Je, soussigné, Claude Merle de Montrevel, lègue à mes concitoyens l’amour de ma patrie. Ma patrie, ce fut d’abord celle des Burgondes qui, après la grande invasion des barbares du nord, finirent par s’installer dans ce qui allait devenir la Bourgogne. Ma patrie, ce fut ensuite la France, quand la Bourgogne lui fut annexée. Ma patrie, ce sera demain l’Europe. Demain tarde un peu, à mon gré ; mais il faut être optimiste avant de mourir. L’Europe se fera un jour, j’en suis certain. Ce dont je suis également persuadé, c’est qu’elle ne se fera pas dans la douceur et dans la joie. Les accouchements s’accompagnent généralement de douleur. Mes chers concitoyens, vous allez donc devoir souffrir ; mais sachez que l’enfant que vous portez sera le plus fort et le plus beau de tous ceux que l’histoire recense.
Il vous faudra d’abord vous débarrasser de tous ces immigrants. Il vous faudra ensuite vous défendre contre les attaques, économiques ou autres, de quelques pays jaloux de votre force dans l’union et de votre grandeur. La Chine, par exemple, ne cessera pas de vous faire des misères. Il faudra la contrer, lui trouver des ennemis prêts à en découdre à vos côtés.
En attendant, il vous faudra dans l’immédiat mettre un peu d’ordre dans votre patrie. Quand j’observe, du haut de mon âge, ma belle province française, je me sens envahi par la tristesse et le regret de ne plus avoir la force de rejoindre ceux qui feront un jour le ménage. Notre France, hélas ! est envahie non seulement par des peuples qui n’ont rien à faire chez nous, mais en outre par la corruption, le pouvoir indécent de l’argent, l’humidité qui envahit le patriotisme, l’incivisme et le manque de culture historique qui caractérise notre jeunesse. Elle titube sans cesse pour éviter la bêtise et l’utopie qui caractérisent toute une bande de caritatifs prêts à donner leur pays en échange de sourires et toute une bande de prédateurs prêts à vendre leur pays pour remplir leurs caisses. La mondialisation qui nous guette sans cesse, c’est l’invention d’un commerce malin auquel s’associe sans le savoir une stupide générosité. Mes chers concitoyens, prenez garde qu’un jour le nationalisme et l’amour de la patrie ne soient considérés comme un délit majeur.
La seule mondialisation qui mériterait de voir le jour, c’est celle qui permettrait de prendre les mesures nécessaires pour pallier la catastrophe qui va bientôt nous tomber du ciel. Dans tous les pays du monde, les hommes politiques ne pensent qu’à se faire réélire ; ils se gardent bien de s’entendre pour armer le monde entier contre la maladie qui menace l’univers astral ; ceux que l’on nomme, parmi les citoyens, les écologistes ne sont pas pris au sérieux. Tout au plus leur fait-on risette au moment des élections en leur promettant quelques réformettes sans aucune efficacité.
Mes chers concitoyens, je vous souhaite beaucoup de courage. Ce sera dur, mais je suis sûr que vous vous en sortirez.