses yeux immenses, sa nature exaltée et romanesque firent la conquête de tous ceux qui l’approchaient : La Fayette, Thiers, Chopin, Listz, Victor Cousin, Musset, l’historien Auguste Mignet, auquel, disait-on, elle ne refusa rien. Sa maison devint le lieu de rencontre de ses compatriotes exilés. Pour soulever l’opinion en faveur de la libération de l’Italie, elle créa des journaux, dont la Gazetta italiana, écrivit des articles virulents et enflammés. En 1848, elle accourut à Milan alors insurgée, leva à ses frais une troupe de volontaires, et on la vit défiler à la tête de ses soldats, sous les acclamations de la foule, portant déployé un immense drapeau aux couleurs italiennes. Découragée par l’échec du soulèvement de Milan, elle rentra à Paris et entreprit un long voyage en Asie Mineure. Elle se fixa à Locato, près de Milan, à partir de 1856. Elle écrivit une Histoire de la maison de Savoie et des Mémoires d'exil. Cette ardente patriote eut la joie d'assister à la libération et à l'unification de son pays un an avant sa mort ».
BELLEVILLE (Jeanne de).- Seconde épouse d’Olivier IV de Clisson qui fut décapité en 1343 sur ordre du roi de France Philippe VI. Jeanne put contempler la tête de son mari plantée sur une pique aux créneaux du château du Bouffay, près de Nantes. Elle jura vengeance. Avec l'aide de plusieurs seigneurs de Bretagne, elle livra une guerre sans merci au roi de France et à Charles de Blois. Elle acheta sur ses deniers un bateau pour faire la guerre de course aux navires de commerce français. Maniant le sabre et la hache d'abordage, elle dirigeait elle-même les opérations, ce qui lui valut le surnom de “Lionne sanglante”. Son bateau sombra au cours d'un naufrage. Elle se réfugia avec ses deux fils en Angleterre où elle mourut en 1359. « On voyait, dit Sainte-Foix, une des plus belles femmes de l'Europe, armée d'une épée d'une main et d'un flambeau dans l'autre, et venger sa famille et son pays ».
BELLONE.- Déesse de la guerre chez les Romains (Ényo chez les Grecs), considérée parfois comme la femme, ou la sœur, de Mars. Elle attelait les chevaux du dieu Mars et conduisait son char.
Dans un ouvrage qui a pour titre Mythologie grecque et romaine (Paris, Bordas, 1991), Pierre Commelin la décrit ainsi :
« Cette déesse personnifie la Guerre sanglante et furieuse ».
« Elle avait à Rome un temple dans lequel le Sénat donnait audience aux ambassadeurs. À la porte de ce temple était une petite colonne nommée la guerrière, à laquelle on jetait une lance toutes les fois qu’une guerre était déclarée. Mais son temple le plus fameux se trouvait à Comane, en Cappadoce : là son culte était célébré par une multitude de ministres de tout âge et de tout sexe. Plus de six mille personnes étaient employées au service de ce temple ».
« Indépendamment de ses fonctions auprès du dieu Mars, cette déesse au front d’airain, suivant l’expression d’Homère, a son char, son cortège particuliers, et procède d’elle-même à sa terrible mission. Armée à l’antique, le casque en tête, la lance à la main, montée sur son char qui renverse tout sur son passage, précédée de l’Épouvante et de la Mort, elle s’élance vers la bataille ou dans la mêlée : sa chevelure de serpents siffle autour de son visage enflammé, pendant que la Renommée vole autour d’elle, appelant au son de la trompette la Défaite et la Victoire ».
Dictionnaire historique, critique et biographique : « Fille de Phorcys et de Céto, déesse de la guerre, était sœur, d’autres disent femme du dieu Mars. Elle avait des temples et des prêtres qui l’apaisaient par leur sang, en se faisant des incisions aux bras et aux cuisses avec des couteaux. Les poètes la représentent armée d’un casque et d’une cuirasse, les cheveux épars, une pique ou une torche à la main. On lui donne aussi quelquefois un fouet, pour animer les troupes au combat. Ce fut, dit-on, Oreste et sa sœur Iphygénie qui portèrent de la Scythie Taurique dans la Grèce le culte de cette divinité, consistant dans les mêmes rites que celui de la Diane de Tauride. Elle avait un temple à Comane en Cappadoce et un autre à Rome. C’était dans ce temple que le sénat recevait les ambassadeurs des puissances alliées ; et c’était à la porte de ce temple qu’on voyait la petite colonne Bellica, à laquelle on lançait un javelot toutes les fois qu’on déclarait la guerre ».
BÉNARD (Madame).- Histoire militaire des femmes : « Le 3 avril 1814, au siège de Sens par les alliés, plusieurs habitants ayant été pris les armes à la main, l’ennemi résolut, aussitôt la reddition, de passer la ville entière au fil de l’épée. Alors la femme d’un négociant, Mme Bénard, se leva et, malgré les supplications de son époux et de ses enfants, sortit de la cité, marcha au travers des balles et des obus qui pleuvaient, atteignit la tente du prince de Wurtemberg et se jeta à ses genoux ; frappé du courage et du sang-froid de cette héroïne, le prince accorda son pardon à la ville. Le gouvernement royal de France félicita Mme Bénard et lui adressa, comme souvenir, la collection des médailles de nos souverains ; cette collection a depuis été offerte par sa famille à la bibliothèque de la ville de Sens ».
BENNES (Madame de).- Voir Houssay (Louise-Françoise-Claudine du).
BÉRENGÈRE.- Reine de León et de Castille, fille du comte de Barcelone Raymond III, femme d'Alphonse VII, morte en 1149. Assiégée dans Tolède par les Maures en 1139, elle monta sur les remparts et apostropha les assiégeants, les traitant de lâches puisqu'ils attaquaient ainsi une femme. Les chevaliers maures ordonnèrent alors la retraite et leur armée défila devant la reine pour lui rendre hommage.
Histoire militaire des femmes : « Bérengère de Barcelone, femme d’Alphonse VIII, roi de Léon, de Castille et de Tolède, imagine, pendant que son époux attaquait Oréjà et que les mahométans viennent l’assiéger dans Tolède (1139), de faire dire aux chefs des infidèles que s’ils avaient de l’honneur et du courage ils iraient combattre le roi, au lieu de s’en prendre à une reine. On lui répond galamment et on lui demande de se faire voir pour qu’on puisse la saluer. Elle y consent et paraît au milieu de sa suite, avec tout l’éclat d’une cour somptueuse. Frappés comme le sont les Orientaux, quand ils admirent un objet qui parle à leurs sens, les Maures lui témoignent respect et prévenance, puis s’éloignent. Ce fait témoigne d’une grande beauté et d’une rare fermeté chez la jeune princesse (elle avait alors vingt-huit ans à peine) qui l’accomplit. Ultérieurement, deux des généraux des Maures, Aben-Azuel et Aben-Céta, ayant été tués dans une bataille, Bérengère fit placer leurs corps dans de riches cercueils et ordonna qu’on les portât de sa part à leurs épouses ».
BERMUDEZ (Beatrix).- Voir Estrada (Maria d’).
BERRY (Marie-Caroline-Ferdinande-Louise de Bourbon-Sicile, duchesse de).- Princesse de Bourbon-Sicile, née à Palerme en 1798, morte à Brunnensee (Styrie) en 1870. Elle épousa en 1816 le duc Charles-Ferdinand de Berry. Elle était la fille de François Ier, roi des Deux-Siciles. Sept mois après l'assassinat de son mari, elle donna le jour au futur comte de Chambord. Romanesque et énergique, elle suivit Charles X dans son exil en 1830, puis, revenue en France, elle tenta de soulever la Vendée contre le roi Louis-Philippe en 1832. Ayant échoué, elle fut trahie et emprisonnée à Blaye.
Dans la biographie qu'il lui a consacrée, Alfred Nettement décrit ainsi l'errance de la duchesse en Vendée (Alfred Nettement, Mémoires historiques de S.A.R. Madame, duchesse de Berri, Paris, Allardin, 1837, tome 3) : « La vie qu'elle menait depuis son arrivée dans l'Ouest eût usé une organisation de fer : ces nuits sans sommeil, ces journées sans sécurité, ces courses continuelles, cette existence errante, qui se promenait d'asile en asile et de danger en danger ; ces marches laborieuses, accomplies presque toujours de nuit, souvent à pied, quelquefois à cheval, dans des routes impraticables, à travers des marais fangeux, dans des champs hérissés de haies qu'il fallait franchir, ou plantés de vignes rampantes qui étendent sous les pieds des voyageurs d'inextricables réseaux : tant de fatigues avaient épuisé les forces de Marie-Caroline. La route que les soldats évitaient comme trop mauvaise, c'était la sienne ; les profondeurs dans lesquelles ils n'osaient s'aventurer, et qu'ils laissaient derrière eux comme impénétrables, elle y pénétrait ».
BETTIGNIES (Louise de).- Héroïne française, agent de renseignements de l'armée britannique dans le nord de la France, née près de Saint-Amand-les-Eaux (Nord) en 1880, morte en Allemagne, à Cologne, en 1918. Mise par les Anglais à la tête d'un service de renseignements pendant la Première Guerre mondiale, elle opéra, depuis Lille, sous le nom d’Alice Dubois. Elle sauva la vie de plus d'un millier de soldats britanniques et fournit à l'Intelligence Service des renseignements militaires de premier ordre. Son action permit ainsi, notamment, la destruction de deux mille pièces d'artillerie lors des combats de Carency et de Loos-en-Gohelle. Arrêtée par les Allemands en 1915, à Tournai, elle fut condamnée à mort ; sa peine fut commuée en détention perpétuelle et elle mourut en 1918 des suites de la tuberculose dans un hôpital de Cologne. La « Jeanne d'Arc du Nord » reçut à titre posthume, en 1920, la croix de la Légion d'honneur, la croix de guerre 14-18 avec palme, la médaille militaire anglaise et fut faite officier de l'ordre de l'empire britannique. Une statue lui a été élevée en 1927 à Lille, boulevard Carnot.
BIGET (Anne).- Voir Marthe (sœur).
BLANCHE DE CASTILLE.- Reine de France née à Palencia, en Vieille-Castille, en 1188, morte à Paris en 1252. Fille d'Alphonse VIII de Castille, petite-fille d’Henri II d'Angleterre, elle épousa le futur Louis VIII de France et fut la mère de Louis IX (saint Louis). À la mort de Louis VIII, en 1226, elle devint régente du royaume. Elle était autoritaire et très courageuse.
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Parmi les diverses preuves de son courage, on peut citer celle qu’elle donna en 1226 au siège de Bellesme au Perche, dont elle se rendit maîtresse malgré le duc de Bretagne, ligué contre elle avec le roi d'Angleterre. Cette place passait alors pour imprenable par l'épaisseur de ses murs et la tour qui défendait le château. La saison était un autre obstacle ; on était au plus fort d'un hiver extrêmement rude. La rigueur du froid faisait périr les hommes et les chevaux. Blanche ne se rebuta point. Elle était en personne au siège. Elle marchait à côté de son fils, animait le soldat, flattait l'officier, et leur remontrait de quelle honte ils se couvriraient, si, leur roi à leur tête, ils étaient réduits à lever le siège. Pour mieux mettre l'armée à couvert du froid, elle fit couper une quantité prodigieuse d'arbres, fruitiers ou non, et on fit dans le camp de si grands feux, et en si grande quantité, que le soldat cessa de murmurer. « Ce n’était pas seulement par cette vigilance, dit Guillaume de Nangis, que Blanche de Castille paraissait être une personne de grande conduite ; mais, en tout le reste de ses actions, c’était la plus adroite et la plus habile femme de son royaume ». Des assauts violents se donnèrent au corps de la place, et, avec deux pierriers, les toits du fort furent brisés, et les cailloux y pleuvaient, par l'effort de ces deux machines, en si grande quantité, que les assiégés n'étaient en sûreté nulle part. Enfin la grosse tour fut abattue, et les Bretons, qui défendaient le fort, le livrèrent au roi et à la reine-mère, à laquelle on peut très justement attribuer l'honneur du siège. Quelques mois après, elle fit le siège d'Ancenis, à six lieues de Nantes ; le roi d'Angleterre était alors dans cette capitale, il en délogea promptement, « aimant mieux, dit un historien, manquer de foi à son fidèle partisan, le duc de Bretagne, que de se mettre au hasard d'augmenter les trophées d'une femme de laquelle il n'osait attendre les attaques ».
BOADICÉE ou Bodicca, ou Boudicca.- Femme de Prasutagus, reine des Icéniens (ou Icènes), peuple de Grande-Bretagne établi dans l'actuel comté du Norfolk. Prasutagus mourut jeune ; désirant mettre sa nation à l'abri d'incursions romaines, il avait institué, par son testament, l'empereur romain son héritier ; mais les officiers romains pillèrent ses États, firent fouetter publiquement Boadicée, sa veuve, et livrèrent ses filles à la brutalité des soldats romains. Boadicée souleva alors son peuple contre les Romains. Elle fut d'abord victorieuse et s'empara de Camulodunum (aujourd'hui Colchester). Finalement vaincue par le général Caius Suetonius Paulinus en 61, elle se donna la mort par le poison.
Dans leur ouvrage L’univers ou histoire et description de tous les peuples. Angleterre (Paris, Firmin Didot, 1842), Léon Galibert et Clément Pellé citent à ce sujet l’historien Tacite :
« Cependant les guerriers bretons, divisés par groupes, voltigeaient ça et là ; jamais ils n’avaient offert une si grande multitude, et leur orgueil fut si présomptueux, qu’ils amenèrent avec eux leurs femmes pour les rendre témoins de leur victoire ; ils les placèrent sur les chariots qu’ils avaient disposés à l’extrémité de la plaine. Boadicée sur un char, ses deux filles devant elle, haranguait chaque peuple qu’elle abordait ; elle leur déclarait « que quoique les Bretons fussent accoutumés à combattre sous les ordres d’une femme, quoique issue d’aïeux si illustres, elle venait non réclamer un royaume et des richesses, mais, comme simple citoyenne, venger sa liberté ravie, son corps déchiré de verges et l’honneur de ses filles outragé ; que la cupidité des Romains en était venue au point d’insulter même aux corps, et que ni la vieillesse ni l’enfance n’y échappaient ».
« Les dieux toutefois, ajoutait-elle, nous offrent une juste vengeance : déjà a succombé la légion qui osa nous combattre ; les autres se cachent dans leur camp ou méditent les moyens de fuir. Les Romains ne supporteront ni le bruit ni les cris de tant de milliers d’hommes, et encore moins leurs chars et leurs coups. Si les Bretons réfléchissent au nombre de leurs guerriers, aux causes de la guerre, ils verront que c’est en ce combat qu’il faut vaincre ou qu’il faut périr. Une femme y est déterminée : les hommes voudraient-ils vivre et être esclaves ? ».
« Suetonius, en ce grand péril, ne garda pas le silence, et, quoiqu’il se fiât au courage des soldats, mêlant les exhortations aux prières, il leur dit :
« Méprisez ces clameurs barbares et ces vaines menaces : vous voyez là plus de femmes que de guerriers ; ces hommes sans énergie, sans armes, céderont aussitôt qu’ils auront reconnu le fer et la valeur des vainqueurs qui tant de fois les ont défaits ; même avec de nombreuses légions, un général ne compte que sur quelques braves pour décider la victoire ; quel surcroît de gloire vous attend, si une poignée de braves acquiert la renommée d’une armée tout entière ? Serrez vos rangs, lancez vos traits, et ensuite, frappant de vos épées vos boucliers, égorgez et massacrer sans discontinuer, et sans penser au butin ; la victoire remportée, tout vous appartiendra ! ».
« Une telle ardeur succéda aux paroles du général ; les vieux soldats, éprouvés par une foule de combats, brandirent leurs javelots avec une telle assurance, que Suetonius, certain du succès, donna le signal du combat. Et d’abord la légion, immobile à son poste, se tenait dans le défilé comme en un rempart. Dès que l’ennemi s’approcha davantage, assurée de la portée de ses traits, elle les épuisa, et formée en coin, elle s’élança en dehors. Les auxiliaires suivent son impétuosité ; les cavaliers, la lance en avant, renversent tout ce qui s’oppose et résiste. L’ennemi tourne le dos : la retraite est difficile pour lui, parce que les chariots, entourant la plaine, fermaient les issues. Le soldat n’épargna pas même les femmes, et les bêtes de somme, percées de traits, augmentèrent les monceaux de morts ».
« La gloire de ce jour fut des plus bruyantes, et comparable aux anciennes victoires ; on dit qu’il y périt près de quatre-vingt mille Bretons. Nous eûmes seulement quatre cents soldats tués, et guère plus de blessés. Boadicée termina sa vie par le poison ».
Les femmes les plus cruelles de l’histoire (Alain Leclercq, Éditions Jourdan, 2013) :
« L’histoire fut déterminée à trouver en Boadicée une noble héroïne anglaise, une femme qui avait presque vaincu la puissance de Rome. La statue de bronze à taille réelle de Boadicée, debout sur son char, ses filles à ses côtés, occupe une place de premier plan en face du Parlement de Londres et rappelle aux passants sa révolte héroïque. Mais on ne peut nier que, malgré son énorme courage et son bref succès dans l’unification de tribus en guerre, Boadicée était aussi, dans la tradition de son peuple, la chef le plus sauvage et la plus impitoyable. Sans pitié lors des batailles, c’est sur son ordre que des milliers de civils innocents, en ce compris des femmes et des enfants, furent torturés et tués. Malgré cela, les conséquences de son combat pour la liberté continuent de se répercuter. Certaines des pires atrocités de ces batailles furent effacées de la mémoire collective par ceux qui voient dans la Reine Guerrière une icône féministe fière et un champion féroce des oppressés ».
« L’emplacement du corps de Boadicée est très controversé. Certains pensent qu’elle fut enterrée sur le quai 10 de King’s Cross Station à Londres ».
BOBOLINA.- Héroïne grecque qui se distingua, en 1821, dans la guerre d'indépendance des Grecs contre la Turquie. Son mari avait été assassiné par les Turcs en 1812. Elle arma trois vaisseaux à ses frais et remporta plusieurs victoires, fit des prouesses notamment au siège de Tripolitza et en Argolide. Elle mourut tragiquement en 1825 dans une rixe avec les parents d'une jeune fille que son frère avait séduite.
Histoire militaire des femmes : « Nous rencontrons […], à la date de 1821, une Grecque du nom de Bobolina, devenue veuve en 1812, par l’exécution de son mari jugé coupable d’entretenir des relations avec Ali, et ayant juré aux Turcs une haine éternelle ; cette femme prend alors une part active au siège de Tripolitza (1821), et illustre son nom par des actions d’éclat. Elle appuie ensuite avec une flotte le blocus de Noplie, de Romanie, et se distingue dans les divers combats livrés dans l’Argolide. Malheureusement elle succombe en 1825 dans une rixe ».
Le tour du monde. Nouveau journal des voyages publié sous la direction d’Édouard Charton, premier semestre 1878, Hachette, 1878 :
« Elle était de Spetzia, petite île située à côté d’Hydra, à l’entrée du golfe de Nauplie, et dont la population avait eu longtemps à souffrir de l’arbitraire et de la cruauté des pachas. Le mari de Bobolina, emmené prisonnier à Constantinople en 1812, y avait été empalé par ordre du sultan, et sa veuve, brûlant du désir de le venger, arma à ses frais, au moment de l’insurrection, trois navires dont elle prit le commandement, pendant que ses deux fils s’enrôlaient dans l’armée. Elle orna sa coiffure d’une croix avec la légende : La mort ou la liberté, et sur son pavillon à l’effigie du Christ elle fit inscrire la parole légendaire des jeunes Spartiates : ou dessus ou dessous, que les matelots interprétaient par : avec ou à fond, c’est-à-dire vaincre ou couler bas ».
« Ce fut une rude guerre. Les bricks d’Hydra, les polacres de Psara, les chebcks de Mycone, les pinques de Trikéri, rivalisaient de hardiesse et d’audace, et les kaloundjis turcs tremblaient lorsque, de leurs vaisseaux de haut bord, retenus immobiles par le calme, ils voyaient bondir vers eux ces longues barques à neuf bancs de rameurs ou ces tartanes converties en brûlots, qui s’attachaient aux flancs de leurs vaisseaux, comme une robe de Nessus ».
« Bobolina avec sa flottille se distingua par son acharnement parmi tous ces croiseurs, poursuivant les bâtiments turcs jusqu’au fond des golfes de l’Asie Mineure et savourant le plaisir de la vengeance ».
« Peu après elle fit hommage de ses navires à la patrie, tout en continuant à servir comme officier de marine. Elle assista au siège de Tripolitza et siégeait aux conseils des chefs grecs à côté de Colotronis, de Cantacuzène, d’Hypsilantis, qui lui témoignaient une sorte de déférence. Elle inspectait les avant-postes en encourageant les tirailleurs et se dressant de toute sa haute taille au-dessus des ouvrages en terre, au mépris des projectiles qui lui étaient envoyés des remparts ».
« Elle fut ensuite chargée, en 1821, d’assiéger Nauplie, qu’elle bloqua par mer et par terre pendant quatorze mois avec une infatigable constance et une persévérance au-dessus des forces de son sexe : repoussant les sorties ; resserrant chaque jour, sous le feu de l’ennemi, le cercle dont elle enserrait le château et la citadelle, et réduisant enfin à merci les musulmans de la garnison ».
« Quand on parla de reddition, ce fut à elle qu’on adressa les premières propositions, et par son intermédiaire que l’on communiqua avec les chefs hellènes ».
« Il y eut des entrevues dans l’enceinte cyclopéenne de Tyrinthe et les envoyés turcs embrassaient humblement le pan de la robe de Bobolina en la suppliant de leur sauver la vie ».
Une autre Grecque se distingua au siège de Tripolitza : voir Zacharias (Constance).
BONNE ESPÉRANCE.- Voir Vaux (Anne de).
BONNY (Anne).- Célèbre femme pirate irlandaise dont fait état Daniel De Foe (l'auteur de Robinson Crusoé) dans son Histoire générale des plus fameux pirates parue en 1724. Après une jeunesse plus que tumultueuse (elle aurait, à l'âge de treize ans, poignardé une domestique), elle épousa un pirate, James Bonny, et partit avec lui aux Bahamas. Elle y rencontra une autre femme pirate célèbre, Mary Read, avec laquelle elle eut une liaison obscure. Les deux femmes furent capturées en même temps par le capitaine Barnett en 1720, condamnées à mort mais non exécutées.
BORDEREAU (Renée).- Vendéenne et royaliste, dite « Brave Langevin », née en 1770, combattante habillée en homme dans l'armée catholique et royale durant la guerre de Vendée. Elle participa notamment aux batailles de Fontenay (mai 1793), Saumur (10 juin 1793) et Angers (3 et 4 décembre 1793). Après la défaite de Savenay fin décembre 1793 et la déroute des Vendéens, elle fit partie d'une petite bande de partisans qui harcelaient les républicains et délivraient des prisonniers. Elle fut faite prisonnière à plusieurs reprises mais parvint chaque fois à s'échapper. Elle fut pourtant capturée en 1809 et ne devait être libérée qu'à la Restauration.
Renée Bordereau a écrit ses mémoires (Mémoires de Renée Bordereau, dite Langevin, touchant sa vie militaire dans la Vendée, Paris, L.-G. Michaud, 1814) dont on trouvera ci-dessous le début de l’ « avis de l’éditeur » :
« Le courage que les femmes ont montré dans nos troubles politiques a été généralement remarqué, et il en est plusieurs dont le nom passera glorieusement à la postérité ».
« Au nombre de ces héroïnes on distinguera sans doute Renée Bordereau, dite LANGEVIN. L’histoire n’offre point d’exemple d’une femme qui ait donné à son Souverain des preuves de fidélité plus constante, qui ait montré plus de bravoure et de fermeté sur le champ de bataille ».
« Son nom est connu de tous les habitants de l’Ouest ; tous les soldats vendéens ont été témoins de ses exploits, et ils ont longtemps admiré la valeur du Brave Langevin ; ils se sont longtemps efforcés de l’imiter, sans savoir que c’était une femme qu’ils prenaient pour modèle ».
« Rien ne pouvait en effet trahir le secret, ni faire connaître le sexe de cette femme extraordinaire ; ses mœurs furent toujours aussi pures que son courage fut inébranlable ».
« Pendant six ans d’une guerre à jamais épouvantable, dans plus de deux cents batailles ou combats sanglants, sa valeur ne s’est pas démentie une seule fois ».
« Aux premières affaires où je me suis trouvée, dit-elle avec la candeur et la franchise que l’on remarque dans tout le cours de son récit, le bruit des coups de fusil me fit impression et je fus désespérée de ne pas me trouver plus de courage ; je m’adressai alors à Dieu et en levant les bras au ciel je lui dis : bon Dieu, ne me donnerez-vous pas plus de cœur pour combattre vos ennemis ? ».
« Aussitôt après cette invocation, la nouvelle Jeanne d’Arc se sentit en quelque sorte animée par l’Esprit-Saint, et dans tout le cours de sa carrière militaire elle n’éprouva plus un seul moment d’hésitation ni de crainte ».
« Toujours à cheval, aux avant-gardes et dans les postes les plus périlleux, même lorsqu’elle reçut des blessures graves et dangereuses, elle ne voulut pas quitter le champ de bataille ».
BOUILLON (Rose).- Épouse d'un nommé Julien Henri, soldat au 6e bataillon de la Haute-Saône, qui abandonna deux enfants en bas âge aux soins de sa mère, prit des habits d'homme et se fit inscrire comme volontaire dans le bataillon où servait son mari.
Philippe Le Bas, L’univers. Histoire et description de tous les peuples. Dictionnaire encyclopédique de la France, Paris, Firmin Didot, 1841, tome III : « Elle supporta toutes les fatigues et tous les dangers de la guerre, jusqu'à la mort de son époux, qui perdit la vie à ses côtés à la bataille de Limbach. La vue d’Henri, baigné dans son sang, loin de la distraire de ses devoirs de soldat, sembla au contraire avoir doublé son courage, et on ne cessa de la voir, tant que dura l’affaire, parmi les plus acharnés à poursuivre l’ennemi. Après cette journée, elle obtint la permission de se retirer auprès de sa vieille mère qu'elle avait chargée du soin de ses deux enfants. Le gouvernement récompensa la conduite héroïque de cette femme par une pension de trois cents francs réversible sur sa famille ».
BOURBON-CONDÉ (Anne-Geneviève de).- Voir Longueville (Duchesse de).
BOURGET.- Vivandière, sous le second Empire, au 1er régiment de tirailleurs algériens, elle fut blessée à trois reprises en Afrique, effectua dix-sept ans de service et participa à douze campagnes. Elle fut décorée de la médaille militaire par décret du 7 juin 1865.
BRADAMANTE.- Héroïne du Roland amoureux du poète italien Matteo Maria Boiardo et du Roland furieux de l'Arioste, sœur de Renaud de Montauban, c'est une courageuse guerrière armée de la lance d'Argail qui renverse tous ceux qu'elle touche.
BRETEUIL (Julienne de).- Histoire militaire des femmes : « En février 1139, Julienne de Breteuil, fille naturelle d’Henri Ier, roi d'Angleterre, défendait le château de Breteuil contre son père, et ce par ordre de son mari. Outrée contre le roi qui venait de livrer ses deux fils à l'un de ses ennemis, lequel avait eu la cruauté de leur mutiler le visage, elle eut recours à une ruse pour se garantir des suites d'un assaut qui eût tourné contre elle, attira son père à une entrevue et, comme il venait, tendit elle-même une baliste et projeta un trait sur lui. Le roi Henri eut le bonheur d'échapper ; il intercepta toute communication et obligea sa fille à se rendre. Pour punition il se borna à la contraindre à sortir du fort en se laissant glisser sans aucun soutien du haut des créneaux le long du talus de la muraille ; elle tomba dans l'eau glacée du fossé, mais sans se faire de mal, et parvint à s'échapper.”
BRÉVILLE (Louise-Marguerite de).- Héroïne française née en 1648, morte en 1673.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Elle descendait d’une vieille famille aristocratique. Soit goût de l’aventure, soit lassitude de la vie de province, elle quitta les siens et s'enrôla dans l'armée sous un déguisement masculin. Elle en fut chassée pour avoir tué un soldat en duel. Elle s'engagea ensuite dans la flotte de l'amiral d'Estrées qui guerroyait contre les Barbaresques. Séduit par son courage, l’amiral, qui avait percé sa vraie nature, lui confia le commandement d'une frégate, la Madeleine. Pendant la guerre de Hollande, elle fut mortellement blessée au cours d'un abordage avec l'escadre de l'amiral Ruyter ».
BRULON (Marie-Angélique-Josèphe).- Combattante française née en 1772 à Dinan (Côtes-du-Nord), morte en 1859 à Paris, aux Invalides. Elle accompagna à la guerre, en Corse, en 1791, son père et son mari, sergent des gardes françaises, qui furent tués. S'étant engagée, après avoir endossé l'uniforme de son mari, dont elle avait ôté les galons, elle combattit courageusement contre les rebelles corses et les Anglais jusqu'en 1798. Elle s'illustra particulièrement à la défense du fort de Gesco en 1794 et au siège de Calvi où elle fut grièvement blessée à la jambe par un obus. En 1798, elle fut la première femme à être admise à l'hôtel des Invalides de Paris. Nommée lieutenant honoraire en 1822, elle reçut en 1851 la croix de chevalier de la Légion d'honneur des mains mêmes du prince-président Bonaparte, futur Napoléon III. Surnommée “le caporal Liberté », son histoire a été rapportée en ces termes par Édouard de La Barre Duparcq dans son Histoire militaire des femmes :
« Son intelligence, sa résolution, son énergie apparurent surtout lors du débarquement des Anglais ; […] on la nomma sergent. C’est pourvue de ce grade qu’elle contribua à la défense du fort Gesco qui dominait la basse ville et le faubourg de Calvi. Placée dans le service de l’artillerie, vu le manque de soldats spéciaux, elle s’y mit avec dévouement, ayant près d’elle sa petite fille, âgée de deux ans, laquelle jouait au milieu des affûts et des boulets, à la condition de rentrer dans une cachette offerte par la muraille dès que l’assiégeant recommençait son feu. Quand les munitions des défenseurs s’épuisèrent, quand leur tir se ralentit, un assaut eut lieu par la brèche déjà existante ; Liberté, armée d’une hache, frappait à coups redoublés et plus d’un adversaire fut précipité par elle dans le fossé, jusqu’au moment où un stylet lancé avec adresse l’atteignit au bras droit. « Bah ! dit-elle, ce n’est qu’une égratignure, je n’ai que pour trois jours seulement à rester l’arme au pied. » Blessée, on trouva moyen de l’utiliser. Revêtue de ses habits de femme (il fallut vaincre sa répugnance pour les lui faire reprendre), elle sortit du fort et se rendit secrètement dans la ville, afin d’y chercher un fourgon chargé de munitions. Au lieu de ramener le fourgon, ce qui eût offert des difficultés dans une opération cachée, elle prit avec un groupe de soixante femmes corses, dont chacune portait des paquets de cartouches et, courant sous le feu ennemi qui éclata dès que cette manœuvre fut aperçue, elle parvint jusqu’au fort Gesco et y pénétra avec ses compagnes. On put recommencer le feu, mais cela dura deux jours à peine. Le fort abandonné, nos défenseurs se concentrèrent dans la ville ; après une nouvelle défense, prolongée autant que possible, Calvi se rendit. Les Français obtinrent d’être ramenés à Toulon et le sergent Liberté eut la satisfaction de rapatrier sa compagnie en France, ses officiers ayant été tués ou se trouvant à l’ambulance ; elle rapportait, il est vrai, pour dernier souvenir de son héroïsme une blessure à la jambe reçue pendant ces derniers jours. La veuve Brulon prit ensuite part aux dernières campagnes de la République et aux diverses guerres de l’Empire, s’y distingua et reçut cinq autres blessures. Louis XVIII la créa sous-lieutenant honoraire et, en 1851, elle reçut des mains du chef de l’État la décoration de chevalier de la Légion d’honneur. Son décès […] eut lieu à l’hôtel des Invalides, où l’on lisait sur la porte de sa chambre : Madame veuve Brulon, officier ».
BRUNEHAUT ou Brunhilde.- Reine mérovingienne née en 534 en Espagne, morte à Renève, près de Dijon, en 613, fille du roi wisigoth d'Espagne Athanagild.
Dictionnaire des femmes célèbres :
« Elle épousa Sigebert Ier à Metz, entre 566 et 568, devenant ainsi reine d'Austrasie (est de la France plus une partie de l’Allemagne). Elle eut très vite une grande influence sur son mari. Elle le poussa notamment à s'attaquer à son demi-frère, Chilpéric Ier, roi de Neustrie (ouest et nord-ouest de la France), dont la femme, Frédégonde, avait fait assassiner Galswinthe, sœur de Brunehaut. L’affrontement tourna à la catastrophe pour cette dernière : Sigebert fut assassiné par Frédégonde en 575 et Brunehaut fut reléguée à Rouen. Leur fils Childebert (cinq ans) fut proclamé roi d'Austrasie. Peu après, elle épousa Mérovée, l'un des fils de Chilpéric, lequel s'opposa à cette union en faisant exécuter Mérovée. Brunehaut s'installa alors à Metz où elle assura la régence de l'Austrasie au nom de Childebert II. S'opposant à la noblesse austrasienne qui souhaitait un rapprochement avec la Neustrie de Chilpéric Ier, elle travailla à une alliance avec la Bourgogne de Gontran (centre et sud-est de la France), Gontran ét ant l’oncle de Childebert II. Elle obtint gain de cause. Le traité d'Andelot prévoyait qu'en cas de disparition de Gontran ou de Childebert, l'héritage du décédé reviendrait au survivant (28 novembre 587). Le premier mourut en 592, de sorte que Childebert devint roi de Bourgogne et d'Austrasie ».
« La reine mère devenue toute-puissante se tourna ensuite contre la Neustrie d’autant plus volontiers que, par suite de la disparition de Chilpéric Ier en 584, le pouvoir était assuré par sa plus mortelle ennemie, Frédégonde. Celle-ci détenait la régence au nom de son fils Clotaire II. Cependant, à deux reprises, en 592 et en 596, les armées de Brunehaut furent vaincues par celles de Frédégonde. La mort de cette dernière en 597 laissa le champ libre à sa rivale. Entre-temps, Childebert II était mort (595), mais la reine mère continuait à assumer le pouvoir au nom de Théodebert II, son petit-fils. Elle décida d’en finir avec la Neustrie, poussa Théodebert II et son frère Thierry II, roi de Bourgogne depuis 595, à envahir les États de Clotaire II. Celui-ci fut vaincu et une partie de ses territoires annexée (599 ou 600) ».
« Quelque temps après, Brunehaut fut victime d'une révolution de palais et chassée par l'aristocratie austrasienne, traditionnellement favorable à la Neustrie. Elle se réfugia chez Thierry II, en Bourgogne, et le dressa contre Théodebert II. Aux environs de 612, le premier vainquit le second à Tolbiac : Théodebert fut remis à Brunehaut qui le fit disparaître. L'année suivante, Thierry mourait et Brunehaut se retrouvait une fois encore régente de Bourgogne et d'Austrasie, l'aîné de ses arrière-petit-fils, Sigebert II, étant âgé de douze ans. Là encore, elle rencontra l'hostilité de l'aristocratie. Pépin de Landen et l'évêque de Metz, Arnould, firent appel à Clotaire II. Ce dernier, depuis sa défaite de 599 ou 600, était parvenu à restaurer son pouvoir de manière spectaculaire. Il envahit l'Austrasie. Brunehaut se réfugia en Bourgogne, tenta de lever une armée et, finalement, fut faite prisonnière. Elle fut horriblement suppliciée pendant trois jours et mourut attachée à la queue d’un cheval ».
« Brunehaut, dont la figure émerge d’une manière singulière dans la « nuit » du haut Moyen Âge occidental, a été longtemps maltraitée par l’Histoire. On lui reconnaît aujourd’hui un génie politique et une envergure dont était dénuée Frédégonde, beaucoup plus sanguinaire et impulsive qu’elle. Elle aura travaillé sa vie durant à l’union de la Neustrie, de la Bourgogne et de l’Austrasie, soit à reconstituer le regnum Francorum qu’avait inauguré Clovis. Après elle, Clotaire II y parvint de manière fugitive et, bien plus tard, Charlemagne ».
BRUNORO (Bonna).- Paysanne de la Valteline enlevée par un officier parmesan, Pietro Brunoro, qu’elle accompagna, habillée en soldat, à la guerre. Devenue la femme légitime de son ravisseur, elle continua à combattre à ses côtés.
Histoire militaire des femmes : « Une paysanne de la Valteline mérite de terminer ce chapitre en prenant place à côté de la gloire pure et renommée de Jeanne d’Arc. Il s’agit de la bergère Bonne qui, rencontrée un jour par Pierre Brunoro, officier parmesan distingué, fut enlevée par lui. Il la faisait habiller en homme et elle le suivait à la chasse, à la guerre. Après avoir ainsi figuré dans les troupes de François Sforza et dans celles du roi de Naples, Alphonse, elle acquit de l’influence et fit donner à son amant par le sénat de Venise, le commandement des troupes de la sérénissime république. Touché de son dévouement et de son adresse, Brunoro épousa notre héroïne qui se distingua par son courage dans la lutte (1453) entre Venise et François Sforza, le premier souverain qu’elle eût servi. C’est elle qui dirigea, les armes à la main, l'assaut du château de Parano, près de Brescia, et le fit réussir. En récompense de cette honorable conduite, le sénat vénitien la chargea, conjointement avec son mari, de la défense de l'île de Négrepont, en Grèce, mission dont elle s'acquitta à merveille, car les Turcs n'entreprirent rien tant qu'elle fut présente. Ce fut le dernier acte de sa vie et de sa carrière militaire ; son mari succomba et fut enterré à Négrepont ; comme elle revenait veuve et triste, la Parque cruelle coupa également le fil de ses jours dans une ville de Morée (1466) ».
CAMILLE.- Reine légendaire des Volsques, fille du roi Métabus, particulièrement habile dans le maniement de l'arc et célèbre pour son agilité à la course (Virgile dit qu' « elle eût couru sur les épis sans en courber la tige »). Selon l'Énéide de Virgile (chant XI), elle vint au secours du roi des Rutules, Turnus, contre Énée. Elle fut tuée traîtreusement par Aruns. Voir Amazones.
CANDACE.- Reine d'Éthiopie qui fit irruption en haute Égypte et pilla tout sur son passage jusqu'à l'île du Nil Éléphantine (aujourd'hui Jazïrat Aswan). Les troupes romaines d’Auguste finirent par la battre et la repoussèrent dans ses États en 20 av. J.-C.
CANDALE (Marguerite de Foix de).- Héroïne française née en 1568, morte en 1593, épouse du duc d'Épernon.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Elle était l’épouse de Jean-Louis de Nogaret, duc d’Épernon, célèbre Gascon dont les hauts faits d’armes et la vie politique défrayèrent la chronique de son temps. À Angoulême, où le duc tenait le château avec une petite garnison, il fut assiégé par la populace que les ligueurs avaient soulevée contre lui. Les ligueurs avaient capturé sa femme en ville ; elle devait servir d’otage pour décider son mari à capituler. La duchesse, qui avait vu tous les hommes de son armée massacrés devant elle, fut conduite devant le château sous les cris de la populace et menacée des pires tortures si elle ne parvenait pas à décider la capitulation de son mari. Elle refusa avec hauteur, et son attitude si fière impressionna les ligueurs qui lui laissèrent la vie sauve. Elle figurait en gisante aux côtés de son mari sur le tombeau qui fut primitivement élevé dans l’église Saint-Blaise de Cadillac, gisants dont il ne reste que les têtes ».
CAPITAINE LOYS.- Voir Labé (Louise Charly) dite.
CASANOVA (Danièle, née Vincentella Périni).- Résistante française née à Ajaccio le 9 janvier 1908, morte au camp de concentration d'Auschwitz le 9 mai 1943.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Ses parents, des instituteurs corses, l’envoyèrent faire ses études à Marseille pour y préparer le concours d’entrée à l’École normale supérieure de Sèvres. Elle l’abandonna en début d’année et s’installa à Paris en 1927 car elle voulait devenir dentiste. Elle épousa Laurent Casanova en 1933. Tout en poursuivant ses études, puis ses activités professionnelles, elle milita dans les rangs de l’Union fédérale des étudiants, ensuite aux Jeunesses communistes. Elle y occupa des responsabilités nationales, internationales à partir de 1935 lorsqu’elle fut élue membre exécutif de l’Internationale de la Jeunesse communiste. L’année suivante, elle fonda l’Union des jeunes filles de France, dont le premier congrès se tint en décembre 1936 dans l’euphorie du Front populaire. Elle dota cette organisation d’un journal, Filles de France, et mena campagne pour différentes causes, entre autres en faveur des républicains espagnols. Engagée très tôt dans la Résistance, participant à des manifestations contre l’occupant et organisant, dans la clandestinité, des comités populaires féminins. Propagandiste très active, elle fut arrêtée à Paris le 14 février 1942, avec quatre-vingts membres du parti communiste. Transférée à la prison de la Santé, elle fut déportée à Auschwitz en janvier 1943. Elle y mourut du typhus. Le parti communiste a fait d’elle une de ses martyres ».
CATHERINE DE MÉDICIS.- Reine de France née le 13 avril 1519 à Florence, morte le 5 janvier 1589 à Blois. Fille du duc d’Urbino Laurent II de Médicis et de Madeleine de La Tour d’Auvergne, elle fut mariée en 1533 au futur roi de France Henri II. Après la mort de ce dernier et de son fils aîné, François II, elle assuma la régence du royaume pour son second fils, Charles IX, qu’elle continua à dominer lorsqu’il fut devenu majeur.
Histoire militaire des femmes : « En 1562, Catherine de Médicis mène le roi Charles IX au siège de Rouen « où, sans appréhender les coups de canon, que l’on tiroit de la ville, elle agissoit dans le camp avec un courage viril ; et par des langages qui tesmoignoient sa grande constance, elle animoit à bien faire, et les soldats, et les capitaines ». C’est Davila qui, au livre IIIe de son Histoire des guerres civiles de France, lui rend ce témoignage. Le même auteur nous montre ensuite la même reine, au siège de Bourges, entrepris après la soumission de Rouen, encourageant les soldats par sa présence, ordonnant la continuation de la batterie aussitôt que le roi de Navarre (père de Henri IV) eut été mortellement blessé, et faisant tirer jusques à deux mille coups de canon, ce qui amena une brèche suffisante. Même en tenant compte d’une certaine disposition à la flatterie envers sa protectrice chez l’historien précité, il ressort de ces deux faits que Catherine de Médicis ne craignait pas de se mêler aux actions de guerre, autant qu’une femme peut le faire ».
CAULAH.- Voltaire, Dictionnaire philosophique, au mot Amazones : « Lorsque le célèbre capitaine Dérar combattait en Syrie contre les généraux de l'empereur Héraclius, du temps du calife Abubéker, successeur de Mahomet, Pierre, qui commandait dans Damas, avait pris dans ses courses plusieurs musulmanes avec quelque butin ; il les conduisait à Damas ; parmi ces captives était la sœur de Dérar lui-même. L'histoire arabe d'Alvakedi, traduite par Ockley, dit qu'elle était parfaitement belle, et que Pierre en devint épris ; il la ménageait dans la route, et épargnait de trop longues traites à ses prisonnières. Elles campaient dans une vaste plaine sous des tentes gardées par des troupes un peu éloignées. Caulah (c'était le nom de cette sœur de Dérar) propose à une de ses compagnes, nommée Oserra, de se soustraire à la captivité ; elle lui persuade de mourir plutôt que d'être les victimes de la lubricité des chrétiens ; le même enthousiasme musulman saisit toutes ces femmes ; elles s'arment des piquets ferrés de leurs tentes, de leurs couteaux, espèce de poignards qu'elles portent à la ceinture, et forment un cercle, comme les vaches se serrent en rond les unes contre les autres, et présentent leurs cornes aux loups qui les attaquent. Pierre ne fit d'abord qu'en rire ; il avance vers ces femmes ; il est reçu à grands coups de bâtons ferrés ; il balance longtemps à user de la force ; enfin il s'y résout, et les sabres étaient tirés, lorsque Dérar arrive, met les Grecs en fuite, délivre sa sœur et toutes les captives ».
Antoine-Jean-François de La Croix, Anecdotes arabes et musulmanes : « Pierre, avec une partie de l’infanterie chrétienne, fond sur l’arrière-garde Musulmane, où étaient le bagage, les richesses, et les femmes des ennemis. Il s’en empare, et revient à Damas chargé de butin. Avant de rentrer dans la ville, il voulut examiner ses prisonnières. La beauté peu commune de Caulah, sœur de Dérar, fixa ses regards : il la choisit pour sa maîtresse, et destina les autres à ses officiers. Caulah était aussi courageuse que belle. Tandis que les vainqueurs étaient entrés dans leurs tentes pour se rafraîchir, elle assembla les compagnes de sa captivité : « Eh quoi ! servantes du Dieu de Mahomet, leur dit-elle, souffrirez-vous que ces barbares vous déshonorent ? Prétendez-vous devenir les esclaves et les concubines de ces idolâtres ? Où est votre courage ? Mourons, plutôt que d’être les objets de leur sacrilège lubricité. Mais, que dis-je, mourons ? Combattons pour notre honneur ; le Tout-Puissant saura nous secourir. Que chacune de vous saisisse un piquet de tente, et formez un cercle bien serré ; je vous donnerai l’exemple de la valeur ». À ces mots, elle avance contre un Grec, et lui casse la tête. On accourt au bruit pour en connaître la cause. Pierre fait environner ces intrépides amazones. Il les menace, elles le bravent ; il veut gagner Caulah, elle se rit de ses promesses. Enfin, on allait en venir aux coups, lorsque Caled et Dérar parurent. À leur aspect, Pierre veut prendre la fuite. Dérar, que le désir de recouvrer sa sœur anime, le joint et l’arrête. « Je vous rends Caulah, lui dit le capitaine Chrétien, c’est un présent que je fais à votre valeur ; c’est le gage de l’amitié que je veux contracter avec vous.- Seigneur, lui répondit Dérar, je vous rends grâces d’un si beau présent, et je l’accepte avec reconnaissance. Mais, pour vous prouver combien j’y suis sensible, je ne puis vous offrir que la pointe de cette lance, que je vous prie d’accepter ». En même temps il lui passe sa lance au travers du corps, délivre toutes les prisonnières, et revient chargé de riches dépouilles ».
CAVANAUGH (Christine, dite Kitt ou Mother Christian Ross).- Héroïne irlandaise née à Dublin en 1667, morte à Londres en 1739.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Fille d'un brasseur de Dublin, elle épousa un soldat, Richard Welsh, qui disparut brusquement. Au bout d’un an, ayant appris que son mari avait été enrôlé dans l'armée et envoyé en Flandre, elle réussit, travestie en homme, à se faire engager dans un régiment d'infanterie en partance pour les Pays-Bas. De là, elle fut versée dans le 2e régiment de dragons, les Scots Greys, et prit part vaillamment au siège de Namur en 1695. La paix signée, elle rentra en Irlande. Sept ans plus tard, toujours sans nouvelles de son mari, elle rejoignit les Scots Greys et, sans cesse sur la brèche, elle combattit à Nimègue, à Venlo, à Bleinheim. C’est alors qu’elle découvrit Richard Welsh. Toujours travestie, elle le suivit partout jusqu’au jour où, blessée à la bataille de Ramillies (1706), il fallut l’opérer et que l’on découvrit son identité. Elle ne put rester dragon mais, pour ne pas quitter son mari, elle travailla aux cuisines et participa ainsi à la bataille de Malplaquet où Welsh fut tué (1709). Peu de temps après, elle épousa un autre grenadier, Hugh Jones, qui mourut en 1710. Elle demanda alors à rentrer en Angleterre où la reine Anne Stuart lui octroya une pension. Elle fut inhumée à Westminster avec les honneurs militaires ».
CAVELL (Edith-Louisa).- Héroïne anglaise née à Swardeston (comté de Norfolk) en 1865, morte à Bruxelles en 1915. Infirmière à Bruxelles dans une clinique qui fut transformée en hôpital de la Croix-Rouge durant la Première Guerre mondiale, elle demeura à son poste malgré l'occupation allemande. Membre d'une organisation qui aidait les prisonniers alliés à gagner les Pays-Bas, elle fit ainsi évader deux cents hommes (Belges, Britanniques, Français). Arrêtée en août 1915, elle fut condamnée à mort par un tribunal militaire allemand et exécutée, malgré l'intervention de l'ambassade des Etats-Unis d'Amérique à Bruxelles. Conduite, en pleine nuit, dans une cour de sa prison, elle devait être exécutée par un peloton de six hommes, sous la conduite d'un officier. Elle refusa de se laisser bander les yeux, mais, quand elle vit s'abaisser les canons des fusils, elle eut une défaillance et s'affaissa à terre, évanouie. L'officier s'avança alors et accomplit la sentence.
Commentant l'événement, le New York écrivit : « Mieux eût valu pour l'Allemagne perdre un corps d'armée que d'avoir fait ainsi exécuter miss Cavell ».
CÉLÈNE.- Une des Amazones qui combattirent contre les Grecs d’Hercule.
CÉZELI (Constance de).- Issue d'une ancienne et riche famille de Montpellier, épouse de Barri de Saint-Aunez, gouverneur de Leucate, elle défendit vigoureusement cette place contre les Espagnols en 1570.
Histoire militaire des femmes : « Son mari venait d'être fait prisonnier par les Espagnols, quand ceux-ci, joints aux ligueurs, vinrent assiéger Leucate ; ayant le gouverneur entre leurs mains, ils espéraient que la forteresse se rendrait. C'était compter sans la dame de Barri. Elle assembla la garnison, fit appel aux habitants, saisit une pique, se mit à la tête des assiégés, repoussa vigoureusement les assaillants. Ce succès lui coûta cher. « Rendez-vous, lui fit dire l’adversaire, ou nous pendons votre mari ». Émue, mais conservant sa force d’âme : « J’ai offert et j’offre encore tous mes biens, qui sont considérables, pour ma rançon, mais je ne rachèterai pas par une lâcheté la vie d’un époux qui aurait honte d’en jouir à ce prix ». Une aussi belle réponse électrisa les défenseurs, et une seconde fois les efforts des Espagnols échouèrent. Avant de se retirer, l'ennemi tint parole : il mit Barri à mort. À cette vue la garnison entière demanda le supplice du seigneur de Loupiau(*), ligueur prisonnier du parti protestant ; mais Mme de Saint-Aunez s'opposa généreusement à cette demande, ne voulant pas user de représailles. Henri IV applaudit à un si beau caractère(**), et signa pour l'héroïne un brevet qui lui octroyait le gouvernement de Leucate, avec la survivance de cet emploi pour son fils ».
(*) De Loupine, suivant un autre auteur.
(**) « Élevée et nourrie dans un état corrompu, Constance de Cézéli avait eu d’autant plus à combattre, que son éducation avait probablement été dirigée à lui inspirer des sentiments pour un époux, qui d’ailleurs ne ressemblent jamais à ceux qu’une mère éprouve pour un fils » (Considérations sur l’influence des mœurs dans l’état militaire des nations, par l’auteur d’Azémor, Londres (Paris), 1788, in-8e, p. 64).
CHAÏDO.- Dans les Mémoires du colonel Voutier sur la guerre actuelle des Grecsques (Paris, Bossange, 1823), il est question d'une femme grecque, Chaïdo, qui combattit lors de la guerre d'indépendance des Grecs contre la Turquie : « La belle Chaïdo, se jetant dans la mêlée, ne rappelle-t-elle pas les temps antiques ? Son pied était ferme, ses coups toujours sûrs ; elle portait aux doigts trois anneaux enlevés à des Turcs qui avaient succombé sous son bras. Son époux vainqueur tombe à ses côtés. Sa chute apporte un mouvement d'hésitation chez les compagnons qui l'entourent : Chaïdo, toujours elle-même, fait un signe imposant aux Palicaris, jette son tablier sur le corps du guerrier, s'élance en avant, et la victoire est achevée. Le sang du dernier musulman est offert en holocauste aux mânes du brave ».
CHAPUY (Reine).- On peut lire dans L'intermédiaire des chercheurs et curieux (18e année, Paris, 1885), sous la plume d'un certain Cottreau : « Je retrouve dans des copies prises aux Archives nationales le document suivant :
« 24e Régiment de cavalerie, Cie de Yvendorff.
« Nous commandant dudit régiment, certifions à qui il appartiendra, que la citoyenne Reine Chapuis dite Chapuy, fille de Marie-Anne Goujon et de Amédée Chapuy, née le 12 mai 1776, à Versailles, dépt de Seine-et-Oise, taille de 5 pieds 2 pouces 6 lignes, est entrée au corps le 19 février 1793 et qu’elle s’y est toujours comportée en brave militaire et en vraie républicaine.
« En foi de quoi, fait à Beauvais, le 2 nivôse an II. Signé : GURY.
« 24e Régiment de cavalerie. Congé militaire.
« Nous soussignés, certifions avoir donné congé absolu à la citoyenne Reine Chapuy, dit Chapuy, entrée en qualité de cavalier au 24e régt, Cie d’Yvendorff, native de Versailles, âgée de 17 ans et demi, taille de 5 pieds 2 p. 6 l., cheveux et sourcils blonds, yeux bleus, visage ovale et gravé de petite vérole, nez court, bouche moyenne, et après avoir reconnu son sexe, lui avons permis conformément à la loi de se retirer où bon lui sembleroit.
« Fait à Beauvais, le 2 nivôse an 2.
« La citoyenne dénommée ci-dessus a servi audit régiment depuis le 19 février 1793 jusqu’à ce jour avec honneur, exactitude et probité. Elle est partie avec différents détachements pour l’armée, où elle a rempli ses devoirs militaires avec une bravoure peu commune et a donné des marques non équivoques de son civisme ».
« Suivent les signatures du commandant, du commissaire des guerres et des officiers.-Arch. Nationales, c II, cote 983 ».
CHEVALIER BALTHASAR.- Voir Premoy (Geneviève).
CHEVALIER DU HOUSSAY.- Voir Houssay (Louise-Françoise-Claudine du).
CHIMÈNE.- Jimena Díaz était l'épouse de Rodrigo Díaz de Bivar, dit le Cid Campeador, et la fille du comte Lozano de Gormaz. À la mort de son époux en 1099, elle défendit héroïquement Valence contre les Maures, mais sans pouvoir la sauver. Elle se retira au monastère de Cardeña.
CIA.- Histoire militaire des femmes : « Nous retrouvons en ce XIIIe siècle un acte militaire accompli par une femme italienne. Nous voulons parler de Cia, épouse du tyran de Forli, qui défendit longtemps Césène, et cela contre les troupes du légat, pendant que son mari combattait dans Forli. Elle avait répondu de la place qu’elle gardait, mais sans pouvoir tenir sa promesse, même en renfermant avec elle dans la citadelle les notables de la ville, ceux surtout qui lui étaient hostiles, afin d’engager l’adversaire à ne pas détruire par son feu la tour qui les renfermait ».
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Cia, femme d’Ordelaffi, tyran de Forli dans le 14e siècle, était aussi brave que son mari. Au milieu des troubles qui agitaient alors l’Italie, Ordelaffi commandait dans Forli, et Cia gouvernait Césène. C’étaient les deux places d’armes d’où ils bravaient leurs adversaires. Elles furent attaquées en même temps. Ordelaffi écrivit à sa femme pour l’exhorter à se bien défendre ; elle lui répondit : « Ayez soin de Forli, je réponds de Césènes… » Elle aurait tenu parole, malgré les forces du légat qui l’assiégeait, si Ordelaffi n’eût encore écrit à Cia de faire décapiter Jean Zaganella, Jacques Bastardi, Palezzino et Bertonuccia, quatre Césénois qu’il soupçonnait d’être guelfes, c’est-à-dire favorables au pape. Cia n’obéit point à cet ordre : elle trouva les accusés innocents, et d’ailleurs elle craignait que leur mort ne causât quelque révolte. Les quatre proscrits, ayant su le danger qu’ils avaient couru, se formèrent un parti avec lequel ils forcèrent Cia à se renfermer dans la citadelle. Cette femme irritée fit couper la tête à deux confidents de son mari, qui l’avaient dissuadée de se défaire des quatre Césénois. Le légat, voyant que cette héroïne faisait une forte résistance dans la citadelle, la fit miner. Cia, pour retarder la prise de la place, s’avisa d’y enfermer un grand nombre de Césénois dont elle se défiait le plus. Le légat, allant un jour visiter les travaux, fut surpris de voir plus de cinq cents femmes échevelées se jeter à ses pieds avec de grands cris, et demander grâce pour leurs maris et leurs parents, qui allaient périr sous les ruines de la citadelle. Le légat sentit l’artifice, et en profita pour presser la reddition de la place, qui en effet ne résista plus. Il sauva la vie à ceux qu’on avait mis dans la tour, et Cia fut sa prisonnière ».
CLÉLIE.- Histoire militaire des femmes :
« L’histoire militaire des femmes romaines doit commencer par le trait de Clélie, qui montra une audace virile à la fin du siège mis devant Rome par Porsenna, roi de Clusium et allié de Tarquin le Superbe, naguère expulsé de la ville éternelle ; nous joindrons seulement à son nom celui de Valeria, fille du consul Publicola. Voici le fait tel que le rapportent les historiens ».
« Tarquin le Superbe ayant froissé Porsenna que les Romains voulaient prendre pour arbitre entre eux et lui, ce monarque ne tarda pas à conclure la paix. On lui donna pour otages dix jeunes gens et dix jeunes filles ; Valeria, fille du consul Publicola, et Clélie, se trouvaient au nombre de ces dernières. Au camp du roi de Clusium ces jeunes filles jouirent d’une certaine liberté, car Porsenna était confiant dans la parole donnée et avait même renvoyé une partie de son armée. Un jour elles allèrent se baigner. Au milieu de leurs jeux aquatiques elles remarquèrent l’absence de toute surveillance à leur égard ; Clélie proposa de retourner à Rome. Elles le firent en franchissant le Tibre à la nage ; mais, à peine arrivées, le consul les blâma d’avoir manqué à la foi jurée, les fit reprendre et reconduire. Tarquin les attaqua en route ; heureusement elles possédaient une escorte. Une escarmouche s’engagea, au milieu de laquelle Valeria franchit bravement les rangs ennemis et regagna la première, accompagnée de trois servantes, son poste d’otage qu’elle n’aurait jamais dû quitter. Le fils de Porsenna vint au secours des jeunes romaines, et toutes furent ainsi ramenées au camp de son père. À cette nouvelle, ce dernier les fit appeler et demanda laquelle avait donné l’exemple aux autres et déterminé leur fuite ; son ton était sévère, on n’osait généralement répondre : ”C’est moi”, dit simplement Clélie. Le roi de Clusium, charmé de sa décision, lui fit don d’un cheval magnifiquement harnaché et la renvoya ainsi que toutes ses compagnes(*). Était-ce simple hommage à des qualités viriles et surtout à une franchise louable et méritante, ou bien Clélie avait-elle accompli quelque action courageuse dont l’histoire ne nous a rien retracé ? J’inclinerais volontiers vers cette seconde supposition ».
(*) PLUTARQUE, Vie de Publicola et Actions courageuses des femmes, § consacré à Valeria et Clélie.
CLÉOPÂTRE VII.- Dernière reine d'Égypte, née à Alexandrie en 69 av. J.-C., fille de Ptolémée XII, dit Aulète le joueur de flûte, sœur et épouse de Ptolémée XIII Philopator, qui la chassa du trône. César, dont elle était devenue la maîtresse, la rétablit dans le pouvoir. Après la mort de César, elle épousa Antoine. La politique d'annexion suivie par Antoine et Cléopâtre lui paraissant menacer l'hégémonie romaine en Méditerranée, Octave (le futur empereur Auguste) leur déclara la guerre et leur livra bataille à Actium (aujourd'hui Akra Nikolaos), au sud de Corfou. Alors que la bataille semblait indécise, Cléopâtre et ses soixante vaisseaux quittèrent le champ de bataille, abandonnant Antoine à son triste destin. Ce dernier s'étant suicidé, Cléopâtre tenta vainement de séduire Octave et se suicida à son tour, en 30 av. J.- C., en se faisant mordre par un aspic.
Dans son ouvrage consacré à Aspasie, Cléopâtre, Théodora (Paris, Calmann Lévy, 1890), Henry Houssaye décrit ainsi la défection de Cléopâtre à la bataille d’Actium : « Succès et échecs se compensaient. Dans les deux partis on combattait avec une égale fureur et la victoire restait incertaine. La nervosité de Cléopâtre allait tout perdre. Depuis plusieurs heures, elle était dans la fièvre et dans l’angoisse. Du pont de l’Antoniade, elle suivait anxieusement des yeux les mouvements des vaisseaux. D’abord elle avait espéré la victoire. Maintenant, épouvantée par le tumulte et les clameurs, elle ne souhaitait plus que fuir. Elle attendait avec une impatience, qui s’accroissait de minute en minute, le signal de la retraite. Soudain, elle voit l’aile droite s’éloigner vers la côte d’Épire, l’aile gauche gagner le large, et le centre, le centre qui la protège, attaqué, abordé, désuni, rompu, percé par les liburnes romaines. Alors, « pâle de sa mort prochaine », -pallens morte futura(*)- n’écoutant plus que sa peur, Cléopâtre fait hisser les voiles, et avec ses soixante vaisseaux elle passe au travers des combattants et s’enfuit vers la haute mer(**). Au milieu du combat, Antoine aperçoit le mouvement de l’escadre égyptienne. Il reconnaît les voiles de pourpre de l’Antoniade. C’est Cléopâtre qui fuit, en lui enlevant au moment décisif sa puissante réserve. Mais la reine n’a pu ordonner la retraite. C’est lui seul qui en devait donner le signal. Il y a une méprise, un faux mouvement, une panique. Antoine fait à son tour hisser les voiles de sa galère, il s’élance à la suite de Cléopâtre. Il ramènera les vaisseaux égyptiens et rétablira les chances de la bataille. Mais, avant de rejoindre l’Antoniade, le malheureux a réfléchi. Cléopâtre l’a abandonné par lâcheté ou par trahison. Il ne ramènera à Actium ni elle ni ses vaisseaux. Il pense à retourner au combat, qui n’est plus qu’une déroute, pour se faire tuer avec ses soldats. Mourir sans revoir Cléopâtre ! il ne le peut pas. Une force fatale l’entraîne sur les traces de cette femme. Il aborde l’Antoniade, mais alors la honte de lui-même l’envahit. Il refuse de voir la reine. Il va s’asseoir à la proue du vaisseau et y reste trois jours et trois nuits, la tête dans ses mains(***) ».
(*) Virgile, Æn., VIII, 709.
(**) Velleius Paterculus, II, 83 ; Plutarque, Anton. LXXXIII ; Florus, IV, 11 ; Dion, L, 33.
(***) Velleius Paterculus, II, 85 ; Plutarque, Anton. LXXIII, LXXIV ; Florus, IV, 11 ; Dion, L, 33.
Représentations artistiques :
- « Le Banquet de Cléopâtre » : fresque de Tiepolo représentant la reine Cléopâtre recevant Antoine à dîner ;
- « Le Débarquement de Cléopâtre à Tarse » : tableau de Claude le Lorrain.
CRATÉSIPOLIS.- Femme d'Alexandre, tyran de Sycione.
Histoire militaire des femmes : « Diodore de Sicile(*), au chapitre LXVII de son dix-neuvième livre, nous montre, au milieu des luttes suscitées par la mort du grand Alexandre, une femme de tête, dans la personne de Cratésipolis, femme d’Alexandre, lui-même fils de Polysperchon(**). Cet Alexandre résistait à Cassandre et, en occupant l’isthme de Corinthe, l’avait empêché de pénétrer dans le Péloponèse ; il partit ensuite de Sycione avec son corps de troupes, et fut assassiné en route. Aussitôt sa femme prit le commandement de ses troupes dont elle était très aimée, et sa bienfaisance envers les soldats, rapporte notre auteur, les soulagements qu’elle apportait au sort des malheureux, les soins qu’elle prenait des indigents lui avaient concilié l’affection générale de l’armée : elle était de plus d’une grande habileté pour le gouvernement et douée d’un courage fort au-dessus de celui qu’on doit attendre d’une femme. Les Sycioniens essayèrent de secouer le joug ; elle marcha contre eux, livra bataille, leur tua beaucoup de monde ; aussitôt sa victoire, elle fit arrêter et mettre en croix une trentaine des plus séditieux, puis elle gouverna souverainement Sycione (315 av. J.-C.) jusqu’à sa mort qui arriva l’année d’après, suivant les uns ; jusqu’à l’an 308, où elle livra la ville à Ptolémée, suivant les autres ».
(*) Cet écrivain admet des Amazones parmi ses contemporaines, mais sans rien préciser, se bornant à dire : « Les Amazones de la Lybie l’emportent en bravoure, dans un degré non moins élevé, sur toutes les femmes de nos jours auxquelles on puisse les comparer » (III, LII).
(**) Polysperchon, général d’Alexandre le Grand, remplaça comme régent Antipater, fut attaqué par Cassandre, fils de ce dernier, et réduit à la possession de quelques villes du Péloponèse.
CROS (Perrine).- Femme soldat qui appartint aux chasseurs à pied de la Garde, sous le second Empire. Blessée à la bataille de Solferino, en Lombardie, le 24 juin 1859 (victoire du général Bazaine sur les Autrichiens), elle fut décorée le lendemain de la médaille militaire.
CYNNANE.- Fille de Philippe de Macédoine et sœur d'Alexandre de Grand.
Histoire militaire des femmes : « Une sœur d’Alexandre le Grand mérite plus ample attention. Elle se nommait Cynnane. Exercée aux armes dès son enfance, elle apprit aussi l'art de conduire les armées. L’orateur et écrivain militaire grec Polyen assure qu'elle livra bataille aux Illyriens et tua elle-même leur reine d'un coup sur la nuque ; […] Cynnane, devenue veuve du fils de Perdiccas, ne voulut pas se remarier et accoutuma sa fille Eurydice au poids des armes. Après la mort d'Alexandre elle franchit le Strymon malgré Antipater, traversa également l'Hellespont, mais échoua contre l'armée macédonienne après avoir vainement essayé de la ramener, et mourut noblement en digne sœur du grand conquérant(*) ».
(*) Polyen, VIII, 60.
DAGOBERT (Madeleine).- Femme soldat qui appartint, sous le second Empire, au 2e régiment de zouaves. Elle participa, le 4 juin 1859, à la bataille de Magenta, en Lombardie (victoire du maréchal Canrobert sur les Autrichiens) et fut décorée de la médaille militaire par décret du 17 juin 1859.
DAME AUX JAMBES D’OR.- Histoire militaire des femmes : « Dans la seconde croisade l’empereur d’Allemagne Conrad se rend en Syrie suivi par une troupe de femmes armées comme des chevaliers ; le chef de cette troupe portait un surnom, celui de la dame aux jambes d’or, à cause des éperons dorés et sans doute aussi des autres dorures qui ornaient la culotte qu’elle portait ; on ignore son nom véritable. Le comte de Poitiers avait également emmené un essaim de jeunes filles ».
DAURANNE (Marie).- Vivandière qui sauva un soldat de la noyade pendant la campagne d'Italie.
Histoire militaire des femmes : « En 1797, au passage de la Piave, par la division Guieu (le 12 mars), un soldat, entraîné par le courant, allait se noyer, quand une vivandière de la 51e demi-brigade, Marie Dauranne, se jeta à la nage et le sauva. Le général Bonaparte lui fit aussitôt présent d'un collier d'or, auquel on suspendit plus tard une couronne civique sur laquelle se trouvait gravé le nom du fantassin qui lui devait la vie ».
DÉBORAH.- Prophétesse juive qui, en 1285 av. J.-C., aida Barach à triompher des Cananéens et chanta ensuite, en action de grâces, un cantique demeuré célèbre.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Déborah était mariée à Lappidot et rendait la justice dans les territoires d’Éphraïm. Israël était alors menacé par les Cananéens qui tentaient de réduire son peuple en esclavage ou de le chasser du pays. Déborah, inspirée par Dieu, ordonna à Baraq, chef de la tribu d'Éphraïm, de rassembler dix mille hommes et de combattre Yavîn, roi de Canaan, et son général Sisera. Elle prédit la victoire, pourtant improbable. Baraq accepta à condition que Déborah marchât avec lui contre les ennemis. Elle l'accompagna et, après la victoire d’Israël, elle chanta un célèbre cantique (Juges, V), l'un des textes les plus beaux et les plus anciens de la Bible. Israël vécut en paix pendant quarante ans, et Déborah continua à rendre la justice jusqu’à sa mort ».
DÉJANIRE.- Une des Amazones qui combattirent contre les Grecs d’Hercule.
DERBY (Charlotte de la Trémouille, comtesse de).- Femme du comte Jacques-Stanley de Derby, qui participa courageusement à la guerre civile anglaise, fut fait prisonnier à la bataille de Worcester, qui vit la victoire du général Charles Fleetwood, collaborateur d’Oliver Cromwell, sur le roi d'Angleterre, d'Écosse et d'Irlande Charles II le 3 septembre 1651, et fut décapité. Après avoir défendu vigoureusement Latham-House, la comtesse se maintint avec autant de courage dans l'île de Man, où elle se comporta quasiment en reine, et défia les partisans de Cromwell. Elle fut probablement la dernière à leur céder en Angleterre et demeura prisonnière jusqu'au rétablissement de Charles II. Elle mourut en 1664.
DÍAZ (Jimena).- Voir Chimène.
DIHYA.- Reine berbère, dite Al-Kahîna, légendaire “reine des Aurès” qui fut battue par les Arabes, commandés par Hassan Ibn en Nu'man, à la bataille de Tabarka (ville du nord de la Tunisie) vers 704-705. Dihya fut décapitée après la bataille.
Dans ses Recherches sur l'origine et les migrations des principales tribus de l'Afrique septentrionale et particulièrement de l'Algérie (Paris, Imprimerie impériale, 1853), Antoine-Ernest-Hippolyte Carette nous dit :
« Cette héroïne, nommée généralement Kahîna, et quelquefois Dâmia, appartenait à l'une des plus grandes familles africaines. Elle commandait d'abord dans le Djebel-Aourès ; mais, après la défaite et la mort de Ksila, elle avait été reconnue par toutes les tribus berbères. Les Romains eux-mêmes (ce qui en restait encore) s'étaient mis sous sa protection. Aussi, lorsque H’acen-ben-No’mân, débarrassé des Grecs, demanda aux habitants du pays quelle était la plus grande puissance indigène, ils n'hésitèrent pas à lui désigner Kahîna ».
« H’acen se mit en campagne et rencontra l'armée berbère sur les bords de l'Ouad-Nîni. Il fut mis en déroute complète et se retira précipitamment dans la direction du sud-est. Poursuivi jusqu'au-delà du territoire de Gabès, il continua sa retraite vers le sud et ne s'arrêta que dans le désert de Barka, devenu le champ d'asile des armées arabes. Un grand nombre de prisonniers arabes tombèrent au pouvoir de Kahîna. Elle eut pour eux les plus grands égards et les rendit à la liberté, à l'exception d'un tout jeune homme, nommé Khâled-ben-Iezid-el-Kîci, qu'elle retint auprès d'elle pour le faire élever avec ses deux fils et que, pendant toute sa captivité, elle combla de soins maternels ».
« H’acen, à la tête des débris de l'armée arabe, resta cinq ans dans le désert de Barka. Enfin, en 74 de l'hégire, il reçut de nouvelles troupes et put reparaître dans le Maghreb. Des émissaires envoyés secrètement auprès de Khâled-ben-Iezid obtinrent de lui des renseignements sur la situation des peuples berbères et sur les moyens les plus avantageux de les attaquer ».
« À la nouvelle du mouvement de l'armée arabe, Kahîna, demeurée depuis sa victoire maîtresse de l’Afrique, prit une de ces résolutions violentes dont l’histoire moderne offre un exemple célèbre. Convaincue que l'attrait du pillage était le seul mobile des Arabes, et que l'Afrique les séduirait moins si elle était moins riche et moins belle, elle donna l'ordre de tout dévaster. Cet ordre fut exécuté autant qu'il pouvait l'être ; et, pendant quelques mois, l'exaltation du patriotisme africain commença cette œuvre de destruction que le vandalisme des Arabes devait continuer plus tard sans interruption pendant des siècles ».
« Les historiens arabes s’accordent à dire que, à cette époque, l’Afrique, depuis Tripoli jusqu’à Tanger, offrait un réseau continu de villages et de vergers ».
« La population romaine, animée d'un amour beaucoup moins farouche de l'indépendance, se détacha alors du parti de Kahîna et vint implorer le secours du général arabe contre les excès du patriotisme berbère ».
« Le moment décisif approchait ; avant d'engager une lutte dont elle pressentait peut-être l'issue, Kahîna fit venir ses enfants et les envoya au général arabe avec Khâled-ben-Iezid qui, jusqu'à ce moment, était resté auprès d'elle ».
« Enfin, les deux armées se trouvèrent en présence : cette fois, la victoire resta aux Arabes. Kahîna périt les armes à la main. Sa tête fut envoyée au khalife 'Abd-el-Mâlek ».
DOMINICA (Annia).- Fille du patrice Pétrone, épouse de l'empereur Flavius Valens, qui battit les Goths en 378.
Histoire militaire des femmes : « Douée d’un esprit opiniâtre, ainsi que d’un caractère violent et cruel, se distingua par sa défense de Constantinople contre les Goths, qu'elle repoussa, alors qu'ils arrivaient glorieux d'avoir défait son mari près d'Andrinople et de l'avoir brûlé dans une chaumière ».
DOUROVA (Nadejda).- Fille d'une noble famille russe qui, en 1806, profita du passage dans sa ville d'un régiment de Cosaques pour s'enrôler après avoir coupé ses cheveux et s'être déguisée en homme.
Histoire militaire des femmes : « Nous retrouvons dans la campagne de Russie, sous Smolensk et à la bataille de la Moskowa, une guerrière russe, qui déjà, en 1807, avait fait contre nous la campagne de Prusse et figuré dans les combats de Gutsstadt et de Halsberg, de même qu’en 1813 elle se distingua aux sièges de Modlin et de Hambourg. Il s’agit de la demoiselle Nadedja Dourova entrée au service à quatorze ans, retraitée à vingt-quatre ans en 1817(*).
(*) Morte en 1866, à Yelabouga (gouvernement de Viatka).
DSINGU.- Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Héroïne du Japon, accompagna son époux, l'empereur Tsiun-ti, dans la conquête de la Corée, l’an 204. Ce prince étant mort au milieu de ses victoires, Dsingu en poursuivit le cours, réduisit toute la Corée sous son obéissance, et donna des lois sages au Japon ».
DU GUESCLIN (Julienne).- Histoire militaire des femmes : « Julienne du Guesclin, sœur de Bertrand du Guesclin(*),repoussa en 1361 une surprise contre le château de Pontorson, habitation de son frère, mais qu’il avait momentanément abandonné pour aller en Poitou faire le siège du château d'Essay. Cette surprise était tentée par un capitaine anglais du nom de Felleton, récemment battu et fait prisonnier par Du Guesclin, et laissé par lui dans son château de Pontorson gardé seulement par quelques archers et ses domestiques ; mais Felleton, ayant reçu la somme exigée pour sa rançon, venait d'être mis en liberté par la dame Du Guesclin qui exerçait le commandement dans la forteresse en l'absence de son mari. Connaissant le fort et le faible du château, sachant le peu de monde qui le gardait, ayant une connivence dans la place par une jolie chambrière devenue son affidée pendant sa captivité et qui lui avait promis de lui en faciliter l'accès, il semblait posséder toutes les chances en sa faveur, et comptait même sur la frayeur que sa tentative exercerait sur la châtelaine et sa famille. À peine ses deux cents hommes, rassemblés à la hâte, se disposaient-ils à suivre sur l'échelle apportée en lieu sûr les trois plus audacieux d'entre eux qui se trouvaient près du sommet du mur prêts à pénétrer sur le rempart, qu'une main ferme et hardie saisit le haut de l'échelle, l'éloigna vivement de la muraille et, la faisant tournoyer, lança dans l'espace nos trois téméraires. C'était la main de Julienne du Guesclin, qui, ayant entendu quelque bruit, s'était levée et habillée à la hâte ; elle sonna la cloche d'alarme, les habitants accoururent aux créneaux, et Felleton à cette vue fut obligé de renoncer à son coup de main et de se retirer. Comme il se retirait, il rencontra Du Guesclin qui revenait d'Essay, et subit un nouvel échec. Ramené prisonnier dans ce château de Pontorson dont il espérait naguère de se rendre maître, il reçut ce compliment de Tiphaine Raguenel : «Ah ! seigneur, c’est trop d’avoir été vaincu deux fois en douze heures, une fois par la sœur, une fois par le frère, et votre bravoure a été cette nuit cruellement mise en défaut ». […] Julienne du Guesclin dont il est ici question était, au moment de son exploit, religieuse de Saint-Sulpice de Rennes, et devint plus tard supérieure ou abbesse de Saint-Georges dans la même ville. Un auteur, et c’est ici que la légende intervient, prétend qu’un songe inspiré l’avertit à temps de l’entreprise du capitaine anglais contre le château de Pontorson ; en plein XIVe siècle l’apparition de la légende est encore de mise ».
(*) On attribue souvent cet exploit à Julienne Raguenel, sœur puînée de Tiphaine Raguenel, femme de Du Guesclin.
On peut lire dans Le magasin pittoresque (publié sous la direction d’Édouard Charton, 32e année, Paris, 1864) :
« Bertrand Duguesclin, qui fut un des plus grands hommes de guerre du moyen âge, fut aussi un des plus honnêtes hommes de son siècle. Sa valeur était un patrimoine de famille, et tous ceux qui l’entouraient étaient animés de son courage et de sa loyauté. Les chroniqueurs rapportent de sa sœur un trait qui prouve qu’elle n’était pas moins brave que lui, et qu’elle n’eût pas été moins redoutable aux ennemis de son pays si elle avait porté la cuirasse et l’épée ».
« Duguesclin, dans les rares moments où il goûta un peu de repos, habitait, avec sa femme Tiphaine Raguenel, le château de Pontorson en Bretagne. C’était là qu’il enfermait et faisait garder les prisonniers dont il attendait la rançon. L’un d’eux, un Anglais nommé Felton, pendant sa captivité s’était ménagé des intelligences dans la place. Quand il eut recouvré sa liberté, il profita de l’absence du châtelain pour tenter une escalade. C’est alors que Julienne, sœur de Duguesclin, avertie, disent les chroniques, par un songe, donna l’alarme et, saisissant elle-même une épée, se jeta au-devant des ennemis en poussant le cri de guerre de Notre-Dame Duguesclin ! qui avait tant de fois mis en fuite les Anglais et les partisans de Montfort.
À ce nom redoutable, aux coups de cette épée,
Qui dans le sang breton fut tant de fois trempée,
L’audacieux Anglais, d’épouvante glacé,
Tombe ; un autre soldat par sa chute est poussé,
Et sur son frêle appui le rang entier chancelle.
Julienne avec effort saisit la haute échelle,
La renverse, et la voit éclatée en débris.
Mais l’alarme est donnée……….
« Ces vers sont de Mme Amable Tastu, qui a écrit un poème sur cet épisode de la vie de Duguesclin et qui l’a inséré dans ses Chroniques de France, publiées en 1829 ».
EGEA.- Reine des Amazones qui passa de la Lybie en Asie, à la tête d'une armée, et vainquit Laomédon, roi de Troie. Après avoir fait un immense butin, elle périt dans un naufrage en repassant la mer pour retourner dans son pays.
ELGIE-BEN-BOISIS (Ben-Nazer).- Princesse algérienne du début du XVIIIe siècle.
Histoire militaire des femmes : « Elle vint en aide à son père, nommé le sultan, c’est-à-dire le chef, Boisis, lequel avait conquis une grande autorité et en imposait même aux Turcs, mais qui fut enfin vaincu par le bey de Constantine ; comme les troupes de son père faiblissaient et parlaient de se soumettre, elle se para de ses plus beaux vêtements, monta à cheval, appela ses parentes, ses amies, ses voisines, les fit prendre une monture, et les harangua ainsi : « Puisque ces hommes n'ont pas le courage d’aller contre les Turcs, vendons nous-mêmes chèrement notre vie et notre honneur, et ne restons plus avec ces lâches ». En partant elle dit aussi aux guerriers : « Enfants de Nazer, ne me suivrez-vous pas ? » Cette conduite, l'énergie dont elle faisait preuve, réchauffa les esprits ; les Turcs furent vigoureusement assaillis, battus, dépouillés de leur butin, et leur chef fait prisonnier ».
ÉLIÉ (Adélaïde).- « Matelote » ayant pris part, juste avant la Révolution française, à des campagnes maritimes de D'Estaing et de De Grasse.
Histoire militaire des femmes : « Échappée de la maison paternelle à l'âge de onze ans, dans le but de se soustraire aux mauvais traitements d'une belle-mère, elle était arrivée de la ville de Serre (en Gapençois) à Marseille, et, après avoir mendié plusieurs jours, avait troqué chez un fripier ses habillements de fille contre de mauvais vêtements de garçon. Elle s'engagea alors au titre de sous-mousse sur le vaisseau le Glorieux. Là, elle s’acquitte à merveille de ses fonctions, combat avec intrépidité, reçoit trois coups de feu, dont l’un lui casse le bras, dont les deux autres l’atteignent à la même jambe. Rien ne la rebute, elle cache son sexe et le cache encore en Angleterre, où le sort de la guerre la conduit bientôt comme prisonnière. À la paix elle revient en France et y est reconnue pour une femme. Elle prit sa retraite à dix-sept ans, avec la demi-solde de matelot ».
ELLIS (Madame).- Histoire militaire des femmes : « Femme du colonel Ellis, qui remplit avec distinction dans cette guerre [la guerre de Sécession] les fonctions d’aide de camp. En septembre 1861, elle apporta dans la ville de Jefferson les dépêches du général Hunter, montée sur un superbe cheval, habillée militairement, suivie de deux ordonnances, et après avoir franchi sans repos 45 milles en dix heures ; c’était aussi une insurgente attachée au premier régiment de cavalerie de Missouri ».
EMMA.- Femme de Lothaire, fils du roi de France Louis IV d'Outre-mer, qui se distingua en 985 en défendant Verdun. Assiégée par des forces nombreuses, elle résista suffisamment longtemps pour permettre à son époux d'accourir à son secours.
ENRÍQUEZ (Jeanne).- Reine de Navarre et d'Aragon, fille de Frédéric Henriquez, almirante (amiral) de Castille. Elle fut mariée en 1444 au roi de Navarre Jean II qui devint roi d'Aragon en 1458. Mère de Ferdinand le Catholique, elle fut l'ennemie de son beau-fils, Don Carlos, fils d'un premier lit de son mari qu'elle arma contre son père. Les Catalans prirent parti pour Don Carlos et assiégèrent Jeanne dans Gérone. La reine fut délivrée par le comte de Foix en 1463. Elle combattit en 1467 le duc Jean de Lorraine qui disputait la Catalogne à son mari. Elle mourut en 1468 au siège de Rosas.
ÉNYO.- Voir Bellone.
ÉPERNON (duchesse d’).- Histoire militaire des femmes : « Née Marguerite de Foix. Conduite en 1588 à la porte du château d’Angoulême, défendu par son mari, sommée de l’engager à se rendre et menacée si elle ne le faisait d’un sort cruel, elle éleva la voix et l’exhorta à se défendre vigoureusement, sans s’inquiéter d’elle. « Le devoir et l’honneur avant tout », telle fut sa dernière recommandation. Son énergie toucha l’adversaire, qui la laissa libre ».
ÉPICHARIS.- Courtisane romaine qui fit partie de la conspiration ourdie par le sénateur Pison contre l'empereur Néron, en 65. Dénoncée et arrêtée, elle fut soumise à la torture et parvint à s'étrangler avec un nœud coulant pour ne pas révéler les noms de ses complices.
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Épicharis, […] sous le règne de Néron, montra au milieu des tortures un courage au-dessus de son sexe et de sa condition. Accusée devant ce prince d’avoir eu part à une conjuration contre sa vie, elle développa une si grande fermeté dans les tourments, qu’on ne put jamais lui faire déclarer le nom des complices ; le fouet, le feu, la rage même des bourreaux, honteux de ne pouvoir lui arracher le moindre aveu et d’être vaincus par une femme, rien ne put lui faire rompre son silence obstiné. La conspiration était cependant une des plus vastes qu’on eut vues jusque-là à Rome. Il y était entré des hommes consulaires, des sénateurs, le préfet du prétoire et des personnes de tout âge, de tout sexe, et de toute condition, tant était grande la haine que l’on portait au tyran. Épicharis ramenée le lendemain pour être appliquée à une nouvelle question, se laissa glisser du siège où on l’avait placée ; elle se passa le cou dans le mouchoir qu’elle avait détaché de son sein et qui tenait au siège, et, aidée du poids de son corps mourant, elle s’étrangla. Il existe une tragédie de Ximénès, intitulée : Epicharis, ou la Mort de Néron, représentée en 1753. Ernest Legouvé a aussi donné une tragédie de ce nom ».
ÉPINOY (Christine de Lalaing, princesse d').- Héroïne belge morte à Anvers en 1582. Lors du siège de Tournai par Alexandre Farnèse, duc de Parme, elle défendit énergiquement la ville à la place du gouverneur, son mari, qui était absent.
Histoire militaire des femmes : « Nous […] la voyons, pendant que son mari assiège Saint-Guillain, remplir au siège de Tournai (1581), avec une grande activité, les fonctions de gouverneur ; partout elle exhorte, supplie, menace, donne l’exemple. Malgré ses efforts, une muraille est abattue, la brèche devient praticable. Loin de se décourager, notre Amazone se prépare à une défense énergique pour repousser l’assaut et y parvient par un combat des plus rudes et très sanglant ; […] Une seconde fois, cette héroïne (peu de femmes ont mieux mérité ce titre) défendit aussi vigoureusement la brèche, mais, blessée au bras, ayant perdu beaucoup de monde, privée d'approvisionnements suffisants, elle fut bientôt obligée de se rendre ; elle obtint la capitulation la plus honorable et fut traitée par les Espagnols avec une haute distinction, due assurément à son courage autant qu'à son rang ».
ERAUSO (Doña Catalina de).- Aventurière espagnole surnommée « la Monja Alferez » (« la Nonne Lieutenant »), née à Saint-Sébastien-de-Guipuzcoa en 1592, morte vers 1635. Destinée à devenir nonne, elle s'enfuit très jeune du couvent et, habillée en homme, mena dès lors une existence mouvementée et aventureuse, remplie de querelles, de duels et de meurtres. Elle s'engagea comme soldat en Amérique espagnole et servit notamment au Chili dans la guerre contre les Indiens Araucans. Elle devint lieutenant, d'ou son surnom. C'était une duelliste redoutable, responsable de la mort de nombre d'hommes. Elle a laissé une autobiographie traduite par José-Maria de Heredia.
On peut lire dans Le magasin pittoresque (publié sous la direction d’Édouard Charton, 22e année, Paris, 1854) des extraits de cette autobiographie. C’est ainsi que, s'étant querellée avec son frère, le capitaine Miguel de Erauso, elle fut envoyée, par mesure disciplinaire, au port de Païcabi où elle mena une dure existence : « Nous étions toujours sur le qui-vive. Il fallait sans cesse repousser les agressions des Indiens. Toutes les compagnies du Chili vinrent s'unir à nous pour en finir avec ces ennemis. Nous fûmes réunis, dans la plaine de Valdivia, au nombre de 5.000 hommes. Les Indiens s'emparèrent de Valdivia et la mirent au pillage. Plusieurs combats se succédèrent, et les Indiens y eurent le dessous ; mais, ayant reçu du renfort, ils revinrent à la charge, nous culbutèrent, tuèrent beaucoup de soldats et d'officiers, entre autres mon alferez (lieutenant), et ils s'emparèrent du drapeau. Voyant notre officier emporté, je me lançai avec deux autres soldats à cheval, à travers la mêlée, donnant et recevant des coups, renversant tout sur notre passage. Un de nous tomba mort ; mais, sans nous laisser arrêter, nous nous ouvrîmes un chemin vers le drapeau. Là, mon camarade fut jeté à terre d'un coup de lance. Je fus blessé à la jambe ; mais je tuai le chef indien qui tenait le drapeau, que je repris ; puis, excitant de nouveau mon cheval, et me précipitant à travers les combattants, en frappant de tous côtés, blessant et tuant, atteint moi-même d'un coup de lance dans l'épaule gauche et de trois flèches, j'arrivai enfin jusqu'à nos rangs. En arrivant, je tombai sans connaissance : on accourut pour me secourir, et, en ouvrant les yeux, je vis mon frère, ce qui fut pour moi une grande consolation. Bientôt je fus guéri. Nous restâmes campés neuf mois en ce même endroit. Mon frère obtint du gouverneur l'enseigne que j'avais gagnée, et je fus nommé alferez de la compagnie l'Alonzo Moreno ».
Le magasin pittoresque poursuit : « On se lasserait à compter les coups d’épée ou de couteau que donne ou reçoit Catalina de Erauso, à l’improviste, en guet-apens ou en duel. En résumé, cette religieuse fugitive fait un fort mauvais homme. Son grade d’enseigne ne change rien à ses habitudes de querelles et de vengeances sauvages. Dans une maison de jeu de la Conception, un de ses amis, alferez comme elle, l’insulte : elle lui passe aussitôt son épée à travers le corps. Un auditeur général la saisit au collet : il a le même sort. Pendant six mois, on la tient assiégée dans un couvent. En ce temps même, on vient la prier de prendre parti dans un duel. Quoiqu’elle craigne une embûche, la tentation est trop forte pour qu’elle y résiste. Elle se rend de nuit sur le terrain, croise le fer avec le second adversaire de son ami et l’étend à ses pieds. Elle lui demande comment il s’appelle. D’une voix mourante, il répond : -Le capitaine Miguel Erauso. C’était son frère. « Je restai stupéfaite », dit-elle. Cette fois, elle resta huit mois dans le couvent où elle avait cherché asile et où elle fut témoin de l’ensevelissement de Miguel Erauso. Quand il lui fut possible de sortir, elle se dirigea vers Valdivia et le Tucuman. Ce voyage fut pénible ».
ERMENGARDE DE NARBONNE.- Vicomtesse de Narbonne, née vers 1128, fille d’Aimery II de Narbonne. Maniant le charme aussi bien que le glaive, elle aida à tenir le sud de la France pour Louis VII contre les attaques du roi d'Angleterre Henri II et défendit âprement ses domaines à plusieurs reprises.
Histoire militaire des femmes : « La vicomtesse Ermengarde de Narbonne remariée à Bernard d’Anduse, conduit en 1148, trois ans après son second mariage, ses troupes au siège de Tortose, contre les Sarrazins, et, une fois l'épée déposée, administre virilement la vicomté de Narbonne, durant quarante-quatre ans, y rendant justice elle-même, quoique femme et en dépit des lois romaines suivies dans sa province, et ce par une exception accordée par Louis le Jeune(*) ».
(*) L'autorisation royale date de 1156. Ermengarde se démit de son autorité dans la vicomté de Narbonne en 1192, en faveur de Pierre de Lara, son neveu.
ERNECOURT (Barbe-Alberte d').- Née en 1606, morte en 1660, nièce d’Henriette de Chérisay-Norroy, fille unique de Simon II d'Ernecourt, gentilhomme du duc de Lorraine, et de Marguerite Housse de Watronville, elle fut mariée à seize ans à Jean-Jacques de Haraucourt, seigneur de Saint-Baslemont, favori du duc de Lorraine Charles IV, qui lui communiqua ses deux passions : les chevaux et la guerre.
Histoire militaire des femmes : « Elle possédait le goût des armes, et dès son mariage […] revêtit l'habit et les armes d'un homme, pour prendre part aux exercices militaires de son mari, qui exerçait les fonctions de colonel dans l'armée du duc de Lorraine, Charles IV. Aussi fut-elle prête, en 1636, à jouer son rôle dans la guerre, mais, fait curieux, elle resta attachée au service de France tandis que son époux combattait avec les Lorrains et les Impériaux que commandait le duc de Lorraine comme généralissime : ce fait tient sans doute à ce que, née dans l’un des trois évêchés(*), réunis à la France en 1552, elle était en réalité française. Son château patrimonial de La Neuville ayant été assiégé en 1636 par les Espagnols venus de Luxembourg, elle barricada le village dont il faisait partie, réunit plusieurs gentilshommes, arma ses domestiques et vassaux, sortit contre l'ennemi, le défit, le poursuivit, mais reçut, dit-on, cinq coups de feu, dont un enleva son chapeau. Ce succès devint la source de plusieurs autres ; elle grossit sa troupe, entreprit une guerre de coups de main et la prolongea durant sept ans, toujours heureuse et profitable pour elle, sans être ni blessée ni vaincue(**). Cette femme héroïque voulut plus tard finir sa vie dans un couvent de Bar-le-Duc, mais sa santé, altérée par les fatigues de la guerre, s’opposa à ce qu’elle pût rester dans l’ordre des sœurs Christes qu’elle avait choisi et dont le régime était sévère ; elle mourut en 1660 dans ses domaines(***) ».
(*) Metz, Toul et Verdun.
(**) On attribue à cette guerrière le trait suivant : un officier, étant venu demeurer sur ses terres, s'y comporta mal et offensa sa belle-sœur. Elle lui envoya, sous le nom de chevalier de Saint-Baslemont, un cartel qui fut accepté. Après l'avoir désarmé : « Vous avez cru, Monsieur, combattre un homme ; c'est Mme de Saint-Baslemont qui fut votre adversaire ; elle vous rend votre épée, et vous prie de témoigner à l'avenir plus de considération pour les dames ».
(***) Consultez l’Amazone chrétienne, où les aventures de Mme Saint-Baslemont, qui a joint une admirable dévotion, et la pratique de toutes les vertus, avec l’exercice des armes et de la guerre, par le P. J. M. D. V. (Jean-Marie de Vernon), Paris, in-12, 1678, chez Meturas.-Nouvelle édition, Liège, 1773.
Abbé F.X. de Feller, Dictionnaire historique, ou histoire abrégée des hommes qui se sont fait un nom par le génie, les talents, les vertus, les erreurs, depuis le commencement du monde jusqu’à nos jours, Paris, Méquignon, Lyon, Guyot, 1818, tome II : « Elle avait reçu de la nature les dispositions les plus heureuses pour le métier de la guerre, un corps robuste, et propre à tous les exercices militaires, un courage intrépide, une imagination féconde en stratagèmes, une prudence singulière, etc. Elle fit du lieu de sa naissance, qui n’était d’abord qu’un médiocre village, une place d’armes, où elle reçut et protégea contre les Cravates, espèce de maraudeurs, qui ravageaient alors la Lorraine et la Champagne, une foule de laboureurs et d’artisans. Ces troupes indisciplinées, amenées du fond de la Hongrie, commettaient des excès atroces et inouis (même dans les Pays-Bas autrichiens, soumis à l’allié de leur maître ; la province de Luxembourg en fut presqu’entièrement dépeuplée). La Vie de cette femme célèbre, en qui la piété relevait l’éclat des vertus guerrières, et qu’une maladie cruelle enleva le 22 mai 1660, fut d’abord publiée à Paris en 1678, sous le titre de l’Amazone chrétienne, par le père Jean-Marie, religieux du tiers-ordre de Saint-François. Le P. Desbillons en a donné en 1773, une histoire mieux rédigée, mais tirée, quant aux principaux faits, de la première. Pour donner une idée de la bravoure de l’héroïne, nous rapporterons l’exploit suivant : « Le premier jour de mai de l’année 1636, temps où madame de Saint-Balmont n’était pas encore bien connue des troupes françaises (elle montra toujours pour elles une prédilection particulière), 100 cavaliers de la compagnie de Brissac et de celle du baron de Guitaut, vinrent enlever son troupeau de vaches. Aussitôt elle en est avertie par une sentinelle, postée au haut du clocher de la paroisse ; et la voilà en campagne, à la tête de quelques gentilshommes et de ceux de ses paysans qui composaient son infanterie. Les ennemis se présentent au nombre de 60, tandis que les autres emmènent le troupeau. Elle vole à ces derniers, après avoir commandé à son infanterie de faire face aux 60 ; mais cette infanterie, qui n’était pas encore dressée, se resserre au lieu de s’étendre, et se laisse envelopper. L’amazone s’en aperçoit, et revole pour la dégager. Elle ordonne à son beau-frère, le chevalier d’Araucourt, et à un autre officier, de percer la cavalerie ennemie : mais ils sont faits tous deux prisonniers. Alors sa vigueur et son courage redoublent ; et, malgré 5 coups de feu, dont un lui enleva son chapeau (l’auteur remarque ailleurs qu’en temps de paix même, elle avait sous un habit de femme, un pourpoint, un baudrier et des bottes), et les 4 autres portèrent de façon qu’elle s’en ressentait encore longtemps après, elle pénètre jusqu’à ces pauvres fantassins, qui étaient prêts à mettre bas les armes. Courage, leur crie-t-elle, ne craignez rien ; nous sommes plus forts que nos ennemis, ils n’ont que des pistolets. Ses soldats ranimés, elle les met en ordre, les range le long d’une haie, qui les couvre parfaitement, après qu’elle leur a fait mettre un genou en terre ; et dans cette posture, elle leur défend de tirer, à moins que l’ennemi ne s’avance assez près pour qu’aucun coup ne soit perdu. En un moment, la scène change, et les 60 cavaliers effrayés de la bonne contenance de ces paysans, se débandent, laissent leurs deux prisonniers, et prennent la fuite. Pendant ce temps-là, Manheuse (habile et brave officier, qui avait été longtemps capitaine dans le régiment du mari de madame de Saint-B.), secondé seulement de 15 fantassins, tenait en respect les 40 autres cavaliers, chargés du soin d’emmener les vaches ; l’amazone paraît : les vaches restent, et l’on ne voit plus d’ennemis. Personne ne périt dans cette occasion, et il n’y eut de blessés que notre héroïne, et un de ses officiers ; mais les blessures n’étaient pas dangereuses ».
ESTRADA (Maria d').- Femme d'un soldat de Fernand Cortez qui suivit ce dernier lors de la conquête du Mexique par les Espagnols. Armée d'une épée et d'une lance, elle fut de toutes les expéditions et se distingua par sa valeur dans les combats.
Histoire militaire des femmes : « Pendant le long siège que Fernand Cortez, le vainqueur de Montezuma, fit de la ville de Mexico en 1521, il eut à subir un assaut infructueux et l’abandon de ses alliés. Il ne se laissa pas abattre et sut ranimer l’énergie de ses soldats. Ceux-ci, si le courage leur avait manqué, auraient rougi devant leurs femmes. Plusieurs de ces femmes restèrent dans le camp et méritent que l’histoire redise leur héroïsme. L’une d’elles montait la garde pour son mari fatigué, et pour accomplir ce devoir endossait son armure. Une autre, munie d’une épée et d’une lance, se donnait pour mission de se jeter au-devant de ses compatriotes quand ils cédaient du terrain, les ralliait, les ramenait au combat. En vain Cortez représenta à ces guerrières de demeurer à Tlascala. « Une femme castillane, lui fut-il répondu, doit partager les périls de son mari et mourir avec lui s’il le faut ». L’historien Herrera(*) nous a conservé le nom de cinq de ces héroïnes : Beatrix de Palacios, Maria de Estrada, la plus souvent citée, Juana Martin, Isabel Rodriguez et Beatrix Bermudez. Suivant Torquemada, l’héroïne Maria de Estrada maniait l’épée et le bouclier comme aurait pu le faire le meilleur homme d’armes ; elle épousa plus tard Pedro Sanchez Farfan et reçut en récompense de sa bravoure le village de Tetela(**) ».
(*) Hist. general, dec. 3, lib. I, cap. XXII.
(**) Monarquica India, IV, 72.
ÉTHELFLEDA.- Princesse anglo-saxonne, morte en 918. Fille d'Alfred le Grand, roi de Wessex et des Anglo-Saxons, surnommée la « Dame des Merciens », elle gouverna sagement la Mercie (en anglais Mercia), dans la région des Midlands, à partir de 911. Elle fut une grande guerrière qui aida activement son frère, roi du Wessex, dans sa lutte contre les Danois.
EURYBÉE.- Une des Amazones qui combattirent contre les Grecs d’Hercule.
EURYDICE.- Fille de Cynanne (Voir cette entrée).
FARANTZEM.- Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Fille d’Antoug, seigneur de Sunik, fut regardée comme la plus belle femme de son siècle ; la nature l’avait ornée de charmes, de grâces, d’élégance et de traits enchanteurs. Elle fut donnée en mariage en 367, à Kuel, fils du prince Tiridate, et petit-fils de Tiran II, roi d’Arménie. Dirite, prince du sang royal, ayant l’occasion de voir Farantzem le jour même de ses noces, en fut frappé, et forma le projet de se défaire de son époux. Archag II en fut épris de son côté ; il tua son mari et l’épousa, contre les lois et les serments qu’il avait prononcés en se mariant avec Olympiate, parente de Théodose le Grand, alors général des troupes. Farantzem, pour être maîtresse absolue du cœur du roi, empoisonna la vertueuse Olympiate, et commença à disposer des charges du royaume. Chabouh II, roi de la Perse, informé également de la rare beauté de cette reine, fit venir Archag auprès de lui, sous prétexte d’une entrevue ; il le renferma ensuite dans un château, et chercha à avoir Farantzem dans son palais ; mais cette reine refusa avec fierté la demande du roi, et se renferma dans la forteresse d’Ardakers. Une armée formidable de Persans vint bientôt investir cette place ; Farantzem y commanda en personne, et fit la résistance la plus rigoureuse ; mais elle fut livrée par trahison entre les mains de l’ennemi barbare, qui la fit mourir vers l’an 380 de J.-C. ».
FAUSTA (Livia).- Histoire militaire des femmes : « Dans ses Commentaires(*), l’un de mes auteurs favoris, Blaise de Montluc […], fait l’éloge des dames de Sienne, voulant, assure-t-il, « immortaliser leur nom tant que son livre vivra » ; je n’ose dire qu’il le surfait, quoiqu’un peu gascon. Toutefois, d’après son témoignage, comme gouverneur de la place et témoin oculaire, il y eut en 1554, durant la défense célèbre et prolongée de cette ville, une organisation militaire des femmes. Elles formaient trois bandes : - la bande commandée par la signora Forteguerra (on croirait à un nom de circonstance), vêtue de violet, avec un « accoutrement en façon d’une nymphe, court et montrant le brodequin » ; - la bande de la signora Picollomini qui portait du satin couleur incarnat ; - la bande aux ordres de la signora Livia Fausta, habillée de blanc et suivant une enseigne blanche. On voit par ces détails que, même en face de l’ennemi, les dames n’oublient pas la toilette et le bon air qu’elle donne. Chacune de ces bandes comptait mille guerrières nobles ou bourgeoises, armées de piques et chargées de pelles, hottes et fascines, ce qui indique qu’on les employa surtout aux travaux de fortification dans le but d’améliorer et d’entretenir les remparts en bon état ; en y travaillant elles chantaient un hymne composé en l’honneur de la France ».
(*) Livre III.
FERNIG (Théophile et Félicité de).- Deux sœurs héroïnes de la Révolution française. Théophile naquit le 10 mai 1770 à Mortagne-du-Nord, dans le Nord, et mourut en 1818, Félicité naquit au même endroit le 17 juillet 1775 et mourut en 1841 (elle a laissé quelques poésies). Vêtues d'habits masculins et armées de fusils de chasse, elles partirent à la guerre avec leur père dans la garde nationale de Mortagne, près de Valenciennes, et servirent d'abord sous le général de Beurnonville. Elles combattirent à Valmy (victoire de Kellermann et de Dumouriez sur le duc de Brunswick, le 20 septembre 1792) et à Jemappes (nouvelle victoire de Dumouriez sur les Autrichiens, le 6 novembre 1792). En avril 1793, elles accompagnèrent Dumouriez dans son émigration et furent un temps prisonnières en Hollande. Dumouriez les appelait ses enfants et en parle dans ses Mémoires. Un frère de ces deux femmes guerrières servit dans l'armée française et devint général sous le règne de Louis-Philippe.
Histoire militaire des femmes : [Elles] « se vêtirent d’habits d’hommes, s’armèrent de fusils de chasse, marchèrent contre les Autrichiens avec la garde nationale de Mortagne (près Valenciennes), pour accompagner leur père, lequel commandait cette troupe bourgeoise ; ce père exerçait dans ladite localité les fonctions de greffier général des terres et châtellenies de Mortagne, et se livrait en même temps à la culture des lettres, mais il était originaire d’Alsace, d’une famille noble(*), et avait fait de 1755 à 1762 les campagnes de Hanovre sous le maréchal de Richelieu. Ses deux filles étaient douées d’une grande beauté ; l’une, Félicité, avait seize ans ; la seconde, nommée Théophile, treize ans seulement. Leur présence, leur abnégation, électrisent les gardes nationaux qui réussissent à repousser plusieurs attaques nocturnes. Le général Beurnonville survient, passe les vainqueurs en revue, et félicite les deux héroïnes qui « savent tuer leur homme ». On les retrouve à Valmy, en qualité d’aides de camp de du Mourier, suivant un titre officiel, et elles prennent leur part du succès. À Jemmapes, la plus jeune fait prisonnier un colossal chasseur à cheval hongrois, et le ramène triomphante au général en chef, ce qui fit rire aux dépens du captif et excita l’admiration en faveur de l’heureuse guerrière ; dans cette même journée l’aînée s’attacha à la personne du duc de Chartres (depuis Louis-Philippe), et chargea à ses côtés, la bride dans les dents et le pistolet au poingt. Pour les récompenser la Convention leur envoie des chevaux, décrète qu’elles ont bien mérité de la patrie et ordonne la reconstruction aux frais de l’État de leur maison incendiée par l’ennemi(**) ; car les éloges passent vite et ce ne sont pas eux qui font la gloire, mais les actes eux-mêmes, et les deux sœurs continuèrent à combattre et à s’exposer, à donner un exemple qui électrisait les troupes ; plusieurs chevaux furent tués sous elles, Félicité sauva même un jeune volontaire français qu’elle épousa plus tard(***). Le 5 avril 1793, menacées par le système de la Terreur, et ne voulant pas abandonner du Mouriez, elles émigrèrent(****) avec lui ; ce résultat correspondait mal à leur bravoure et à leurs sentiments politiques, Théophile déclarant dans une de ses lettres ne pas partager les principes de du Mouriez ; mais à envisager leur sort, chacun peut tirer une conclusion et peut s’attendre à la disgrâce de trouver un jour la patrie ingrate, tout en se promettant de ne jamais lui en vouloir(*****) ».
(*) Son fils, le comte de Fernig, était chef de bataillon ou lieutenant-colonel en 1792, devint général de brigade, et se lia avec la famille de Rotschild ; il s’est distingué à la bataille de Lutzen et a fait la campagne d’Espagne en 1823.
(**) Ce dernier décret fut abrogé quand elles émigrèrent.
(***) Il était Belge d’origine et se nommait Vandermallen.
(****) Elles furent jetées en prison en Hollande ; l’aînée finit par épouser un officier belge, la seconde mourut en 1818 à Bruxelles, auprès de sa sœur. Une troisième sœur du général comte de Fernig, Aimée, a épousé le commandant Guilleminot, depuis officier général, officier d’état-major renommé qui devint chef du dépôt de la guerre sous la Restauration.
(*****) Sur la vie ultérieure de Mlles de Fernig, lisez Correspondance inédite de Mlle Théophile de Fernig, publiée par M. Honoré Bonhomme, in-12, 1873, chez Firmin Didot. Cette correspondance respire la pureté et l’honnêteté.
FIEF (Madame du).- Voir Liébault de la Barossière (Aimée).
FIGUEUR (Marie-Thérèse).- Femme soldat née à Tamay (Côte-d'Or) en 1774, morte à Issy (Seine) en 1861. Elle s'engagea en juillet 1793 dans l'armée républicaine sous le nom de « Sans-Gêne » et fit les campagnes de la Révolution et de l'Empire. Elle termina sa carrière en 1812 quand elle fut retenue prisonnière en Angleterre jusqu'en 1814. Elle avait entamé ses exploits au siège de Toulon où elle avait traité Bonaparte de moricaud. En 1794, elle se rendit à l'armée des Pyrénées-Orientales commandée par le général Dugommier. Elle pénétra parmi les premiers dans la forteresse de Figuières. Elle tua un Espagnol d'un coup de sabre et conduisit deux prisonniers auprès du général Augereau. Elle sauva le général Noguez abandonné comme blessé et retira de l'eau plusieurs soldats qui allaient se noyer dans une rivière. Elle gagna ensuite l'Italie avec son régiment. Elle fit la campagne d'Égypte. Retour en Italie où elle ramène sur son cheval un carabinier qui avait la cuisse fracassée et le conduit à l'hôpital. Au sortir de l'hôpital, elle est faite prisonnière par des hussards autrichiens. Elle s'échappe de sa prison. Le 13 brumaire an VIII, elle participe à la bataille de Savigliano, reçoit quatre coups de sabre dans le dos et est à nouveau faite prisonnière, puis bénéficie d'un échange de prisonniers. Fatiguée et presque mourante, elle sollicite et obtient une pension en 1800. Réfugiée à Châlons-sur-Saône, elle se refait une santé et reprend du service dans un régiment de dragons commandé par Horace Sébastiani. Présentée à Joséphine de Beauharnais, elle rencontre le Premier consul qui lui rappelle l'épisode du siège de Toulon et lui demande si elle pense toujours qu'il ressemble à un moricaud. Bonaparte l'attache à sa femme comme femme de chambre, mais, au bout de dix jours, n'en pouvant plus de s'ennuyer, elle quitte sans crier gare Saint-Cloud et reprend du service dans son régiment. On la retrouve à Ulm, puis à la bataille d'Austerlitz, puis encore à celle d’Iéna. Sa santé déclinant, on l'envoie à Paris à l'hospice de la Charité. Elle y guérit et part pour l'Espagne. En juillet 1812, elle est faite prisonnière, conduite à Lisbonne, puis en Angleterre où elle est internée à Bolderwood. Revenue en France en 1814, elle se marie avec un maréchal des logis de la gendarmerie.
Parmi les certificats délivrés à cette femme intrépide, il faut citer :
- celui d'Augereau : « Je certifie que le dragon Sans-Gêne a fait sous mes ordres la guerre des Pyrénées-Orientales, que dans plus d'une occasion elle a donné des preuves d'un courage au-dessus de son sexe » ;
- celui du général de division Lemoine : « atteste que les services du dragon Sans-Gêne lui ont, dans tous les temps, mérité des éloges des officiers généraux et l'admiration de toute l'armée » ;
- celui du conseil d'administration de l'escadron complémentaire du 15e régiment de dragons : « certifie à tous qu'il appartiendra que la nommée Thérèse Figueur, dite Sans-Gêne, […] a donné des preuves de courage. Son dévouement, sa bravoure peu ordinaires, même parmi les hommes, la rendent recommandable et le conseil d'administration la recommande à toutes les autorités civiles et militaires auxquelles elle se présentera ».
En 1842 parut un ouvrage publié par Saint-Germain Leduc où étaient retracés les exploits de Marie-Thérèse Figueur (Les campagnes de Mademoiselle Thérèse Figueur aujourd'hui Madame veuve Sutter, de 1793 à 1815, écrites sous sa dictée, Paris, Dauvin et Fontaines). En voici quelques extraits :
« Un gros de troupes espagnoles, fantassins mêlés de quelques cavaliers, se retirait en désordre sur la grande route dans la direction de Girone. Nos éclaireurs, dont je faisais partie, les reconduisaient en tiraillant, tandis qu’à droite et à gauche de la route une demi-brigade française marchait sur deux colonnes, de manière à ce que celle de droite, suivant une ligne plus courte et gagnant infailliblement de l’avance sur l’ennemi, devait, à un point indiqué, lui couper le passage. De temps en temps quelque cavalier ennemi se retournait et nous envoyait une balle, à nous autres tirailleurs, pour nous maintenir à distance. Nous étions assez près pour reconnaître que ces braves gens, qui se dévouaient pour couvrir la retraite, n’étaient pas des Espagnols, mais portaient l’uniforme des émigrés Français. Mes camarades et moi nous nous fîmes un devoir de les ménager. Je poussai mon cheval encore plus près du dernier de leurs groupes, de manière à ce qu’ils pussent m’entendre, et je criai de toute ma force en français : « Filez vite, filez ou vous êtes perdus. Gagnez derrière la colline ou vous êtes coupés par notre colonne de droite ». Ceux qui m’entendirent prirent franchement le galop, les autres les imitèrent, à l’exception d’un seul qui ne pressa point le pas davantage. Je me hasarde à m’approcher de plus en plus, et je renouvelle mon avis charitable. Pour réponse, il se retourne brusquement : un beau jeune homme brun, l’air triste, mais déterminé. Je n’ai jamais oublié ce visage, il m’a empêché de dormir pendant plus d’une année. Il m’ajuste de sa carabine et m’envoie son coup de feu. Indignée, je cours sur lui et je lui plonge mon sabre dans la gorge ; c’est ce qu’en langage militaire nous appelons le coup du cochon. J’étais tellement transportée de fureur qu’après qu’il fut tombé je forçai mon cheval à le fouler. Sa balle avait effleuré la bordure en peau de tigre de mon casque et bouleversé l’oreille de chien de ma coiffure du côté gauche ».
« Plus loin, vers le soir du même jour, un quartier-maître espagnol et sa femme se rendirent à moi. Je consolai la malheureuse de mon mieux ; je la préservai elle et son mari de toute violence ; j’empêchai qu’on ne les fouillât. Comme ils étaient épuisés de fatigue, je les fis monter tous les deux sur mon cheval, et je les amenai à mon général qui était Augereau. Cédant à un mouvement de brutalité inexplicable, une personne de l’état-major invective le pauvre prisonnier qui répondait mal aux questions, et s’oublie au point de tirer le sabre et de lui faire au bras une blessure grave. Il fallut toute l’autorité du général pour calmer ce fou furieux. Le citoyen général Augereau me complimenta. Dans la journée mon cheval s’était abattu et par suite de cette chute ma carabine avait été brisée ; je me plaignai de rester ainsi désarmée. Le général tira d’une de ses fontes l’un de ses propres pistolets, et me le présentant : « Citoyenne, dit-il, prends ceci et souviens-toi d’Augereau qui n’oubliera pas le petit Sans-Gêne ». Je demandai à escorter moi-même mes prisonniers jusque sur les derrières de l’armée […] ».
« […] L’armée espagnole couvrait la ville de Girone ; nous fîmes plus d’une tentative pour nous établir au-delà de la ligne de la Fluvia. À la suite d’un de ces combats qui avait été rude, nous fûmes ramenés avec perte. Nous regagnions à la hâte et en conservant très peu d’ordre nos premières positions. On m’avait envoyée porter un ordre au général Mirabel. Pour rejoindre le corps auquel j’appartenais, celui du général Augereau, j’eus à traverser un terrain sur lequel on s’était battu une heure auparavant. Il y avait ça et là des morts et des blessés couchés par terre. De rares éclopés portant le bras en écharpe ou tirant la jambe se traînaient du moins mal possible dans la direction de la retraite. Un cri plaintif arrive à moi, je mets mon cheval au pas et j’écoute. Le cri recommence. J’approche d’un de ces corps gisants. Je reconnais l’habit de général, mais la figure de l’homme n’est qu’une croûte grisâtre. Je distingue le trou d’une balle à la tête ; je saute à terre, je soulève le blessé qui n’a que la force de gémir. Un carabinier de la 17e demi-brigade passe à cent pas de nous. Je cours à lui, j’invoque sa pitié. Il consent à m’aider, mais son secours ne peut être que faible, car il a lui-même le poignet droit à moitié abattu. À nous deux cependant et le blessé se ranimant de plus en plus et recevant quelque énergie de la fièvre, nous parvenons à placer le précieux fardeau sur mon cheval. J’eus le bonheur de le conduire sans mauvaise rencontre jusqu’en lieu sûr : c’était le général Noguez ».
« Un autre jour qu’il fallut repasser la Fluvia (peut-être n’était-ce pas la Fluvia, mais seulement un torrent gonflé qui était devenu rivière : la mémoire des noms peut faillir à soixante-neuf ans), quelques autres dragons et moi nous fûmes la providence de plusieurs fantassins blessés de la 17e demi-brigade. Ils avaient perdu pied au milieu du courant. Je mis mon cheval à la nage, et je saisis de mes deux mains et aidai à se soutenir à flot deux malheureux qui couraient risque de se noyer. Je recommençai à plusieurs reprises allant et revenant de l’un à l’autre bord, si bien que la besogne terminée, mon brave cheval était rendu. Ce soir là je l’ai baisé plus de vingt fois en le bouchonnant […] ».
« […] J’ai perdu dans cette campagne de l’armée des Pyrénées orientales deux chevaux tués sous moi : l’un à mon arrivée au camp devant Perpignan, en allant à la découverte près du Boulou ; l’autre devant la ville de Rosas […] ».
« […] Transportez-vous avec moi dans les plaines du Piémont entre la Stura et le Pô, aux premiers jours de Brumaire an 8 ».
« Le 8 brumaire donc (31 octobre 1799) le corps du général Davin auquel j’appartenais avait été ramené vivement par les Autrichiens, et se retirait dans la direction de Busca. Nous passâmes près d’un carabinier blessé qui poussait des cris déchirants, je fus vers lui. Sa cuisse avait été fracassée par un biscaïen. Des camarades m’aidèrent à le placer sur mon cheval, et je l’amenai de la sorte devant moi à Busca où je le déposai dans l’hôpital […] ».
FLORINE DE BOURGOGNE.- Histoire militaire des femmes : « Dans la première croisade (1097), […] Florine, fille du duc de Bourgogne, combattait à côté de son fiancé Suénon, fils du roi du Danemark, et mourait comme lui sous les coups des infidèles, après avoir vu périr autour d’elle un nombre infini de chevaliers ».
FOIX (Marguerite de).- Voir Épernon (duchesse d’).
FONSECA (Éléonore, marquise de).- Née à Naples en 1768, elle s'adonna à la botanique et à diverses branches de l'histoire naturelle. Elle aida dans ses recherches le biologiste Lazzaro Spallanzani et aurait été à l'origine de la découverte des vaisseaux lymphatiques. Elle embrassa le parti de la révolution et eut une grande part dans l'opposition à la cour, en 1799, au moment de l'approche des Français. Dans l'intervalle du départ du roi pour la Sicile et de l'arrivée de l'armée française, les Lazzaroni s'étaient mis à massacrer les partisans des Français. La marquise de Fonseca se mit alors à la tête de quelques femmes pour leur résister et conduisit ses compagnes au château Saint-Elme où les Français ne tardèrent pas à les délivrer. La marquise rédigea un journal, le Moniteur napolitain, où elle attaqua sans cesse l'autorité royale. Après les succès du cardinal Ruffo, elle fut arrêtée et condamnée à être pendue, le 20 juillet 1799, à l'âge de trente et un ans.
FORTEGUERRA.- Voir Fausta (Livia).
FRANCESCA.- Jeune italienne, citoyenne de Casal, dans le Montferrat, qui, durant la défense de cette cité par le maréchal de Toiras, prit les armes, participa à plusieurs sorties, tua deux ennemis et en blessa plusieurs.
Histoire militaire des femmes : « Le maréchal lui accorda pour récompense la solde de quatre soldats et, en outre, une place de chevau-léger dans sa propre compagnie (1630). Elle se nommait Francesca et comptait vingt ans d’âge. L’historien de Toiras, Baudier, rapporte qu'elle fut incitée à se faire guerrière en voyant les Espagnols tirer sans pitié sur elle et sur d'autres femmes pendant qu'elle coupait de l'herbe pour gagner sa vie ; il assure qu'elle débuta seule, armée d'un mousquet qu'on lui avait prêté, et signale une blessure qu'elle reçut au visage, un jour où elle s'était trop aventurée(*) ».
(*) Elle tua d’ailleurs l’Allemand qui la blessa. Voyez Histoire du maréchal de Toiras, par Baudier, édition in-folio, 1644, p. 169, 170 ; édition in-18, 1666, t. II, p. 147, 148.
FRÉDÉGONDE.- Reine de Neustrie, née vers 545 à Montdidier (Somme), morte à Paris en 597. D'une famille franque obscure, elle fut d'abord servante d’Audovère, première femme de Chilpéric Ier, qu'elle parvint à faire répudier. Elle fit étrangler Galswinthe, deuxième femme de Chilpéric, et la remplaça. Ce crime entraîna la guerre entre la Neustrie et l'Austrasie car Galswinthe était la sœur de Brunehaut, épouse du roi d'Austrasie Sigebert Ier. Ce dernier envahit la Neustrie mais tomba dans un guet-apens tendu par Frédégonde. Après la mort de Chilpéric en 584 à Vitry (mort qui ne fut sans doute pas naturelle), Frédégonde exerça la régence. Elle fit assassiner Mérovée, fils de Chilpéric et d’Audovère, qui avait épousé Brunehaut devenue veuve, et l'archevêque de Rouen Prétextat, qui avait béni cette union. Frédégonde aurait aussi été l'instigatrice de l'assassinat de Clovis, frère de Mérovée, d’Audovère et même de Chilpéric Ier. Elle fit reconnaître son fils, Clotaire II, comme roi de Neustrie. Elle battit d'abord Childebert, fils de Brunehaut, en 593, puis vainquit Brunehaut à la bataille de Leucofao, ou Latofao, entre Soissons et Laon, en 596.
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Frédégonde, reine de France, femme de Chilpéric Ier, […] entra d’abord au service d’Audouerre, première femme de ce prince, qu’elle eut le crédit de lui faire répudier. Voici le stratagème qu’elle employa : Audouerre étant accouchée d’une fille, Frédégonde fit disparaître la marraine au moment de la cérémonie ; la reine qui y assistait, s’impatientant de cette absence, Frédégonde, sa confidente, lui dit : Qui vous empêche de tenir vous-même votre enfant sur les fonds de baptême ? Aucune loi ne s’y oppose. Audouerre se laisse persuader, ignorant que, d’après les lois de l’Église, les parrains et marraines d’un enfant contractaient avec les parents une alliance spirituelle qui interdisait toutes les autres. Chilpéric, aussi superstitieux que libertin, prit une seconde femme : Frédégonde la fit assassiner, dit Grégoire de Tours, son ennemi mortel, et obtint le lit et le trône qu’elle occupait. Cette femme adroite et politique subjugua son mari, et lui fit commettre une foule de crimes. Il accabla d’impôts ses sujets ; il fit la guerre à ses frères. Frédégonde seconda ses armes par le fer et par le poison. On l’accuse d’avoir fait assassiner Sigebert, Mérouée, Clovis, Prétextat. Elle ne pouvait souffrir Rigunthe, sa fille, et leurs querelles étaient si violentes, qu’elles en venaient jusqu’à se battre. Un jour, la reine veuve feignit de vouloir lui donner ce qui lui revenait des trésors de Chilpéric son père. L’avide princesse penche la tête dans un des coffres qui les contenaient ; aussitôt sa mère le referme brusquement sur elle. C’était une nouvelle victime immolée aux fureurs de cette forcenée, si Rigunthe n’eût été promptement secourue. Enfin, Chilpéric est assassiné en revenant de la chasse, en 584. Les soupçons tombent sur diverses personnes ; mais ils se réunissent presque tous sur Frédégonde, d’autant plus que le roi venait de découvrir ses intrigues galantes. Cette princesse, dit-on, aimait Landri, guerrier estimé, et l’un des principaux seigneurs de la cour. On raconte, sans citer aucune autorité respectable, qu’elle croyait Chilpéric à la chasse, où il allait fréquemment ; mais ce jour-là, avant de partir, il lui prit fantaisie de monter par un escalier dérobé dans l’appartement de Frédégonde. Il la trouva le visage baissé et le corps courbé, se lavant les mains, et lui donna par derrière, en badinant, un léger coup de baguette. La reine, sans se lever, sans tourner la tête, dit : « Landri, est-ce ainsi qu’on attaque une femme comme moi ? ». Chilpéric sentit la jalousie dans le cœur. Frédégonde effrayée fit venir aussitôt Landri, pour lui raconter de quelle manière le sort l’avait trahie. Il fallait prévenir la colère d’un roi toujours redoutable, même lorsqu’elle paraissait assoupie ; et l’on conjecture que Frédégonde ne s’épargna pas un crime nécessaire à sa sûreté personnelle et à celle de son amant. Cette anecdote, rapportée en différents traités d’histoire, a été copiée dans Aimoin, le plus menteur des historiens. Frédégaire accuse Brunehaut de cet assassinat, et Grégoire de Tours, ennemi déclaré de Frédégonde, se contente de détailler les défauts de Chilpéric, de lui prodiguer les épithètes les plus odieuses ; mais sans donner, dans ce qu’il dit du meurtre de ce prince, la moindre apparence de soupçonner qu’il en crût Frédégonde coupable. La reine, après la mort tragique de son époux, arma contre Childebert, défit ses troupes en 591, ravagea la Champagne, reprit Paris avec les villes voisines qu’on lui avait enlevées. Elle mourut paisiblement dans son lit en 597 ».
FRITH (Maria).- On peut lire dans Le magasin pittoresque (publié sous la direction d’Édouard Charton, 11e année, Paris, 1843) :
« Cette femme, d'une haute stature, d'un caractère viril, presque toujours habillée en homme et l'épée au côté, s'était acquis une certaine célébrité sous le règne de Charles Ier, roi d'Angleterre. Malheureusement ce n’est point par des vertus qu’elle s’est fait un nom populaire. Aujourd’hui elle demeurerait confondue et ignorée parmi la foule des misérables que la justice est obligée de séparer de la société. Mais au seizième siècle son originalité, son audace, quelque soupçon de sorcellerie qu’entretenait son habileté à éviter les châtiments qu’elle méritait, l’étrangeté de ses travestissements et de ses habitudes lui donnèrent une physionomie tout-à-fait excentrique. Des artistes en renom ont reproduit ses traits ; plusieurs poètes dramatiques ont fait allusion à ses coupables exploits, et à défaut de détails sur sa vie, on ne saurait comprendre ces passages des vieux dramaturges anglais […] ».
« On raconte que Maria Frith entretenait une correspondance suivie avec les principaux bandits de son temps, et qu'elle se lia particulièrement d'intérêts avec le fameux Smull-Sack. Mais ce scélérat l'ayant laissée un jour en gage dans une auberge pour une somme assez forte qu'il lui devait, la plaisanterie ne fut pas du goût de Maria et la détermina à rompre toute association avec Smull ».
« Le plus hardi méfait de Maria Frith fut l'enlèvement du général Fairfax dans la forêt de Hunslow. Cet enlèvement la fit renfermer à Newgate, d'où elle ne tarda pas à sortir, grâce à une grosse somme d'argent qu'elle donna en échange de sa liberté ».
« Elle mourut d'hydropisie, à l'âge de soixante-quinze ans. D'après un préjugé de ce temps, on attribua cette longévité à l'habitude de fumer qu'elle avait depuis longtemps contractée. Alors, en effet, il n'était pas moins rare de voir une femme la pipe à la bouche que vêtue d'un habit d'homme. Dans son intérieur, toute la société de Maria Frith se composait d'un singe, d'un aigle, de chiens et d'oiseaux ».
FULVIE (en latin Fulvia).- Romaine de la gens Fulvia, morte à Sicyone, en Grèce, en 40 av. J.-C. Elle fut mariée successivement au tribun Publius Claudius Pulcher, qui fut assassiné par Titus Annius Papianus Melo, à Scribonius Curio et, enfin, en 45 av. J.-C., à Marc Antoine. Après le meurtre de son premier mari, elle avait fait placer son cadavre devant sa porte et soulevé le peuple contre le meurtrier. Lorsqu'elle fut devenue la femme du triumvir Marc Antoine, elle profita des nombreuses proscriptions pour venger son premier mari et contribua à la mort de Cicéron qui l'avait violemment attaquée dans ses Philippiques. Quand on apporta au triumvir la tête de Cicéron, elle en perça, dit-on, la langue avec un poinçon d'or. Pendant que son mari et Octave menaient la guerre contre les républicains, elle exerça dans Rome une souveraineté quasiment totale. Lorsque Marc Antoine et Octave se dressèrent l'un contre l'autre, elle prit parti pour son mari, bien qu'il l'ait abandonnée pour la reine d'Égypte Cléopâtre VII, et contribua au déclenchement de la guerre dite de Pérouse en 41 av. J.-C. Bientôt forcée de quitter Rome, elle s'enferma avec son beau-frère, le consul L. Antoine, dans Pérouse où elle soutint contre Octave un long siège. Seule la famine la détermina à capituler. Elle put s'enfuir en Grèce et eut une entrevue orageuse avec son mari à Athènes. S'étant rendu compte de toute l'intensité de la passion de Marc Antoine pour Cléopâtre, elle ne tarda pas à mourir de chagrin.
GAËTE.- Épouse du Normand Robert Guiscard qui participa avec son mari à la bataille de Durazzo (ville et port d’Albanie) contre les troupes de l'empereur byzantin Alexis Ier Comnène, le 18 octobre 1081. La lance à la main, elle ramena vaillamment au combat les troupes de son mari malmenées par les Grecs.
Edward Gibbon, Histoire de la décadence et de la chute de l’empire romain, traduit de l’anglais par F. Guizot, Paris, Ledentu, 1828, tome XI : « Les Grecs représentent Gaita, femme de Robert, comme une amazone et une seconde Pallas, moins habile dans les arts, mais non moins terrible à la guerre que la déesse des Athéniens. Quoique blessée d’un trait, elle demeura sur le champ de bataille, et, par ses exhortations et son exemple, rallia les troupes dispersées. Sa faible voix était secondée par la voix plus forte et le bras plus vigoureux de Guiscard […] ».
GAFFORIO.- Histoire militaire des femmes : « En 1735, Mme Gafforio se distingue en Corse les armes à la main. Son mari étant absent, les Génois veulent forcer son palais et l'enlever elle-même. Elle s’y barricade, s’y approvisionne de vivres et de munitions, et se défend durant plusieurs jours. Ce siège durait encore lorsque les Corses rassemblés par elle se mutinent, à la vue de leurs camarades tués par le feu de l’ennemi, et parlent de se rendre. Elle aussitôt de saisir un baril de poudre et une mèche allumée, de les porter dans une sale basse et voûtée, et de dire à ses soldats que s'ils cessaient de combattre, elle allait faire sauter le château. Son intrépidité ramène l'énergie chez ses compagnons, la résistance continue et le général Gafforio arrive à temps pour délivrer et sa femme et sa maison ».
GARIBALDI (Anita).- Née Ribeiro Da Silva, au Brésil, en 1817, morte près de Ravenne, en Italie, en 1849, femme du général et homme politique italien Giuseppe Garibaldi.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Elle rencontra Garibaldi au Brésil, alors qu'il se battait avec les rebelles contre le gouvernement impérial. Veuve, elle l’épousa et fut à ses côtés dans tous les combats. Ses exploits sont demeurés légendaires : cavalière émérite et soldat redoutable, elle se distingua au cours des batailles. Faite prisonnière, elle s’évada, accrochée à la crinière d'un cheval. Elle suivit Garibaldi en Uruguay, puis en Italie en 1848. Elle s'installa avec ses deux enfants à Nice, ville natale de son mari, pendant que celui-ci combattait pour la République romaine. Elle le rejoignit lors de la défaite de Rome, en 1849, et l'accompagna dans la tragique retraite qui suivit. Enceinte, épuisée, elle dut s'arrêter dans une ferme près de Ravenne, où elle mourut. Garibaldi, obligé de poursuivre, l'enterra en toute hâte. Ses deux fils, Menotti et Ricciotti, furent tous deux généraux ».
GERBERGE.- Reine de France, fille du roi de Germanie Henri Ier l'Oiseleur, née en 913, morte en 969. Elle épousa en 940 le roi de France Louis IV d'Outremer et eut pour fils Lothaire. Elle fut présente à plusieurs combats livrés par son père et reçut la mission de défendre Reims. Devenue veuve en 954, elle se mit à la tête d'une armée pour défendre les droits de son fils, alors âgé de douze ans, puis fit le siège de Poitiers. En 960, elle reprit Dijon qui venait d'être enlevée par Robert de Trèves.
GHESQUIÈRE (Virginie).- Femme soldat déguisée en homme qui serait née en 1768 à Deûlement (Nord) et morte en 1867 à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine). Incorporée à la place de son frère, elle atteignit le grade de sergent. Blessée au Portugal en secourant son colonel, « joli sergent » dut se déshabiller et ne put dès lors continuer à dissimuler son véritable sexe. Elle dut quitter l'armée.
Histoire militaire des femmes : « Pendant notre expédition de 1808 dans le Portugal, le colonel du 27e de ligne reçut un coup de feu au milieu d’un combat de rencontre. Le venger fut l’affaire d’un instant : on accabla l’ennemi, on le perça, on se fit jour. Comme on se retirait, un sergent de voltigeurs, svelte et mince, s’écria : « Et le corps de notre colonel, il faut aller le chercher ; nous montrerons à l’ennemi de quel bois nous nous chauffons ». Il dit et entraîne avec lui deux braves soldats. La mort moissonne en route ces derniers. Le sergent arrive seul, saisit le cadavre du colonel et veut le charger sur ses épaules, mais impossible, il n’est pas assez robuste des bras. Heureusement deux cavaliers anglais passent. À leur vue le sergent se met à faire du bruit. Les cavaliers l’aperçoivent et s’approchent. Dès qu’ils sont à petite distance, il en tue un d’un coup de carabine, blesse l’autre avec sa baïonnette et le renverse de cheval ; puis il saisit l’une des montures, y hisse son colonel et revient triomphant à l’ambulance. Le colonel respirait encore ; on le fait revenir, il sera sauvé. Quant au sergent, sa poitrine ruisselle de sang ; on le déshabille malgré sa résistance, et l’on s’aperçoit que c’est une femme(*). C’est, en effet, Virginie Ghesquières, du village de Deulémont, près Lille ; elle sert depuis six ans au lieu et place de son jeune frère tombé à la conscription. On lui donne son congé et, en récompense de son dernier exploit, la croix de la Légion d’honneur accompagne ce glorieux témoignage de son honorable conduite(**) ».
(*) Histoire de Lille, par Victor Derode, 1848.
(**) Cette femme est morte en décembre 1867, âgée de près de cent ans, à la maison de refuge d’Issy.
HACHETTE (Jeanne).- Habitante de Beauvais née vers 1454, devenue célèbre par le courage qu'elle manifesta lors du siège de sa ville natale par le duc de Bourgogne Charles le Téméraire en 1472. Elle monta sur la muraille, à la tête de plusieurs femmes, et arracha l'étendard qu'y plantait déjà un soldat bourguignon. Jeanne Hachette (ainsi nommée car elle était armée d'une hachette) s'appelait en fait Jeanne Laisné. Une statue en bronze, œuvre du sculpteur Debay, lui a été élevée à Beauvais. Louis XI exempta Jeanne de payer la taille, elle et ses descendants, et accorda aux femmes de Beauvais, par lettres patentes, le privilège de prendre le pas sur les hommes à la procession et à l'offrande du 10 juillet, pendant la fête établie en souvenir de la levée du siège.
On peut lire dans Le magasin pittoresque (publié sous la direction d’Édouard Charton, 4e année, Paris, 1836) :
« Le duc de Bourgogne, après avoir envahi et ravagé la Picardie, se jeta tout-à-coup sur Beauvais à la tête de quatre-vingt mille hommes. Cette ville était sans garnison, défendue par des fortifications en mauvais état et des murailles d’une médiocre hauteur ; ses faubourgs tombèrent sans obstacle aux mains des Bourguignons. C’en était fait de la ville elle-même si les habitants, soit par attachement pour leur roi, soit par haine de l’étranger, ou soit plutôt dans la crainte de perdre sous un nouveau maître leurs libertés, franchises et privilèges, ne se fussent excités l’un l’autre à se défendre vigoureusement ; ils s’armèrent à la hâte, et naguère artisans inoffensifs et citoyens paisibles, ils acceptèrent hardiment la lutte inégale contre des troupes nombreuses, bien armées, disciplinées, et aguerries par les fatigues et les combats. Les femmes et les enfants secondèrent puissamment leurs maris et leurs pères ; ils dépavèrent les rues, et firent pleuvoir incessamment sur les assiégeants une grêle de pierres et de quartiers de rochers. Plusieurs femmes, plus audacieuses encore, prirent des armes, montèrent sur les remparts, et s’illustrèrent par des prodiges d’audace et de valeur. Une d’elles s’y fit surtout remarquer ; c’était Jeanne Lainé, plus connue sous le nom de Jeanne Hachette. Cette femme digne des siècles de Rome et de la Grèce, et inspirée peut-être par l’exemple de l’héroïne d’Orléans, monta sur la brèche, arracha le drapeau bourguignon qu’on y voulait arborer, et précipita le soldat qui le portait du haut des murailles dans les fossés. Le duc Charles surpris d’une résistance aussi opiniâtre ordonna la retraite, et à quelques jours de là Beauvais n’eut plus qu’à ouvrir ses portes aux troupes du roi Louis XI, qui avançaient pour la dégager ».
« C’est en commémoration de la conduite des femmes de Beauvais en cette circonstance et pour en perpétuer le souvenir, que Louis XI institua pour le 14 octobre une procession annuelle. […] ».
[…] « Jeanne Lainé eut une large part dans la munificence royale ; elle fut, en raison de sa grande valeur et courage, mariée à Collin Pillon, et le roi, par un édit du mois de février 1475, voulut que ledit Collin Pillon et Jeanne sa femme demeurassent toute leur vie durant francs, quittes et exempts de toutes tailles, qui étaient et seraient dorénavant mises et imposées en son royaume, quelque part qu’ils fissent leur demourance en ledict royaume ».
HARCOURT (Marie d').- Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Femme d'Antoine de Lorraine, comte de Vaudemont, eut part à presque toutes les expéditions de guerre qu'entreprit son mari. On dit qu'un jour cette courageuse princesse, étant nouvellement relevée de couches, monta à cheval, fit prendre les armes à plusieurs seigneurs, et, par une valeur inouïe, contraignit les ennemis à lever le siège de Vaudemont. Cette héroïne mourut en 1476, dans sa 78e année ».
HARPALYCE.- Princesse guerrière, fille du roi de Thrace Harpalycus, qui repoussa Néoptolème, qui avait envahi la Thrace. Elle fut prise et tuée par des paysans à qui elle avait dérobé des bestiaux.
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Fille d’Harpalycus, qui la nourrit de lait de vache et de jument, et qui l’accoutuma de bonne heure au maniement des armes. Elle le secourut contre Néoptolème, fils d’Achille, qu’elle mit en fuite. Harpalycus ayant été tué quelque temps après par ses sujets, Harpalyce se retira dans les bois, d’ou elle fondait sur les bestiaux du canton et les enlevait. Elle fut prise dans des filets qu’on lui avait tendus ; et, après sa mort, les paysans se firent la guerre pour avoir les troupeaux qu’elle avait ravis. On établit des assemblées et des jeux au tombeau de cette fille, pour expier sa mort ».
HAUTECLOQUE (Nicole de).- Résistante et femme politique française, née Saint-Denis, à Commercy (Meuse) en 1913, morte en 1993.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Fille d’un colonel, elle épousa un neveu du général Leclerc de Hautecloque, Pierre de Hautecloque, dont elle se sépara. Après l’Appel du 18 juin 1940, elle se rallia au général de Gaulle et entra dans la Résistance comme agent secret du colonel Rémy avec le titre de capitaine […]. Elle fut chevalier de la Légion d'honneur, croix de guerre 1939-1945, médaillée de la France libre et rosette de la Résistance ».
Elle a été députée de Paris de 1962 à 1978.
HENDRICH.- Femme lieutenant-colonel d'un régiment de cavalerie allemande. En 1640, à une sortie devant Turin, à la suite de l'action par laquelle les Français repoussèrent les Espagnols, on la trouva parmi les morts.
Mémoires de Henri de Camplon, édition elzévirienne de Jannet, 1857, p. 133, cité par l’Histoire militaire des femmes : « Il se trouva parmi les morts une femme qui avait toujours passé pour un homme chez les ennemis, sous le nom de capitaine Hendrich. Elle était lieutenant-colonel d’un régiment de cavalerie allemande, et avait épousé depuis dix ans, pour mieux tromper le monde, une autre femme qui était la seule connaissant son secret. Au commencement on l'appelait le capitaine Capon, parce qu'on ne lui voyait point de barbe. Elle avait tué en duel, pour cette injure, un autre capitaine, ce qui la fit laisser en repos. Elle passait pour un des meilleurs officiers de l'armée des Espagnols, et pouvait avoir quarante ans ».
HIPPOLYTE.- Reine des Amazones, en Scythie, qui fut vaincue et tuée par Hercule. Une autre version veut qu’Hercule donna Hippolyte pour femme à Thésée.
HOUSSAY (Louise-Françoise-Claudine du).- On peut lire dans L'intermédiaire des chercheurs et curieux (18e année, Paris, 1885) :
« Il ne faudrait pas oublier, […] madame de Bennes, dite le chevalier du Houssay. M. de la Gournerie, dans les « Débris de Quiberon » (Nantes, 1875, p. 32), et M. Forneron dans son « Histoire générale des émigrés » (I, 392) en ont fait mention ».
« Louise-Françoise-Claudine du Houssay avait épousé M. de Bennes, gentilhomme normand. En 1791, jetés dans les prisons d'Orbec pour leurs opinions royalistes, ils parvinrent à s'évader, et, après avoir couru les plus grands dangers, ils arrivèrent à Coblentz en mars 1792. Madame de Bennes, vêtue d'habits d'homme, entra, sous le nom du chevalier du Houssay, avec son mari dans les hommes d'armes à pied. Au licenciement de ce corps, à Maëstricht, ils entrèrent dans les chasseurs nobles de Damas (régiment de Damas-Étienne, infanterie, formé le 29 juillet 1793) ».
« M. de Bennes avait déjà été blessé deux fois, lorsqu'il fut tué aux côtés de sa femme sur le canal de Louvain (15 juillet 1794). Cette catastrophe ne fit qu'enflammer le courage de la femme. Quoique blessée elle-même d'un coup de baïonnette à la main droite à Charleroy (25 et 26 juin 1794), elle prit part à toutes les affaires de son régiment. Embarquée pour Quiberon, elle y fut faite prisonnière. Pendant trois mois et demi, elle fut en proie à une affreuse misère et à d'horribles traitements, passa à la commission, et fut condamnée à mort. Le jour de son exécution, elle s'évada, sous des habits de femme que lui procura Madame du Portall ».
« Sous la Restauration, elle obtint, quoique protestante, la croix de Saint-Louis ».
HUGOTTE (Jacqueline-Marie-Louise).- Résistante française née en 1928 à Limeil-Bévrannes (Seine-et-Oise). Ses parents faisant partie d'un réseau, elle fut amenée toute jeune à remplir diverses missions (distribution de tracts et journaux clandestins, réception de parachutages nocturnes). En août 1944, elle participa aux combats de la libération de Montluçon.
HYPSICRATÉE.- Dictionnaire historique, critique et bibliographique : Femme de Mithridate, roi de Pont, célèbre par sa vertu et sa beauté. Elle accoutuma son corps délicat aux plus rudes fatigues, à monter à cheval, à supporter le poids des armes, pour suivre dans toutes ses expéditions guerrières son époux, qu'elle ne voulait point quitter.
ISABELLE D’AUTRICHE.- Infante d'Espagne, fille du roi d'Espagne Philippe II et d’Élisabeth de Valois, souveraine des Pays-Bas en 1598 et femme d’Albert d'Autriche, née en 1566 à Ségovie, morte en 1633 à Bruxelles. L'Espagne tenta de lui faire occuper le trône de France aux dépens d’Henri de Navarre ; mais la tentative échoua. Isabelle accompagna son époux dans ses guerres contre les Hollandais et montra la plus grande énergie dans la lutte contre Maurice de Nassau. Se trouvant au siège d'Ostende en 1630, elle jura de ne changer de linge qu'après la prise de la place. Ostende ayant résisté plus de trois ans, le linge de la princesse avait pris une teinte café au lait que l'on nomma couleur Isabelle. La princesse défendit le Brabant contre le prince d'Orange et déjoua une conspiration ourdie pour ériger les Pays-Bas catholiques en république.
ISABELLE DE MONTFORT.- Histoire militaire des femmes : « Un historien du XIIe siècle(*) nous cite la fille du comte de Montfort, Isabelle, mariée à Raoul de Conches, qui, à la guerre, montait à cheval, et ne le cédait à personne en intrépidité ».
(*) Orderic VITAL, livre XII. Traduction de M. Guizot.
ISABELLE Ière LA CATHOLIQUE.- Reine de Castille née à Madrigal de las Altas Torres en 1451, morte à Medina del Campo en 1504. Fille du roi de Castille Jean II, elle épousa en 1469 Ferdinand, héritier d'Aragon. En 1474, elle succéda sur le trône de Castille à son frère Henri IV qui avait désigné pour lui succéder sa fille, Jeanne dite « la Beltraneja », dont la légitimité fut contestée (on la disait fille de la reine et du favori Beltrán de la Cueva, d'où son surnom). Isabelle défendit victorieusement sa couronne contre Jeanne, qui avait reçu l'appui d’Alphonse V de Portugal. Isabelle et son mari achevèrent la reconquête de l’Espagne sur les Maures (la « reconquista ») par la prise de Grenade en 1492.
Histoire militaire des femmes : « Le trésor royal tomba promptement au pouvoir des nouveaux souverains, grâce à l’habileté d’Isabelle qui amena le garde de ce trésor à son parti en achetant sa soumission moyennant le don d’un marquisat et d’un comté. Cet argent servit à soutenir la guerre contre Jeanne et son parti, contre les Portugais, contre les Français. Isabelle y prit part autant que son époux. Elle dirigeait la levée des troupes, les exerçait, les passait en revue, excellait à leur adresser des paroles d'encouragement. Elle suivait l'armée, partageant les fatigues et les dangers des combattants : on la voyait dans les camps choisir un détachement et aller à sa tête reconnaître la situation exacte de l'adversaire. Elle parcourait les différentes provinces de l'Espagne, afin d'assurer les approvisionnements de son armée. Un jour de bataille(*) elle paraissait à la tête de sa cavalerie, excitait chacun à faire son devoir et donnait l'exemple. Tant d’activité, un tel héroïsme fixa la victoire sous ses étendards ; Jeanne, vaincue, prit le voile (1479), les Portugais et les Français firent la paix. Depuis cette époque Isabelle et Ferdinand gouvernèrent avec talent et gloire. Parmi leurs actes remarquables il faut citer la réduction de la fameuse ville de Grenade, riche de son millier de tours, de ses 400.000 habitants et de ses fabriques de soierie, et aussi la protection accordée à l’explorateur Christophe Colomb. Isabelle mourut en 1504 d’une maladie grave contractée pour avoir été trop souvent à cheval ; depuis sa première participation aux luttes armées, elle n’avait pas eu d’autre monture, et c’était imprudent pour une femme ».
(*) Le roi de Portugal fut défait en 1476, à Toro, par Isabelle et Ferdinand.
JACQUELINE DE BAVIÈRE (ou Jacoba de Bavière).- Duchesse de Bavière, comtesse de Hollande, de Zélande, de Frise et de Hainaut, fille du duc de Bavière Guillaume VI et de Marguerite de Bourgogne, née en 1401 au Quesnoy, morte en 1436 à Teilingen, près de Leyde. Elle épousa en 1415 Jean de France, duc de Touraine, fils de Charles VI. Elle succéda à son père en 1417 et, devenue veuve, épousa en secondes noces, en 1418, son cousin germain le duc de Brabant Jean IV. Sa couronne lui ayant été ôtée par son oncle, Jean de Bavière, dit Jean sans Pitié, et voyant que son mari n'entreprenait rien pour sa défense, bien au contraire, elle partit en Angleterre, épousa en 1422 le duc de Gloucester, oncle d’Henri VI d'Angleterre, et revint en Flandre avec une armée. Faite prisonnière, elle parvint à s'échapper, remonta sur le trône, mais dut nommer gouverneur de ses États son vainqueur, le duc de Bourgogne Philippe III le Bon, et promettre de ne plus se remarier. S'étant remariée une quatrième fois, avec Frank van Borselen, bailli de Zélande, le duc de Bourgogne lui prit ses États.
JEANNE D’ARC (sainte).- Héroïne française, surnommée la Pucelle d'Orléans, née à Domrémy (aujourd'hui Domrémy-la-Pucelle), en Lorraine, en 1412, morte brûlée vive à Rouen, sur la place du Vieux-Marché, le 30 mai 1431. Issue d'une famille de paysans, très pieuse, elle vit à plusieurs reprises apparaître saint Michel et entendit des voix qui la pressaient de sauver la France de l'invasion anglaise. Dès 1428, elle demanda à Robert de Baudricourt, capitaine de Vaucouleurs, de lui fournir une escorte pour rejoindre le roi de France Charles VII à Chinon. Baudricourt n'accéda à ses désirs qu'en 1429, à l'époque du siège d'Orléans par les Anglais. Arrivée auprès du roi le 13 février, elle obtint sa confiance en le reconnaissant alors qu'il s'était dissimulé parmi ses courtisans, le persuada de la réalité de sa mission, obtint une armée à laquelle se joignirent :
- Étienne de Vignolles, dit La Hire ;
- Ambroise de Loré, baron d'Yvré ;
- Jean Poton, seigneur de Xaintrailles, futur maréchal de France ;
- un prince de la cour, le duc d'Alençon ;
- Bueil et Gilles de Rais.
Entrée dans Orléans le 29 avril, la Pucelle emporta en quatre jours les principales bastilles, dont celle des Tourelles, à l'attaque de laquelle elle fut blessée. Ainsi dégagée, Orléans pouvait enfin se ravitailler. Le 8 mai, les Anglais de Suffolk et de l'homme de guerre John Talbot, futur premier comte de Shrewsbury, déguerpirent. Jeanne d'Arc, accompagnée d’Arthur de Bretagne, comte de Richemont, rencontra ensuite une armée anglaise commandée par Talbot le 18 juin 1429. Les Français, parmi lesquels figuraient Jean Dunois, comte de Longueville, dit le Bâtard d'Orléans, La Hire, Loré et Xaintrailles, battirent ce jour-là les Anglais et firent prisonnier Talbot. Ce furent ensuite les prises d'Auxerre, de Troyes et de Châlons. Jeanne d'Arc s'ouvrait ainsi la route de Reims. Elle y fit sacrer le roi en juillet 1429.
Elle essaya ensuite, vainement, de reprendre Paris, se faisant blesser le 8 septembre à la porte Saint-Honoré. S'étant repliée, elle échoua devant La Charité-sur-Loire. Elle prit Compiègne mais fut capturée, lors d'une sortie, par les Bourguignons de Jean de Luxembourg-Ligny, comte de Saint-Pol, qui, pour 10.000 écus d'or, la vendit aux Anglais. Ceux-ci la déférèrent devant un tribunal ecclésiastique présidé par l'évêque de Beauvais, Pierre Cauchon, une créature d’Isabeau de Bavière, elle-même toute dévouée au frère du roi d'Angleterre, John de Lancastre, duc de Bedford. Jugée comme hérétique et sorcière et comme relapse (pour s'être rétractée après avoir, dans un moment de faiblesse, accepté d'abjurer), elle fut condamnée à être remise au bras séculier et à être brûlée vive.
En 1450, Charles VII, qui l'avait lâchement abandonnée à son sort, fit procéder à une enquête qui aboutit à un procès de réhabilitation en 1456. En 1909, Jeanne d'Arc fut béatifiée et canonisée en 1920. Elle est fêtée le deuxième dimanche de mai.
Jeanne d'Arc continue à personnifier le patriotisme français et le courage. On connaît sa fière réplique à ceux qui lui demandaient pourquoi elle avait porté son étendard à l'église lors du sacre de Reims : « Il avait été à la peine, il était juste qu'il fût à l'honneur ». À Pierre Cauchon qui lui demandait si elle pensait être en état de grâce elle répondit : « Si je n'y suis, que Dieu m'y mette ; si j'y suis, que Dieu m'y tienne ». Quant au courage de Jeanne, il est symbolisé par cette fameuse déclaration anglaise : « Nous avons brûlé une sainte ! ».
Colonel Hardÿ de Périni, Batailles françaises, Châteauroux, A. Majesté et L. Bouchardeau, 1844, première série, 1214 à 1559 :
« Campagne de 1429. Charles VI était mort en 1423, presque en même temps qu’Henri de Lancastre, dont le fils, un enfant de dix-huit mois, avait été proclamé, à Saint-Denis, roi de France et d’Angleterre. Une paysanne lorraine, Jeanne la Pucelle se dit envoyée par Dieu, pour faire sacrer à Reims le gentil Dauphin et bouter les Anglais hors de toute France ».
« Après avoir délivré Orléans, assiégé par Salisbury, elle se mit en campagne, le 10 juin 1429, avec 1.200 lances et les milices enthousiastes des villes de la Loire, pour assiéger Meung-sur-Loire et Jargeau, où les Anglais s’étaient réfugiés ».
« Le duc d’Alençon, Dunois, le comte de Vendôme, le maréchal de Boussac s’étaient faits volontairement les lieutenants de la Pucelle d’Orléans ».
« Jargeau fut emporté d’assaut le 14 juin ».
« Le 15, Jeanne d’Arc vint mettre le siège devant Beaugency ».
« Là, elle fut rejointe par le connétable de Richemont avec 400 lances et 800 archers bretons ».
« Le château de Beaugency capitula dans la nuit du 17 juin ».
« Environ une heure après le départ de la garnison, vint en l’ost des Français la nouvelle que Talbot, Scales, Jehan Fastolf et plusieurs autres seigneurs et capitaines d’Angleterre, suivis de 4 ou 5.000 hommes, étaient passés par Yenville-en-Beauce pour venir droit à Meung-sur-Loire et de là combattre ceux du siège de Beaugency ([…] ».
« […] Le connétable et les capitaines, sur les instances de Jeanne d’Arc, décidèrent qu’on donnerait immédiatement la chasse à l’armée anglaise, pour la combattre quelque part qu’on pût la trouver […] ».
« […] Ce fut un cerf, levé par les éclaireurs français dans les bois de Patay, qui leur révéla le voisinage de l’armée ennemie […] ».
« […] Bataille de Patay (18 juin 1429) […] C’est la première fois peut-être, depuis le commencement de la guerre de Cent ans, que nous voyons les capitaines anglais être indécis et divisés au moment de l’action. Jeanne d’Arc a changé les rôles : la décision, l’unité d’action, la confiance, ces causes premières des victoires anglaises, sont passées dans le camp français ».
« Les capitaines anglais qui voulaient battre en retraite en présence de l’ennemi, l’emportèrent. Alors les hommes d’armes, qui avaient mis pied à terre pour se former en arrière de la haie occupée déjà par les archers, remontèrent à cheval et tournèrent le dos […] ».
« […] Environ dix-huit cents Anglais restèrent sur la place ; il y eut de 100 à 120 prisonniers, parmi lesquels les principaux seigneurs étaient Henri Branche, Talbot, Scales, Hongreffort, messire Thomas de Rampston et plusieurs autres […] ».
« […] Le sacre et le martyre. Le voyage de Reims fut une marche triomphale de 50 lieues ; les villes ouvraient leurs portes, les hommes d’armes accouraient, les compagnies bourgeoises grossissaient la foule des gens de pied qui voulaient combattre l’étranger sous l’étendard de la Pucelle ».
« Pendant la cérémonie du sacre (17 juillet), tous les regards de la foule, entassée dans la cathédrale de Reims, se portaient sur l’héroïne, debout derrière le trône royal, son étendard à la main […] ».
« […] Jeanne d’Arc voulut reprendre Paris ».
« Malgré la cour, malgré le roi, elle vint se poster à la Chapelle-Saint-Denis et, le 7 septembre, elle tenta un coup de main hardi contre le boulevard Saint-Honoré. Mais elle fut blessée et conduite à Compiègne, que les Bourguignons assiégeaient ».
« Prise dans une sortie, le 24 mai 1430, elle fut vendue aux Anglais et martyrisée pendant plus d’une année, sans que le roi qu’elle avait fait sacrer, sans que les gens de guerre qu’elle avaient conduits à la victoire, eussent fait une démarche, ou versé une goutte de sang pour la secourir ; la noble héroïne française fut brûlée vive à Rouen, comme sorcière, le 30 mai 1431 ».
« Chef de guerre, Jeanne d’Arc a résumé sa tactique dans la fière réponse qu’elle fit à ses juges :
- Je disais : « Entrez hardiment parmi les Anglais et j’y entrais moi-même ! ».
Histoire militaire des femmes :
« Au mois d’avril 1429 la ville d’Orléans se trouvait assiégée par les Anglais, quatre bastilles l’enserraient ; son fort devenait douteux. Tout d’un coup, le 29 avril, un convoi se présente, il passe au travers des Anglais, il entre triomphalement dans la ville. Qui vient d’accomplir ce miracle ? La résolution succédant à la nonchalance. Qui a opéré ce revirement , qui a tiré Charles VII de son sommeil léthargique, qui l’a rendu à la France ? Le dévouement d’une jeune fille de dix-huit ans(*) qui s’est dit : « Volons aux combats, agissons, osons ; la France s’est toujours relevée quand elle l’a voulu ».
« Une fois la cour séduite par son grand sens et son éloquence, une fois qu’une fonction militaire lui est accordée, cette jeune fille habituée dès son enfance à manier un cheval, au milieu d’un pays(**) où l’on s’occupe de l’élevage de la race chevaline, rompue à l’exercice de la lance par des jeux fréquents au milieu des guerres civiles, arrive sous les murs d’Orléans avec un convoi que les Anglais laissent passer, nous venons de le dire, et s’enferme dans la ville. Elle écrit au duc de Bethfort : « Duc, vous qui vous dites régent de France par le roi d’Angleterre, la Pucelle vous prie et requiert que vous vous faciez destruire. Si vous ne faictes raison, aux yeux pourrez veoir qu’en sa compagnée les François firent le plus beau fait qui oncques fut faict en la chrétienté ». Puis elle se résout à passer de la défensive à l’offensive ; malgré une délibération contraire du conseil de guerre, au lieu de laisser l’ennemi continuer ses progrès, elle sort de la cité entraînant sur ses pas chevaliers et soldats, s’acharne après la bastille de Saint-Loup, la presse si bien qu’elle se rend ; les trois autres bastilles éprouvent le même sort et les Anglais lèvent le siège. Quel exemple plus probant de l’utilité d’animer la défense et d’opposer à l’assaillant ses propres armes, celles de l’audace, de la volonté, de la conquête successive et pas à pas, en un mot de chercher à renverser les rôles ? ».
« Orléans délivrée, Jeanne propose sans hésiter de procéder à l’acte le plus significatif et le plus essentiel, mais aussi le plus difficile, celui du couronnement du roi de France dans Reims. La marche est malaisée, et traverse les provinces occupées par les Anglais ; mais, outre la portée du couronnement, véritable témoignage de délivrance, la possession de Reims augmentera ce noyau du beau royaume de France qu’il faut conserver avant tout et d’où, fortifiés et concentrés, nous pourrons rayonner vers nos frontières pour les purger à leur tour de la présence de l’ennemi. Charles VII hésite longtemps, mais Jeanne insiste et le monarque finit par promettre de marcher sur Reims, mais à une condition, c’est que les places voisines de la capitale de l’Orléanais seraient reprises. La Pucelle se rend donc sous Gergeau, ville très fortifiée, dont la garnison montait à douze cents hommes et contre laquelle les Français venaient d’échouer dans une tentative récente ; d’après son conseil on donne l’assaut. Elle se montre au premier rang, et plante sa bannière au pied des remparts, sous une grêle de traits ; une pierre l’atteint et la renverse dans le fossé, mais de là elle crie aux Français : « Amis, Notre Seigneur a condamné les Anglais, Ils sont à vous, bon courage ! » et ce mot enflamme tellement les cœurs que la ville est emportée. La Ferté-Hubert est évacuée et Beaugency ne tarde pas à se rendre. Le lendemain de la prise du château de cette dernière place, les Anglais, qui viennent d’opérer leur jonction, se trouvent à Pathay, non loin de Rouvrai où l’un de leurs chefs, Fastol, a naguère été victorieux ; ils sont en nombre, mais les temps sont changés, et exhortés par Jeanne, les Français attaquent non seulement sans se former, mais même sans se reconnaître ; heureusement c’était le moment de l’enthousiasme dans sa nouveauté et sa vigueur entière. Cet enthousiasme produit son effet et en peu d’instants la victoire se déclare pour le drapeau que défend la Pucelle. Fastol lui-même s’enfuit ; l’autre chef anglais, Talbot, demeure au nombre des prisonniers. À la suite de ce succès, Janville, place d’approvisionnement des Anglais, se rend. De tels succès déterminent chez l’indécis Charles VII la résolution d’accomplir sa promesse ; il se met en route pour Reims, et en dix-huit jours franchit l’intervalle entre Gien et la ville du sacre, malgré plusieurs rivières, malgré plusieurs places fortes ; le 17 juillet 1429 il est sacré et acquiert une force morale importante aux yeux des populations. À ce résultat s’en joint un autre dû à l’influence de Jeanne ; on accourt plus volontiers sous les drapeaux et l’armée s’accroît. Si le roi de France eût été moins dénué d’argent, tout aurait bien été, au moins tant qu’il ne serait pas retombé dans sa funeste apathie. […] ».
« Après le couronnement vint l’expédition de l’Île-de-France. Un grand nombre de places cèdent aux Français : deux fois ces derniers offrent la bataille […], deux fois Bedfort la refuse et se retire de Dammartin, ville près de laquelle devait s’engager la seconde action ; l’armée royale chemine par Compiègne, Beauvais, Lagny, Saint-Denis, localités dont elle s’empare, atteint la Chapelle, près Paris, et fait l’attaque de cette capitale, attaque dans laquelle Jeanne est blessée ».
« Voici comment ce fait arriva. Il paraît que Jeanne, suivant sa coutûme, conseillait vivement d’en venir à un assaut, ignorant la grande profondeur de l’eau dans les fossés. Dans le conseil elle éprouva une vive opposition, car déjà on l’enviait et beaucoup n’eussent pas été fâchés qu’il lui arrivât mal. Néanmoins elle vint contre la ville avec un gros de gendarmes et en compagnie du seigneur de Rais, maréchal de France, descendit en l’arrière-fossé, très accompagnée encore, monta sur un dos-d’âne, c’est-à-dire sur une dame […], et, s’aidant d’une lance, sonda l’eau du fossé. Pendant qu’elle se livrait à cet examen des lieux, un trait lui perça la cuisse. Malgré cette blessure, elle demeura sur ce point, fit apporter force fascines et bois de toute espèce, et, les jetant à l’eau, essaya de combler le fossé. Son intention était de marcher droit à la muraille par-dessus ce comblement ; mais la chose était des plus difficiles, et il eût fallu des approvisionnements de bois plus considérables. La nuit venue, elle persistait encore ; en vain on l’envoyait chercher, et il fallut que le duc d’Alençon vînt lui-même pour l’arracher à son projet et surtout au danger qu’elle courait […] ».
« La campagne suivante, celle de 1430, s’annonçait néanmoins sous d’heureux auspices ; elle débute bien. Jeanne, rassemblant les garnisons des alentours, y défait elle-même […] le partisan bourguignon Franquet d’Arras […] et le fait prisonnier. Elle revient alors à Lagny, puis à Soissons, Crépy et Compiègne. Nous touchons à la catastrophe qui termine sa carrière militaire. Toutefois, de Compiègne qui lui sert presque de centre pour rayonner dans les alentours de cette place, elle court à Pont-l’Évêque, bourg situé à 300 mètres au sud de Noyon, et par lequel Philippe de Bourgogne recevait ses approvisionnements tirés de Noyon et de la Picardie. En vain Chabannes et Xaintrailles l’accompagnent, en vain deux mille hommes la suivent, en vain même la garnison anglaise de Pont-l’Évêque est sur le point de céder ; les Bourguignons postés à Noyon paraissent sur nos derrières, nous prennent entre deux feux, nous obligent à nous replier (mai 1430). Qu’on ne s’étonne pas de voir Jeanne céder ainsi à la nécessité, car, si cette expédition lui fait honneur, elle ne pouvait s’accomplir qu’à la condition de réussir promptement ; en la tentant, en effet, on s’exposait à être coupé par l’armée bourguignonne occupée au blocus de Gournay […] ».
« Quand Jeanne revint à Compiègne, cette dernière ville se trouvait déjà un peu à l’estroit. Elle voulut la dégager, espérant, si elle parvenait à rendre ses alentours plus libres, pouvoir ensuite y batailler assez pour forcer l’ennemi à lever le siège. C’était un grand coup à frapper ; suivant son habitude, elle le désira définitif, retentissant et surtout immédiat. Sortant donc peu d’instants après sa rentrée dans la cité compiégnoise, elle courut à l’un des deux camps bourguignons pendant que le gouverneur de la ville se chargeait du camp anglais ; elle réussit à bouleverser les deux camps bourguignons, mais, une fois ralliées, les troupes de ces camps revinrent ensemble à la charge ; la lutte recommença. Les Anglais, ayant échappé à l’attaque qui les menaçait, se montrèrent à leur tour sur les derrières de la troupe de la Pucelle ; une terreur panique se déclara, les efforts de notre héroïne devinrent inutiles, et en voulant, non continuer la lutte, mais couvrir la retraite jusqu’au pont […], elle fut entourée et devint prisonnière (28 mai 1430) ».
« En présence de ce malheur on est tenté de croire à la trahison. Certes il existait au cœur de plus d’un chevalier une jalousie secrète contre cette jeune fille qui venait de s’improviser chef de guerre, qui montrait l’entente du métier des armes et semblait inspirée, au point d’ébranler les plus incrédules sur la réalité de sa mission providentielle ; il en était en cette occasion, et en particulier sous les murs de Compiègne comme dans tous les moments, en tous les lieux où surgit une personne de talent, on nie ses mérites, on l’accuse, on l’abat. En outre, Jeanne d’Arc était animée d’une volonté de fer, et cherchait à réussir par des moyens nouveaux ; donc imposant avec ténacité ce qu’elle voulait, donnant aux plus grands des ordres contraires à la routine, elle femme et très jeune, ou bien se passant de leur concours, elle dut irriter plus d’un esprit et faire naître contre elle des désirs de vengeance. Pourtant le jour même où elle tombe en captivité, assez de causes contraires se réunissent pour justifier un accident fatal, pour écarter l’idée de l’intervention d’un traître. En effet, il y a lieu de supposer que ce jour-là, venant de Pont-l’Évêque, elle ne peut pénétrer dans Compiègne sans un combat. Or, un combat livré le matin, après une route succédant elle-même à un engagement, formait un mauvais prélude pour une sortie aussi importante que celle dirigée contre les trois camps ennemis ; si Jeanne, qui résistait à tout, n’était pas fatiguée (et cela n’est pas démontré), son entourage l’était, et certes les conditions dans lesquelles s’accomplissait cette sortie devenaient mauvaises. Ainsi la témérité de la Pucelle peut avoir été cause indirecte de sa captivité. Nous cherchons à jeter du jour sur ces événements, et point à accuser Jeanne, car il nous semble que cette fin cruelle de sa vie militaire, infligée par les Anglais, manquerait à sa mémoire, que son auréole de gloire serait moins grande, si elle avait fini tranquillement, même après l’expulsion entière de nos ennemis du sol national ».
« Et pour compenser ce semblant de reproches nous résumerons les états de service de Jeanne ; nul tableau ne saurait être plus éloquent. En quinze mois de guerre continuelle, elle a parcouru douze cents lieues ; voilà pour son activité qu’aucune autre femme guerrière n’a dépassée. Dans le même intervalle de temps elle a pris part à plus de vingt batailles ou combats, ou sièges ou levées de sièges, et elle a été blessée quatre fois ; voilà pour son courage. Quant au résultat final, c’est son influence qui a sauvé la France, et malgré sa disparition de la scène, Charles VII, grâce à elle, vit sa puissance grandir, ses alliances s’augmenter, sa capitale lui ouvrir ses portes ; encouragé par le succès, il jeta de côté les lisières que sa maîtresse ou ses favoris lui avaient imposées, administra sagement, rendit de bonnes lois, créa le premier des troupes permanentes, en un mot régna, et non sans gloire ».
« La mort de cette héroïne est à la fois grande et simple comme sa vie entière. Conduite dans une charrette sur la place du Vieux-Marché de Rouen, sous la garde de sept cents soldats anglais, et montée sur une plate-forme avec les prélats, elle entendit contre elle, contre ses actes, un sermon violent, puis se mit en prières publiquement, hautement, demandant à tous merci, requérant qu’on priât pour elle, et arrachant ainsi par sa parole des larmes à un grand nombre. Alors le bailli prescrivit au bourreau de s’emparer de sa personne et de la conduire au bûcher ; comme l’inquisition l’avait condamnée, la justice séculière ne pouvait intervenir que de la sorte pour l’exécution. Elle descendit de la plate-forme où elle venait d’être exposée, salua les assistants et monta sur le bûcher ; quand les flammes montèrent, ce fut elle qui eut la présence d’esprit d’avertir son confesseur afin qu’il se retirât ; restée seule, elle invoqua les saints et les saintes du paradis et mourut en proférant le nom de Jésus. Cette mort cruelle n’assouvit pas encore la haine de ses ennemis, la haine plutôt des ennemis de la France ; le jour même le cardinal d’Angleterre ordonna au bourreau, qui le fit sans délai, de rassembler ses restes et de les jeter dans la Seine ».
« La mémoire de cette touchante victime fut réhabilitée le 7 juillet 1456 seulement. Charles VII était mort, mort de faim, par la crainte d’être empoisonné par son fils ; l’Angleterre tremblait encore devant son souvenir, du moins ceux de ses soldats enrôlés pour servir en France désertaient au moment de l’embarquement ; l’évêque Pierre Cauchon, qui l’avait jugée le voulant bien, puisqu’elle n’appartenait pas à son diocèse et n’avait pas été prise sur son territoire, était mort excommunié et son corps avait été jeté à la voierie par la populace ; ne dirait-on pas le jugement de Dieu ? ».
« Jeanne d’Arc, relatons-le pour terminer, menait une vie sobre, sans laquelle on accomplit rarement de grandes choses ; elle buvait, mangeait et dormait peu. Elle préférait l’entretien des hommes à celui des femmes, trouvant sans doute celui-ci futile, et cela s’explique par le fait qu’elle ne prenait point part à leurs occupations habituelles ; même avec les hommes l’exubérance des paroles la fâchait […]. Elle se tenait bien à cheval […], et supportait facilement la fatigue ; on la vit une fois rester sous les armes, sans se reposer, durant six jours et six nuits. Son humanité envers les soldats malades ou blessés a été souvent célébrée. Enfin, particularité essentielle, imitée plus tard par la Tour d’Auvergne, le premier grenadier, elle ne tuait pas ; aussi ne se servait-elle pas de son épée ornée de cinq croix […], et c’est pour cela qu’elle portait une bannière ».
(*) Elle s’en donne elle-même dix-neuf, un an après, lors de son premier interrogatoire, le 21 février 1430. Hume se fait l’écho d’un bruit qui attribuait vingt-sept ans à notre héroïne.
(**) Elle est née à Domrémy, près de la frontière de Champagne et de Vaucouleurs.
Représentations diverses de Jeanne d'Arc : parmi les œuvres qui lui sont consacrées, il convient de citer les tableaux de Paul Delaroche (1824), d’Eugène Devéria (1831), d’Ingres (1854), de Bastien-Lepage (1880), l' « Entrée de Jeanne d'Arc à Orléans » de Scherrer (1887), « Jeanne d'Arc à Reims », peinture murale de Lenepveu au Panthéon, etc. Parmi les statues : celles de Barrias à Rouen, de Gois (1804) à Orléans, de la princesse Marie d'Orléans, de Rude (1852), de Chapu (1872), de Frémiet (1874) sur la place des Pyramides à Paris, de Roulleau, de Paul Dubois (1889) à Reims et sur la place Saint-Augustin à Paris, de Réal del Sarte (1928) à Rouen, etc.
Bibliographie : il faut surtout retenir :
- Jules Quicherat, Procès de condamnation et de réhabilitation de Jeanne d’Arc, 1841-1849, 5 volumes ;
- Aperçus nouveaux sur l’histoire de Jeanne d’Arc, 1850 ;
- Pierre Champion, Procès de condamnation, 1920.
Jules Quicherat fait état d'une aventurière qui réussit à se faire passer pour Jeanne d'Arc : voir Armoises (Jeanne des).
JEANNE DE FLANDRE.- Duchesse de Bretagne, fille du comte de Flandre Louis Ier, femme du duc de Bretagne et comte de Montfort Jean IV, morte en 1374. Elle disputa le duché de Bretagne à Jeanne de Penthièvre, comtesse de Blois, alliée de la France, lors de la guerre de Succession de Bretagne, dite guerre des deux Jeanne. Son mari ayant été fait prisonnier, elle continua courageusement la guerre, avec l'appui des Anglais, et soutint deux sièges dans Hennebon, près de Lorient, en 1342 et 1343. La guerre se termina à la bataille d'Auray par la victoire de Jean IV sur Charles de Blois, mari de Jeanne de Penthièvre, qui périt dans la bataille.
Histoire militaire des femmes : « Elle montait à merveille à cheval, avait courage d’homme et cœur de lion et frappait dans la mêlée des coups du plus vigoureux effet. […] Jeanne de Montfort parcourut ensuite ses autres villes et forteresses, menant son jeune fils avec elle, et releva partout le courage de ses partisans comme à Rennes, augmenta les garnisons, pourvut les places d’approvisionnements, puis vint s’enfermer pendant l’hiver dans le port d’Hennebon, grande ville fortifiée et défendue par un important château. La guerre contre elle commença par le siège de Rennes ; cette cité prise, son adversaire, Charles de Blois, vint devant Hennebon afin de finir la lutte d’un seul coup en la prenant (1342). Elle avait fait appel au roi d’Angleterre, mais ce secours tardant, elle prescrivit de sonner la baricloche (cloche du beffroi), afin que chacun s’armât. Les assiégeants se présentèrent aux barrières pour paleter (combattre aux palissades) et escarmoucher ; elle envoya une sortie contre eux. Les assiégeants repoussés assaillirent vigoureusement les barrières le lendemain à l’aube ; cette fois la lutte dura jusqu’à midi, avec foison de morts pour le côté de l’attaque. […] Peu après, notre héroïne, montée sur une tour, s’aperçut que les tentes se trouvaient abandonnées, chacun étant accouru pour voir l’assaut qui se donnait. Aussitôt pour détourner le danger, car déjà la brèche était praticable, elle monta sur son coursier, armée comme elle étoit, prit avec elle 300 gendarmes à cheval lesquels gardoient une porte que l’on n’assailloit point ; sortant brusquement par cette porte ou poterne, elle se jeta sur les tentes des ennemis, mit facilement en fuite les garçons et valets qui s’y trouvaient et les incendia. Mais à la vue des flammes les assiégeants se réunirent et lui coururent sus ; vivement pressée, elle ne perdit point courage et chevaucha si bien qu’elle gagna un château voisin, celui d’Auray probablement. Pendant son absence la garnison d’Hennebon s’inquiétait, ignorant ce qu’elle était devenue et alarmée des moqueries des assiégeants qui lui criaient : « Votre comtesse est perdue ; vous ne la trouverez mie en pièce ». Mais elle reparut subitement un jour au soleil levant à la tête de 500 combattants, et, après une action qui dura jusqu’après midi, parvint à se faire ouvrir une porte et à rentrer dans le château qui dominait la ville. Cet exploit décida les assiégeants à partager leurs efforts entre Hennebon et Auray ; ils firent donc de leurs forces deux armées et entreprirent deux sièges. Néanmoins un émissaire vint dans Hennebon pour tenter un accommodement, et déjà les seigneurs qui s’y trouvaient se laissaient gagner, quand Jeanne les pria de sursoir à leurs résolutions, annonçant un secours sous trois jours. Et bientôt, en effet, regardant la mer, elle s’écria : « Je vois venir le secours que tant ai désiré ». Les navires apparurent amenant des renforts sous la conduite d’Amaury de Clisson, après soixante jours de retard occasionnés par des vents contraires. Le lendemain, Gautier de Mauny, chef des Anglais, voulut effectuer une sortie dans le but de détruire les machines des assiégeants ; il fut suivi de la plupart des chevaliers et de 300 archers. Le choc fut impétueux et, de la machine qui fut détruite, se dirigea sur le camp qui fut renversé ; alors l’ennemi tint tête et une mêlée s’engagea. Les assiégés résistèrent à merveille, se retirant peu à peu, et comme au seuil de la ville se trouvaient de leurs archers adroitement embusqués, et que les chevaliers d’Hennebon se mirent de cette dernière partie, la sortie rentra sans avoir essuyé des pertes trop sensibles et reçut de la comtesse Jeanne l’accueil le plus cordial […]. Cette vaillante dame reçut encore de son mieux les mêmes guerriers lorsqu’ils revinrent dans Hennebon après une course militaire dans laquelle ils avaient battu l’un des généraux ennemis, essayé de prendre La Rocheperiou et Faouet, et enlevé le château de Goy-la-Forest. La lutte tournant ensuite moins bien pour elle, Jeanne s’embarqua pour l’Angleterre dans le dessein de solliciter le roi Edouard […]. Comme elle revenait avec une flotte et des secours, elle rencontra, à la hauteur de Guernefey (1343), la flotte génoise dont disposait Charles de Blois, et n’hésita pas à livrer une bataille navale qui fut dure et crueuse (cruelle), suivant l’expression d’un contemporain ; elle y prit part […]. Après cette bataille, terminée par une tempête, les Anglais débarquèrent près de Vannes, prirent cette ville et plusieurs autres ; leur roi même vint se mettre de la partie. Quant à Jeanne, notre héroïne, elle lutta jusqu’au traité de 1343, par lequel les rois de France et d’Angleterre se retirèrent de la querelle, et même ensuite contre Charles de Blois, laissé à ses propres forces. Telle est cette femme guerrière, dont les hauts faits ont excité l’enthousiasme des chevaliers ses contemporains, pour qui la victoire s’est finalement déclarée, et dont la célébrité a fait dire qu’elle semblait le type de la femme féodale, voulant, à force de qualités viriles, se relever de l’incapacité prononcée contre elle par la loi salique ».
JEANNE Ière NAVARRE.- Reine de Navarre et de France, femme du roi de France Philippe IV le Bel, fille unique et héritière d’Henri Ier le Gros, roi de Navarre, comte de Champagne, née à Bar-sur-Seine en 1273, morte au château de Vincennes en 1305. Elle fut la mère de Louis X, de Philippe V et de Charles IV de France et la grand-mère de Jeanne II de Navarre. Quoique mariée au futur roi de France en 1284, elle conserva l'administration personnelle de ses États et chassa de la Navarre les Aragonais et les Castillans. En 1297, elle tailla en pièces l'armée du comte de Bar qui avait envahi la Champagne.
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Jeanne […] était une princesse aussi spirituelle que courageuse. Le comte de Bar étant venu fondre en Champagne l’an 1297, elle y courut à la tête d’une petite armée ; ce qui épouvanta tellement le comte, qu’il se rendit sans coup férir. Il ne sortit de prison qu’à des conditions très dures, entre autres, de rendre à la reine, en qualité de comtesse de Champagne, hommage pour le comté de Bar, qu’il croyait indépendant. Jeanne aimait l’éclat extérieur de la royauté, et poussait le penchant à la magnificence jusqu’à la jalousie. Ayant accompagné, en 1299, Philippe le Bel à Bruges, elle vit avec chagrin que les bourgeoises de cette ville, la plupart femmes de marchands, se montraient devant elle avec une parure aussi brillante que la sienne : « On ne voit, dit-elle, que des reines à Bruges. Je croyais qu’il n’y avait que moi qui dusse représenter cet état ». On dit qu’elle fit augmenter la rançon des habitants, mais cette petitesse paraît au-dessous d’une aussi grande princesse. Elle mourut à Vincennes, le 2 avril 1305, à 33 ans, et fut enterrée dans l’église des Cordeliers de Paris ».
JEANNE DE PENTHIÈVRE.- Duchesse de Bretagne, fille du comte de Penthièvre Guy de Bretagne, héritière du duc de Bretagne Jean III, son oncle, femme de Charles de Blois, née en 1319, morte en 1384. Elle fit valoir par les armes ses droits de succession contre son autre oncle, Jean IV, qui était marié à Jeanne de Flandre. La guerre des deux Jeanne se termina par la bataille d'Auray, en 1364, gagnée par le mari de Jeanne de Flandre, soutenu par les Anglais de John Chandos, sur le mari de Jeanne de Penthièvre qui périt dans la bataille. Voir Jeanne de Flandre.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Elle épousa en 1337 Charles de Blois ou de Châtillon, neveu du roi de France Philippe VI. Peu avant sa mort, en 1341, son oncle Jean III le Bon, duc de Bretagne, la désigna comme son héritière, au détriment de son frère, Jean de Montfort, marié à Jeanne de Flandre. Celui-ci prit les armes et s’adjugea la majeure partie de la province (1341). Philippe VI s’interposa et accorda la Bretagne au mari de Jeanne de Penthièvre. S’ensuivit une longue guerre, dite la « guerre des deux Jeanne ». En l’absence des maris faits prisonniers –Jean de Montfort par les Français, de 1341 à 1343 ; Charles de Blois par les Anglais alliés aux Bretons, de 1347 à 1351-, les épouses poursuivirent les hostilités. Jeanne de Penthièvre dut verser une rançon considérable pour obtenir la libération de son mari. Elle montra une détermination sans faille et fit échouer toute tentative de négociation. Toutefois, elle dut s'incliner après la mort de Charles de Blois, tué à la bataille d’Auray en 1364, et accepter le traité de Guérande (1365) qui attribuait la Bretagne à Jean IV, le fils de Jean de Montfort, ce dernier ayant été tué au siège d'Hennebont en 1345. Elle conservait néanmoins le comté de Penthièvre et le vicomté de Limoges. Elle mourut sans postérité ».
JEANNE ENRÍQUEZ.- Voir Enríquez (Jeanne).
JEANNE HACHETTE.- Voir Hachette (Jeanne).
JOURDAN (Thérèse).- Voir Rohmer (Catherine).
JUDITH.- Héroïne juive, veuve d'un riche citoyen de Béthulie, qui sauva sa cité assiégée par Holopherne, général du roi d'Assyrie Nabuchodonosor, vers 659 av. J.-C. Judith parvint à se faire recevoir par Holopherne qui, frappé par sa beauté, l'invita à un repas. Lorsque, ivre, il s'endormit, elle lui trancha la tête avec son propre glaive et emporta cette tête qui fut exposée sur les murs de la ville. Les Assyriens, terrifiés, levèrent le siège après avoir subi une sanglante défaite.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Fille de Merari, de la tribu de Siméon, elle passait pour être d’une grande beauté et d’une grande vertu. Lors du siège de Béthulie par Holopherne, général des troupes assyriennes au service de Nabuchodonosor, elle était la veuve de Manassès depuis trois ans et demi. Pour sauver la ville affamée et sur le point de capituler, elle se présenta à Holopherne en se faisant passer pour un transfuge. Après l’avoir séduit, elle passa la nuit avec lui et, profitant d’un sommeil dû à l’ivresse, elle lui trancha la tête, qu’elle rapporta à Béthulie, provoquant ainsi la déroute de l’ennemi. L’histoire de Judith nous est connue par un des livres de l’Ancien Testament qui porte son nom. Elle n’apparaît à aucun autre endroit de la Bible. Elle est considérée par les exégètes comme la représentation symbolique du peuple juif. Le Moyen Âge a vu en elle une préfiguration de la Vierge ; la Renaissance l’a exaltée comme l’incarnation de la résistance aux tyrans. Elle a inspiré de nombreux peintres, dont Cranach (deux versions à Vienne), Bronzino (Florence), Michel-Ange (chapelle Sixtine), Véronèse (Vienne). Donatello a fait d'elle une sculpture (Florence). La scène du meurtre a été représentée par le Tintoret (trois tableaux à Madrid), le Caravage (Rome), Rubens (Brunswick). Boticelli la montre revenant à Béthulie, l'épée à la main ».
KAHENA ou Kahina (la).- Voir Dihya.
KAÏDOS.- Héroïne grecque qui se distingua dans la guerre d'indépendance des Grecs contre la Turquie. Combattant aux côtés du polémarque Samuel, elle alluma une mine sous les murailles de Vilia et défendit le monastère de Saint-Vénérande une pique à la main quand sa carabine devint inutilisable.
KARA-FATIMA.- Héroïne du Kurdistan qui, en 1854, fit une entrée triomphale à Constantinople, à la tête de 500 Kurdes, enrôlés et exercés par elle, venus au secours de la Turquie.
KENNAVA.- Lors du siège de Haarlem par les Espagnols, en 1572, il y avait, parmi les assiégés, une compagnie de femmes.
Histoire militaire des femmes : « Organisées militairement, et armées d'une pique, d'une épée et d'un pistolet, ces Amazones rivalisaient de zèle avec les hommes dans le travail destiné à l'amélioration des fortifications de la place. Elles prenaient également part aux factions sur les remparts et même aux sorties à l'extérieur contre les assiégeants. Une femme âgée de cinquante ans, nommée Kennava, les commandait et se distingua à leur tête durant ce siège remarquable par l’opiniâtreté des habitants ».
LABÉ (Louise Charly, dite).- Femme poète française, née à Lyon vers 1522, morte à Lyon vers 1565. Fille et femme de cordiers, surnommée « la Belle Cordière », elle a écrit quelques-uns des plus beaux vers d'amour qu'il y ait en langue française. Elle aimait pratiquer le maniement des armes et s'habillait en homme lorsqu'elle montait à cheval. Elle prit part à la défense de Perpignan lors du siège de 1542.
Histoire militaire des femmes :
« Au siège de Perpignan, en 1542, une jeune fille, du nom de Louise Labé, connue par ses poésies, parut en compagnie de son père, et, entraînée par son imagination hardie et romanesque, prit part aux opérations de la défense, et mérita par ses courageux exploits le surnom de capitaine Loys. Elle avait pris pour combattre des habits d’homme. Un anonyme du temps a célébré ses prouesses :
Là sa force elle déploye,
Là de sa lance elle ploye
Le plus hardi assaillant.
« Peu après elle se maria dans la ville de Lyon et renonça aux armes ; sa conduite ultérieure paraît avoir laissé à désirer. Elle mourut vingt-quatre ans après la défense de Perpignan, son unique action de guerre ».
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Elle était fille d’un nommé Charly, dit Labé. Son père lui donna une éducation très soignée, lui fit apprendre la musique, plusieurs langues, et, ce qui n’est pas ordinaire, elle reçut des leçons d’équitation et de tous les exercices militaires : on la vit même, […] en 1542, figurer parmi les guerriers français au siège de Perpignan. Son nom de guerre était le capitaine Loys. Parmi les éloges que les écrivains du temps lui prodiguent, ils n’oublient pas de vanter la force de son bras, son courage et ses exploits. La première campagne de Louise Labé ne fut pas heureuse ; les Français furent obligés de lever le siège de Perpignan. Elle renonça au métier de la guerre pour se livrer à l’étude, à la poésie et aux amours, qui furent ses principales occupations. […] Une Épitre dédicatoire à Clémence de Bourges, écrite avec esprit ; une Pièce en prose, intitulée : Le Débat de l’amour et de la folie, où se trouve de la grâce et de l’invention ; trois Élégies, vingt-quatre Sonnets, dont le premier est en Italien, forment la totalité de ses Œuvres publiées ».
LAISNÉ.- Voir Hachette (Jeanne).
LAMPETO.- Voir Amazones.
LANGEVIN.- Voir Bordereau (Renée).
LA PORTE.- Voir Porta (Bianca).
LA ROCHEJACQUELEIN (marquise Marie-Louise-Victoire de).- Histoire militaire des femmes : « Née De Donnissan (Versailles, 1772 – Orléans, 1857). Filleule de Madame Victoire, tante de Louis XVI, elle épousa à dix-sept ans son cousin, le marquis de Lescure. Vendéenne dans l'âme, elle le suivit lorsqu'il participa à l'insurrection chouanne. Il fut tué à ses côtés à Cholet, en octobre 1793, lorsque les quarante mille hommes qu’il commandait furent écrasés par Hoche et Marceau. Elle resta avec l'armée vendéenne et, après la défaite finale de Savenay (décembre 1793), elle put s'échapper et se réfugia en Espagne. Profitant de l'amnistie, elle revint en France après 1795 et vécut dans la retraite de son château de Citran. Elle se remaria avec le marquis de La Rochejacquelein en 1801 et s'exila lors de la seconde Restauration. Ses Mémoires (1815) sont une source intéressante sur sa famille et sur les guerres de Vendée ».
LA ROCHETTE (Mademoiselle de).- Dictionnaire des femmes célèbres : « Héroïne française (XVIIIe siècle). Pupille du chef vendéen François de Charette, elle se battit pour lui avec ses deux sœurs Sophie et Céleste et reçut sept coups de sabre. Elle parvint à s'échapper et se cacha dans le bocage. Capturée par les Bleus, elle fut traînée de cadavre en cadavre afin d'identifier Charette que l'on croyait mort. Comme elle ne reconnaissait personne, elle fut emprisonnée et survécut aux guerres de Vendée ».
LA TOUR (Claudine de).- Comtesse de Tournon, parente de Catherine de Médicis, qui, à deux reprises, en 1567 et en 1570, défendit avec énergie la ville de Tournon, assiégée par les protestants qu'elle obligea à lever le siège.
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Fille de François de La Tour, premier du nom, vicomte de Turenne et de Anne de La Tour de Bologne, sa seconde femme, fut mariée, en 1535, à Just, comte de Tournon. Elle était parente de Catherine de Médicis, et son courage héroïque parut à la défense de la ville de Tournon, assiégée deux fois par les protestants, l’une en 1567, et l’autre en 1570. Madame de Tournon leur fit lever le siège honteusement. Elle mourut le 6 février 1591, avec la réputation d'une héroïne. Elle a eu son historien dans Jean Villemin, qui a fait en vers latins, Historia belli quod cum hœreticis rebellibus gessit, anno 1567, Claudia de Turenne, domina Turnonia, auctore Joanne Villemino, in 4e, Paris, 1569 ».
LA TOUR (Henriette de).- Histoire militaire des femmes : « Pendant l’expédition dirigée sur l’Irlande, au mois d’août 1798, pour aider à l’insurrection de ce pays contre les Anglais(*), M. Moreau de Jonnès, alors officier d’artillerie, se trouva hériter d’un officier mourant, nommé De La Tour, d’un fils très jeune qui l’avait suivi et qu’il le pria de ne pas abandonner. Après le passage du fleuve Shannon, à Balintra, et le combat de Ballinamuck qui s’ensuivit, les forces françaises défaites se trouvèrent dans la situation la plus critique, et l’on parla d’une reddition. Afin d’éviter le triste sort de devenir prisonnier de guerre, M. Moreau de Jonnès prit le parti de tenter de s’échapper ; le jeune homme déclara qu’il le suivrait et aussi plusieurs de ses artilleurs. Les voilà donc gagnant une chaîne de coteaux éloignés, en compagnie de cinq soldats, et avec l’intention de rejoindre le cours du Shannon, de le suivre jusqu’à ce qu’il devînt navigable, de trouver une barque, de s’y jeter et de gagner ainsi quelque navire assez fort pour tenir la mer. Arrivés sur le bord du fleuve, ils rencontrèrent un batelier qui les passa de l’autre côté. À la nuit, au lieu de se cacher dans un bois fourré, ils se réfugient dans une grange placée sur une éminence et s’y endorment après avoir eu soin de laisser une sentinelle au dehors. Au jour une décharge de mousqueterie résonne dans la grange, la sentinelle et les artilleurs sont tués ; M. Moreau de Jonnès et le jeune Henri de La Tour se blottissent dans le chaume qui couvre la grange et attendent le départ des ennemis. Ceux-ci éloignés, ils descendent de leur cachette, trouvent un pâtre occupé à dépouiller leurs compagnons morts, l’étendent à terre d’un coup de sabre, et quittent à leur tour cette grange qui avait failli leur devenir funeste. Ils atteignent bientôt les campagnes du Munster, province appartenant à l’insurrection et où ils rencontrent de la bienveillance et du pain chez les paysans. Mais un accident terrible les atteint ; ils tombent tous deux dans un affreux bourbier, en se dirigeant vers la côte, et ne sortent de ce vaste bog, de cette véritable mer de boue, qu’après des efforts inouïs, en plantant leurs baïonnettes dans l’escarpement du haut duquel ils étaient tombés et en se soulevant peu à peu sur ce frêle point d’appui. Une fois tirés de ce mauvais pas, ils n’ont plus rien, ni armes, ni vivres, ni munitions, ni papiers de service ; en outre, ils sont couverts de boue et affreux à voir ; pourtant ils se présentent dans un château peu éloigné, et y reçoivent la plus généreuse hospitalité. Comme il faut changer d’habits, vu le bain glacial qu’on vient de subir, force est au jeune Henri de La Tour de se confier à la maîtresse de maison, de lui déclarer qu’elle est femme et a revêtu les habits d’homme uniquement pour suivre son père malade : la transformation opérée, c’est donc Henriette de La Tour qui apparaît. Ainsi le jeune compagnon de M. Moreau de Jonnès, ainsi la personne qui venait de courir avec lui les dangers dont nous avons parlé, et qui précédemment avait participé à l’expédition d’Irlande, ainsi celui qui venait de mettre au grand jour son courage, sa présence d’esprit, son intelligence, ses aptitudes militaires, en combattant, en ouvrant un avis, en devinant le terrain, en sachant tirer parti des moindres particularités, celui-là même était une femme ; c’est à ce titre que nous avons dû en parler dans ce livre(**) ».
(*) Cette expédition d’Irlande prouve avec quelle facilité les Français se laissent entraîner à entreprendre légèrement une expédition sans la munir même du strict nécessaire, et rappelle l’énergie désastreuse avec laquelle nos généraux veulent néanmoins que tout soit possible à des militaires français qui manquent de matériel et pour qui rien n’est prêt.
(**) Lisez cet intéressant épisode au tome II des Aventures de guerre au temps de la République et du Consulat, par M. A. Moreau de Jonnès, membre de l’Institut, Paris, 1858, p. 17 à 44.
LA TOUR DU PIN DE LA CHARCE (Philis de).- Héroïne française née en 1645, morte en 1703.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Elle fut un modèle de résistance à l’envahisseur. En 1662, Victor-Amédée II, duc de Savoie, qui souhaitait conquérir le Dauphiné, lança ses troupes dans cette province, semant la terreur, pillant et incendiant les villages et les fermes. Philis de La Tour du Pin leva une petite armée, formée des vassaux et des paysans de son père, à la tête de laquelle elle harcela l'ennemi sans relâche. Elle coupa les moyens de communication des Savoyards, obstrua les torrents, abattit les arbres, détruisit des ponts. Elle combattit si vigoureusement ses adversaires qu’ils furent obligés d'abandonner la ville de Sisteron ; enfin, elle retint les troupes du duc de Savoie devant les portes de la ville de Gap. La résistance héroïque de Philis de La Tour du Pin, qui combattait l’épée à la main, protégée par une cuirasse, arrêta l'invasion savoyarde jusqu'à l'arrivée des troupes de Louis XIV, qui reconquirent la totalité du Dauphiné ».
Si l'on en croit Voltaire (Dictionnaire philosophique), le roi de France lui donna une pension comme à un brave officier.
LE PASTOUR (Marguerite).- Française qui fit office de bourreau, née à Cancale en 1720.
Dictionnaire des femmes célèbres : « D’après les registres paroissiaux, elle était la fille d'un sieur de la Chesnais et de Marguerite Girard. Son père, capitaine de vaisseau, se remaria ; belle-mère et bru se déchirèrent. Marguerite Le Pastour s’enfuit costumée en garçon et s'enrôla dans les troupes de Marie-Thérèse d'Autriche. Déçue par la guerre, elle fut recueillie par le bourreau de Strasbourg qu'elle aida dans ses fonctions. Ne supportant pas de maître, elle s'installa ensuite à Lyon en 1756 où elle fut acceptée comme exécuteur. Pendant trois ans nul ne s'aperçut qu'elle était de sexe féminin. Après qu’une servante eut découvert la supercherie, elle fut emprisonnée (janvier 1749). Le chapelain recueillit ses confidences insérées dans les Mémoires historiques sur différents sujets tirés de l’histoire ecclésiastique et de l’histoire profane (1739-1770). Ce document fut découvert en 1934 par René Richelet. Au bout de dix mois, elle épousa Noël Roche et, nantie d'un mari, sortit de prison, retourna en Bretagne où naquit sa fille. L’acte de baptême de celle-ci est le dernier document concernant Marguerite Le Pastour ».
LIBUSSA.- Voir Ulasta.
LIÉBAULT DE LA BAROSSIÈRE (Aimée).- On peut lire dans L'intermédiaire des chercheurs et curieux (18e année, Paris, 1885) :
« Gouin du Fief, gentilhomme breton, émigré en 1792, avec son fils aîné. En 1795, il entra d’abord dans les cadres de Williamson ; mais les quitta au mois de juin de cette même année pour aller servir dans l’armée de Charrette, dont il fut l’aide de camp. Sa femme, une demoiselle Aimée Liébault de la Barossière, servit avec lui dans cette armée, et l’accompagna en 96 dans celle de Scépeaux après la mort de Charrette ».
« Dès le mois de mars 1793, où la Vendée se souleva en masse, madame du Fief organisa les paysans de son canton, leur distribua des armes, de l'argent, des munitions et des vivres, et employa tous ses revenus à soutenir les rassemblements royalistes. Toujours à la tête de ses chouans, elle combattit avec un courage et une intrépidité qui souvent empêchèrent les paysans de lâcher pied devant les bataillons républicains ».
« Lorsque, en octobre 93, la grande armée de la Vendée passa sur la rive droite de la Loire, madame du Fief la suivit et partagea tous ses périls et ses travaux, malgré les soins qu'exigeaient d'elle trois de ses enfants qui la suivaient et qui manquèrent maintes fois d'être sacrifiés, notamment à Dol, d'où elle n'avait pas voulu partir sans les blessés et où, surprise par les bleus, elle perdit ses chevaux et ses bagages et ne s'évada qu'en traversant, la nuit, les marais, portant dans ses bras le plus jeune de ses fils pour qu'il ne fût pas noyé, et arriva à Pontorson avant l'entier départ de l'armée ».
« Elle fut assez heureuse pour échapper à la défaite du Mans ; mais un de ses fils fut pris, conduit à Nantes et destiné à la noyade. Il fut sauvé par un ami de M. du Fief, qui le fit servir pendant dix-huit mois sur les vaisseaux de la République, d'où il rejoignit sa mère à l'armée de Charrette, en même temps que le plus jeune de ses frères, perdu dans la déroute de Savenay, et qui avait gardé les moutons d'un paysan royaliste ».
« De retour en Vendée avec sa fille, madame du Fief apprit l'assassinat du plus jeune de ses fils, et crut pendant plusieurs mois que ses deux autres enfants avaient été tués aussi ».
« On la proposa pour la croix de Saint-Louis ; mais le roi (Louis XVIII) ne voulut pas en entendre parler, et, comme gage de son admiration pour tant de dévouement et de courage, il lui fit écrire une lettre flatteuse en lui envoyant son portrait ».
LINCH (Elisa).- Amie anglaise du président du Paraguay, le maréchal Lopez, qui se trouvait à la tête d'une brigade de 4.000 femmes, lors de la guerre du Paraguay contre le Brésil.
Histoire militaire des femmes : « Enfin, au sujet de la lutte que le maréchal Lopez, président du Paraguay, soutenait avec énergie contre le Brésil, allié aux États du Rio de la Plata, les feuilles publiques ont rapporté que la petite république paraguayenne avait été obligée de recourir à l’emploi extrême des femmes. Un régiment féminin se serait formé, probablement avec des volontaires, et aurait été principalement utilisé à la garde des postes ; si nous en croyons un récit humoristique du Courier de la Plata(*), ce corps de troupes, originaire de Noembucu, se servait de ses prisonniers, du moins de ceux auxquels il laisse la vie, s’en servait pour faire la cuisine, chercher de l’eau et mener les enfants à leur mère ; en un mot, leur infligeait les fonctions de brosseur combinées avec celles d’une gardienne de salle d’asile. Quoi qu’il en soit, ce régiment, ou plutôt cette brigade, car 4.000 femmes la composaient, était aux ordres d’une Anglaise, Eliza Linch, qui se trouvait au mieux avec le dictateur et possédait le grade d’officier général(**). Après la défaite et la mort de Lopez, cette dame et son enfant tombèrent aux mains des vainqueurs et furent retenus prisonniers à bord d’un bâtiment brésilien stationnant dans le port de l’Assomption(***). On l’accuse encore de dire du bien du dictateur et de défendre sa mémoire(****), ce qui est tout naturel puisqu’elle vivait avec lui et ne peut que l’honorer ; on l’accuse, probablement avec plus de raison, de partager la responsabilité de la tyrannie du maréchal et de l’avoir poussé à plus d’un acte de cruauté : sans doute on formulera contre elle une accusation légale. En attendant, l’historien(*****) ne doit pas celer que, militairement parlant, Lopez II(******), au lieu de se sauver en Europe avec ses richesses comme tant d’autres tyrans, a fait contre ses ennemis une longue et héroïque défense ; quant à la question de savoir si cette défense manquait de patriotisme, si elle était plus avantageuse à son pouvoir qu’à son pays, c’est aux Paraguayens à décider ».
(*) Juillet 1868.
(**) Spectator, 27 juin 1868.
(***) Asuncion, capitale du Paraguay.
(****) Lisez le World de New-York du 2 juin 1870.
(*****) L’auteur de ces pages écrit en 1870.
(******) Le père de Lopez, l’un des successeurs du fameux Francia, avait déjà exercé la dictature au Paraguay.
LIX (Antoinette).- Héroïne française, née à Colmar en 1837, morte à Lamarche (Alsace), qui combattit durant la guerre franco-allemande de 1870-1871, comme lieutenant dans le corps des francs-tireurs des Vosges.
Histoire militaire des femmes : [Elle] « se reposait des fatigues du combat en soignant les blessés ».
Dictionnaire des femmes célèbres : « Son père, aubergiste et veuf, l’éleva comme un garçon. Antoinette, dite Tony, droite et musclée, maniait l’épée comme un maître d’armes et montait à cheval comme un uhlan. Après un passage chez les religieuses de Ribeauvillé, elle accepta une place de préceptrice chez les comtes Lubianski, en Pologne. Elle prit part aux rêves d’insurrection polonaise et, devenue le lieutenant Mikail Ponury, dit Michel le Sombre, combattit contre l'armée russe : son héroïsme forgea sa légende. Elle entra au service du général Chabrolles, puis, à la mort de celui-ci, rejoignit le camp du général Sokol qui avec ses troupes repoussa l'ennemi pas à pas. Elle décida enfin de revenir à Colmar. Mais plus rien ne l’y retenait. Apprenant qu'une épidémie de choléra sévissait à Lille, elle offrit ses services et y perdit la santé. Rétablie, elle devint receveuse des postes à Lamarche, en Alsace, et se battit encore en 1870 avec les francs-tireurs des Vosges ».
LONGUEVILLE (Anne-Geneviève de Bourbon-Condé, duchesse de).- Née le 27 août 1619 au château de Vincennes, morte le 15 avril 1679 aux Carmélites du faubourg Saint-Jacques à Paris, fille du prince de Condé Henri II et de Charlotte de Montmorency, sœur du grand Condé et du prince de Conti et femme du duc Henri II de Longueville. Elle naquit en prison (son père et sa mère étant prisonniers au château de Vincennes). Devenue l'amie de La Rochefoucauld, elle entra dans la Fronde et y joua un des principaux rôles, s'emparant de l'hôtel de ville dont elle fit sa place d'armes. C'est à l'hôtel de ville qu'elle donna le jour à Charles Paris d'Orléans (qui était très probablement le fils de La Rochefoucauld). Lors de la seconde Fronde, après l'arrestation de ses frères et de son mari, elle tenta vainement de soulever la Normandie, dont son mari était gouverneur. Elle se réfugia en Hollande, poussa Turenne à traiter avec les Espagnols. Elle revint à Paris en 1651 où elle eut une liaison avec le duc de Nemours. En 1652, elle partit avec Condé à Bordeaux et tenta de soulever la région. Elle soutint un siège dans Bordeaux. Ayant vu échouer tous ses complots, elle se retira dans la solitude de Port-Royal-des-Champs, puis chez les Carmélites du faubourg Saint-Jacques où elle mourut.
LOTTAS.- Volontaires féminines de l'armée finlandaise regroupées en 1918 dans l'association « Lotta-svärd », ainsi nommée de la volontaire finlandaise du même nom (voir Svärd [Lotta]). Utilisées dans les services auxiliaires des armées (ravitaillement, santé), elles recevaient un véritable entraînement militaire. Elles étaient affectées notamment à la défense antiaérienne. Les lottas se distinguèrent durant les combats contre les bolcheviks en 1918-1919 et durant la Seconde Guerre mondiale. D'autres nations se sont inspirées des lottas pour créer des organisations militaires féminines semblables.
LUXEMBURG (Rosa).- Agitatrice et révolutionnaire allemande née en 1870 à Zamosc (Pologne russe), morte en 1919 à Berlin. Fille de commerçants juifs de Pologne, elle adhéra à seize ans au parti socialiste révolutionnaire « Prolétariat ». Menacée d'être arrêtée, elle s'enfuit en Suisse en 1889 et entreprit à Zurich des études approfondies d'économie politique. Liée avec des marxistes russes exilés, elle prit la tête, avec son ami Leo Jogiches, du « parti social-démocrate du royaume de Pologne ». En 1898, elle alla s'installer en Allemagne, contracta un mariage fictif pour obtenir la nationalité allemande et collabora à la presse social-démocrate. Lors de la révolution de 1905, elle retourna en Pologne et y organisa la propagande révolutionnaire. Arrêtée à Varsovie, puis libérée, elle revint en Allemagne où elle fonda, avec Karl Liebknecht, Franz Mehring et Clara Zetkin, la ligue Spartakus qui prônait des positions révolutionnaires et antimilitaristes. Elle fut emprisonnée en 1915, puis, de nouveau, en 1916 jusqu'en 1918. Libérée lors de la révolution allemande de 1918, elle reprit son activité révolutionnaire et contribua à la fondation du parti communiste allemand. Elle participa activement à l'insurrection spartakiste de janvier 1919. Arrêtée, elle fut exécutée sommairement le 15 janvier 1919.
Elle a laissé plusieurs ouvrages :
- Marxisme contre dictature, Éditions du Nouveau Prométhée, 1934 ;
- L'Accumulation du capital, 1913 ;
- La Révolution russe (publié par Paul Levi en 1922).
MAHLER.- Née Lévy, vivandière au 34e de ligne sous le second Empire. Elle fut blessée à Melegnano et à la bataille de Solferino, le 24 juin 1859 (victoire du général Bazaine et du général piémontais Durando sur les Autrichiens, commandés par l’empereur François-Joseph Ier), en portant secours aux blessés sur le lieu même du champ de bataille. Elle fut décorée de la médaille militaire le 19 février 1862.
MAILLETET.- Voir Vivandières.
MAILLOTE (Jeanne).- Histoire militaire des femmes : « En 1582 les Harlus, brigands d’une espèce particulière, s’emparent d’un faubourg de Lille ; c’est une femme, Jeanne Maillote, qui les chasse aidée des femmes de son quartier et aussi de la confrérie des archers de Saint-Sébastien ».
MALALAÏ.- Jeune afghane qui utilisa son châle comme un étendard afin d'encourager les moudjahidin lors de la bataille de Maïwan (victoire du prince afghan Ayyub Khan sur les Anglais le 27 juillet 1880, lors de la 2e guerre anglo-afghane). Elle fut mortellement blessée par une balle anglaise. Malalaï est, en Afghanistan, le symbole de la bravoure et du patriotisme (de nombreux hôpitaux et écoles portent son nom).
MAMIA ou Mauvia.- Reine des Sarrasins au IVe siècle. Restée veuve à la fleur de son âge, elle prit elle-même le commandement de son armée et devint la terreur de l'empire romain. Après avoir ravagé l'Arabie et la Palestine, elle força l'empereur Valens à lui demander la paix. Elle favorisa les chrétiens et fit du rappel des évêques catholiques exilés par Valens l'un des articles du traité de paix. Elle fit ensuite alliance avec l'empereur et le servit dans ses guerres contre les Goths.
MARCHAND (Goton).- Voir Rouget (Claudine).
MARGUERITE D’ANJOU.- Reine d'Angleterre, femme d’Henri VI, fille du roi de Sicile René Ier d'Anjou, dit le Bon, née en 1429 à Pont-à-Mousson, morte en 1482 au château de Dampierre, en Anjou, près de Saumur. Elle prit une part active à la guerre des Deux-Roses. S'étant mise à la tête du parti de Lancastre (Rose Rouge), elle fut battue par le duc Richard d'York et Richard Neville, comte de Warwick, dit le Faiseur de rois, à Saint Albans, près de Londres, le 22 mai 1455. Elle fut de nouveau battue par Warwick le 10 juillet 1460 à Northampton, bataille au cours de laquelle son mari, Henri VI, fut fait prisonnier. Le 30 décembre 1460, elle remportait une éclatante victoire sur York à Wakefield, près de Leeds. Le duc d'York périt dans la bataille. Son fils le remplaça aussitôt, se fit proclamer roi sous le nom d’Édouard IV et battit les troupes de Marguerite à Towton le 29 mars 1461. Marguerite alla chercher un asile en France. Le roi de France Louis XI ne lui accorda qu'un faible secours. Elle revint en Angleterre et livra avec son mari la bataille d'Hexam en 1464. Ce fut une défaite. Dans sa fuite, elle faillit être dépouillée par une bande de voleurs, mais parvint de nouveau à trouver refuge en France, revint quelques années plus tard en Angleterre. Le 4 mai 1471, elle perdit avec son mari la bataille décisive de Tewkesbury, près de Gloucester, contre Édouard IV, fut faite prisonnière et ne recouvra la liberté qu'en 1475, grâce à l'intercession du roi de France. Elle mourut en France sept ans plus tard.
Histoire militaire des femmes : « Sa carrière prête au roman, le livre écrit sur elle par l’abbée Prévost(*) le fait bien voir, mais ce qui est certain, c’est qu’elle prit part à douze batailles rangées pour défendre les droits de son mari pendant les guerres célèbres de la rose blanche et de la rose rouge. Chacun sait comment ces guerres survinrent. On était déjà mécontent de l’ascendant pris par la reine, quand les droits du duc d’York à la couronne furent à nouveau rappelés et soutenus. La chambre des communes accusa le premier ministre qui fut banni, et bientôt la lieutenance générale du royaume fut accordée au prince, mais presque aussitôt il fut révoqué de ses fonctions et pouvoirs. Alors celui-ci prit les armes, attaqua le roi, le battit, le fit prisonnier ; puis il gouverna en son nom. En 1456, Marguerite, profitant d’une absence du duc, conduisit Henri VI à la chambre des lords, et les pouvoirs du vainqueur furent annulés à nouveau ; de là le renouvellement de la guerre civile. Battu à Northampton, Henri VI tomba de nouveau en captivité. Marguerite se réfugia avec son fils dans l’Angleterre septentrionale, sut inspirer la compassion, faire naître l’enthousiasme, attirer jusqu’à vingt mille hommes sous ses drapeaux. Enveloppé à Wakefield, le duc d’York fut vaincu, tué. Marguerite défit ensuite le duc de Warwick à Saint-Albans (1461), et délivra son époux ; mais elle s’abandonna à des exécutions inutiles et ne put empêcher le fils du duc d’York d’être proclamé roi à Londres, sous le nom d’Édouard IV. Malgré un effectif de soixante mille soldats, elle fut défaite dans la journée de Towtown, et, proscrite, se réfugia en Écosse, puis en France. Revenue de ce dernier pays avec un secours de vingt mille hommes, elle subit une nouvelle déroute à Exham (1464). C’est alors que la chronique place une scène singulière. Cachée dans une forêt avec son fils, elle est dépouillée et parvient à s’échapper, mais d’un piège elle tombe dans l’autre, et un voleur formidable s’avance contre elle, l’épée à la main ; la promptitude d’esprit la sauve, elle marche au voleur, et lui présentant le prince enfant : « Je vous confie, lui dit-elle, le fils de votre monarque ». Ce mot heureux, cet appel plein de confiance lui vaut un partisan qui la cache et lui fournit les moyens de passer en Flandre. Pendant qu’elle rassemble une armée, un retour de fortune rend à Henri VI la liberté et le trône qu’il perd peu après avec la même facilité. Ses partisans s’agitent cependant ; ils sont défaits à Barnet. À ce moment Marguerite débarque à Weymouth avec son fils, devenu un homme, car il compte dix-huit ans. Des forces imposantes se rallient encore autour d’elle, mais Édouard IV les atteint promptement et les anéantit à Tewkesbury. Les malheurs de Marguerite d’Anjou atteignent alors le comble ; elle voit poignarder son fils sous ses yeux, elle est renfermée dans la tour de Londres où son mari succombe peu de jours après sous les coups d’un assassin. Après quatre ans d’une dure captivité, elle fut échangée par le traité de Picquigny (1475), moyennant une rançon de 50.000 écus payée par Louis XI(**) ».
(*) L’auteur de Manon Lescaut : c’est un des plus faibles ouvrages de cet écrivain doué d’une grande facilité, mais qui composait trop vite.
(**) Elle vécut depuis lors en France et y mourut le 25 août 1482, âgée de cinquante-neuf ans.
David Hume, Histoire d’Angleterre, Paris, Furne, 1839, tome II :
« […] la reine divisa son armée, et en envoya la moindre division, sous les ordres de Jasper Tudor, comte de Pembroke, frère utérin du roi, contre Édouard, nouveau duc d’York. Elle marcha en personne, à la tête de la plus considérable, vers Londres, où le comte de Warwick commandait le parti d’York. Pembroke fut défait par Édouard à Mortimer’s-Cross dans le comté de Hereford, et perdit près de quatre mille hommes : son armée se dispersa, et lui-même ne dut son salut qu’à la fuite ; mais sir Owen Tudor, son père, fut fait prisonnier, et eut la tête tranchée sur le champ par ordre d’Édouard. L’exemple de cette barbarie, une fois donné, fut imité des deux partis par un esprit de vengeance qui se couvrait du prétexte d’une juste représaille ».
« Marguerite compensa cet échec par un avantage qu’elle remporta sur le comte de Warwick. Ce seigneur, à l’approche des royalistes, fit sortir ses troupes, renforcées d’une multitude de bourgeois de Londres, affectionnés à ses intérêts, et livra bataille à la reine à Saint-Albans. Tandis que les deux armées combattaient chaudement, Lovelace, qui commandait un corps considérable dans celle de Warwick, se retira du combat : cette perfidie, dont les guerres civiles fournissent plusieurs exemples, décida la victoire en faveur de la reine. Environ deux mille trois cents hommes de la faction d’York périrent à la bataille, ou dans la poursuite […] ».
« Quoique appuyée d’un renfort nombreux de volontaires d’Écosse et de partisans de la maison de Lancaster, elle [Marguerite] reçut à Hedgley-More un échec du lord Montacute ou Montague, frère du comte de Warwick, et gouverneur des frontières orientales, entre l’Écosse et l’Angleterre. Montague fut tellement enhardi par ce premier succès, que, tandis qu’un détachement considérable était en marche pour le joindre par ordre d’Édouard, il hasarda encore, avec ses troupes seules, d’attaquer les lancastriens à Hexam, et remporta sur eux une victoire complète. Les ducs de Sommerset, les lords Roos et Hungerford furent faits prisonniers dans la poursuite, et eurent immédiatement la tête tranchée à Hexam, en vertu de la loi martiale. On exécuta aussi expéditivement à Newcastle sir Humphrey Nevil et plusieurs autres gentilshommes. Tous ceux que les armes avaient épargnés sur le champ de bataille périrent sur l’échafaud, et le parti de la Rose blanche ne songea plus qu’à exterminer totalement celui de la Rose rouge, conduite déjà trop justifiée par les exemples que les lancastriens en avaient donnés précédemment ».
« Le sort de l’infortunée famille royale, après cette défaite, fut très extraordinaire. Marguerite s’était sauvée avec son fils dans une forêt, où elle espérait pouvoir se cacher, lorsqu’elle fut attaquée au milieu de la nuit par des voleurs, qui, ne connaissant pas cette princesse, ou respectant peu son rang, la dépouillèrent de tous ses diamants, et la traitèrent avec la dernière indignité. Le partage d’un si riche butin excita entre eux une querelle : pendant qu’ils se disputaient ainsi leur proie, la malheureuse reine saisit le moment de s’échapper avec son fils, s’enfonça dans le plus épais du bois, où elle erra quelque temps, épuisée de faim et de fatigue, accablée de douleur et remplie d’effroi. En cet état terrible elle aperçut un voleur qui venait à elle l’épée à la main, et, ne se voyant aucun moyen de l’éviter, elle prit tout à coup l’étrange résolution de se confier à sa générosité. Elle s’avança vers lui, et lui présentant le jeune prince qu’elle tenait entre ses bras : « Ami, s’écria-t-elle, je confie ici à vos soins le salut du fils de votre roi ». Le voleur, en qui une vie dissolue avait obscurci et non pas étouffé l’humanité et une sorte de grandeur d’âme, fut frappé de la singularité de l’événement, et, touché de la confiance que Marguerite lui marquait, non seulement s’abstint de toute espèce d’outrage contre cette princesse, mais se dévoua entièrement au soin de la défendre et de la sauver. Par son secours, elle demeura quelque temps cachée dans la forêt, et à la fin fut conduite sur les côtes de la mer, d’où elle se réfugia en Flandre […] ».
« […] la reine Marguerite et son fils, âgé alors de dix-huit ans, jeune prince de grande espérance, arrivèrent à Weymouth, escortés d’un petit corps de troupes françaises. Lorsque cette princesse reçut la nouvelle de la captivité de son époux, de la défaite et de la mort du comte de Warwick, le courage qui l’avait soutenue contre tant de désastres l’abandonna totalement, et elle prévit du premier coup-d’œil les suites terribles de ce revers. Elle se réfugia d’abord dans l’abbaye de Beaulieu ; mais à l’aspect de Tudor, comte de Pembroke, de Courteney, comte de Devonshire, des lords Wenloc et Saint-John, et d’autres personnes de qualité qui vinrent ranimer ses espérances, elle reprit sa première énergie, et résolut de défendre jusqu’à la dernière extrémité les débris de sa fortune écroulée. Elle traversa les provinces de Devon, de Sommerset et de Glocester, et vit grossir son armée chaque jour de marche ; mais à la fin, le rapide, l’expéditif Édouard lui porta les derniers coups à Tewkesbury, sur les bords de la Severne. Les lancastriens y furent totalement défaits ; le comte de Devonshire et lord Wenloc perdirent la vie sur le champ de bataille ; le duc de Sommerset, et environ vingt autres personnes de distinction, s’étant sauvés dans une église, y furent investis ; on les en arracha, et on leur trancha la tête aussitôt après. Environ trois mille des leurs périrent à cette action, et le reste de l’armée fut entièrement dispersé ».
Ouvrage de référence : Abbé Antoine-François Prévost, Histoire de Marguerite d’Anjou, reine d’Angleterre, Amsterdam, François Desbordes, 1740.
MARGUERITE DE PROVENCE.- Reine de France, femme de saint Louis, mère de Philippe III, née en 1221, morte en 1295 à Saint-Marcel, près de Paris. Elle était la fille aînée du comte de Provence Raymond Bérenger V. Elle épousa le roi de France en 1234 et l'accompagna dans sa première croisade (la septième) en 1248. Lorsque Louis IX fut fait prisonnier à la bataille de Mansourah (8 février 1250, en Basse-Égypte), elle fit montre du plus grand courage et c'est elle qui détermina les croisés paniqués à résister aux infidèles dans Damiette.
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Marguerite suivit Louis en Égypte, l’an 1248, et accoucha à Damiette, en 1250, d’un fils, surnommé Tristan, parce qu’il vint au monde dans de fâcheuses conjonctures. Trois jours auparavant, elle avait reçu la nouvelle que son époux avait été fait prisonnier ; elle en fut si troublée que croyant voir à tout moment sa chambre pleine de Sarrasins, elle fit veiller auprès d’elle un chevalier de 80 ans, qu’elle pria de lui couper la tête s’ils se rendaient maîtres de la ville. Le chevalier le lui promit, et lui dit bonnement qu’il en avait eu la pensée avant qu’elle lui en parlât(*). Les Sarrasins ne purent surprendre Damiette ; mais le jour même qu’elle accoucha, les troupes pisanes et génoises, qui y étaient en garnison, voulurent s’enfuir parce qu’on ne les payait pas. Cette princesse, pleine de courage, fit venir au pied de son lit les principaux officiers, et les harangua, non pas les larmes aux yeux ; mais d’un ton si ferme et si mâle, qu’elle obligea ces lâches à ne point sortir de la place ».
(*) Cette circonstance a fourni à M. Aucelot une belle scène dans la tragédie de Louis IX.
MARGUERITE VALDEMARSDOTTER (Marguerite Ière).- Reine de Danemark et de Norvège, puis de Suède, dite la Sémiramis du Nord, née à Soeborg en 1353, morte à Flensborg en 1412. Elle était la seconde fille du roi de Danemark Valdemar IV Atterdag. Elle épousa le roi de Norvège Haakon VI en 1363. À la mort de son père, en 1375, elle exerça la régence de Danemark pour son fils Olav V (Olav II de Danemark). En 1380, à la mort de Haakon, elle devint régente de Norvège. Profitant d'une révolte des Suédois contre leur roi Albert de Mecklembourg, elle se fit proclamer reine de Suède et battit Albert à la bataille de Falkœping, près du lac de Vener, en 1389, et le fit prisonnier. Ayant perdu son fils en 1387, elle désigna, pour lui succéder, Éric de Poméranie, son petit-neveu, tout en conservant le pouvoir. En 1397, elle convoqua à Kalmar une assemblée de députés de tous ses États qui établit le célèbre acte d'union réunissant les royaumes de Danemark, de Norvège et de Suède.
MARI (Alexandrine).- Histoire militaire des femmes : « L’Italie nous offre, tout à la fin du XVIIIe siècle, une guerrière en la personne d’une jeune fille d’Arezzo, Alexandrine Mari, maîtresse du ministre anglais Windham ; cette Amazone (on peut l’appeler ainsi, car elle combattait toujours à cheval) prit part à l’insurrection de sa ville natale contre les Français (1799), et dirigea en personne les insurgés à San-Donato, à Ponte et Borgo-san-Lorenzo. Lorsque nous eûmes évacué Florence, elle y entra solennellement à la tête des troupes qui avaient levé l’étendard contre notre domination ».
MARIA (dona).- Histoire militaire des femmes : « L'histoire coloniale du Portugal nous fournit un trait à la date de 1683. Le roi de Visapour ayant débarqué dans l'île de Goa et élevé des batteries contre la ville du même nom, sise alors à neuf kilomètres de sa situation actuelle, allait maltraiter cette cité, quand une héroïne, nommée dona Marie, effectua une sortie, tomba sur une redoute ennemie, la força, en tua toute la garnison ; cet exploit accompli par une femme jeta la terreur parmi les troupes du rajah et les porta à fuir. Dona Marie obtint depuis la solde de capitaine, et eut en outre l'heureuse chance de contraindre à l'épouser un infidèle qui l'abandonnait, et cela en le défiant, comme il convenait à une guerrière, à l'épée et au pistolet ».
MARIE.- Vivandière du 1er puis du 2e régiment de zouaves.
Histoire militaire des femmes : « Citons aussi la vieille Marie, dont parlent les Souvenirs d’un officier du 2e zouaves(*) ; c’était, au moment où l’auteur écrivait, une vivandière, à la mémoire heureuse et qui charmait les veillées par ses récits ; le chroniqueur ne dit rien de ses faits de guerre avec le 2e zouaves et nous devons les supposer peu importants, mais elle s’était signalée durant vingt ans avec le premier (et alors unique) régiment de cette arme, cherchant, dit-on, à cacher et à oublier les irrégularités passées de sa conduite qui avaient tant attristé sa famille. En avril 1854, la belle Marie (on la désigna d’abord ainsi) voulut s’embarquer pour la guerre d’Orient et prit à cet effet un costume de soldat, mais sa ruse fut découverte et le colonel, tout en la louant de son énergie, la fit reconduire sur Oran ».
(*) Ce livre est signé de Forville, au moins dans le Spectateur militaire qui l’a d’abord publié.
MARIE Ière STUART.- Reine d'Écosse de 1542 à 1567, fille du roi d'Écosse Jacques V et de Marie de Lorraine, reine de France de 1559 à 1560, femme de François II, née à Linlithgow en 1542, morte décapitée à Fotheringhay en 1587. Devenue reine d'Écosse sous la régence de sa mère, elle fut fiancée au dauphin de France, le futur François II. Elle fut élevée à la cour de France et épousa le dauphin en 1558. François II étant décédé en 1560, Marie revint en Écosse et y épousa son cousin, le comte de Lennox Henry Darnley. Ce dernier ayant été assassiné le 9 février 1567, elle épousa en troisièmes noces un comte de Bothwell, James Hepburn, qui était catholique et très probablement l'assassin de son prédécesseur. Les nobles écossais et les calvinistes, excités par le réformateur John Knox, se révoltèrent alors, proclamèrent la déchéance de la reine et firent couronner son fils, Jacques. Marie prit les armes. Le 15 juin 1567, à la tête de deux mille hommes, elle rencontra l'armée de ses adversaires à Carberry Hill, près d'Édimbourg. Il n'y eut pas à proprement parler de bataille, la reine ayant fait sa reddition à sir William Kirkcaldy of Grange après avoir obtenu qu'on laissât partir libre Bothwell, son mari. Faite prisonnière et enfermée au château de Lochleven, elle s'évada en 1568 et tenta une nouvelle fois le sort des armes. Le 13 mai 1568, à Langside, un village situé près de Glasgow, le régent d'Écosse, James Stuart, premier comte de Murray (ou Moray), demi-frère de Marie, battit les troupes de la reine déchue. Marie put se réfugier en Angleterre, pensant trouver refuge auprès de la reine Elisabeth. Celle-ci pourtant la fera traîner de château en château (Carlisle, Bolton, Tutbury, Wingfield, Coventry, Chatsworth, Sheffield, Buxton, Chartley, Fotheringhay), sous bonne garde, pendant dix-huit ans. Plusieurs tentatives furent faites pour la délivrer. Sous prétexte d'une présomption de complicité dans un attentat préparé contre elle, Elisabeth la fit exécuter. Elle fit montre d'un très grand courage au moment fatal. Elle a laissé des Lettres, instructions et mémoires (publiés en 1844).
MARIE-THÉRÈSE D’Autriche.- Histoire militaire des femmes : « Nous devons nous arrêter sur cette mâle et digne figure de souveraine qui mérite une place honorable dans l’Histoire militaire des femmes. Elle le mérite, au point de vue guerrier, au moins par deux actes, sa confiance dans les Hongrois, la création d’un ordre de chevalerie. C’était en 1741 ; elle fuyait devant Frédéric II, maître de la Silésie, jusqu’alors province autrichienne, et devant l’électeur de Bavière, bientôt élu empereur. À peine avait-elle trouvé une ville tranquille pour faire ses couches. Elle atteint Pesth, assemble les États de Hongrie et, tenant sur les bras son fils nouveau-né (depuis Joseph II), prononce devant eux une allocution latine qui peut se résumer ainsi : « Abandonnée par mes amis, poursuivie par mes ennemis, persécutée par mes proches, je n’ai d’autre ressource que votre fidélité, votre courage et ma confiance. Avec l’aide de Dieu, c’est assez. Je remets entre vos mains mes enfants qui attendent leur salut de votre valeur ». À ces mots, prononcés avec autant de simplicité que de noblesse, les magnats tirèrent leur épée, comme ils le font à la cérémonie du couronnement(*), et, la faisant flamboyer, s’écrièrent unanimement : « Moriamur pro lege nostro Maria-Theresina ». La réconciliation entre la monarchie autrichienne et la Hongrie se trouvait scellée à nouveau et pour longtemps ; le sabre hongrois fut pour beaucoup dans la lutte contre Frédéric II et contre la France tant que Charles II vécut. Les talents de plusieurs généraux autrichiens, ceux du maréchal Daun, vainqueur à Chotemitz, y furent bien pour quelque chose : c’est à l’occasion de ce succès que l’impératrice Marie-Thérèse créa l’ordre de Marie-Thérèse, fondé le jour même de l’action, le 18 juin 1757, et dont les statuts(**) veulent qu’ils soient accordés exclusivement aux généraux ayant gagné une bataille ou forcé une place(***). En dehors de ces deux actes on ne peut dire que Marie-Thérèse, qui jamais n’a commandé personnellement ses troupes, ait participé aux choses militaires, si ce n’est en veillant à l’organisation de son armée : ainsi on la voit en 1748, au lendemain du traité d’Aix-la-Chapelle, prescrire l’entretien de troupes presque aussi nombreuses que celles entretenues par ses États pendant la guerre ; c’était signifier à ses ennemis que désormais elle serait prête à faire bonne résistance si on l’attaquait encore, soit séparément, soit réunis en une coalition ; mais en même temps elle tempéra l’inconvénient du grand nombre de bras enlevés à l’agriculture par la présence de tant d’hommes sous les drapeaux, en favorisant les mariages parmi les soldats et en formant des établissements pour l’éducation des enfants sortis de ces unions. […] Ne quittons pas cette page relative à Marie-Thérèse sans y mentionner le courage héroïque dont elle fit preuve dans les circonstances difficiles de sa vie, courage politique ou civique si l’on veut, pour l’opposer au courage militaire, mais qui ne dépare jamais les vertus guerrières, soit chez l’homme, soit chez la femme ; courage qui consiste surtout dans l’énergie vis-à-vis du malheur, la persévérance à y remédier, la constance à montrer à ses inférieurs un visage calme et confiant alors même que l’on commencerait à douter du résultat final ».
(*) Le couronnement de Marie-Thérèse, comme reine de Hongrie, avait eu lieu peu auparavant. Plusieurs écrivains confondent à tort la cérémonie de ce couronnement et la scène célèbre rappelée dans le texte.
(**) L’institution réelle, sur le papier, est du 12 déc. 1757.
(***) Le ruban est blanc avec un liseré rouge sur chaque bord. L’ordre de Marie-Thérèse a été réorganisé en 1760, puis en 1810, et les conditions d’admission chaque fois adoucies ; il fut toujours un ordre réservé aux officiers, sans distinction de naissance, de religion, ni d’ancienneté de service.
MARKIEVICZ (comtesse Constance).- Nationaliste et révolutionnaire irlandaise née en 1868, morte en 1927, dite la « Comtesse Rouge » à cause de ses opinions socialistes. Lors de l'insurrection de 1916, à Dublin, elle fut commandant en second de l' «Irish Citizen Army » et dirigea la brigade féminine. À la tête de quatorze compagnes, elle participa aux combats de rue comme « sniper ». Arrêtée, elle fut enfermée à la prison d'Aylesbury, en Angleterre, puis à Kilmainham. Condamnée à mort, elle ne fut pas exécutée, sa peine ayant été commuée en détention à perpétuité. L'amnistie générale de 1917 la fit libérer et elle retourna en Irlande où elle fut accueillie triomphalement. Ayant intégré la direction du Sinn Féin, elle fut de nouveau emprisonnée pendant six mois à Londres. Élue député à la Chambre des communes, elle refusa, comme les autres élus irlandais, de siéger à Westminster. En 1919, elle devint ministre du travail dans le gouvernement d’Eamon de Valera. Elle démissionna trois ans plus tard et partit aux Etats-Unis d'Amérique pour y récolter des fonds. Elle reprit les armes lors de l'insurrection de 1922-1923. Réélue au Parlement, elle adhéra au Fianna Fáil à sa création. Décédée des suites d'un cancer, elle fut inhumée au cimetière de Glasnevin, à Dublin, non loin d'une autre héroïne irlandaise, Maud Gonne.
MARPÉE.- Une des Amazones qui combattirent contre les Grecs d’Hercule.
MARPÉFIA.- Voir Amazones.
MARTHE (sœur).- Histoire militaire des femmes : « À la guerre de 1813 appartient la sœur Marthe(*), née en 1748, morte en 1824, à Besançon. Entrée fort jeune au couvent comme sœur converse, chassée de son asile par la Révolution, elle mit au secours des malheureux et des prisonniers sa santé de paysanne et l’énergie de son caractère. Les élans de sa charité trouvent du pain pour les pauvres(**), son courage lui fait sauver des enfants soit d’un incendie, soit des dangers offerts par les eaux du Doubs. Quant aux prisonniers, elle les soigne et en grand nombre, qu’ils soient Espagnols ou Anglais. Sur les champs de bataille, les blessés la voient accourir avec joie, et on l’y appelle dans toutes les langues. Tant de dévouement fit placer son portrait dans une des salles du ministère de la guerre, la plupart des souverains de l’Europe se plurent à la gratifier d’un signe honorifique ; mais, des récompenses terrestres, la plus douce à ses yeux était son crédit, la considération dont elle se trouvait entourée, et qu’elle savait, avec des formes brusques et impérieuses, faire tourner au profit de sa nombreuse clientèle ».
(*) Anne Biget.
(**) Surtout pendant la famine de 1817.
MARTIN (Juana).- Voir Estrada (Marie d’).
MATHILDE DE TOSCANE dite « la Grande Comtesse ».- Marquise de Toscane, fille du marquis Boniface III, née en 1046, morte en 1115 à Bondeno di Roncore, près de Mantoue. Elle épousa successivement Godefroy le Bossu, duc de Basse-Lorraine, et Guelfe V, duc de Bavière. Ses possessions comprenaient la Toscane et une grande partie de la Lombardie. Elle prit une part active à la « querelle des investitures » aux côtés du pape Grégoire VII. C'est dans sa forteresse de Canossa que l'empereur Henri IV vint faire pénitence en 1077. Elle abandonna par donation tous ses biens au Saint-Siège.
Dans son ouvrage Les femmes illustres de l'Europe (Paris, Lehuby, 1852), la comtesse Drohojowska dépeint ainsi Mathilde de Toscane : « Sachant manier la lance et l'épée avec autant d'adresse qu'elle mettait de grâce et de talent à parler la langue de la poétique Toscane, on vit maintes fois la fière souveraine diriger elle-même dans la défense et dans l'attaque ses nobles chevaliers et ses fidèles gens d'armes, et c'était merveille alors que son courage, sa prudence et son habileté guerrière. Si la domination normande, si rapide et si promptement établie dans la basse Italie, hésita à s'étendre au delà, certes l'épée de Mathilde, l'éclat de son renom et de ses vertus n'y furent pas étrangers ».
MARULLE.- Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Fille du gouverneur de Cochino, ville de l'île de Lesbos, ayant vu son père tué dans une attaque faite par les Turcs, au temps de Mahomet II, descend de la muraille où elle combattait, pénètre jusqu'au corps de son père, le fait enlever, repousse les assiégeants, et les force à se rembarquer. Le général vénitien, arrivant au secours de la ville, n'y trouva plus le peuple qu'occupé à fêter sa libératrice. Il lui offrit de choisir pour époux celui de ses capitaines qui lui plairait le plus, et de faire approuver cet hymen par le gouvernement. Marulle, contente de la gloire qu'elle venait d'acquérir, ne voulut pas accepter ce choix ».
MAUPIN.- Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Actrice célèbre par son jeu, par sa voix et par sa figure, née à Paris, en 1673, du sieur d'Aubigny, secrétaire du comte d'Armagnac. Un nommé Maupin, de Saint-Germain-en-Laye, qui avait un emploi dans les Aides, l'épousa très jeune, et négligea de l'emmener avec lui dans la province où il résidait. Pendant son absence, sa femme fit la connaissance de Sérane, prévôt de salle, qui lui apprit à faire des armes, et l'écolière ne tarda pas à devenir plus forte que le maître. L'amant et sa maîtresse, forcés de s'enfuir, se retirèrent à Marseille, où la nécessité les força bientôt d'entrer à l'Opéra. Maupin revint à Paris, reprit son nom de femme, et débuta en 1695 par le rôle de Pallas, dans l'opéra de ce nom. Elle excellait surtout à représenter Médée, dans l'opéra de Méduse par Lagrange, qui fut joué en 1702. Trois ans après, cette chanteuse renonça au théâtre, rappela son mari qui était toujours en province, et passa avec lui les dernières années de sa vie ; elle mourut à la fin de 1707, à l'âge de 33 ans. Très adroite dans les exercices du corps, elle était surtout d'une grande force dans l'escrime. Duméni, acteur de l'Opéra, l'ayant insultée, elle l'attendit un soir, vêtue en homme, dans la place des Victoires, et voulut lui faire mettre l'épée à la main ; sur son refus, elle lui donna des coups de canne, et lui prit sa montre et sa tabatière. Le lendemain, Duméni, déguisant son aventure, racontait au foyer qu'il avait été attaqué par trois voleurs, qui, malgré sa résistance, lui avaient enlevé sa tabatière. « Tu mens impudemment, s'écrie Maupin, tu n'es qu'un lâche, tu n'as été attaqué que par une seule personne, c'est moi ; en voici la preuve ». Elle tira en même temps la tabatière et la montre, qu'elle lui rendit. Une autre fois, étant déguisée en homme, et par suite d'agaceries indécentes qu'elle avait faites à une dame dans un bal, elle se prit de querelle avec trois hommes, qui l'accompagnaient, les fit descendre sur la place, et les tua tous les trois.
MAUVIA.- Voir Mamia.
MAVROIÉNIS (Modéna).- Héroïne grecque qui se distingua dans la guerre d'indépendance des Grecs contre la Turquie.
Le tour du monde. Nouveau journal des voyages publié sous la direction d’Édouard Charton, premier semestre 1878, Hachette, 1878 :
« Une femme de haute naissance et de grande beauté, Modéna Mavroiénis, avait vu son père étranglé par ordre du sultan à Constantinople, et se réfugia à Mycone, dont elle excita les habitants à la révolte, promettant sa main au vainqueur des Turcs, armant des navires et formant une compagnie d'élite avec laquelle elle repoussa elle-même une descente de pirates barbaresques. Dans cette rencontre elle tua de sa main leur capitaine, dont elle foula dédaigneusement la tête du talon en s’écriant : « Honneur aux braves ! victoire à la croix ! » et les palikares répondirent : « Gloire à Modéna Mavroiédis, fille du martyr Étienne ! que ses palmes soient immortelles ! ».
« Modéna s'enhardit après ce premier succès. Elle organise seize compagnies de cinquante hommes, et malgré les larmes et les supplications de sa mère, malgré la délicatesse de sa santé, elle s'embarque pour l'Eubée, que cernaient alors les flottes du Grand Seigneur ».
« Elle porte au côté l'épée que l'impératrice Catherine de Russie avait envoyée à son père, et sur la poitrine la croix en diamants de Saint-Wladimir qu'elle avait pu soustraire à la rapacité des bourreaux ».
« Elle défend les gorges du Pélion contre l'armée du séraskier Selim Pacha, lui tue trois mille soldats et le force à se retirer sur Larissa. Jusqu'à la fin de la guerre elle guerroya dans les montagnes de la Phthiotide et contribua à la victoire où l'armée turque presque tout entière fut détruite.”
MCCAULEY (Mary Ludwig).- Voir Molly Pitcher (Mary Ludwig McCauley, dite).
MÉDICIS (Catherine de).- Voir Catherine de Médicis.
MÉNALIPPE.- Sœur de la reine Antiope qui combattit avec elle contre Hercule et Thésée. Voir Amazones.
MÈRE ROYAUME (Madame Royaume, dite).- Dictionnaire des femmes célèbres : « Héroïne genevoise (XVIe-XVIIe siècles). Cette valeureuse citoyenne de Genève a acquis une célébrité auprès des Genevois qui dure encore de nos jours. En 1602, une armée du duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier, tenta, au cours de la nuit du 11 au 12 décembre, de s'emparer de la ville de Genève, en dressant des échelles contre les remparts de la cité, d'où le nom de l'Escalade que les Genevois ont donné à cet assaut. La défense de la ville fut acharnée et l'ennemi repoussé. Au cours de la bataille, Mère Royaume coiffa un Savoyard d'une marmite et le tua. La date du 12 décembre est restée un jour de fête pour les Genevois et, en souvenir de l'acte de bravoure de la Mère Royaume, on vend tous les ans, au cours de la fête commémorative de l'Escalade, des marmites en chocolat ».
MICHEL (Louise).- Dictionnaire des femmes célèbres : « Anarchiste française (Vroncourt-la-Côte, Haute-Marne, 29 mai 1830 – Marseille, 10 janvier 1905). Fille naturelle d'une servante, elle fit cependant de solides études et entra dans l’enseignement à Paris. Ses idées libérales et même révolutionnaires l’engagèrent à se joindre aux nombreux opposants de Napoléon III. Après la chute de l'Empire et la proclamation de la République, Louise Michel, déçue par la politique conservatrice menée par Adolphe Thiers, dont elle disait : « Je poignarderai cet affreux gnome », se joignit aux communards. Le 3 avril, elle fit partie des troupes fédérées qui tentèrent une sortie en direction de Versailles, en marchant dans les rangs du 61e bataillon. Toujours vêtue d'une robe noire barrée d'une écharpe rouge, elle fut de tous les défilés, combattant pour la défense de Paris, montant sur les barricades, participant aux émeutes et à la semaine sanglante du 24 au 31 mai 1871, au cours de laquelle furent incendiés le palais des Tuileries, l'Hôtel de Ville, la Cour des comptes. Louise Michel, que l’on avait surnommée « La Vierge rouge », fut arrêtée et comparut devant le Conseil de guerre qui la condamna à la déportation en Nouvelle-Calédonie. Amnistiée en 1880, elle rentra en France et reprit sa propagande révolutionnaire qui lui valut de nouveau plusieurs emprisonnements (1883, 1886). Elle créa la Ligue internationale des femmes révolutionnaires contre la guerre. C’est au cours d'une tournée de conférences à Marseille qu’elle mourut. Elle laissa le souvenir d’une femme courageuse, aux idées généreuses, luttant pour la révolution sociale et contre la guerre. Elle a publié entre autres ses Mémoires (1886) et La Commune, histoire et souvenirs (1898) ».
MOELINE FOUGÈRES (Thérèse).- Biographie moderne, ou galerie historique, civile, militaire, politique et judiciaire ; Contenant les portraits politiques des Français de l’un et l’autre sexe, morts ou vivants, qui se sont rendus plus ou moins célèbres, depuis le commencement de la révolution jusqu’à nos jours, par leurs talents, leurs emplois, leurs malheurs, leur courage, leurs vertus ou leurs crimes, Paris, Alexis Eymery et Delaunay, 1815, tome II : « Fille d'un conseiller au parlement de Rennes, et demeurant à Fougères, elle eut une grande part aux projets que la Rouarie, dont elle était la maîtresse et la confidente, forma en Bretagne en 1791. Douée d’une figure charmante, elle parcourait les campagnes des environs de Fougères, à cheval, vêtue en amazone, pour exciter les paysans Bretons à la défense de la royauté ; fut signalée après la mort de la Rouarie, dans les papiers saisis au château de Laguyomarais ; arrêtée, conduite à Paris, traduite au tribunal révolutionnaire, et condamnée à mort, le 18 juin 1793. Elle montra beaucoup de fermeté en allant au supplice, et était alors âgée de 30 ans ».
MOLLY PITCHER (Mary Ludwig McCauley, dite).- Dictionnaire des femmes célèbres : « Héroïne américaine (Trenton, New Jersey, 13 octobre 1757 - Massachusetts 22 janvier 1832). Sa famille, originaire du Palatinat, s’installa dans le New Jersey en 1730. Elle épousa en 1769 John Caspar Hays qui fut enrôlé contre les Anglais lors de la guerre d'Indépendance. Elle le suivit et, au moment de la bataille de Montmouth (28 juin 1778), elle soigna les blessés avec héroïsme, leur donnant à boire dans un pot (pitcher), d'où son surnom. Son mari ayant été blessé, elle le remplaça à son canon. Elle épousa en secondes noces George McCauley dont elle eut plusieurs enfants. À partir de 1822, elle reçut une pension annuelle pour bons et loyaux services. Son nom figure sur le monument commémoratif de la bataille de Montmouth.
MONTPENSIER (Anne-Marie-Louise d'Orléans, duchesse de).- Princesse française, fille de Gaston d'Orléans, frère du roi Louis XIII, et de Marie de Bourbon, femme du duc de Lauzun, née à Paris en 1627, morte à Paris en 1693, dite la Grande Mademoiselle. Elle prit part aux troubles de la Fronde. Lors de la bataille du faubourg Saint-Antoine, qui vit la victoire d’Henri de La Tour d'Auvergne, vicomte de Turenne, maréchal de France, et du maréchal de La Ferté sur Louis II de Bourbon, prince de Condé, dit le Grand Condé, à la tête de la Fronde des princes, les 1er et 2 juillet 1652, la Grande Mademoiselle fit tirer les canons de la Bastille sur les troupes royales pour protéger la retraite de Condé.
Henri Martin, Histoire de France depuis les temps les plus reculés jusqu’en 1789, Paris, Furne, 1858, tome XII :
« […] Tout à coup, une volée de canon, partie des tours de la Bastille, emporta les premières files de la cavalerie royale. La porte Saint-Antoine était ouverte et des bandes de Parisiens en armes bordaient les remparts et protégeaient l’entrée des troupes rebelles dans Paris(*) ».
« Ce dénouement inattendu était l’œuvre d’une femme, de mademoiselle de Montpensier. Le duc d’Orléans, retenu au fond de son Luxembourg bien moins par les intrigues du cardinal de Retz que par sa propre lâcheté, avait fait le malade pour se dispenser de monter à cheval et, pendant très longtemps, ni sa fille ni les amis de Condé n’avaient pu obtenir de lui un ordre, une parole, pour tâcher de sauver les troupes de Condé et les siennes propres. Il s’était enfin laissé arracher un blanc-seing, au nom de Mademoiselle, pour le bureau de la ville. Mademoiselle courut aussitôt à l’Hôtel de Ville, animant le peuple sur son chemin avec plus de succès que n’avait fait tout à l’heure Beaufort. Le cardinal de Retz avait répandu le bruit que Condé, comme le duc de Lorraine, s’était accommodé avec Mazarin, et le peuple avait d’abord douté si le combat n’était pas simulé : ce doute n’était plus permis à l’aspect de tous les blessés, de tous les mourants que les gardes de la porte Saint-Antoine laissaient, par compassion, entrer dans la ville. On avait vu ramener tout sanglants La Rochefoucauld, Nemours et la plupart des chefs de l’armée rebelle. La pitié pour les vaincus, l’ardeur qu’excitait le bruit lointain de la bataille, les vieilles haines que réchauffait le triomphe imminent du Mazarin, entraînèrent la multitude. Le gouverneur, le prévôt et le bureau de la ville, qui avaient d’abord résisté à Mademoiselle, cédèrent aux menaces de l’impétueuse princesse(**), appuyées par les clameurs du peuple attroupé sur la Grève. Mademoiselle leur extorqua l’ordre de faire marcher deux mille hommes de garde bourgeoise au secours de M. le prince et d’ouvrir la porte Saint-Antoine : elle y courut, fut obéie à regret de la garde, composée, ce jour-là, de gens hostiles aux princes, monta à la Bastille et en fit tourner le canon contre l’armée du roi. On prétend qu’elle mit le feu de sa main à la première pièce(***) ».
(*) Mém. De Turenne, p. 443-444.- Id. du duc d’York, p. 544-550.- Id. de La Rochefoucauld, p. 479-482.- Id. du prince de Tarente, p. 108-118.- V. les observations de Napoléon, dans ses Mémoires, cités par M. de Sainte-Aulaire, t. II, p. 292.
(**) Elle dit au maréchal de l’Hospital qu’elle lui arracherait la barbe, et qu’il ne mourrait jamais que de sa main. Mém. De Conrart, p. 109.
(***) Mém. De mademoiselle de Montpensier, p. 117-123.- Id. de Conrart, p. 106 et suiv.- Suite et conclusion du Journal du Parlement, p. 23-29.
MONTPENSIER (Catherine-Marie de Lorraine, duchesse de).- Fille de François de Lorraine, deuxième duc de Guise, et d’Anne d'Este, femme de Louis II de Bourbon, duc de Montpensier, née à Joinville le 18 juillet 1552, morte à Paris le 6 mai 1596. Elle prit, à côté de ses frères, Henri de Guise et le duc de Mayenne, une part active aux guerres de la Ligue. Ennemie acharnée du roi Henri III, elle paya des prédicateurs pour le faire insulter en chaire ; elle portait, dit-on, à sa ceinture une paire de ciseaux avec lesquels elle se proposait de le tonsurer lorsqu'il aurait été déclaré indigne du trône. Elle poussa l'audace jusqu'à tenter de le faire enlever. Quand on lui annonça qu'il venait d'être assassiné, elle s'écria : « Je ne suis marrie que d'une chose, c'est qu'il n'ait pas su avant de mourir que c'est moi qui ai fait le coup ». En fait, on l'accusa, mais sans preuve, d'avoir armé le bras de Jacques Clément. Elle fut l'instigatrice de la journée des Barricades. Lorsqu'elle apprit que Paris avait ouvert ses portes à Henri IV, elle fut consternée et demanda s'il n'y avait pas quelqu'un qui pût lui donner un coup de poignard dans le sein. Elle finit toutefois par se réconcilier avec lui et sa fille épousa Gaston d'Orléans, deuxième fils du roi.
MOREAU-ÉVRARD (Émilienne).- Résistante française née à Wingles (Pas-de-Calais) en 1898, morte à Lens (Pas-de-Calais) en 1971. Durant la Première Guerre mondiale, elle devint célèbre en sauvant, par ses renseignements, un détachement français dans les rues de Loos-en-Gohelle, la petite commune du nord de la France où elle habitait avec ses parents. Elle n'avait alors que seize ans. En février 1915, elle récidiva en sauvant, toujours grâce à ses observations et ses renseignements, un détachement écossais. Se faisant institutrice et infirmière de fortune, elle n'hésita pas, en outre, à faire le coup de feu avec les soldats britanniques. C'est ainsi qu'elle abattra deux Allemands qui menaçaient son ambulance. Son action lui valut d'être citée à l'ordre de l'armée et d'être décorée de la croix de guerre avec palme. Celle que l'on appela « l'héroïne de Loos » était si célèbre qu'au début de l'occupation allemande, en 1940, elle fut placée en résidence surveillée. Elle entra alors en Résistance sous le nom de Jeanne Poirier, en tant qu'agent de liaison du réseau « Brutus ». En 1942, on la retrouve à Lyon dans le groupe de renseignement « La France au combat ». Traquée par les Allemands, elle parvint à s'enfuir en Algérie, puis revint dans le nord de la France. Émilienne Moreau-Évrard reçut la croix de compagnon de la Libération en 1945. Elle fut ensuite faite officier de la Légion d'honneur et décorée de la croix de guerre 1939-1945 et de la croix du combattant volontaire de la Résistance.
MORIN (Marie).- Héroïne française du XVIIIe siècle, dite « Muguette », qui se rendit célèbre lors de la guerre de Vendée.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Son fiancé ayant été tué par les Bleus, elle décida de le venger et devint un élément important de la chouannerie. Elle déjoua des embuscades et sauva des prisonniers au Mont-Saint-Michel dans la nuit du 9 au 10 août 1799. Elle est l'héroïne du Chevalier des Touches de Barbey d'Aurevilly ».
MOSCHO.- Histoire militaire des femmes : « Dans les premières luttes de l'indépendance de la Grèce, le 20 juillet 1792 très exactement, le fameux Ali, pacha de Janina, fut battu près de la ville de Souli, grâce surtout à l'intervention des femmes de cette cité. Ces femmes avaient pour chef une guerrière nommée Moscho,
… Qui portait en ce jour triomphant
Sur un bras son fusil, sur l’autre son enfant (*),
a dit M. Pierre Lebrun(**). Par malheur le frère de cet enfant se trouvait à Janina comme otage ; le pacha fit crier à Moscho, durant la mêlée, qu’il mettrait ce fils à mort si elle continuait son mouvement en avant, mais elle riposta fièrement qu’elle en saurait avoir un autre […] ».
(*) Et le tablier plein de cartouches, dit une chanson grecque.
(**) Le Voyage de Grèce, poème, 1828, p. 63.
MUSNIER.- Histoire militaire des femmes : « En 1568, alors que l’armée protestante assiégeait Cravant, petite ville à 20 kilomètres d’Auxerre, où les royalistes avaient détaché des compagnies [...] il se donna plusieurs assauts vigoureusement repoussés ; les assiégeants trouvèrent au nombre des morts qui avaient payé de leur vie l’insuccès de ces assauts, le capitaine Musnier et sa femme, laquelle le suivait à la guerre et sur les champs de combat, partageant à la fois ses périls et ses fatigues(*) ».
(*) CHALLE, Hist. des guerres du calvinisme, […] t. I, p. 176.
MUSSASA.- Reine des Giagas (ou Jaggas), cannibales des côtes occidentales d'Afrique (Congo). Elle succéda à son père, Dongy, dans le commandement de sa tribu. Habillée en homme, elle conduisit à plusieurs reprises ses troupes à la victoire. Elle mourut au milieu du XVIIe siècle.
Histoire militaire des femmes : « Au début du XVIIe siècle, une femme du royaume de Congo se signala par son intrépidité. On la nommait Mussasa. Fille d’un chef de tribu, elle prit, à la mort de son père, le commandement des guerriers et, par son habileté dans les luttes à main armée, par ses instincts sanguinaires même, leur inspira une telle confiance qu’ils la suivirent partout. Alors elle tenta les entreprises les plus périlleuses : on la voyait tellement acharnée dans la mêlée qu’elle se retirait la dernière. Vêtue et armée comme un homme, elle voulut que sa fille fût élevée dans les mêmes goûts et parvint à en faire une guerrière. Aussi, quand elle mourut en 1662, après avoir agrandi ses États, cette fille, appelée Tem-Bam-Dumba, continua-t-elle le même genre de vie, mais en même temps elle ne connut aucun frein, et elle qui s’était déjà révoltée contre sa mère, devint un monstre d’immoralité et de cruauté ; certes, ce résultat se produit chez des sauvages, chez des cannibales, néanmoins il montre à quels écarts peut être entraînée une femme qui sort de la voix tracée à son sexe, lorsqu’un noble caractère ne guide pas son âme, lorsque le bénéfice de l’instruction n’éclaire pas son esprit ».
MYRINE.- Voir Amazones.
NARBONNE (vicomtesse de).- Voir Ermengarde de Narbonne.
NITOCRIS ou Nitokris, ou Nitakerit.- Reine d'Égypte, de la VIe dynastie (XXIVe siècle av. J.-C.), qui a fait l'objet de légendes romanesques racontées par Hérodote et Manéthon qui lui attribuent la construction de la troisième grande pyramide de Gisèh. Elle aurait entraîné dans sa mort les meurtriers de son époux. Cette figure légendaire pourrait recouvrir celle de Néith, femme de Pépi II.
Histoire militaire des femmes : « La reine Nitocris, appelée sur le trône après l'assassinat de son frère, ne voulut profiter du pouvoir que pour venger ce dernier. Elle fit inviter à un splendide festin les auteurs du crime, et les réunit dans ce but dans une vaste salle souterraine où, par ses ordres, on laissa les eaux du Nil faire irruption, puis elle eut le courage de s'enfermer dans une chambre remplie de cendres et de s’y laisser mourir ».
ORITHRIE.- Voir Amazones.
ORSINA VISCONTI TORELLI (comtesse).- Mère d'Antonia Torelli (Voir Torelli) et grand-mère de Donella Rossi (Voir Rossi).
Histoire militaire des femmes : « Au début du XVe siècle l’Italie nous offre une femme guerrière dans la personne de la comtesse Orsina Visconti Torelli. Devenue en 1422 régente de Guastalla, pendant que son mari commandait à Gênes, puis à Naples, elle se conduisit avec sagesse dans ces fonctions difficiles. Quatre ans plus tard, les Vénitiens, trouvant les bords du Pô dégarnis, le remontèrent et vinrent assiéger Guastalla. Orsina se trouvait à une faible distance ; elle accourt, revêt la cuirasse et le casque, rassemble ses troupes, les enflamme d'un mot, leur promettant de ne pas quitter les armes que l'ennemi ne soit battu, et engage résolument l'action. Montée sur un cheval blanc, elle suit les péripéties de la journée, devine les points faibles, et, suivant le besoin, y envoie les renforts nécessaires ; là elle combat de sa personne et abat plusieurs ennemis, ici elle fait de nombreux prisonniers ; partout son élan gagne les troupes et une grande victoire s'ensuit. Une peinture existant encore sur les murs de l’église Saint-Barthélemy à Guastalla même rappelle cette vigueur, cette habileté d’une femme improvisée général en chef et gagnant une bataille(*) ».
(*) La fille d’Orsina Visconti Torelli, Antonia, comtesse Rossi, reprit Milan sur les habitants révoltés contre François Sforza et la restitua à ce dernier. Sa petite-fille, Donella Rossi, se distingua également les armes à la main, […]. Trois générations successives de femmes guerrières, fait rare, unique peut-être !
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « comtesse de Guastalla, des vicomtes de Milan, fille d’Antonio Visconti et de Déjanire des comtes de Valperga, était cousine des onze filles de Bernabo, mariées à onze souverains, et tante à la mode de Bretagne des ducs de Milan Jean-Marie, Philippe-Marie et de Valentine, mariés à Louis, duc d’Orléans, aïeul du roi Louis XII. À l’éclat de la naissance et de la richesse elle joignait une taille avantageuse et noble, de l’esprit, de la beauté et du courage ; c’est le portrait que les historiens nous en font. Le duc Jean-Marie Visconti, voulant s’attacher davantage le comte Guy II Torelli, général d’une haute réputation, qui lui devenait nécessaire, lui donna en mariage Orsina vers 1400. Elle fut emmenée en otage à Ferrare en juin 1409 avec Christoforo, son fils ; y fut traitée avec de grands égards et n’eut à se défendre que des attentions du vainqueur. Rentrée chez elle, elle s’occupa d’y réparer les ravages qu’y avaient faits les Vénitiens et les Mantouans ; pendant que son mari allait comme commissaire général du duc de Milan à Gênes en 1422, puis commander ses forces de terre et de mer à Naples, elle resta chargée de la régence de Guastalla, et s’y conduisit avec une prudence et une sagesse infinies. La guerre ayant recommencé en 1425, pendant que Guy était allé chercher à Gênes en 1426 un secours de quatre mille chevaux et de trois cent cinquante fantassins, qu’il jeta dans la citadelle de Brescia, et que la défense de cette place occupait toutes les forces du duc, les Vénitiens trouvant les bords du Pô peu garnis de troupes, le remontèrent jusqu’à Casal-Maggiore, enlevèrent cette place et celle de Brescello, et vinrent assiéger Guastalla. Cette ville n’était gardée que par des soldats étrangers tirés de Castel-Nuovo ; privée de la présence de Guy, Orsina qui se trouvait à dix mille de là, en apprenant cette nouvelle, court à Parme, lève des troupes, endosse la cuirasse, et le casque en tête et montée sur un cheval blanc qu’elle conduisait avec une adresse extrême, parcourt la ligne de ses troupes et leur dit : « Braves soldats, c’est ici que j’attends la preuve de votre valeur, marchons ; courage ! je ne quitte pas les armes que je n’aie avec vous vaincu et mis en fuite nos ennemis ». L’élan qu’inspirèrent sa présence et ses discours fut terrible ; les Vénitiens furent culbutés, le désordre s’y mit, l’armée crut voir Guy la poursuivant ; ils abandonnèrent leur camp ; cinq cents Esclavons restèrent sur la place, et il y eut un grand nombre de prisonniers. Philippe de Bergame rapporte « qu’on vit cette femme courageuse pendant la bataille conduire elle-même les renforts aux endroits les plus chauds, que plusieurs des ennemis périrent de sa propre main, et que ses armes étaient couvertes de sang au sortir du combat ». Les habitants de Guastalla firent peindre cette glorieuse action sur les murs de l’église Saint-Barthélemi où cette fresque existe encore ; à Milan et dans tout le duché, on marqua par des feux et d’autres marques d’allégresse la joie que produisait cette nouvelle. Antonia, fille d’Orsina, mariée à Pietro Maria Rossi hérita du même courage. Orsina, veuve en 1449, mourut peu après son mari qu’elle adorait ; elle laissa trois enfants ».
ORTIZ DE DOMINGUEZ (Josefa).- Patriote mexicaine morte en 1829.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Elle prit part à la révolution mexicaine qui provoqua le départ des Etats-Unis en 1810, l'abdication de l'empereur Iturbide et la proclamation de la République par Santa Anna en 1823. Sa fougue et son courage lui valurent le surnom de “Corregidora de Queretaro”. Sa figure est restée très populaire au Mexique ».
PACHECO (doña Maria).- Femme de Don Juan de Padilla, morte en 1531. Après la défaite des « Comuneros » (révolte des communes espagnoles dirigée contre l'entourage flamand de Charles Quint auquel était alors confié le gouvernement de l'Espagne), le 21 avril 1521 à Villalar, village situé près de Peñaflor, au nord de la Castille, Juan Padilla, l'un des meneurs de l'insurrection, fut décapité. Sa femme fit alors montre d'un courage héroïque et soutint un siège dans Tolède contre les troupes de Charles Quint en 1522. À court de munitions et de vivres, elle put s'évader de la ville et, sous un déguisement, se réfugier au Portugal où elle mourut peu après.
Dans un ouvrage paru en 1847 et réédité en 1995 (Histoire et description de l’Espagne), Joseph Lavallée décrit ainsi l’action de Doña Pacheco : « Padilla tomba sous la hache du bourreau, et avec lui périrent toutes les anciennes libertés de la Castille. Valladolid, effrayé par la déroute des comuneros, implora le pardon des vainqueurs. Une amnistie générale lui fut accordée. On n’en excepta que dix-huit personnes. Ségovie, Salamanque, Médina del Campo et les autres villes suivirent l’exemple de Valladolid. Tolède, au contraire, loin de se laisser intimider par le supplice de Padilla, en reçut un nouvel élan. Ceux des habitants qui favorisaient le parti des royalistes ouvrirent les portes de la ville au marquis de Villena. Mais la veuve de Padilla, la vaillante Maria de Pacheco, se renferma dans l’alcazar ; et non seulement elle put s’y maintenir, elle parvint encore à chasser les royalistes de Tolède. Alors la ville fut assiégée par l’armée de la noblesse ; mais les comuneros, animés par Maria de Pacheco, se défendirent avec la plus grande intrépidité. Ils manquaient de vivres et de munitions ; mais ils allaient en chercher dans le camp même des assiégeants, où ils se précipitaient avec cette furie que donne le désespoir. Ces combats, dont ils sortaient souvent vainqueurs, se répétaient chaque jour ; mais, dans une de ces rencontres, on leur tua seize cents hommes ; et cette perte épuisa leurs moyens de défense. La ville capitula, et par l’intervention du clergé elle obtint une amnistie. Tout le monde déposa les armes, à l’exception de Maria Pacheco. Cette héroïne, qui n’espérait ni ne demandait de pardon, se renferma dans l’alcazar. On l’y assiégea, mais elle se défendit pendant trois mois. On parvint à forcer cette citadelle ; cependant Maria ne se rendit pas encore ; elle se retrancha dans sa maison. Enfin, quand toute défense fut devenue impossible, elle s’échappa déguisée en paysanne, et avec son fils elle se rendit en Portugal auprès de l’archevêque de Braga son parent. Son fils y mourut bientôt, et elle-même ne tarda pas à succomber ».
PALACIOS (Beatrix de).- Voir Estrada (Marie d’).
PANKHURST (Emmeline Goulden, Mistress).- Femme politique et féministe britannique née en 1858 à Manchester, morte en 1928 à Londres. Elle épousa en 1879 un avocat féministe, Richard Pankhurst, et milita dès 1889 pour obtenir le droit de vote des femmes. Elle créa en 1903, avec sa fille Christabel, l'Union politique et sociale des femmes (Women's Social and Political Union). N'ayant pu obtenir la satisfaction de ses revendications, elle passa, avec ses suffragettes, à l'action violente en 1906. Plusieurs fois arrêtée, n'hésitant pas à faire la grève de la faim, elle finit par avoir gain de cause en 1918 lorsque le droit de vote fut accordé aux femmes. En 1913, à la suite d'attentats féministes, elle fut condamnée à trois ans de prison. Libérée en 1914, elle abandonna alors la direction de son mouvement et se lança légalement dans la politique en devenant membre du parti conservateur. Au début de la Grande guerre, elle avait appelé les femmes à y participer en travaillant dans les usines ou en s'engageant dans les services auxiliaires de l'armée. Elle avait publié en 1914 son autobiographie : My Own Story.
PENTHÉSILÉE (en grec Penthesileia).- Reine des Amazones, fille de Mars. Alliée de Priam, elle alla combattre les Grecs dans les dernières années du siège de Troie et fut tuée par Achille. Le héros, en la dépouillant pour prendre ses armes, fut si frappé de sa beauté qu'il pleura sa mort et tua Thersite parce qu'il insultait le cadavre. Selon Pline (livre 7, chapitre 56), Penthésilée aurait inventé la hache d'armes.
PEROVSKAIA (Sofia Lvovna).- Révolutionnaire russe née à Saint-Pétersbourg le 13 septembre 1853, morte à Saint-Pétersbourg le 15 avril 1881.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Fille du gouverneur de Saint-Pétersbourg, reçue à la cour, elle se consacra à soulager la misère du peuple et, sous le nom de Vosinoïva, elle devint membre de Terre et Liberté (1878) et de Liberté du peuple (1879 – 1881), organisations qui dépendaient du parti populiste. Incarcérée de 1873 à 1879, puis à nouveau emprisonnée, elle s'évada et participa avec Vera Figner [Voir Figner (Vera Nokolaïevna)] à l'attentat manqué contre le train impérial (novembre 1879). Par la suite, elle prit part à deux tentatives d'assassinat de Nicolas II, à Odessa au printemps 1880 et à Saint-Pétersbourg le 1er mars 1881. Arrêtée le 10 mars, elle fut condamnée à mort et pendue le 15 avril suivant. Elle fut la première révolutionnaire à avoir été exécutée en Russie. Elle avait épousé A.I. Zheliabov ».
PERROT.- Vivandière qui fut plusieurs fois blessée lors de la conquête de l'Algérie et qui obtint la Légion d'honneur. La « chevalière Perrot », comme on l'appelait, mourut à Nantes en 1863 et fut enterrée avec les honneurs militaires.
PHILIPPIS.- Une des Amazones qui combattirent contre les Grecs d’Hercule.
PHOBÉE.- Une des Amazones qui combattirent contre les Grecs d’Hercule.
PICOLLOMINI.- Voir Fausta (Livia).
PLATER (Émilie).- Héroïne polonaise de l'insurrection de 1831 née à Vilna en 1806, morte en 1831. À la tête de six cents hommes, elle força les Russes à la retraite devant Dunabourg. Capitaine-commandant dans le régiment de Lithuanie, elle reçut la mission de défendre Kowno. Elle se fraya un chemin à travers les troupes russes, le sabre à la main ; poursuivie par les Cosaques, elle gagna un village prussien après dix jours de marche et y mourut.
Histoire militaire des femmes : « On se rappelle le grand soulèvement polonais, conséquence de notre révolution de 1830 ; alors finit une héroïne polonaise nommée Émilie Plater(*), appartenant à la famille noble de ce nom et ayant donné les preuves d’une grande énergie. Née en 1806, élevée par une parente, Mme de Sieberg, dans le domaine livonien de Lixna, ayant refusé par patriotisme d’épouser un général russe, elle avait pris les armes dès les débuts du soulèvement, réuni six cents hommes et tenté de surprendre la forteresse de Dunabourg ; malgré un combat heureux livré le 2 avril 1831 et dans lequel la victoire lui resta, il lui fallut, devant des forces supérieures, renoncer à ses projets. Investie du grade de capitaine-commandant dans le régiment de Lithuanie, elle reçut la mission de défendre Kowno et le fit avec une rare intrépidité, à la date du 25 juin. Elle se fraya ensuite un chemin au travers des troupes russes, le sabre à la main. Alors, poursuivie par les Cosaques, elle gagna la Prusse et, après dix jours de marche, tomba malade dans un village, où elle mourut de douleur en apprenant le triste sort de la capitale de sa bien-aimée patrie. Toujours habillée en homme, elle inspirait à ses troupes le plus grand respect, dû certainement à ses actions, mais également à un ensemble mélancolique et mystérieux qui en imposait. Elle avait transformé en aide de camp sa dame de compagnie, Marie Rasnanowiez, laquelle se tirait au mieux, sous sa direction, de son rôle militaire ».
(*) Émilie Plater, sa vie et sa mort, par Straszewiz, avec préface de Ballanche, 1834, Paris in-8e.
POCHELAT.- Voir Rouget (Claudine).
PORTA (Bianca).- Histoire militaire des femmes : « Bianca Porta, épouse d’un habitant de Padoue, qui exerçait les fonctions de gouverneur de Bassano, perdit son mari durant le siège de cette ville ; elle continua elle-même la défense et par son intrépidité la prolongea longtemps (1233). Enfin, cité et héroïne tombèrent au pouvoir du tyran Acciolino. Le vainqueur, remarquant les beautés de sa prisonnière, voulut abuser d'elle ; elle lui échappa en se jetant par la fenêtre. Blessée seulement, elle ne tarda pas à se remettre et dut enfin céder à la force. Désespérée, elle n'en laissa rien paraître, demanda comme faveur la permission de visiter le tombeau de son époux, et à peine la cavité sépulcrale ouverte, s'y précipita vivante en attirant sur elle la pierre de recouvrement, laquelle l'engloutit et l'écrasa en partie. C’est ce beau trait dont Legouvé a dit :
Elle attire sur soi, de ses mains assurées,
La pierre qui couvrait des dépouilles sacrées ;
Et, s’écrasant du poids sur sa tête abattue,
Du tombeau d’un époux protège sa vertu.
Que ne peut le devoir sur ces âmes fidèles(*) ? ».
(*) Le mérite des femmes. Le poète embellit son sujet en supposant que Bianca n’a pas succombé, qu’elle a seulement promis son amour, sous condition qu’on lui laisserait visiter le tombeau ouvert de son mari et y demeurer seule pour le pleurer à son aise.- Dans les notes du poème, cette héroïne est désignée sous le nom de Mme de La Porte.
POUZZOLES (Marie de).- Histoire militaire des femmes : « Pétrarque cite une de ses contemporaines nommée Marie de Pouzzoles, de la ville habitée par sa famille. Cette Napolitaine, douée d'une force prodigieuse, avait dès son enfance dédaigné les occupations féminines et manié presque exclusivement des armes ; elle était d'une grande sobriété et savait supporter les fatigues et les intempéries. Elle prit part à un grand nombre de combats et y fit preuve non seulement du courage, mais du talent de conduire la troupe ; elle excellait dans les coups de main. On la voyait diriger ses soldats soit à pied, soit à cheval. Suivant l'usage de ce temps, elle acceptait des défis et livrait, en présence du peuple, de ces combats singuliers dits combats d’honneur ou tournois. On assure qu’au milieu des camps elle mena toujours une vie régulière, et cela se peut croire d’une femme qui avait un bras assez fort pour se faire respecter. Elle mourut d'une blessure reçue dans une bataille ».
PREMOY (Geneviève).- Héroïne française, née à Guise (Aisne) en 1660, qui s'illustra comme femme de guerre sous le règne de Louis XIV sous le nom de « chevalier de Balthasar ». Ses nombreux exploits, narrés par un biographe inconnu, ont été repris par Édouard de La Barre Duparcq dans son livre Histoire militaire des femmes paru à Paris en 1873. Elle s'échappa toute jeune de la maison familiale, à la suite d’une querelle avec son frère, se rendit à Lille et, habillée en homme, s'engagea dans un régiment de cavalerie du prince de Condé. Au siège de Condé de 1676, elle ramena prisonnier, quoique blessée, un lieutenant de dragons. Convaincue de maraudage, elle fut condamnée à mort, parvint à s'échapper, puis fut graciée. Elle assista au siège de Bouchain et à la levée du siège de Maestricht. Elle prit part à l'attaque d'un convoi près de Valenciennes et tua de sa main l'officier qui le commandait. Au siège de Cambrai, elle faillit recevoir un boulet. À Lille, le courage dont elle eut l'occasion de faire preuve lui donna le grade de cornette. Puis ce furent les sièges de Gand et d'Ypres où elle fut blessée. En 1683, elle participa au siège de Courtray, en 1684 à celui de Luxembourg où elle reçut un éclat de grenade au cou. En 1688, c'est le siège de Philipsbourg où elle est de nouveau blessée. Dans l'armée du maréchal de Luxembourg, elle assiste à la bataille de Fleurus où elle a un cheval tué sous elle. En 1691, elle participe avec son régiment au siège de Mons. Louis XIV la remarque. Elle reçoit une blessure au sein et le chirurgien qui la soigne s'aperçoit que le chevalier Balthasar est plutôt une chevalière que l'on retrouve, en septembre 1691, à la bataille de Leuze-en-Hainaut (victoire du maréchal de Luxembourg sur Guillaume d’Orange). Elle participe ensuite à la bataille de Steinkerque, le 3 août 1692, qui voit une nouvelle victoire du maréchal de Luxembourg sur le stathouder de Hollande et roi d’Angleterre, d’Écosse et d’Irlande Guillaume III d'Orange-Nassau. Devenue infirme, elle est reçue à Fontainebleau par le roi qui lui octroie une pension et l'admet dans l'ordre de Saint-Louis nouvellement créé. On retrouve encore la chevalière de Balthasar au siège d'Ath, en Flandre, et enfin en Italie, en 1702, où elle commandait deux compagnies de grenadiers. On ignore la date de sa mort.
Histoire militaire des femmes :
« Nous devons aussi comprendre dans cette période [fin du XVIIe siècle] les exploits de Geneviève Prémoy, connue sous le nom de chevalier Baltazar ; son histoire ne paraît pas entièrement véridique, et l’on doit se méfier du mot par lequel son biographe anonyme(*) déclare que la vérité fait le principal ornement de son récit ; toutefois, comme il semble exister un fonds réel à ces aventures, nous en dirons quelques mots ».
« Geneviève Prémoy naquit à Guise, le 15 mars 1660 ; son père servait de partisan aux gouverneurs de Guise et de Landrecies. Ce métier, dont il s’acquitta durant quarante années à la grande satisfaction de ses chefs, donna l’essor au caractère de Geneviève qui montra de bonne heure une grande ardeur martiale. À la suite d’une querelle avec son frère, qui ne la voulait laisser habiller en homme, elle s’échappa de la maison paternelle, se rendit à Douai, y revêtit des habits masculins, adopta le faux nom de chevalier Baltazar, gagna Lille et s’engagea volontairement dans un régiment de cavalerie du prince de Condé, en la compagnie d’un capitaine nommé Barthe. Le siège de Condé (1676) fut son début ; quoique blessée dans le premier détachement dont elle fit partie, elle ramena prisonnier un lieutenant de dragons. L’ouverture de la tranchée lui permit de se distinguer encore, mais, entraînée un jour à la maraude, elle fut condamnée à mort, parvint à s’échapper, puis rentra en grâce à la suite d’une aventure très romanesque dont nous laissons la responsabilité à son panégyriste. Geneviève, après avoir assisté au siège de Bouchain, fut de la marche qui fit lever au prince d’Orange le siège de Maestricht. On la voit ensuite auprès de Valenciennes prendre part à l’attaque d’un convoi, y recevoir une blessure et tuer de sa main l’officier qui le commandait ; sous Cambrai, un boulet passe si près d’elle qu’il la rend sourde pour quinze jours. En tous ces sièges elle se distingue. À chacun des répits que lui laisse le cantonnement de son régiment dans une ville, après une victoire ou une conquête, son historien imagine ou tout au moins augmente quelque aventure gaie dont il la tire, du reste, toujours à son honneur. Ainsi fait-il pour Cambrai, ainsi fait-il pour Lille où notre héroïne revient après la levée du siège de Charleroi et la reddition de Saint-Ghislain. Le courage dont elle fait preuve dans un détachement envoyé aux environs de Lille lui vaut bientôt le grade de cornette. Peu après, Gand et Ypres la voient à leurs portes ; non loin de cette dernière place elle commande vingt-cinq maîtres et enlève à leur tête un petit convoi venant de Mons ; cet exploit lui vaut une balle à la tête dont l’extraction exige l’emploi du trépan. La paix de 1678 ne tarde pas à interrompre les actions de guerre de notre héroïne, à son grand regret. Placée dans le régiment de Gesvre, comme lieutenant réformé, elle tient garnison à Dunkerque et à Nancy ».
« Geneviève Prémoy reparaît avec ses armes en décembre 1683, au siège de Courtray, puis, pendant l’hiver, agit plus d’une fois en partisan aux environs de cette ville ; en effet, elle aimait à faire le coup de feu, ou plutôt à sabrer, car n’oublions pas qu’elle servait soit dans la cavalerie, soit dans les dragons(**). L’année suivante notre héroïne coopère au siège de Luxembourg, où elle reçoit sur le cou un éclat de grenade : son biographe reste ici sobre de détails militaires, et à le lire avec continuité l’on remarque combien il manque pour son travail de mémoires exacts sur les actions de guerre du temps, tandis qu’il abonde en circonstances sur les aventures semi-galantes(***), ce qui confirmerait la grande place tenue dans son récit par l’invention ».
« Malgré ce doute, achevons l’esquisse biographique de Geneviève Prémoy et montrons-la partie agissante au siège de Philipsbourg (1688), recevant trois balles dans la tête dans le détachement du comte de Buffy devant le château de Briscatel, en Allemagne, débarrassée de deux de ces balles par l’habileté d’un chirurgien qui lui divulgue plusieurs de ses secrets, enfin tenant garnison à Metz avec son régiment. Montrons-la également attachée à l’armée du maréchal de Luxembourg, près de Fleurus. Elle assiste à la bataille de ce nom, y charge plusieurs fois avec un courage à toute épreuve, perd son cheval tué sous elle, s’empare d’un autre. Cette dernière monture était superbe ; le maréchal la désire, force est au pauvre officier de l’échanger contre un ardennais et cent louis d’or de retour. À quelques jours de là le maréchal dit à Geneviève : « Écoute, chevalier, tu m’as trompé, ton cheval a un éparvin.- Tant mieux, monsieur, dit-elle, cela prouve sa bonté. Cependant rendez-le- moi si vous voulez, je vous bouterai le vôtre.- Et mon argent ? réclame le maréchal.- Pour celui-là, je vous ferai mon billet, même par-devant notaire, si vous le voulez, monsieur ». Tout le monde se mit à rire : « Allons, dit Luxembourg, tu me parais plaisant ; viens dîner avec moi ».
« En 1691, Geneviève assiste avec son régiment au siège de Mons ; la vue du roi excite son courage, et elle porte souvent la fascine(****) à découvert. Louis XIV la loue tout en lui faisant dire de ne plus s’exposer ainsi. Sous cette ville elle reçoit dans une escarmouche une blessure au sein, qui la met en danger de mort et dévoile son sexe ; le chirurgien qui la soigne certifie que le chevalier Baltazar, au service depuis quinze ans et connu pour sa valeur, est une fille, et cela double sa réputation. Toutefois la guérison fut lente. On la retrouve pourtant à la bataille de Leuze (18 septembre 1691), et se distinguant comme à l’ordinaire. À peu de temps de là, Louis XIV, stationnant au camp de Gembloux, la fit mander et l’interrogea sur ses campagnes ; elle répondit avec assurance et sans déplaire, témoignant du désir qu’elle avait de mourir pour Sa Majesté ; le prince de Monaco et le marquis de Roncheroles avaient rendu d’elle au monarque le meilleur témoignage ».
« Louis XIV eut encore occasion de complimenter la Dragonne pour sa part glorieuse à la bataille de Steinkerque ; il le fit à Versailles, où elle se rendit par ordre, et lui donna des marques de sa générosité ».
« Blessée à nouveau lors de la bataille, nous devrions dire lors de la victoire suivante de Luxembourg, et devenue infirme, notre héroïne rentra en France et se rendit à Fontainebleau auprès du roi. « Vos services sont dignes de récompense », lui dit ce prince. Une pension et l’admission dans l’ordre de Saint-Louis, dès sa création, furent la suite de cette gracieuse parole du souverain ; Geneviève fut autorisée à porter l’ordre de Saint-Louis en écharpe ».
« Le chevalier Baltazar parut encore à l’armée en 1697, sous les murs d’Ath en Flandre, et finalement en 1702 en Italie ; là, il commanda jusqu’à deux compagnies de grenadiers. On ignore l’époque de sa mort. Depuis qu’on l’avait reconnu pour une femme, il portait une jupe, mais le reste de son habillement dénotait un officier de distinction. Son front était large, sa chevelure brune, son air hardi, son attitude délibérée ».
(*) Hist. De la Dragonne, contenant les actions militaires et les aventures de Geneviève Prémoy, sous le nom du chevalier Baltazar, dédiée au roy. A Brusselles, chez George de Backer, imprimeur et marchand libraire, aux trois Moret, à la Bergstraet, 1703. Avec privilège du roy, I vol. in-16 de VIII-285 pages, avec portrait.
(**) Ce n’était pas alors la même chose, les dragons n’étant encore que de l’infanterie à cheval ; les ordonnances du temps disent fantassins, cavaliers et dragons.
(***) Ce sont toujours à peu près les mêmes ; le chevaliez Baltazar inspire de fougueuses passions à de jeunes héritières, ou sauve en plein air des paysannes menacées dans leur honneur. À la page 197 de son volume, l’auteur avoue la multitude des aventures arrivées à son héroïne.
(****) Sans ces fascines, le travail des tranchées serait impossible.
PROTHOË.- Une des Amazones qui combattirent contre les Grecs d’Hercule.
PUCELLE D’ORLÉANS (la).- Voir Jeanne d'Arc.
QUATRE-SOUS.- Voir Rouget (Claudine).
RACINE.- Vivandière au 2e régiment de chasseurs d'Afrique qui obtint une médaille d'honneur en novembre 1839 « pour avoir, dans les nombreuses expéditions auxquelles son corps a pris part, montré un admirable dévouement en secourant les soldats blessés jusque sous le feu de l'ennemi et en prodiguant à tous les soins et la consolation » (Rapport au roi Louis-Philippe Ier par le ministre de l'intérieur).
RADHIAT-EDDYN.- Reine du Dehly qui fut proclamée souveraine après la déposition de son frère en 1236.
Histoire militaire des femmes : « Se mit à combattre successivement les rebelles qui s'opposaient à l'établissement d'un pouvoir central et fort. Elle les vainquit presque tous ; à la fin cependant elle échoua contre les troupes d'un monarque voisin dont elle devint prisonnière, mais son vainqueur, rempli d'admiration pour elle, ne tarda pas à la délivrer et à l'épouser ».
RANGONE (Constance de).- Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Est comptée au nombre des femmes illustres du seizième siècle. Née dans la Marche Trévisanne, elle avait épousé César Fregose , l'un des plus grands hommes de la république de Gênes, et qui s’était attaché à François Ier contre Charles-Quint, dans les guerres d'Italie. François Ier l’envoya avec Rinconnet, à Constantinople, pour y renouveler une alliance avec la Porte ; mais Charles-Quint, instruit du projet, fit assassiner en route les deux ambassadeurs, en 1541. L'épouse de Fregose vengea sa mort et l'honneur de la France. S'étant mise à la tête des troupes qu'avait commandées Fregose, elle chercha les Espagnols, les combattit, et les mit en déroute ».
READ (Mary).- Célèbre femme pirate née en Angleterre à la fin du XVIIe siècle, morte en 1721. Se faisant passer pour un homme, elle s'engagea à bord d'un navire marchand hollandais sous le nom de Mark Read. Ce navire fut capturé par des pirates anglais dans les rangs desquels elle s'intégra. Aux Bahamas, elle rencontra une autre femme pirate célèbre, Anne Bonny (Voir cette entrée), dont elle devint la compagne. Toutes deux finirent par être prises, à la Jamaïque, et condamnées à mort. Elles n'échappèrent à la sentence que parce qu'elles déclarèrent qu'elles étaient enceintes. On ignore tout de ce que devint Anne Bonny ; par contre, on sait que Mary Read mourut en prison, probablement des suites de la fièvre jaune.
Histoire militaire des femmes : « Une anglaise, Marie Read, nous apparaît à la fin du XVIIe siècle, au milieu des mers américaines, vivant avec des pirates, partageant leurs dangers, leurs profits et la fin souvent tragique de leur carrière […] ».
On peut lire sous la plume de Maxime Formont, dans Le magasin pittoresque (publié sous la direction d’Édouard Charton, 72e année, série III, tome cinquième, Paris) :
« Née en 1680, Marie Read était orpheline, n’ayant plus que sa mère qui était fort pauvre. Pour capter la bienveillance de sa belle-mère, la veuve imagina de déguiser la fillette en garçon et de la conduire ainsi vêtue chez la vieille femme, en la lui présentant comme un fils de son mari. La supercherie réussit : la belle-mère vivait à Londres, assez loin de la famille, et comme les petites gens ne correspondaient pas trop facilement à cette époque, elle n’avait pas eu de nouvelles du ménage de son fils depuis assez longtemps. Elle voulait garder près d’elle le prétendu garçon afin de l’élever elle-même, mais la mère n’y consentit point, acceptant seulement un subside pour les frais de son entretien ».
« Sa mère continua à l’élever comme un garçon. Sur ces entrefaites l’aïeule mourut. Les deux créatures furent réduites à la misère. Dans cette extrémité la mère résolut de mettre sa fille, qui avait atteint l’âge de treize ans, au service d’une dame, en qualité de valet de pied. « Elle n’y demeura pas longtemps, dit le capitaine « Charles Johnson, auquel j’emprunte l’histoire, mais se sentant une inclination au « brigandage, elle s’engagea sur un vaisseau de guerre, où elle servit quelque « temps ». Sa vocation venait de se déclarer ».
« Mais il faut croire que le brigandage maritime était alors d’un faible rapport, du moins pour les débutants. Marie Read quitte la mer et passe en Flandre. La guerre de la ligue d’Augsbourg mettait à ce moment la France aux prises avec la Hollande et l’Angleterre. Marie s’enrôle comme cadet dans un régiment d’infanterie. Elle se comporte dans toutes les rencontres avec une bravoure inimaginable, risque cent fois la mort, renouvelle les exploits légendaires de la nonne Alférez [Voir Erauso (Doña Catalina de)], l’héroïne espagnole célébrée par M. de Heredia, et dans un temps où le courage était une profession pour tant de monde, arrive à se signaler parmi cette milice de héros. Mais elle a beau se précipiter tous les jours dans la mêlée : elle en revient rouge de feu et de sang, noire de poudre, sans le plus petit avancement. Elle ne se rebute pas encore, mais elle quitte l’infanterie pour la cavalerie […] ».
« Pendant qu’elle faisait de si beaux progrès dans l’école de Mars, dit son biographe, Vénus vint lui rendre visite : elle devint éperdument amoureuse d’un Flamand beau garçon, qui était son camarade. Depuis ce temps-là, elle fut moins sensible aux charmes de la guerre ; ses armes, qu’elle avait toujours eu soin de tenir propres, furent négligées ; elle ne courait plus avec le même zèle aux devoirs de sa charge, à moins qu’il ne fallût accompagner son Flamand ; aussi ne manqua-t-elle jamais de le suivre dans tous les partis où il était commandé. Un jour, elle finit par lui avouer qu’elle était femme. Le Flamand, touché d’une telle tendresse, s’engagea à l’épouser ».
« Le régiment connut bientôt toute l’histoire et les officiers prirent le couple sous leur protection. Le mariage se fit comme l’armée venait de prendre ses quartiers d’hiver ».
« Plusieurs officiers eurent la curiosité d’y assister, et convinrent entre eux que chacun leur ferait quelque présent… Ils sollicitèrent ensuite leur congé pour chercher quelque établissement plus solide, et louèrent une maison près du château de Bréda pour y tenir auberge. L’aventure de leurs amours et leur mariage leur attira beaucoup de pratique, et la plupart des officiers de la garnison y dînèrent régulièrement ».
« Mais ce bonheur conjugal ne fut pas de longue durée. Bientôt après, le mari mourut, et comme la paix de Ryswick retirait de Bréda la plus grosse part de la garnison, la clientèle des officiers se trouva tellement réduite que la veuve ne fit plus ses affaires ».
« Marie Read reprend ses habits d’homme et de nouveau s’engage à la frontière dans un régiment d’infanterie. Mais la prolongation de la paix, déjà funeste à son négoce, lui retire toute chance d’avancement rapide. Un beau jour elle s’embarque à la destination des Indes Occidentales où elle va chercher fortune. C’est un extraordinaire aventurier que cette femme ».
« Chemin faisant, le vaisseau est pris et mis au pillage par des pirates anglais ; ils le laissent ensuite aller, mais l’air de décision de Marie Read, sa jeunesse, sa bonne mine les ont frappés. Ce peut être pour eux une précieuse recrue .
- Reste avec nous, lui disent-ils ».
« Elle accepte. La voici rendue à cette existence de flibuste et de piraterie dont elle ne sortira plus. Elle manie intrépidement le pistolet et la hache d’abordage, et sa valeur éclipse celle de tous ses compagnons qui sont cependant des hommes résolus et prêts à tout. Parfois les entreprises des aventuriers de mer se colorent de quelque prétexte patriotique ».
« C’est ainsi que le capitaine Woods, gouverneur de la Providence, armant des vaisseaux pour croiser contre les Espagnols, Marie Read avec plusieurs autres s’enrôlèrent à cette intention. Mais à peine eut-on mis à la voile que les équipages se soulevèrent contre leurs commandants pour recommencer leur ancien métier de pirates : de ce nombre était Marie Read. Il est vrai, dit son historien, que souvent elle a déclaré qu’elle avait en horreur ce genre de vie, et qu’elle ne s’y était engagée qu’à force de sollicitations. Cependant, lorsqu’on instruisit son procès, deux hommes déposèrent sous serment que, dans quelque action que ce fût, aucun pirate n’avait paru si résolu, ni si prêt à aller à l’abordage ou à entreprendre quelque chose où il y eût du danger, qu’elle et Anne Bonny ».
« Singulière figure et d’un romanesque étrange que cette Anne Bonny ! Elle aussi avait été séduite par cet attrait extraordinaire que le métier de pirate offrait alors aux âmes un peu exaltées, et qui peut se comparer au prestige des Brigands de Schiller, pour les esprits romantiques. Elle avait quitté les siens et pris des habits d’homme comme Marie Read, pour partager la vie et les exploits du fameux chef des pirates, Racham, dont la figure prend, dans les récits de l’époque, des proportions vraiment épiques. Quand elle rencontra Marie Read, elle sympathisa naturellement avec elle ; Racham, prenant Marie pour un homme, suspecta leur familiarité, et faillit couper la gorge à ce rival imaginaire, ce qu’il eût fait, si Anny Bonny ne lui eût révélé que le prétendu rival était une femme comme elle.- Garde-lui le secret, ajouta-t-elle ; sur ce navire, Marie Read n’est et ne veut être qu’un pirate comme les autres, et plus hardi que les autres ».
« Cependant, Marie s’était liée d’affection avec un jeune captif que les pirates avaient enrôlé de force parmi eux. Elle en donna bientôt des marques par une action aussi généreuse que l’amour en ait jamais pu inspirer ».
« Il arriva que dans le temps que leurs vaisseaux étaient à l’ancre près d’une île, ce jeune homme prit querelle avec un autre de la troupe. Ils se donnèrent rendez-vous à terre pour se battre selon la coutume des pirates. Cette nouvelle troubla extrêmement la pauvre Marie Read, elle en fut toute agitée, non pas qu’elle souhaitât qu’il eût refusé ce défit ; elle avait elle-même trop de courage pour souffrir la moindre lâcheté dans son amant, mais elle craignit qu’un bras plus fort ne terrassât cet objet aimé, sans lequel elle ne pouvait plus vivre. Elle aima mieux exposer sa propre vie… Dans cette résolution, elle fait une querelle d’Allemand au pirate, et le défie au combat. Le pirate accepte le défi, et s’étant trouvés au rendez-vous deux heures avant le temps marqué pour le combat de son amant, ils se battirent avec le sabre et le pistolet et Marie Read eut le bonheur de vaincre leur ennemi commun qu’elle tua sur la place ».
« Mais tout a une fin. Un jour la chaloupe de Racham fut prise par la marine du roi, presque sans combat. Dans cette dernière action, dit le chroniqueur, personne ne demeura sur le tillac que Marie Read, Anne Bonny et un troisième. Sur le refus que firent ceux qui étaient sous le tillac de venir au combat, Marie Read fit feu sur eux ; un pirate fut tué et plusieurs autres blessés. Son énergie était indomptable, de même que celle d’Anne Bonny.
« Le jour que Racham fut exécuté, on lui permit par grâce spéciale de voir Anne Bonny ; mais, pour toute consolation, elle lui dit :
« Je suis fâchée de vous voir en cet état ; si vous aviez combattu comme un homme, vous ne vous verriez pas pendre comme un chien ».
« Les deux femmes pirates furent jugées et condamnées : ni l’une ni l’autre ne fut exécutée, cependant ».
« Mais Read mourut dans sa prison, d’une de ces fièvres pernicieuses qui ne sont pas rares à la Jamaïque ».
« On n’a jamais pu savoir ce que devint Anne Bonny ».
« Toutes deux furent des brigandes assurément, des âmes de violence et de proie. Mais ce furent non moins incontestablement des héroïnes que ces chercheuses d’aventures : elles ont montré que l’énergie féminine peut égaler et quelquefois dépasser celle de l’homme. Elles se détachent en vigueur sur le rouge décor des soirs de pillage qui ensanglantèrent pendant un siècle la mer des Antilles ».
RECMESSE.- Une des Amazones qui combattirent contre les Grecs d’Hercule.
ROBIN (Jeanne).- Paysanne de Courlay qui combattit dans les rangs royalistes lors de la guerre de Vendée. Elle fut tuée à la bataille de Thouars gagnée par les républicains du général Quétineau le 14 septembre 1793. La veille de la bataille, Jeanne Robin alla trouver Louis-Marie de Salgues, marquis de Lescure, et lui demanda une paire de souliers et la permission de se battre. Elle combattit tout près de lui, fut blessée à la main et périt dans une mêlée où elle s'était précipitée avec fureur.
Dans un ouvrage paru en 1880, Oscar de Poli raconte la mort de Jeanne Robin à la bataille de Thouars (Oscar de Poli, Jean Poigne-d’acier : récits d’un vieux chouan, précédés d’une étude historique sur les Vendéens et les Chouans, 1880) :
« Voilà que Jeanne Robin apprit que M. de Lescure avait défendu qu’aucune fille ou femme servit dans l’armée royale ; il avait ses raisons pour ça, il faut croire, mais ça n’en fit pas moins de peine à Jeanne, aussi bien qu’à son frère et à moi ; ce qui lui donna tout de suite une bonne pensée, comme vous allez voir ».
« Elle s’en alla à la Boulaye, au château, où se trouvait alors Mme de Lescure, et demanda à lui parler. Madame la marquise le voulut bien, et lui dit en la voyant :
- Tu es bien pâle, mon garçon ?
- Je suis une femme, madame la marquise, lui répondit Jeanne ; je suis la fille de Robin Robin, le fermier de votre Petit-Milly, et je viens vous demander de me laisser me battre toujours.
- Mais cela regarde M. de Lescure, mon enfant ; et puis ne comptez-vous pas trop sur vos forces ?
- Je me suis battue quatre fois déjà, madame.
- Eh bien ! mon enfant, lui dit madame de Lescure avec bonté, je parlerai pour vous au général. Adieu, retournez près de votre père…
- Il est mort, madame !
« Et, comme Jeanne fondait en larmes, madame la marquise la consola de son meilleur cœur, et je vous jure qu’il était bon ; puis elle lui renouvela sa promesse de parler en sa faveur au général ».
« Le soir, elle nous revint, la tête haute sinon joyeuse, et nous conta tout ce que je vous ai dit ».
« Le lendemain, on partit pour Thouars, qu’on allait enlever aux citoyens ».
« Deux jours après, on les attaquait ».
« Ce fut une terrible mêlée, mes enfants ; comme toujours, le succès fut d’abord notre ami ; puis, je ne sais pas trop comment, il passa chez les autres ; il faut dire aussi que nous étions vingt contre cent, et on serait battu à moins, n’est-ce pas ? […] ».
[…] « Nous voilà donc à l’attaque de Thouars, mes enfants. M. de Lescure était venu de Saint-Sauveur avec deux ou trois mille gars, et dame ! ça chauffait, comme vous pensez ; car nous nous battions contre vingt mille bleus, et ils savaient bien toujours que nous n’étions pas tant qu’eux ».
« En marchant au feu, Jeanne aperçut M. de Lescure qui passait à cheval à dix pas de nous ; elle courut à lui en s’écriant :
- Mon général, vous ne voulez pas que les femmes se battent ; je suis une femme, moi ; je suis Jeanne Robin ; je l’ai dit à Mme de Lescure ; eh bien ! vous allez voir si les femmes du Bocage se battent comme il faut ! Après ça, vous me renverrez si ça vous plaît, mon général ! ».
« M. de Lescure la salua de son épée en souriant, et Jeanne se jeta en avant, comme une lionne ; elle courait, elle courait, suivie du fidèle Chanzeaux, si fort que Jacques et moi nous avions peine à la suivre dans les guérets ; et cependant ses souliers s’en allaient en morceaux, et ses pauvres pieds meurtris demandaient grâce aux sillons ».
« Elle arriva à vingt-cinq pas des citoyens, qui se reformaient après avoir décampé, et leur envoya son coup de fusil comme eût fait un vieux soldat ; puis elle se rejeta en avant, en criant à nos gars :
- En avant, en avant ! Vive Dieu et vive le Roi !
« Quatre des nôtres se précipitèrent sur ses pas ; les citoyens reculèrent encore ».
« M. de Lescure avait suivi Jeanne des yeux ; il arriva sur elle au galop, en criant :
- Tu seras notre Jeanne d’Arc !
« Il y eut des citoyens qui l’entendirent et qui en profitèrent ensuite pour en faire un tas de mauvais ragots. Jeanne en doubla son courage ; elle semblait défier la mort ; elle courait, elle criait, elle animait les autres ».
« Je l’admirais en la suivant de mon plus près, et, quand je voulais passer devant elle avec l’idée de la couvrir de mon corps pour empêcher les balles de lui arriver, elle doublait sa course en me disant :
- Merci, mon brave Jean, mais je n’ai pas peur, allez !
« Et elle me dépassait en souriant.
« Hélas ! mes enfants, en sautant un fossé, Jeanne reçut d’abord une balle à la main.
- Vous êtes blessée ! m’écriai-je.
- Ce n’est rien que cela, mon ami, me répondit-elle ; ce n’est rien, Jacques, dit-elle à son frère qui accourait.
« Puis elle s’élança encore ; mais Dieu l’avait marquée pour ce jour-là, Jeanne, ma pauvre Jeanne, tomba à mes pieds ; une balle venait de lui traverser la poitrine ; je tombai aussi, moi, je tombai à genoux, fou de terreur et de douleur, à genoux près d’elle, tenant dans mes mains frissonnantes sa tête blonde et blanche ; je l’appelais en la suppliant, en sanglotant, quand un éclat de mitraille me jeta sanglant sur ses pieds […] ».
RODOGUNE.- Princesse parthe, fille du roi Mithridate Ier (IIe siècle av. J.-C.), qui épousa, en 140 av. J.-C., Démétrios II Nikatôr, roi de Syrie, alors prisonnier des Parthes, et qui était déjà marié avec Cléopâtre Théa, fille du roi d'Égypte Ptolémée VI Philométor.
Histoire militaire des femmes : « Au dire de Polyen, […] « elle se nettoyait les cheveux et se lavait quand on vint l’avertir du soulèvement d’une nation tributaire. Elle fixe ses cheveux par un simple nœud, fait vœu de ne rien changer à sa coiffure qu’elle n’eût dompté les rebelles, puis monte à cheval et prend le commandement de son armée. Après une longue guerre, elle obtient la victoire. Alors seulement, raconte le même écrivain, elle se lave » ; il veut dire sans doute dans sa naïveté qu’elle achève sa coiffure et la couvre comme elle en avait l'habitude. « De là, ajoute-t-il, que le sceau royal des Perses porte pour empreinte Rodogune avec des cheveux pendants et attachés «- d'un nœud(*) ».
(*) Polyen, VIII, 27.
RODRIGUEZ (Isabel).- Voir Estrada (Marie d’).
ROHMER (Catherine).- Vivandière, née à Colmar en 1783, qui participa activement à la guerre d'Espagne, à la bataille de Wagram, à la campagne de Russie de 1812, à la campagne de France de 1814, à la bataille de Waterloo du 18 juin 1815 et, pour finir, à la conquête de l'Algérie.
Histoire militaire des femmes : « Parmi les femmes qui prirent part à l’expédition d’Afrique, il nous faut citer Catherine Rohmer(*). Mariée en secondes noces (1825), à un sergent-major du génie(**), elle le suit, et, fait curieux, ses huit fils l’accompagnent. Elle assiste aux prises d’Alger, de Bône, de Mascara, d’Oran, de Constantine. Au siège de cette dernière ville elle perd son second mari et deux de ses fils ; l’un était tambour-major, l’autre chef de musique. Il lui restait encore six fils, tous présents à l’armée d’Afrique. On ne saurait trop citer l’énergie d’une femme qui paye ainsi de sa personne (elle fut blessée de deux coups de feu, reçu l’un à Bougie, l’autre à l’affaire de la maison carrée), on ne saurait trop louer le dévouement patriotique d’une mère qui voit sans sourciller que ses huit fils sont soldats. Cette héroïne était vivandière comme sa mère. Elle avait débuté dans les camps ; sous ses yeux son père, sergent, était mort à la prise de Calabre, et un boulet, à la bataille de Fleurus, avait emporté la tête de sa mère. À dix-neuf ans elle avait épousé François Girard, tambour-major de la 62e demi-brigade. Incorporée dans la division Donnadieu, elle assistait à la prise de Saragosse, entrait au Portugal, revenait à Barcelone. Déjà ses huit fils étaient nés et tous étaient enfants de troupe. D'Espagne elle courait avec son régiment à Wagram, et recevait dans cette journée un coup de lance. Elle tenait ensuite garnison à Vienne. De Vienne elle se rendait à Naples. Après plusieurs mois passés en Italie le sort la renvoyait en Espagne. On ne pouvait prendre, à ce qu’il paraît, Girone sans elle ; elle se distinguait en portant secours aux blessés, elle saisissait un fusil, faisait le coup de feu, donnait l'exemple avec autant de calme que de résolution ; à la suite de cette conquête, son mari obtenait la décoration. De Girone elle partait pour la Russie, (quelle odyssée !) traversait Varsovie, Cracovie, atteignait Moscou : elle résistait à tout, même aux désastres de la Bérésina. De retour en France, on réorganisait son régiment. La campagne de France, en 1814, la comptait encore parmi ses acteurs les plus intrépides ; on la remarquait à Chalons, à Troyes, à Bar-sur-Aube, à Brienne. Elle assistait aux adieux de Fontainebleau, elle faisait partie du petit bataillon de l'île d'Elbe. L'année suivante elle assistait à la bataille de Waterloo. Peu après son mari devenait adjudant d'artillerie. En 1823 elle le suivait pour la seconde fois en Espagne ; mais un coup de feu abattait ce brave entre Barcelone et Gracia. Ce fut deux ans après ce grave événement de sa vie militaire qu’elle devint Mme Varin et bientôt guerrière africaine(***). Quelle vie active, et combien peu des Amazones de l’antiquité ont accompli autant d’actions de guerre ! Ajoutons que cette vaillante femme vécut et mourut pauvre, dans un âge avancé, à Colmar ».
(*) Née à Colmar, en 1783.
(**) Antoine Varin.
(***) On compte souvent parmi les femmes qui ont pris part à notre expédition d’Alger, en 1830, une vivandière nommée Thérèse Jourdan, dont la carrière ressemble beaucoup, sauf en ce qui concerne le nombre des enfants, à celle de Catherine Rohmer.
ROSSI (Donella).- Fille d'Antonia Torelli (Voir Torelli) et petite-fille d’Orsina Visconti Torelli (Voir Orsina).
Histoire militaire des femmes : « Assiégée en 1483, en l'absence de son mari Gibert Sanvitale, par son propre père et son cousin, dans le château de Sala, qui devint plus tard la résidence des ducs de Parme, y soutint un assaut, défendit vigoureusement la brèche, repoussa finalement l'ennemi et tua, dit-on, son cousin, d'un coup d'arquebuse ».
ROSSINI (Marie-Barbe).- Appartenant aux zouaves de la Garde, sous le second Empire, elle participa le 4 juin 1859 à la bataille de Magenta, en Lombardie (victoire du maréchal Canrobert sur les Autrichiens), et fut décorée de la médaille militaire par décret du 17 juin 1859.
ROUGET (Claudine).- Histoire militaire des femmes : « Claudine Rouget et Goton Marchand […] combattirent dans les armées de la République ; la première reçut, en décembre 1793, une pension de 500 fr. ; la seconde, en juillet 1795, une gratification de 400 fr. La dernière venait de se distinguer au siège de Maestricht ; mais en leur accordant une récompense, la Convention voulut faire cesser les inconvénients pouvant résulter de la présence de femmes au milieu des rangs militaires ; toutes deux reçurent donc l’ordre de rentrer dans leurs foyers(*). Quant à la demoiselle Quatresous, la récompense qui lui fut octroyée le 22 avril 1794 diffère des deux précédentes ; elle consiste en une pension de 300 fr. avec promesse de l’augmenter le jour de son mariage ; cette clause particulière dénote en faveur de ses services et de sa bonne réputation. N’oublions pas à ce titre la femme Pochelat, qui combattit, en 1792 et 1793, en qualité de canonnier, dans la légion des Ardennes ; comme les précédentes dont elle était contemporaine, elle obtint de la Convention des éloges et une pension. Nous ignorons si elle reprit les armes et continua le service militaire après l’obtention de cette pension (juin 1793) : toutefois on ne lui en fit pas la condition ».
(*) Nous ne parlons ni de Théroigne de Méricourt ni de Henriette-Jeanne Lacombe, qui ont pris part à des émeutes, à des insurrections, à la journée du 10 août 1793 par exemple ; ce sont des révolutionnaires, nullement des guerrières.
ROYAUME (Madame).- Voir Mère Royaume.
SAINT-NECTAIRE ou Senneterre (Madeleine de).- Surnommée par ses contemporains « l'Héroïne du siècle », elle était veuve de Guy de Miremont lorsque Montal, lieutenant des Guises, assiégea son château en 1573. Non contente de défendre bravement le château de Miremont, elle blessa elle-même mortellement Montal.
Histoire militaire des femmes : « Madeleine de Saint-Nectaire, épouse du comte de Miramont, veuve de bonne heure, se mit à la tête des vassaux de son mari et de son père, les uns disent de ses prétendants, dont le nombre était grand quoiqu’elle refusât toujours de se remarier ; accompagnée d’une soixantaine de gentilshommes, elle battit souvent François de Rosière, seigneur de Montal, lieutenant du roi dans cette contrée [haute Auvergne]. En 1574 ce dernier vint ravager les environs du château de Miramont : notre Amazone se porta à sa rencontre, et dès qu’elle le vit, engagea l’action au cri de « Faites comme moi » et en chargeant elle-même l’ennemi. Après une vive escarmouche, le château de Miramont se trouve investi. Mme de Miramont court chercher du secours, obtient à Turenne quatre compagnies d’arquebusiers, troupe alors assez rare, et résout de jeter cinquante de ces tireurs dans la forteresse. Comme Montal accourt, elle se précipite sur lui malgré le faible effectif de ses troupes, et le met en déroute ; son adversaire reçoit même dans la lutte une blessure mortelle. Plus tard cette guerrière émérite, qui appartenait à la religion protestante, soutint contre la Ligue le parti du roi ».
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Fille de Nectaire, bailli des montagnes d’Auvergne, et de Marguerite d’Estampes, née vers l’an 1526, épousa, le 29 mai 1548, Gui de Miramont, seigneur de Saint-Exupery. La dame de Miramont fut une véritable héroïne. Veuve de bonne heure, encore jeune et belle, entourée d’adorateurs, elle ne cessa point d’être vertueuse ; mais cette vertu, assez rare, n’est pas son seul titre à la célébrité : elle se distingua de plus par son courage militaire ; elle soutint le parti protestant avec succès, fit la guerre à François de Rozière, seigneur de Montal, lieutenant de roi dans la Haute-Auvergne. Elle marchait à la tête d’une cavalerie de soixante gentilshommes, « qui suivaient, dit d’Aubigné, le drapeau de l’amour et le sien ensemble ; presque tous brûlant pour elle, sans que jamais aucun se soit pu vanter d’une caresse déshonnête ». Elle battit en plusieurs rencontres les troupes du lieutenant de roi ; enfin celui-ci en ayant rassemblé plusieurs, vint, en 1574, ravager les environs du château de Miramont. La dame réunit aussitôt plusieurs corps de troupes, marcha contre Montal, et l’ayant rencontré, elle dit à sa petite armée : « Faites comme moi ». Aussitôt avec quinze cavaliers elle prit le galop, et il y eut là une escarmouche assez vive. Pendant la nuit, Montal fit investir le château de Miramont. Notre guerrière, ne pouvant y entrer, fut à Turenne pour y demander du secours ; elle ne put obtenir que quatre compagnies d’arquebusiers. En attendant des forces plus considérables, elle résolut de faire entrer cinquante arquebusiers dans la forteresse de Miramont. Montal, averti de ce projet, va au-devant de l’armée de notre héroïne. Le combat s’engage entre les deux troupes ; la dame de Miramont, qui n’avait que cinquante cavaliers, saisit l’instant favorable pour charger la cavalerie de Montal, qu’elle met en déroute ; lui-même est blessé mortellement dans l’action. Mézeray dit que la dame de Miramont tua de sa propre main le lieutenant de roi ; mais d’Aubigné, qui décrit avec détail cette affaire, n’en parle point. Il dit que Montal reçut un coup au travers du corps, et qu’il fut transporté dans un château voisin, où il mourut quatre jours après ; il ajoute que lui et ses compagnons reprochaient en plaisantant aux gentilshommes de la Haute-Auvergne d’avoir été soldats de la dame de Miramont, et que ceux-ci leur reprochaient à leur tour de n’avoir pas eu cet honneur. Cette dame défendit, dans la suite, le parti du roi contre la Ligue ».
SALISBURY (comtesse de).- Histoire militaire des femmes : « C’est justement à cette guerre de la Succession de Bretagne que nous devons rattacher la personnalité de la comtesse de Salisbury, puisque c’est le roi d’Angleterre Édouard III, l’un des acteurs de cette lutte, qui l’immortalisa par son amour. Cette comtesse, assiégée dans son château, en l'absence de son mari(*), par le roi d'Écosse, David Bruce, à la suite d’une escarmouche livrée sous les murs de cette forteresse et où les siens avaient été vainqueurs, sut prendre la direction morale de la défense, réconforter ses chevaliers, archers et serviteurs. On la tenait, dit Froissart, pour la plus belle et la plus noble d’Angleterre, et ce chroniqueur ajoute : « Par le regard d’une telle dame et son doux admonnestement, un homme doit en valoir deux au besoin ». C’est d’un mot, et en conteur naïf, peindre au mieux l’influence d’une femme présente et active au milieu des guerriers. Mais, après un premier assaut repoussé, la situation de la garnison du château devint critique et il fut décidé d’envoyer vers Édouard III ; Guillaume de Montaigu se chargea de cette mission périlleuse. Le roi d'Angleterre acquiesça à sa demande et marcha immédiatement avec 6.000 armures de fer(**), 10.000 archers et plus de 60.000 piétons ; à son approche le roi d'Écosse leva le siège. Dès l’arrivée d’Édouard III, la comtesse de Salisbury vint le recevoir à la porte du château, vêtue de riches habits et avec le plus gracieux maintien ; elle s’inclina jusqu’à terre, le remercia de la grâce et du secours qu’il lui avait faits, et l’emmena dans ses appartements pour le fêter et l’honorer ».
(*) Fait prisonnier devant Lille, il se trouvait encore prisonnier au Châtelet de Paris.
(**) 6.000 cavaliers bardés.
SALMANTIDES.- Histoire militaire des femmes : « Au temps d’Hannibal nous rencontrons en Espagne comme femmes guerrières les Salmantides. Plutarque raconte ainsi le fait dans son traité sur les Actions courageuses des femmes : « Hannibal assiégeait Salmantique, ville d’Espagne, lorsque les habitants lui offrirent 300 talents d’argent et 300 otages. Il se retira, mais la cité ne tenant pas ses promesses, il revint et promit le pillage à ses soldats. Cette fois, effrayée, la population livra toutes ses richesses, y compris les esclaves, à condition que les personnes des citoyens seraient libres. En quittant leurs foyers, les femmes cachèrent des épées sous leur vêtement. Comme les Carthaginois pillaient la ville abandonnée, la garde massylienne chargée de veiller sur les prisonniers eut également envie de s’enrichir et déserta en partie son poste. Alors les Salmantides, profitant de l’occasion, armèrent leurs maris contre les Massyliens ; plusieurs combattirent avec eux, et l’une d’elles blessa d’un coup de lance un interprète nommé Bannon. Après l’action, les habitants, hommes et femmes, s’enfuyaient, quand Hannibal les atteignit et en massacra un grand nombre. Les autres gagnèrent les montagnes ; ils obtinrent plus tard du vainqueur de rentrer dans la ville ».
SALONINE (Julia-Cornelia).- Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Femme de l'empereur Gallien, joignit à une beauté régulière et à une figure noble toutes les vertus de son sexe. Sans faste, sans orgueuil, remplie de zèle pour le bien public, procura l'abondance dans Rome et ne fut occupée que du soin de faire des heureux. Elle favorisa les savants et fut savante elle-même. Sa philosophie lui fit voir sans dépit les infidélités de Gallien, qui d’ailleurs la respecta toujours, et qui se loua plusieurs fois de ses conseils. Née avec un courage héroïque, elle arrachait son époux du sein des voluptés, pour le faire combattre contre les tyrans qui déchiraient l'empire. Elle l'accompagnait dans ses expéditions militaires, et peu s'en fallut qu'elle ne fût faite prisonnière par les Goths, lorsque Gallien les chassa d'Illyrie. S'étant arrêtée au retour auprès de Milan, où le tyran Auréole avait levé l'étendard de la révolte, elle fut enveloppée dans une conjuration formée contre Gallien, et périt dans la même nuit que son époux et les princes de la famille impériale, le 20 mars 268 ».
SANS-GÊNE.- Voir Figueur (Marie-Thérèse).
SCANAGETTA (Francesca).- Histoire militaire des femmes : « Une jeune fille servait comme officier dans l’armée autrichienne ; son nom était Francesca Scanagetta. Inspirée dans sa jeunesse par la lecture du Tasse et désireuse d’imiter Clorinde, elle avait demandé à son père de la conduire à Vienne déguisée en jeune homme. Celui-ci obtempéra à son vœu, et en 1794 elle entra, sous le nom de Francesco Scanagetta, à l’Académie militaire de Vienne. Ses études furent brillantes. Nommée porte-drapeau en 1797, elle remplit durant trois ans les fonctions de son grade sans que personne se doutât jamais de son sexe. Au bout de ce temps son père dévoila son secret ; alors elle fut congédiée avec une pension et les honneurs dus à son énergie(*) ».
(*) En 1804 elle épousa le capitaine Spini ; veuve en 1831, elle vécut à Milan jusqu’au mois de février 1865. À cette dernière date elle comptait quatre-vingt-dix ans d’âge.
SCENES (Hannah).- Résistante hongroise morte le 7 novembre 1944. Dictionnaire des femmes célèbres : « Elle quitta son pays en 1939 et s'installa en Palestine où elle vécut dans un kibbutz près de Césarée. En mars 1944, l'agence juive lui confia la mission de prendre contact avec la communauté juive de Hongrie pour y organiser une filière d'évasion. Elle s'engagea dans une formation de parachutistes et, d’Égypte, se fit lâcher au-dessus de la Yougoslavie où elle resta pendant trois mois avec les partisans. Elle entra en Hongrie en juillet mais fut très vite prise les armes à la main. Elle fit cinq mois de prison pendant lesquels elle écrivit un Journal et des poèmes. Elle fut finalement fusillée. Ses derniers vers disent :
Dans la nuit la plus noire, il y a toujours un moyen d’allumer un espoir.
« Un film, La Guerre d'Hannah (Golan, 1988) a retracé la vie de cette héroïne nationale ».
SCHELLINCK (Marie-Jeanne).- Née à Gand (Belgique) en 1757, morte près d'Ypres en 1840. Passionnée par les idées révolutionnaires, elle se procura un uniforme et, ainsi déguisée en soldat, elle parvint à se faire incorporer dans l'armée du général Charles-François du Périer, dit Dumouriez. Le 6 novembre 1792, sur le champ de bataille de Jemmapes, elle reçut plusieurs coups de sabre. On se rendit compte alors qu'elle n'était pas un homme mais on lui permit exceptionnellement de demeurer soldat. Devenue bientôt sergent, elle se battit à Arcole et fut à cette occasion citée à l'ordre de l'armée. On la retrouve à la fameuse bataille d'Austerlitz, où elle fut blessée, puis à la bataille d'Iéna, où elle fut de nouveau blessée. Celle que l'on appelait « le Sergent de Jemmapes » termina sa carrière avec le grade de sous-lieutenant et reçut en 1808, des mains mêmes de Napoléon, la croix de la Légion d'honneur à titre militaire.
SEIDAH-KHATOUN.- Princesse persane issue de la famille des Bowaides, née à la fin du Xe siècle, épouse du prince Fakh-ed-Daulah. En 997, à la mort de son mari, elle devint régente de ses États. Elle remit le pouvoir à son fils quand il eut atteint sa majorité mais le lui reprit bientôt après à cause de son incapacité. Celui-ci s'étant révolté et ayant pris les armes, elle le vainquit, le fit prisonnier, puis lui pardonna.
Histoire militaire des femmes : « Celle-ci [Seidah-Khatoun] est poussée à prendre les armes par l’ingratitude de son fils, Madj-Eddaulah, qui la dépouille dès son avènement de toute autorité, de toute influence, alors qu’elle avait gouverné en son nom, avec sagesse et gloire, pendant sa minorité. Irritée par cette ingratitude, que beaucoup de mères eussent cependant pardonnée, car les sacrifices sont doux quand on les accomplit pour le bonheur de ses enfants, Seidah-Khatoun se retira de la cour, rassembla une armée et vint à sa tête demander raison de l’oubli où on la plongeait. Une bataille eut lieu ; notre héroïne y combattit et vainquit, fit son fils prisonnier et remonta sur le trône. Plus tard elle rendit au vaincu ses États et la liberté, mais en se réservant la direction des affaires ».
SÉMIRAMIS.- Reine légendaire d'Assyrie et de Babylonie de la fin du IXe siècle av. J.-C., femme du gouverneur Omnès, puis du roi Ninos qu'elle fit assassiner. Selon des traditions perses rapportées par les historiens grecs Ctésias et Diodore de Sicile, elle aurait alors gouverné l'Assyrie pendant quarante-deux ans, guerroyé jusqu'aux Indes, soumettant l'Arménie, l'Égypte, l'Arabie, une partie de la Lybie et de l'Éthiopie et toute l'Asie jusqu'à l'Indus. Ayant subi une défaite sur les bords de ce fleuve, elle ne poussa pas plus loin ses conquêtes. L'historien latin Valère Maxime raconte que, de retour dans sa capitale, Sémiramis eut à mater une sédition qui éclata alors qu'elle était à sa toilette. Elle sortit de son palais à demi parée, la chevelure en désordre, et, à sa vue, tout rentra dans l'ordre.
Histoire militaire des femmes : « On rapporte qu'elle fut blessée deux fois dans la grande bataille qui se livra un peu au-delà de l'Indus et dut son salut uniquement à la vitesse de son cheval ; ajoutons que son courage et son sang-froid y contribuèrent également, car peu de femmes, le bras percé d’une flèche et l’épaule entamée par un dard, s’en seraient ainsi tirées à leur honneur ».
SENNETERRE (Madeleine de).- Voir Saint-Nectaire (Madeleine de).
SERGENT DE JEMMAPES.- Voir Schellinck (Marie-Jeanne).
SEVERINA (Ulpia).- Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Femme de l'empereur Aurélien, elle était fille d'Ulpius Crinitus, grand capitaine, qui descendait de Trajan, dont il avait la figure, les talents et le courage. Sa fille avait comme lui des inclinations guerrières. Elle suivit Aurélien dans ses expéditions, et s'acquit le cœur des soldats par ses bienfaits. Quoiqu'elle fût d'une vertu à toute épreuve, son époux, naturellement porté à la jalousie, eut toujours les yeux ouverts sur sa conduite. Il exigeait d'elle qu'elle eût soin de sa maison comme une bourgeoise, et ne voulut jamais lui permettre les robes de soie. Séverine survécut à Aurélien, dont elle eut une fille qui fut mère de Sévérien, sénateur distingué sous le règne de Constantin ».
SFORZA (Caterina).- Princesse de Forli née vers 1463, morte à Florence en 1509, fille de Bianca Maria. Elle épousa en 1484 Girolamo Riario, seigneur d'Imola et de Forli. Son mari ayant été assassiné en 1488, elle fit respecter les droits de son fils Octavien. Elle eut à soutenir dans Forli un siège contre César Borgia et fut prise sur la brèche même. Borgia lui prit ses États et la fit enfermer au château Saint-Ange. Louis XII lui fit rendre la liberté. Elle avait épousé en secondes noces un Médicis dont elle eut Jean de Médicis, fameux condottiere dit Jean des Bandes-Noires.
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Fille naturelle de Galéas-Marie Sforce, duc de Milan, assassiné en 1476, et femme de Jérôme Riario, prince de Forli, est regardée comme une des héroïnes de son siècle. Les sujets de son mari s’étant révoltés, et ce prince ayant été assassiné par François Ursus, chef des rebelles, elle fut mise en prison avec ses enfants. La forteresse de Rimini tenait encore pour elle. Comme cette place ne voulait pas se rendre par son ordre, la princesse témoigna qu’il était nécessaire qu’on lui permît d’y entrer, afin qu’elle pût engager le commandant à se soumettre aux vainqueurs. Sa demande lui fut aussitôt accordée. Mais à peine y fut-elle entrée, que, se voyant en sûreté, elle commanda aux rebelles de mettre bas les armes, les menaçant des derniers supplices s’ils n’obéissaient. Les conjurés, frustrés de leurs espérances, la menacèrent de leur côté de tuer ses enfants, qu’elle leur avait laissés en ôtages. Mais elle leur répondit avec courage : « Qu’il lui restait encore de quoi en faire d’autres ». Sur ces entrefaites, elle reçut un secours considérable que lui envoyait Ludovic-Marie Sforce, son oncle ; et peu après, par sa prudence et son courage, elle recouvra le pouvoir souverain. Pendant les guerres des Français en Italie, elle se montra toujours ferme, toujours courageuse, et se fit respecter même de ses ennemis. Elle se remaria à Jean de Médicis, père de Cosme, dit le Grand. Le duc de Valentinois, bâtard du pape Alexandre VI, l’ayant assiégée dans Forli, en 1500, elle s’y défendit vigoureusement, et ne céda qu’à la dernière extrémité. On l’emmena prisonnière dans le château Saint-Ange, et peu après on la mit en liberté, mais sans lui restituer ses États, dont le duc de Valentinois fut investi, et qui, après la mort d’Alexandre VI, furent réunis au Saint-Siège. Elle mourut quelque temps après ».
SIGRID la Superbe.- Histoire militaire des femmes : « En l’an 1000, Sigrid la Superbe, femme divorcée d’Erik, roi de Suède, et restée malgré lui dans le pays, épousa Suénon à la double barbe, et fit rendre à ce dernier monarque son royaume de Danemark, que son premier mari lui avait enlevé. Elle combattit encore le roi de Norvège, avec l'appui des mécontents de ce pays, et détruisit sa flotte ».
SINGUKOGU.- Impératrice du Japon dont l'avènement se situe au tout début du IIIe siècle. Après la mort de son époux, Tsiuu-Ai, elle prit le pouvoir et, dès les premiers jours de son règne, fit la guerre aux Coréens, à la tête d'une nombreuse armée. Elle mourut à l'âge de cent ans, après un règne de soixante-dix ans.
SNELL (Hannah).- On peut lire dans Le magasin pittoresque (publié sous la direction d’Édouard Charton, 19e année, Paris, 1851) : « Hannah Snell était née à Worcester en 1723. À vingt ans, étant orpheline, elle épousa un matelot hollandais qui bientôt l'abandonna. Sans ressources pour vivre, elle prit l’étrange résolution de se vêtir en homme et de s'engager comme soldat. Après quelques mois, l'arrivée d'un jeune conscrit de Worcester au régiment lui ayant fait craindre d'être reconnue, elle déserta et alla prendre du service, comme soldat de marine, sur un des bâtiments de la flotte de l'amiral Boscawen, envoyée aux grandes Indes. Hannah Snell se fit remarquer par son agilité, son adresse, sa présence d'esprit et son courage, soit pendant plusieurs tempêtes où le bâtiment fut prêt de périr, soit dans divers combats. À Pondichéry, elle fut dangereusement blessée, et, pour éviter d'être reconnue, elle eut le courage et l'habileté d'extraire elle-même, avec ses doigts, la balle qui l'avait atteinte. Après avoir été exposée à de nombreux dangers, elle revint en Angleterre, où ses aventures ne tardèrent pas à être connues. Le gouvernement, en récompense de sa bravoure, lui accorda une pension de 20 livres (environ 500 fr.). Elle acheva paisiblement sa vie dans une petite hôtellerie qu'elle avait ouverte près de Wapping, à l'enseigne de « The Female Warrior », et que la bizarrerie de son existence n’avait pas peu contribué à achalander ».
STEVENSON (Rébecca).- Fille du colonel Stevenson qui commandait un régiment de cavalerie dans l'armée sudiste, lors de la guerre de Sécession, elle combattit à la bataille de Chattanooga, qui vit la victoire de l'armée fédérale des généraux Grant et Sherman sur les Confédérés le 24 novembre 1863.
Histoire militaire des femmes : « En mai 1862, la maison paternelle ayant reçu en l’absence de son père, chef d’un régiment de cavalerie, une compagnie de l’armée fédérale commandée par le capitaine John Atkinson, elle fit mauvaise figure à ces garnisaires. Mais le jeune ennemi se montra plein d’égards, puis très amoureux ; elle passa alors à une autre extrémité et promit sa main, mais sans changer de camp, son fiancé devant promptement quitter l’armée de l’union pour prendre rang dans celle des confédérés. À peine les fiançailles achevées, Atkinson fut pris dans une embuscade, près des monts Cumberland, et fusillé. Pour venger son promis, miss Rébecca leva une compagnie de jeunes riflewomen (carabinières), dont elle prit le commandement, choisit ses sœurs miss Lia et miss Judith pour lieutenant et sous-lieutenant, et combattit résolument contre les troupes du président Lincoln, principalement à la bataille de Chattenooga(*) ».
(*) Les journaux illustrés ont donné le dessin du costume de cette compagnie de reflewomen.
STUART (Marie).- Voir Marie Ière Stuart.
SVÄRD (Lotta).- Volontaire finlandaise durant la guerre contre la Russie en 1808.
TELESILLA.- Poétesse argienne qui sauva sa ville natale, Argos, dans le Péloponnèse, assiégée par le roi de Sparte Cléomène en 514 av. J.-C. Argos étant sans défenseurs, Telesilla arma les esclaves, les vieillards, les femmes et les jeunes gens et les rangea en ordre de bataille devant les portes de la ville. Cléomène répugna à combattre une telle armée et préféra se retirer.
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Femme illustre d’Argos dans le Péloponèse, se signala […] envers sa patrie, par un service pareil à celui que la fameuse Jeanne Hachette rendit longtemps après à Beauvais. La ville d’Argos étant assiégée par Cléomène, roi de Sparte, cette héroïne fit armer toutes les femmes à la place des hommes, et les posta sur les remparts pour résister aux ennemis. Les Spartiates, plus surpris qu’effrayés d’avoir affaire à de tels combattants, et persuadés qu’il leur serait également honteux de les vaincre ou d’en être vaincus, levèrent le siège sur le champ. C’est ainsi que Télésille délivra sa patrie d’un ennemi puissant et redoutable ; et ses concitoyens par reconnaissance lui érigèrent dans une des places publiques d’Argos, une statue qui la représentait tenant un casque à la main et ayant à ses pieds un monceau de volumes, pour désigner à la fois son courage et ses goûts littéraires. On a des fragments de ses poésies dans le recueil intitulé : Carmina novem poetarum fœminarum, Hambourg, 1734, in-4e ».
TEM-BAM-DUMBA.- Fille de Mussasa (Voir cette entrée).
TEUTA.- Reine des Illyriens à laquelle les Romains firent la guerre (première guerre d'Illyrie, 229 à 228 av. J.-C.). Ils la vainquirent. En 230 av. J.-C., Teuta, veuve du roi Agron, avait attaqué l'Épire. Le Sénat romain manda deux légats pour protester auprès de la reine. Un des deux légats fut assassiné. Telle fut la cause des hostilités. Les deux consuls romains, L. Postumius Albinus et Cn. Fulvius Centumalus, entreprirent une campagne navale où furent engagés pas moins de deux cents vaisseaux et de vingt mille hommes. Teuta dut se soumettre et s'engager à demeurer confinée dans l'Adriatique, au nord de Lissos.
THALESTRIS.- Reine des Amazones qui alla visiter Alexandre le Grand et s'offrit à lui pour en avoir un enfant.
Diodore de Sicile, Histoire universelle, Paris, De Bure, 1744, tome V : « Comme il [Alexandre le Grand] revenait en Hircanie, Thalestris Reine des Amazones, et qui possédait tout le pays situé entre le Phasis et le Thermodon, prit des mesures pour se trouver sur son chemin. Cette reine était d'une beauté, et en même temps d'une force de corps surprenante ; mais de plus elle était célèbre dans toute la nation par son courage extraordinaire. Ayant laissé pour lors son armée sur les confins de l'Hircanie, elle n'avait amené avec elle que trois cents Amazones revêtues comme elle de leurs armes. Alexandre fut frappé d'admiration au spectacle non seulement de l'équipage militaire, mais de la beauté de ces femmes ; et il demanda à Thalestris quel motif de sa part lui procurait une réception si magnifique. Thalestris lui répondit sans hésiter, que son ambition était d'avoir un enfant de lui, comme d'un prince qui s'était mis par ses exploits au-dessus des autres hommes, et dont elle croyait que la profession des armes qu'elle exerçait elle-même avec honneur, la rendait digne. Qu'ainsi elle espérait que le fruit de leur union surpasserait en valeur tous les hommes du monde. Le roi aisément gagné par cette proposition donna treize jours à Thalestris, après lesquels il la renvoya chargée de magnifiques présents ».
THAMAR.- On peut lire dans Le magasin pittoresque (publié sous la direction d’Édouard Charton, 27e année, Paris, 1859) :
« Dans les provinces transcaucasiennes soumises depuis le commencement de ce siècle à la Russie, il est une ville dont le souvenir, consacré par les traditions grecques, remonte à une haute antiquité. C’est Koutaïs, capitale de l’ancienne Colchide, cité de Jason et de Médée, aujourd’hui obscur chef-lieu du district de l’Imérétie, habité par une population de 2000 âmes, composée d’Arméniens, de Juifs, de Géorgiens, de quelques Russes et de quelques Turcs […] ».
« Au moyen âge, la ville de Koutaïs eut encore pendant plusieurs siècles un renom imposant. Elle fut la forteresse d’une race de rois ambitieux et vaillants. Elle devint la capitale de la Géorgie ».
« Une femme surtout lui donna, par ses conquêtes et ses diverses créations, un grand éclat. C’était la fille de David III, qui monta sur le trône après la mort de son père, et que l’histoire appelle la reine Thamar. Elle commença son règne en 1180, et mourut en 1206. Jeune, elle avait épousé un prince russe, qui d’abord la seconda avec zèle dans ses différentes entreprises, puis bientôt en vint à l’outrager. Une assemblée de prêtres réunis, à la demande de Thamar, pour le juger, le condamna à mort. La généreuse reine ne voulut point ratifier cette sentence. Elle se contenta d’exiler celui qui s’était rendu indigne de régner avec elle, et se remaria avec un prince ossète. Cependant l’époux banni ne pouvait se résigner à subir son arrêt. Il s’en alla à Constantinople, implora le secours des Grecs, tenta, par les promesses qu’il fit, leur cupidité, et leva une armée avec laquelle il s’avança vers la Géorgie, pour reprendre possession de son trône. Vaincu dans une première expédition, il en organisa une seconde. Cette fois la reine s’était mise elle-même à la tête de ses troupes. Le prince rebelle, vaincu une seconde fois et abandonné de ses soldats, fut forcé de recourir à la générosité de celle qu’il voulait déposséder de son empire. Thamar lui pardonna et lui permit de quitter la Géorgie ».
« Après avoir assuré la paix de son royaume par la puissance de ses armes, la noble reine employa les dernières années de son règne à des travaux d’utilité publique et à des fondations religieuses. Elle avait subjugué toute l’Arménie au nord de l’Araxe, elle avait converti au christianisme plusieurs peuplades du Caucase. Elle fit bâtir des églises en différents lieux pour ces nouveaux prosélytes. En même temps, elle construisait à Koutaïs et dans les autres districts de son royaume, des ponts, des forteresses, des monastères ».
« Dans le pays où elle a glorieusement régné, la plupart de ces édifices ont été anéantis par le temps ou par les révolutions politiques ; mais le souvenir de Thamar a survécu à toutes les guerres et à tous les désastres. Le temps même lui a donné une plus vive auréole. D’âge en âge, les peuples de l’Asie occidentale se sont raconté l’éclatant règne de Thamar, et sa réelle histoire a été peu à peu transformée en une légende embellie p ar de poétiques fictions ».
« La reine Thamar, c’est la Sémiramis de cette partie de l’Asie ; c’est l’être privilégié auquel on attribue tout ce qui s’est fait de grand, de beau, d’utile pendant le cours de plusieurs générations ».
« Les soldats géorgiens donnaient à cette noble femme le nom de roi, comme les Hongrois à Marie-Thérèse ; les prêtres ont proclamé ses vertus ; les poètes ont chanté sa beauté. […] ».
THÉRÈSE DE CASTILLE.- Fille naturelle du roi Alphonse VI de Castille, comtesse de Portugal, née vers 1070, morte à Braga (Portugal) en 1130. Elle épousa vers 1092 Henri de Bourgogne. À la mort de son époux, vers 1114, elle devint régente du Comté pour son fils Adolphe Henriques jusqu’en 1128. Profitant des troubles provoqués en Castille par la mésentente qui régnait entre sa sœur Urraque et son beau-frère Alphonse Ier d’Aragon, elle s’empara de Zamora, de Toro et d’Avila en 1121. Elle fut moins heureuse dans une deuxième guerre qu’elle soutint contre son neveu Alphonse VIII, en Galice, en 1127. Ayant épousé en 1124 le comte de Trastamare Ferdinand Páez, elle refusa en 1128 de remettre le pouvoir à son fils et prit les armes contre lui. Elle fut vaincue à Sao Mamede et faite prisonnière. Jetée dans une prison, elle y mourut deux ans plus tard. Voir aussi Urraque.
THÉROIGNE DE MÉRICOURT.- Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Courtisane fameuse, née dans le Luxembourg vers 1760, a joué un rôle assez marquant pendant les premières années de notre révolution. Elle vint jeune à Paris, où elle se livra au libertinage. Au commencement de la révolution, elle se lia avec plusieurs chefs populaires, qui tirèrent parti de son audace naturelle, et d’une espèce d’éloquence qui était accompagnée d’une figure agréable. La Théroigne se trouva dans la plupart des émeutes et surtout dans celle qui eut lieu à Versailles les 5 et 6 octobre 1789 ; elle contribua beaucoup à corrompre le régiment de Flandre, en conduisant dans les rangs d’autres filles de son espèce, dont elle avait la direction, et distribuant aux soldats de l’argent qui venait du Palais-Royal. On l’entendit dans cette occasion vomir mille injures contre la reine. En 1790, elle fut envoyée avec Bouvet-Carrère dans le pays de Liège, afin d’y soulever le peuple ; mais, arrêtée en janvier 1791 par les Autrichiens, elle fut conduite à Vienne, où on l’enferma dans une forteresse. Léopold II, sur le rapport que lui firent deux commissaires qui l’avait interrogée, désira la voir, l’entretint pendant une heure ; et, trompé par son repentir, lui fit rendre la liberté, à condition de ne plus reparaître dans ses États. Elle revint à Paris en janvier 1792, et parut d’abord avoir changé d’opinion. Plusieurs femmes d’une conduite assez équivoque avaient aussi, à l’imitation des hommes, leurs clubs jacobiniques. C’est dans les tribunes de ces clubs, comme sur la terrasse des Tuileries, qu’on entendit la Théroigne haranguer la multitude pour l’amener aux principes de la constitution ; mais les jacobins, qui n’ignoraient pas les services qu’elle avait rendus aux orléanistes, voulurent en profiter à leur tour. Il ne leur fut pas difficile de la gagner, et de l’endoctriner à leur manière ; La Théroigne oublia bientôt ses sentiments de modération. Dès lors sa démagogie n’eut plus de bornes ; une pique à la main, et à la tête d’une troupe de femmes, elle parcourait les rues, et excitait le peuple à la révolte. Dans la funeste journée du 10 août 1792, elle se trouva parmi les factieux, et fit massacrer dans la cour des Feuillans, Suleau et cinq autres personnes. Elle était en correspondance avec les principaux chefs des jacobins, et notamment avec Robespierre et Saint-Just. Cependant l’effervescence continuelle de son sang, causée par l’exaltation de ses idées, et par les différentes crises où elle se trouvait, la firent tomber en démence. On la conduisit dans une maison de folles au faubourg Saint-Martin, et de là à la Salpétrière, où elle mourut en 1817. On trouva dans les papiers de Saint-Just une lettre d’elle, sous la date du 26 juillet 1794, dans laquelle on voit le désordre d’une tête égarée. Malgré l’état d’abrutissement où l’avait réduite le dérangement de sa raison, elle avait conservé encore quelques restes de beauté ; ses pieds et ses mains étaient surtout d’une perfection remarquable. On assure qu’elle avait été la maîtresse du duc d’Aiguillon ».
THOMYRIS.- Voir Tomyris.
TIRGATAO.- Princesse méotide, épouse d’Hécatée, roi des Sintes, que Satyre, tyran du Bosphère, voulut obliger d’épouser sa fille et de faire disparaître sa première femme. Hécatée fit enfermer Tirgatao. Celle-ci réussit à s’échapper et triompha de Satyre.
Histoire militaire des femmes : « Tirgatao […] parvint à s’échapper et à gagner après mille dangers le royaume des Ixomantes appartenant à son père. Elle ne trouva plus ce dernier qui venait de mourir, épousa son successeur, fit déclarer la guerre, et, rassemblant un grand nombre d’alliés, ravagea cruellement le pays du monarque qui voulait de son premier mari pour gendre. Le vaincu soudoya des assassins contre elle, mais elle sortit saine et sauve de cette embûche, fit mettre à mort par représailles le fils de son adversaire qu’on lui avait livré précédemment comme otage, continua vigoureusement la guerre et ne s’arrêta qu’à la mort de son ennemi. Certes voilà une prise d’armes de la part d’une femme grandement justifiée, car la princesse Tirgatao se trouvait doublement victime de l’infidélité de son mari et de la perfidie du père de sa rivale(*) ».
(*) Polyen, VIII, 55.
TOMYRIS ou Thomyris.- Reine des Scythes Massagètes du VIe siècle av. J.-C. Selon Hérodote, Cyrus, fondateur de l’empire perse, voulut l’épouser. La reine l’ayant éconduit, il envahit ses États en 529 av. J.-C. et fit prisonnier son fils, Spargapisès, qu’il fit mettre à mort (selon une autre version, Spargapisès se serait suicidé). Tomyris finit par battre Cyrus et le fit prisonnier. Toujours selon Hérodote, elle lui fit couper la tête qu’elle plongea dans un vase empli de sang en disant ces mots : « Rassasie-toi de ce sang dont tu fus si altéré » (une autre version veut que Cyrus fut proprement noyé dans du sang) ; mais l’historien Xénophon assure, quant à lui, que Cyrus mourut paisiblement dans son lit à Pasargades, sa capitale.
TORELLI (Antonia).- Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Marquise Rossi, fille de Guy II, dit le Grand, premier comte de Guastalla, et de la fameuse Orsina Visconti, tante de Philippe-Marie, duc de Milan, qui avait gagné une bataille devant Guastalla sur les Vénitiens […], fut mariée à Pietro-Maria Rossi, cinquième marquis de Sansecondo, homme d’un mérite rare, qui fut cinq fois général pour le duc de Milan, et prit Plaisance et Caravaggio. Parme, où il commandait presqu’en souverain, se révolta pendant son absence contre François Sforce, duc de Milan. Antonia, qui avait toujours déployé un grand caractère, rassemble à la hâte des troupes sous Torchiara, se met à leur tête, court à Parme, se rend maîtresse de la ville, et la restitue au duc. […] Cette femme courageuse eut neuf enfants, entre autres Donella, mariée à Gibert Sanvitalle, qui bâtit le château de Sala, devenu, depuis 1612, maison de plaisance des ducs de Parme. Francesco Carpesano, prêtre parmésan, dans les Commentaires de son temps, publiés dans le tome 5 de la collection du père Martenne, et Angelo Odoard da Erba, dans sa chronique insérée dans les Rerum italicarum scriptores, tome 20, rapportent que Donella Rossi, fille d’Antonia Torelli, se trouvant en l’absence de Gibert Sanvitalle, assiégée en septembre 1483, par Rolando Rossi, son propre père, et par Amurat Torelli, son cousin, alors à la tête des Vénitiens, soutint un assaut dans Sala, se défendit longtemps sur la brèche, empêcha la prise de la place, et d’un coup d’arquebuse, tua elle-même le malheureux Amurat. Un auteur du siècle dernier observe à ce sujet, « qu’il est assez singulier que trois femmes de la même maison, la mère, la fille et la « petite fille(*), aient eu dans leur vie, trois occasions de se distinguer dans trois « actions du même genre extrêmement rares pour leur sexe, et qu’elles aient toutes « trois réussi dans leurs entreprises ».
(*) La mère : Orsina Visconti Torelli, la petite fille : Rossi (Donella).
Voir Orsina Visconti Torelli (comtesse), Rossi (Donella).
TOURNON (comtesse de).- Voir La Tour (Claudine de).
TRINQUART (Joséphine).- Vivandière ayant servi à la campagne de Russie.
Histoire militaire des femmes : « Lors de la campagne de Russie, une cantinière française, Joséphine Trinquart, appartenant au 63e de ligne, voyant un chef de bataillon blessé, entraîna trois soldats pour relever et ramener cet officier supérieur, mais elle parvint seule jusqu’au blessé, ses trois compagnons ayant été tués. Alors elle voulut charger le commandant sur ses épaules, mais ses forces la trahirent. Elle héla deux cavaliers ennemis, tua l’un d’un coup de pistolet, désarçonna l’autre d’un coup de baïonnette, réussit à mettre son officier à peu près en selle ou couché sur l’une des montures, et revint avec lui à l’ambulance. Cet acte singulier de présence d’esprit et de courage(*) valut la croix d’honneur à son auteur, morte récemment à Montreuil(**) ».
(*) C’est la répétition de l’acte précédemment accompli par Virginie Ghesquières […].
(**) En mars 1872, mais non centenaire, car elle comptait vingt ans environ en 1812.
Voir Ghesquières (Virginie).
TR’UNG (Trac).- Héroïne vietnamienne dont un gouverneur chinois avait fait exécuter l’époux et qui, avec sa sœur Nhi, dirigea une révolte contre la domination chinoise de 40 à 43. Elles furent vaincues et probablement tuées au combat.
ULASTA ou Vlasta.- Née en Bohême, elle entra au service de la duchesse Libussa, qui avait épousé un paysan, Przémislas. Élevée à la manière des femmes sarmates, elle se distingua dans tous les exercices des guerriers. Elle aimait passionnément un jeune homme qui la trompa, ce qui entraîna chez elle une haine implacable pour les hommes. À la mort de Libussa, elle prit le pouvoir.
Histoire militaire des femmes : « En 735, à la mort de la reine ou duchesse Libussa, qui avait succédé à son père Cracus et avait gouverné sagement et glorieusement, elle ne put supporter de voir le pouvoir suprême passer aux hommes. Méprisant, sans doute, le duc Przémilas, paysan, que sa regrettée maîtresse avait épousé par hasard(*), et dont la confiance de la défunte lui avait révélé la faiblesse, elle conçut le projet non seulement de ressaisir la puissance et de remplacer Libussa, mais encore de fonder un État exclusivement gouverné par les femmes, analogue à celui des anciennes Amazones. À cet effet, réunissant les filles attachées de son vivant à la reine Libussa, et des femmes mécontentes de leurs maris, elle leur dit : « Libussa a pu asservir les hommes ; le courage de notre sexe serait-il éteint avec elle ? Vous êtes ses fidèles élèves, avec vous je rentrerai dans la lice et appliquerai l’art du gouvernement qu’elle nous a enseigné. Przémilas, tiré de la charrue, est incapable de régner ; si vous me secondez, nous reprendrons rapidement notre prépondérance ». Ses paroles enflamment l’imagination et le zèle de ses compagnes ; un grand nombre de filles accourt sous sa bannière, elle forme un corps d’infanterie et un corps de cavalerie, les habitue aux exercices militaires. Les hommes s’alarment, pressent Przémilas de se mettre à leur tête pour réprimer cette révolte ; sur son refus, ils courent aux armes et marchent contre Ulasta, mais sans ordre. Notre héroïne les bat et en tue, assure la légende, jusqu’à sept de sa main. Après sa victoire elle se retire sur le mont Vidlové, y bâtit un fort, et de cette retraite sûre, descend fréquemment sur la contrée et la dévaste. Ce brigandage se prolongea huit ans ; cette longue durée s’explique par le fait que Ulasta avait attiré la plus grande partie des jeunes hommes sur promesse écrite de rendez-vous amoureux, les avait attirés, dis-je, dans l’intérieur de sa citadelle, et là les avait impitoyablement mis à mort. Après cet acte cruel, Ulasta eut un moment de puissance suprême et régna véritablement. Elle promulgua un code, dont la principale prescription défendait aux hommes de porter les armes sous peine de mort ; on voit donc qu’elle ne voulait pas la destruction complète de l’espèce masculine, et, en effet, elle se contentait vis-à-vis des garçons nouvellement nés de leur faire crever l’œil droit et de leur faire enlever le pouce de la main droite, afin qu’ils se trouvassent dans l’impossibilité de manier l’arc. Ces cruautés, moins graves cependant que l’usage fondamental des premières Amazones, s’il est vrai que celles-ci massacraient tous les enfants mâles, irritèrent les Bohémiens et firent que Przémilas marcha définitivement, soit de gré, soit de force, contre Ulasta. Au moment où il l’attaqua, elle venait d’instituer un ordre de la vertu militaire pour récompenser les exploits et les services de ses meilleures guerrières. Une grande bataille s’engagea ; les hommes étaient résolus à vaincre, Ulasta et ses compagnes à ne pas survivre à la destruction de leur prééminence sociale, à la fin de leur république féminine ; aucun ne voulut se rendre, aucune ne s’échappa, toutes succombèrent vaillamment, et, quand elles furent abattues par la supériorité de force et sans doute le nombre de leurs adversaires, le visage de chacune regardait et défiait encore l’ennemi ».
« (*) Pressée par ses sujets de se marier, Libussa avait dit : « J’épouserai celui chez lequel mon cheval me conduira » ; ce fut Przémilas. On raconte le fait autrement : livrés à l’anarchie, les Bohémiens décidèrent qu’on lâcherait dans la plaine un cheval sans frein et qu’on reconnaîtrait pour monarque celui chez lequel il s’arrêterait : Przémilas, ainsi désigné, rendit de bonnes lois et fortifia Prague ; la décision, le courage lui faisaient sans doute défaut, surtout à l’origine de son règne.
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « L’une des filles attachées à la célèbre Lybussa, reine de Bohême, jouissait de la confiance de sa maîtresse. À la mort de celle-ci, vers l’an 506, le gouvernement fut exclusivement dévolu à son mari Primislas. Alors Vlasta forme la résolution d’affranchir entièrement son sexe de la domination de l’autre ; en conséquence, elle donne à ses compagnes un festin, à la fin duquel elle leur communique son projet : « Quoi ! leur dit-elle, Lybussa a pu asservir les hommes sous le joug desquels nous retombons depuis sa mort. Avec elle, le courage de notre sexe n’est pas éteint ; car parmi vous j’aperçois de fidèles disciples de l’héroïne qui leur apprit son art, et moi-même avec vous j’entrerai dans la lice pour rendre à notre sexe sa dignité et sa prééminence. Nous pouvons rapidement la reconquérir, si vous me secondez contre Primislas, qui, de ses occupations champêtres, élevé au trône, est absolument incapable de gouverner ». Cette harangue enflamme ses compagnes, qui jurent de concourir à son entreprise. Des femmes mécontentes de leurs maris, d’après le conseil de Vlasta, les assassinent, et se réunissent à la troupe des filles qui, sous les ordres de Vlasta, s’occupant des exercices militaires, formaient un corps composé d’infanterie et de cavalerie. L’audace de ces amazones réveille le courage des hommes qui, rassemblés tumultuairement autour de Primislas, le pressent de se mettre à leur tête pour étouffer au plus tôt la conjuration ourdie par des femmes. Sur le refus du lâche monarque, ils s’avancent contre elles, sans chef et en désordre. Vlasta marche à leur rencontre à la tête d’une troupe régulière, les bat, tue sept hommes de sa main, se retranche ensuite dans une citadelle, et, par un pillage de vivres, de bestiaux dans toute la contrée adjacente, accumule dans le lieu de sa retraite des provisions de tout genre. Ce qu’elle avait le plus à redouter, c’était la bravoure des jeunes Bohémiens. Une ruse atroce la débarrassa des principaux d’entre eux. D’après son conseil, les filles les plus distinguées de son armée par leur rang et leur naissance écrivent à ces jeunes gens des lettres de tendresse pour réclamer leur secours contre Vlasta qui, disent-elles, les a subjuguées et les empêche de se réunir à leurs compatriotes à qui elles offrent leur main. Trompés par ce récit, ces jeunes gens concertent une attaque qui d’abord ne leur offre aucune résistance ; ils pénètrent dans la citadelle, et, au moment où ils se croyaient victorieux, Vlasta avec sa troupe fond sur eux, les fait égorger, et continue d’exercer des cruautés, celle entre autres de crever l’œil droit et de couper le pouce droit aux enfants mâles pour les mettre hors d’état de manier l’arc et de faire la guerre. Ces atrocités et diverses autres racontées par Dubraw (dans son Histoire de Bohême, liv. II), portèrent les hommes à la vengeance. Ils livrèrent aux femmes conjurées une autre bataille où elles furent vaincues, et Vlasta y périt les armes à la main, après avoir épouvanté et ravagé la Bohême pendant environ sept ans ».
URRAQUE (en espagnol Urraca).- Reine de Castille et de León de 1109 à 1122, fille aînée d’Alphonse VI, sœur de la comtesse de Portugal Thérèse de Castille (Voir cette entrée), née en 1081, morte en 1126. Elle fut d’abord mariée à Raymond de Bourgogne dont elle eut un fils, le futur Alphonse VII, puis avec le roi d’Aragon et Navarre Alphonse Ier le Batailleur. À la mort de son père en 1109, elle disputa à son second mari le pouvoir en Castille. Alphonse Ier, invoquant les désordres de sa vie privée, la fit enfermer à Castellas, en Aragon. Elle parvint à s’évader et demanda au Saint-Siège l’annulation de son mariage. Elle prit les armes et fut battue à la bataille de Sepulveda. Elle se retira alors en Galice. Le pape Pascal II ayant enfin annulé le mariage, Alphonse Ier dut renoncer à la Castille. Urraque fit alors proclamer roi son fils mais laissa en fait le pouvoir à son amant, le comte de Lara. En 1122, les Grands du royaume se révoltèrent, arrêtèrent le favori et rendirent le pouvoir à Alphonse VII. Urraque repartit en guerre contre ce dernier. De nouveau battue, elle fut enfermée cette fois au couvent de Saldanha où elle mourut quatre ans après.
USIGLIA.- Histoire militaire des femmes : « À la bataille de Monte Aperto (1260), livrée par les Siennois aux Florentins et où les premiers furent vainqueurs, la déroute devint telle, qu’une pauvre fruitière, nommée Usiglia, qui se trouvait au camp où elle portait des provisions, put, à la vue de ce désastre, se rendre sur le champ de bataille, y faire trente prisonniers, tous appartenant au corps de la ville de Florence, les attacher avec des ceintures et les ramener triomphante. Tous les historiens et chroniqueurs mentionnant la particularité relative à cette fruitière, il n’est guère permis d’en douter (*). Usiglia partagea la couronne et les récompenses octroyées pour son exploit avec son mari Geppo, fendeur de bois ».
(*) C’est l’opinion de M. le duc de Dino. Reportez-vous à la traduction des Chroniques siennoises, Paris, chez Curmer, p. 114 et 150.
VALAVOIRE (Madame de).- Histoire militaire des femmes : « Dès 1656, plusieurs années après la majorité de Louis XIV, mais alors que Mazarin encore vivant gouvernait toujours, nous voyons à Valence (en Italie) une femme, Mme de Valavoire, remplacer son mari blessé, prendre la direction de la défense sur la désignation par élection de la garnison et des habitants, et se conduire de telle sorte, dans ses fonctions improvisées de gouverneur, qu’elle fait lever le siège(*) ».
(*) Consultez Mémoires de Mirabeau, t. I, p. 140.
VALERIA.- Voir Clélie.
VARIN (Madame).- Voir Rohmer (Catherine).
VAUX (Anne de).- Héroïne française du XVIIe siècle.
Dictionnaire des femmes célèbres : « Dotée d’un système pileux surabondant (sa barbe était légendaire), Anne de Vaux put s’engager dans l’armée sans difficulté, le conseil de révision étant, semble-t-il, moins strict qu’aujourd’hui. Vêtue de l’habit militaire, elle participa, sous le nom de « Bonne Espérance », aux combats de Cambrai et de Valenciennes. Elle fit également preuve de vaillance pendant la Fronde, et ses brillants faits d’armes lui valurent d’être promue au grade de lieutenant. Mais ses exploits militaires furent brusquement interrompus car, étant tombée aux mains de l’ennemi, malgré sa barbe, elle ne put dissimuler son véritable état civil et dut abandonner tout espoir de poursuivre sa carrière militaire ».
VELLÉDA.- Prophétesse et druidesse germaine du Ier siècle, sous l'empereur romain Vespasien. Elle était de la nation des Bructères et exerça une grande influence sur les populations germaniques. Elle contribua à l'insurrection du chef batave Civilis qui souleva contre Rome les tribus germaniques et une partie de la Gaule du nord en 70. Après la soumission de Civilis, elle refusa de se plier, fut prise par Rutilius Gallicus et orna le triomphe de l'empereur Domitien. Elle mourut captive à Rome.
Histoire militaire des femmes :
« Les Germains, comme les Gaulois, pensaient que les femmes possédaient quelque chose de sacré et l’inspiration nécessaire pour devenir les interprètes des dieux. Toujours quelque prophétesse avait leur confiance et, si elle réussissait dans ses prédictions, ils l’honoraient presque comme une déesse ».
« La plus célèbre est Velléda(*), celle qui figure dans les guerres de Civilis (70 dep. J.C.) contre les Romains(**). Tacite nous rapporte qu’elle appartenait à la nation des Bructères. Son autorité grandit parce qu’elle avait prédit le triomphe des Germains et la destruction des légions romaines(***). De tous côtés on lui envoyait des présents, et ceux qui venaient la consulter étaient de véritables ambassadeurs. En général, « il ne leur était permis ni de la voir, ni de l’entretenir ; on les écartait de « sa présence, afin d’augmenter la vénération. Placée au haut d’une tour, elle « conservait près d’elle un parent de son choix, qui était comme le messager de sa « divinité, et portait ses réponses à ceux qui la consultaient(****) ».
(*) Chateaubriand introduit la druidesse Velléda dans son poème des Martyrs, et nous la montre au moment où elle cherche la mort, poussant au milieu des rangs gaulois les chevaux qui traînent son char.
(**) Après les succès des Romains, elle aida Cerealis dans la pacification du pays, mais, ayant ensuite excité une nouvelle insurrection, elle fut prise et conduite à Rome.
(***) Histoire, IV, LXI.
(****) TACITE, Histoire, IV, LXV.
VICTORINE (Aurelia Victorina Pia Felix Augusta).- Impératrice romaine dans les Gaules, dite « la Mère des camps », sœur de Marcus Cassianus Latinius Postumus, usurpateur et l'un des Trente Tyrans, et mère de Victorin.
Histoire militaire des femmes : « Elle se mit à la tête de plusieurs légions, les conduisit avec intelligence et devint redoutable pour Gallien. Après la mort de son fils et de son petit-fils, elle fit élire Marius, puis Tetricus, en 268, et quitta elle-même ce monde peu de mois après cette dernière nomination ».
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Mère du tyran Victorin, fut l’héroïne de l’Occident. S’étant mise à la tête d’un certain nombre de légions, elle leur inspira tant de confiance qu’elles lui donnèrent le titre de Mère des armées. Elle les conduisait elle-même avec cette fierté tranquille qui annonce autant de courage que d’intelligence. Gallien n’eut point d’ennemi plus redoutable. Après avoir vu périr son fils et son petit-fils Victorin, elle fit donner la pourpre impériale à Marius, et ensuite au sénateur Tetricus qu’elle fit élire à Bordeaux, l’an 268. Victorine ne survécut que quelques mois à la nomination de ce prince. On a prétendu que Tetricus, jaloux de sa trop grande autorité, lui avait ôté la vie ; mais plusieurs auteurs assurent que sa mort fut naturelle ».
VIERGES SCANDINAVES.- Histoire militaire des femmes : « Chez les races scandinaves il existait une tradition née, semble-t-il, du souvenir d’anciennes femmes guerrières : au-dessous du dieu de la guerre, Tyr, ou plutôt de sa femme Hilda(*), la mythologie de ces peuples représentait un bataillon spécial de vierges chargées, durant les batailles, non seulement des soins à donner aux blessés et du port des boucliers des principaux guerriers, mais aussi de prendre elles-mêmes part à la lutte et de seconder l’action des combattants ».
(*) La racine Hild restée en honneur forme le commencement de plusieurs noms propres.
VITTAUX (Antoinette).- On peut lire dans Le magasin pittoresque (publié sous la direction d’Édouard Charton, 43e année, Paris, 1907) : « Dans la Revue des autographes, numéro d’avril 1907, Mme Charavay indique un curieux certificat délivré en 1793, par le général de division commandant en chef à Douai, à Antoinette Vittaux, native de Charolles en Bourgogne. Elle avait porté les armes pendant deux années dans le bataillon de Saône-et-Loire et avait obtenu des attestations avantageuses signées par le général Houchard ».
VIVANDIÈRES.- Au sens strict, marchandes autorisées à suivre les troupes pour leur vendre des vivres et des boissons. Il y eut, jusque sous le second Empire, des vivandières, dotées d’un uniforme à partir de 1840. Parmi les vivandières les plus célèbres, il faut citer :
- Marie Dauranne, qui sauva un soldat de la noyade pendant la campagne d’Italie ;
- Joséphine Trinquart, qui, lors de la campagne de Russie, sauva un officier blessé après s’être débarrassée de deux cavaliers ennemis ;
- Mailletet, qui fit le tour de l’Europe avec les grenadiers français et qui fut blessée à Waterloo ; elle mourut à l’âge de cent quatre ans ;
- dame Racine, du 2e régiment de chasseurs d’Afrique ;
- Perrot, qui fut blessée en Algérie ;
- Marie, du 1er puis du 2e régiment de zouaves ;
- Mahler, vivandière au 34e de ligne ;
- Bourget, vivandière au 1er régiment de tirailleurs algériens ;
- Baland, vivandière au 95e régiment de ligne.
Voir Dauranne, Trinquart, Racine, Perrot, Marie, Mahler, Bourget, Baland.
VLASTA.- Voir Ulasta.
WANDA.- Princesse qui, selon la légende polonaise, régnait sur Cracovie. Fille du roi Krak, fondateur de cette ville, elle se précipita dans la Vistule plutôt que d’épouser le prince allemand Rytygier, évitant ainsi la soumission de son peuple. Elle est un peu considérée comme la Jeanne d’Arc polonaise.
Histoire militaire des femmes : « Cette Wanda, qui succéda au pouvoir paternel, était une héroïne ; virilement élevée, elle conduisit une armée contre un prince germain, nommé Ritiger, qui prétendait lui ravir à la fois sa royauté et sa main. La chronique veut que Ritiger fut abandonné de ses guerriers, honteux d'avoir à combattre une femme, et se donna la mort ; une autre version prétend que ce fut seulement après deux combats, pour lui deux défaites, actions dans lesquelles Wanda combattit l'épée en main, à la tête de ses troupes, et les anima tant de la voix que de l’exemple. Toujours est-il que Wanda rassembla son peuple, lui fit jurer de ne jamais se laisser asservir, déclara que la pureté de son cœur était le gage de son indépendance, et aussitôt, pour conserver ce gage intact, se précipita dans la Vistule, d'où il fut impossible de la retirer vivante ».
Le général Lazare-Nicolas-Marguerite Carnot, le célèbre Grand Carnot, a écrit sur ce sujet les vers suivants (Opuscules poétiques du général L.-N.-M. Carnot, Baudoin frères, Paris, 1820) :
“Généreux Polonais ! dit alors l’héroïne,
Quel que soit l’avenir que le ciel vous destine,
Comment mon faible bras peut-il vous protéger
Contre tant d’ennemis ? Pourrais-je vous venger,
S’ils osaient se montrer aux traités infidèles ?
Soutiendrons-nous contre eux des guerres éternelles ?
Votre reine est l’objet de leur prétention,
Pour établir sur vous leur domination.
L’audacieux projet d’un prince téméraire
Fut, quoique sans succès, un avis salutaire
Donné par le ciel même ; et j’ai dû pressentir
Qu’il faut rendre un fardeau qu’on ne peut soutenir.
Le ciel m’appelle à lui ; j’ai rempli ma carrière :
Il ordonne à Wanda de rejoindre son père.
Les derniers de mes vœux sont pour votre bonheur :
Il est tout dans vos dieux, la patrie et l’honneur.”
Wanda descend alors ; tranquillement arrive
Au bord du monument ; s’arrête sur la rive,
Lève les bras au ciel, s’élance dans les flots,
Et passe de la vie à l’éternel repos.
C’est en vain qu’on accourt, qu’on gémit, qu’on espère :
L’héroïne n’est plus ; elle a rejoint son père.
Mais les lois du trépas n’effaceront jamais
Les vertus de Wanda du cœur des Polonais. »
XIMÈNE.- Voir Chimène.
YUN YING.- Dictionnaire des femmes célèbres : « Femme politique et patriote tibétaine (née en Mandchourie en 1920). Son père, un prince mandchou, fut massacré avec ses partisans par les Japonais, massacre dont elle fut l’une des seules à réchapper. L’enfant, qui maniait déjà le fusil à l’âge de dix ans, devint une très belle femme et se mit à la tête d'une petite troupe. Pendant trente ans, elle ne connut que les combats contre les communistes chinois, devenant un véritable chef militaire que le maréchal Tchang Kaï-chek nomma colonel. À la tête de ses partisans, elle gagna le Tibet, mais en fut chassée en 1959. Elle jura de libérer le pays du dalaï lama occupé par les armées de Mao. Surnommée « la Jeanne d'Arc du Tibet », elle poursuivit de longues années durant la sanglante guérilla contre les envahisseurs ».
ZARAGOZA Y DOMENECH (Maria Augustina).- Dictionnaire des femmes célèbres : « Héroïne espagnole (Barcelone, 1786 – Mellila, 1857). Elle avait à peine vingt-deux ans lorsque le siège de Saragosse par l’armée napoléonienne, commandée par le général Lefebvre, lui donna l’occasion de se distinguer. Non seulement elle raviva le courage et la dignité des soldats, mais encore elle défendit valeureusement la Puerta del Portillo. Considérée comme le sauveur de la ville, elle reçut du général don José de Palafo un grade de l’armée et la solde correspondante. Elle épousa un militaire de profession et mourut à Mellila, où il tenait garnison. Chantée par Byron pour sa grâce, sa féminité et son courage, elle fut également immortalisée par Goya dans plusieurs tableaux ».
ZACHARIAS (Constance).- Héroïne grecque de la guerre d’indépendance des Grecs contre la Turquie qui participa au siège de Tripolitza en 1821.
Histoire militaire des femmes : « N’est-ce pas également à ces temps qu’appartient Constance Zacharias, femme originaire de Mistra(*), laquelle se mit à cette époque à planter un drapeau devant sa maison, à enrôler des paysans, à marcher à leur tête sur Londari, à incendier cette localité, et à se porter avec sa troupe improvisée sous les murs de Tripolitza ? ».
(*) Son père avait été empalé par les Turcs.
Le tour du Monde. Nouveau journal des voyages publié sous la direction d’Édouard Charton, premier semestre 1878, Hachette, 1878 : « À Sparte on parle encore de Constance Zacharias, fille, elle aussi, d’un martyr de la liberté empalé à Tripolitza. À vingt-quatre ans elle se met à la tête de cinq cents paysans qu’elle enflamme par ses discours, donne le signal de l’insurrection en Laconie et abat le croissant sur les mosquées de Léondari ».
ZARINE.- Reine des Scythes qui fit la guerre au roi des Mèdes Cyaxare pour venger la mort de son prédécesseur Marmarès.
Histoire militaire des femmes : « Ce souverain [Cyaxare] ayant fait égorger dans un festin le roi scythe Marmarès, elle succéda à ce dernier et se mit sans délai à la tête de son armée afin de venger son prédécesseur. Elle lutta deux ans contre les forces de Cyaxare, mais finit par être vaincue. Son vainqueur se nommait Stryangée ; il était gendre du roi des Mèdes. Il paraît que Zarine possédait une beauté redoutable, car il en tomba éperdument amoureux, et, n’en pouvant rien obtenir, se tua de désespoir. Cyaxare, se conduisant avec générosité, rendit alors la liberté à son ennemie qui civilisa sa nation, bâtit un grand nombre de villes, gouverna sagement et fit respecter sa puissance par ses sujets et par ses voisins ».
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Monta sur le trône des Scythes Saces après la mort de Marmarès, que Cyaxare, roi des Mèdes, fit égorger dans un festin, pour secouer le joug sous lequel les Scythes tenaient les Mèdes asservis depuis 28 ans. Cette reine commanda son armée en personne contre celle de Cyaxare, conduite par le gendre de ce prince, nommé Stryangée, jeune seigneur Mède, bien fait, généreux et bon capitaine. Après deux années d’une guerre contrebalancée, Zarine fut vaincue ; et son vainqueur, devenu amoureux d’elle, se tua de désespoir, n’ayant jamais pu corrompre sa vertu, quoiqu’il eût touché son cœur. Cette princesse, rendue à ses sujets, se conduisit en grand homme. Elle fit défricher des terres, civilisa des nations sauvages, fit bâtir un grand nombre de villes, en embellit d’autres, se fit craindre au dehors, en se faisant aimer et respecter en dedans. Zarine a fourni le sujet de deux tragédies imprimées et non représentées, l’une par M. Devineau, Paris, 1803, in-8e ; l’autre par M. Legrand, in-8e ».
ZASSOULITCH (Vera Ivanovna).- Révolutionnaire russe née en 1849 près de Smolensk, morte en 1919 à Petrograd. Elle participa en premier lieu au mouvement populiste Narodnitchestvo qui entendait soulever les paysans, renverser le tsarisme et organiser un communisme agraire. Elle fut ensuite du groupe marxiste « Libération du travail » qui propagea le marxisme en Russie. Rédactrice de l’Iskra (l’ « Étincelle »), organe fondé par Lénine, elle se rallia au menchévisme en 1903 et désapprouva la révolution bolchevique. Elle s’était distinguée pour avoir tiré sur le préfet de police de la capitale qui avait fouetté un étudiant arrêté. Son procès avait tourné à l’accusation du régime.
ZÉNOBIE (en latin Septimia Zenobia).- Reine de Palmyre, femme du roi Septimius Odenath (ou Odheinat). À la mort de son époux (qu’elle fit peut-être assassiner), en 267, elle exerça la régence au nom de son fils Wahballat. Immensément ambitieuse, elle défia la puissance romaine en Orient. Elle conquit l’Égypte et l’Asie Mineure. L’empereur romain Aurélien ne pouvait tolérer l’expansion de cette nouvelle puissance. Il partit en campagne dès 270. Il battit les troupes de Zénobie à Émèse (aujourd’hui Homs ou Hems, en Syrie occidentale) et à Antioche (en turc Antakya) en 272 ; puis il alla mettre le siège devant Palmyre qui capitula. Zénobie chercha à s’enfuir mais fut prise. Chargée de chaînes d’or, elle figura au triomphe de son vainqueur. Aurélien lui fit don d’un domaine à Tibur (aujourd’hui Tivoli) où elle finit ses jours.
Histoire militaire des femmes : « On sait que cette dernière est une des femmes guerrières les plus illustres de l’antiquité. Issue, disait-elle, de la race des Ptolémée, elle épousa un prince sarrasin, Odonat, et contribua aux victoires qu’il remporta sur les Perses au profit de l’empire grec. À la suite des services ainsi publiquement rendus, ce prince fut associé à l’empire par Gallien et déclaré Auguste ; sa femme partagea sa haute fortune qu’elle avait préparée par ses conseils et affermie par ses actes, voire même par sa participation aux combats. C’était le temps où Valérien, prisonnier de Sapor, vieillissait chez les Perses ; le nouvel Auguste songea plusieurs fois à obtenir sa délivrance et, aidé de sa femme, combattit avec énergie dans ce but ; mais il ne put s’y employer exclusivement et fut détourné du siège de Ctésiphon par les incursions des Goths dans l’Asie Mineure. Après s’être porté contre ces derniers, il fut assassiné dans un festin (267). Sa veuve, malgré la situation critique où cet événement la plaçait, gagna les troupes palmyréniennes, fit punir l’assassin, rassembla des forces nombreuses et vainquit avec elles une armée que Gallien envoya contre elle pour lui arracher, ainsi qu’à ses enfants, la part d’autorité qu’il avait précédemment concédée à cette famille. Cette victoire affermit la couronne d’Orient sur sa tête. Après la mort tragique de Gallien […] son successeur, Claude II, jugea prudent de laisser à Zénobie l’administration de ses États ; cette dernière mit à profit cette trêve forcée, s’entourant d’un luxe mitigé par l’économie et d’une étiquette que tempérait l’affabilité ; elle se ménagea des alliances et groupa plus d’un chef voisin autour d’elle. […] Par suite d’une bonne administration, à laquelle elle avait participé du vivant de son époux, ses coffres se trouvaient remplis ; elle utilisa cette ressource pour soumettre l’Égypte. Une première armée envoyée par elle réussit dans cette expédition et mit 5.000 hommes de garnison dans Alexandrie ; cette garnison ayant été chassée par le général romain Probatus, notre héroïne équipa une seconde armée, qui, d’abord vaincue, reprit le dessus et s’empara définitivement de l’Égypte. Pendant ce temps Zénobie conquérait elle-même l’Asie Mineure jusqu’à Ancyre, jusqu’à la Chalcédoine, jusqu’à l’Euphrate, où elle bâtit un fort qui fut trois siècles plus tard réparé et augmenté par Justinien ; […] Son but, en s’agrandissant de la sorte et en augmentant sa réputation, était, non de se séparer de l’empire romain, mais d’obtenir pour son fils une association à l’empire et le rang d’Auguste ; mais Aurélien, à peine proclamé empereur, ne voulut pas y consentir. Bientôt même il marcha contre elle jusque sous les murs d’Antioche et là lui livra bataille. Zénobie, qui prenait part à toutes les fatigues du soldat, sut animer et engager habilement les siens ; elle allait vaincre, quand sa cavalerie, apercevant la cavalerie romaine qui s’arrêtait et semblait même se retirer par ruse, ne se donna pas le temps d’examiner cette manœuvre trompeuse, s’abandonna à sa fougue, s’avança trop, se compromit en laissant l’infanterie palmyrénienne à ses propres forces et produisit un revirement funeste. Définitivement battue, Zénobie se retira dans Antioche, y passa une nuit, traversa ensuite une grande étendue de pays et se fixa aux environs d’Émèse, où elle parvint à rassembler une armée de 70.000 hommes, palmyréniens, arméniens ou arabes. Une nouvelle bataille s’engagea sur ce point ; malgré les recommandations de Zénobie à ses soldats de modérer leur ardeur, les mêmes faits qui avaient signalé l’action sous Antioche se reproduisirent et notre héroïne eut la douleur d’être vaincue une seconde fois. Elle se retira dans Palmyre. Cette place, forte par son assiette, pourvue de machines, de vivres, occupée par une nombreuse garnison, offrait un excellent refuge. Notre héroïne profita de cette situation, anima les siens, se défendit longtemps. Aurélien ne se découragea pourtant pas ; il gagna du terrain et enfin recourut à des pourparlers ; seulement, dans le but d’éviter la singularité de demander la paix à une femme, il s’adressa à la fois et à Zénobie et à ses principaux officiers, affectant de considérer ceux-ci comme des associés, disons mieux des alliés de la reine de Palmyre. « Il vous sera libre, à vous Zénobie, disait-il, de vivre avec votre maison là où j’aurai fixé votre résidence, après avoir pris l’avis du sénat… Les Palmyréniens seront maintenus dans leurs anciens droits ». La reine, à laquelle il ne consentait à reconnaître aucun titre, lui répondit : « Zénobie, reine de l’Orient, à Auguste… Ignorez-vous donc que Cléopâtre aima mieux mourir avec le titre de reine que de survivre à sa dignité ? Nous attendons les secours des Perses, des Arméniens, des Sarrazins ». Malgré la fierté de sa réponse, le terme de la puissance de notre héroïne approchait. Les secours attendus par elle furent battus ou interceptés et avec eux disparut pour la ville assiégée l’espoir d’être ravitaillée. Alors Zénobie forme le projet d’aller chercher elle-même les vivres qui commencent à manquer ; la mission offre des périls, mais elle espère les surmonter. À peine sortie de la ville, elle se voit poursuivie ; elle gagne de vitesse, mais, rejointe près de l’Euphrate, elle devient prisonnière. On la ramène près d’Aurélien ; questionnée sur sa hardiesse à tenir tête à des empereurs romains : « J’ignorais qu’il y eût encore des hommes méritant ce titre, mais vos succès m’ont ouvert les yeux ; vous m’avez vaincue, Aurélien, et je vois enfin un empereur ». Cette fière réponse annonçait une grande dignité naturelle ; c’est que Zénobie n’était pas une femme ordinaire et pourtant Aurélien ne se laissa pas prendre à l’éloge qu’elle lui décernait. Demeurant dans une froide réserve, se retranchant derrière son rang, le vainqueur fit conduire sa captive à Émèse et là mettre à mort sous ses yeux les principaux défenseurs de Palmyre dont la reddition n’avait pas tardé. Plus tard il la produisit pendant son triomphe au travers des rues de Rome et la montra si chargée de perles et de bijoux qu’elle succombait sous le faix, puis il lui concéda, dans Tivoli même, un domaine où elle finit ses jours ».
Dictionnaire historique, critique et bibliographique : « Reine de Palmyre, l’une des plus illustres femmes qui aient porté le sceptre. Elle épousa Odonat, prince sarrasin, et contribua beaucoup aux grandes victoires qu’il remporta sur les Perses, qui conservèrent l’Orient aux Romains. Elle se disait issue d’un des Ptolémée et de Cléopâtre. Si elle ne leur dut pas son origine, elle hérita de leur courage. Après la mort de son mari, en 267, dont on l’accusa d’être l’auteur, indignée de la tendresse qu’il témoignait à son fils Hérodien qu’il avait eu d’une autre femme […], elle prit le titre d’Auguste, et posséda plusieurs années l’empire d’Orient, du vivant de Gallien, et de Claude II son successeur. Tous les historiens de son temps ont célébré ses vertus, surtout sa chasteté admirable, et son goût pour les sciences et pour les beaux-arts. Le philosophe Longin fut son maître, et lui apprit à placer la philosophie sur le trône. Elle savait parfaitement l’histoire orientale, et en avait fait elle-même un Abrégé avec l’histoire de la ville d’Alexandrie. L’empereur Aurélien, ayant résolu de la réduire, marcha jusqu’à Antioche, où Zénobie s’était rendue avec la plus grande partie de ses forces, qui montaient à 600 mille hommes. Cette princesse se mit à la tête de ses troupes, allant à pied lorsqu’il était besoin, comme un simple soldat. Les deux armées se rencontrèrent ; on combattit avec fureur de part et d’autre. Aurélien eut d’abord du désavantage, et fut sur le point de perdre la bataille ; mais la cavalerie des Palmyréniens s’étant trop avancée, l’infanterie romaine tomba sur l’infanterie palmyrénienne, l’enfonça et remporta la victoire. Zénobie, après avoir perdu une grande partie de ses troupes dans cette bataille, alla se renfermer dans la ville de Palmyre. Le vainqueur l’assiégea, et elle se défendit avec courage. Aurélien, las des fatigues du siège, écrivit à Zénobie pour lui proposer de se remettre entre ses mains, en lui offrant la vie, une retraite agréable et la conservation des privilèges des Palmyréniens. Zénobie lui fit cette célèbre réponse : « Zénobie, reine de l’Orient, à l’empereur Aurélien. Avant toi, personne ne m’a fait une demande pareille à la tienne. C’est la vertu qui doit tout faire à la guerre ; et tu m’ordonnes de me remettre entre tes mains, comme si tu ignorais que Cléopâtre aimât mieux mourir en reine que de vivre avec toute autre qualité. Nous attendons les secours des Perses ; les Sarrasins et les Arméniens arment pour nous. Une troupe de brigands a défait ton armée dans la Syrie. Que sera-ce donc quand toutes ces forces seront réunies ? Tu rabattras de cet orgueil avec lequel, comme maître absolu, tu me commandes de me rendre ». Aurélien, ayant reçu cette lettre, n’en pressa le siège qu’avec plus de vigueur. Il alla au-devant des Perses, les défit et engagea par promesses ou par menaces les Arméniens et les Sarrasins à se joindre à lui. Enfin Zénobie, se voyant sans ressource, sortit pendant la nuit de la ville qui se rendit en 273, et monta sur ses chameaux pour se sauver en Perse. Aurélien fit courir après elle : on l’atteignit au moment qu’elle allait passer l’Euphrate. Aurélien ne se crut véritablement maître de l’Orient que lorsque cette princesse fut entre ses mains. Il lui demanda ce qui lui avait inspiré la hardiesse d’attaquer les empereurs romains. « Je n’ai point vu d’empereurs, lui répondit-elle, dans Gallien et dans ses semblables ; mais tu sais comment il faut vaincre, et je te reconnais véritablement digne du nom d’empereur ». Les soldats demandèrent sa mort ; mais le vainqueur la réserva pour son triomphe qui fut superbe. Zénobie y parut liée avec des chaînes d’or que des esclaves soutenaient, et si chargée de perles, que, ne pouvant les porter, elle était souvent obligée de s’arrêter pour se reposer. On blâma Aurélien d’avoir triomphé avec tant de faste d’une femme ; mais cette femme valait un héros, et il répara cet outrage par la manière dont il la traita. Il lui donna une terre magnifique à Tivoli, près du Palais Adrien, où elle passa le reste de ses jours, honorée et chérie. Ses vertus furent ternies par son faste et par sa cruauté. Quelques auteurs ont cru qu’elle avait embrassé la religion des Juifs ; mais il est plus probable que sa religion était une espèce de déisme. Elle protégea Paul de Samosate qui avait été condamné au concile d’Antioche : cette protection empêcha qu’il ne fût chassé de son église. On ne l’en chassa qu’après que cette princesse eut été vaincue par Aurélien. On ignore ce que devinrent les fils de Zénobie. Les historiens ne disent pas s’ils moururent de maladie ou si Aurélien les fit périr. Ce qu’il y a de sûr, c’est que les Palmyréniens s’étant révoltés, il fit raser leur ville. Le P. Jouve a publié en 1758, in-12, une Histoire intéressante de Zénobie. M. Royou, auteur de la tragédie de Phocion, a aussi composé une tragédie de Zénobie, reçue au théâtre français et non encore représentée ».